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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4C.208/2003 /dxc 
 
Arrêt du 22 mars 2004 
Ire Cour civile 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Corboz, Président, 
Klett et Favre. 
Greffier: M. Ramelet. 
 
Parties 
A.________ SA, 
demanderesse et recourante, représentée par 
Me Pierre-André Marmier, avocat, 
 
contre 
 
B.________ Entreprise SA, 
défenderesse et intimée. 
 
Objet 
Contrat de bail, 
 
recours en réforme contre le jugement du Juge instructeur de la Cour civile du Tribunal cantonal 
vaudois du 4 février 2003. 
 
Faits: 
A. 
La société A.________ SA (ci-après: la demanderesse) a notamment pour but social la location de biens d'équipement. 
 
Par contrat des 4 août et 28 septembre 2001, la demanderesse a loué à B.________ Entreprise SA (ci-après: la défenderesse), laquelle est active dans l'enseignement des langues, un équipement informatique destiné à ses bureaux genevois. Ce contrat comportait un avenant no 1, qui décrivait le matériel loué, prévoyait que le loyer dû à la demanderesse se monterait à 11'170 fr. par trimestre, TVA comprise, et stipulait que la convention était conclue pour une durée de 48 mois. 
 
Le matériel a été remis à la défenderesse le 4 septembre 2001. 
 
Le 18 septembre 2001, la demanderesse a adressé à la défenderesse une facture de 3'226 fr.90 pour la "redevance de mise à disposition" courant du 4 au 30 septembre 2001. Le 21 mars 2002, A.________ SA a fait parvenir à la défenderesse les factures afférentes à la location du matériel pour le dernier trimestre 2001 et le premier trimestre 2002. Aucune de ces notes n'a été honorée. 
 
Après avoir, le 28 mars 2002, mis en demeure la défenderesse de s'acquitter des factures impayées dans les dix jours, la demanderesse, par lettre signature du 29 avril 2002, l'a informée qu'elle résiliait le contrat qui les liait avec effet immédiat. 
 
La demanderesse a récupéré l'intégralité du matériel informatique le 31 juillet 2002. 
B. 
Par demande du 13 août 2002, A.________ SA a conclu à ce que la défenderesse lui doive paiement de 183'720 fr., avec intérêts à 5 % l'an dès ce jour, soit 178'720 fr. pour le loyer dû pendant 48 mois ou 16 trimestres (16 x 11'170), plus 5000 fr. pour notamment les frais de démontage, d'emballage et de transport du matériel. 
 
La défenderesse n'a pas déposé de réponse. 
 
Statuant par défaut de la défenderesse, le Juge instructeur de la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois, par jugement du 4 février 2003 dont les considérants ont été notifiés aux parties les 16 et 19 mai 2003, a condamné B.________ Entreprise SA à payer à la demanderesse la somme de 45'460 fr.20 plus intérêts à 5 % l'an dès le 11 septembre 2002. 
 
Admettant que les parties avaient conclu un contrat de bail à loyer au sens des art. 253 ss CO, ce magistrat a retenu que, le 29 avril 2002, la demanderesse avait valablement résilié cet accord, conformément à l'art. 257d al. 1 CO, en raison de la demeure de la défenderesse, laquelle n'avait jamais versé de loyers. Il en a déduit que la bailleresse avait droit au versement des loyers convenus pour la période du 4 septembre 2001 au 29 avril 2002 à titre de créance contractuelle et, du 30 avril 2002 au 31 juillet 2002, à titre de réparation du dommage entraîné par l'usage illicite du matériel informatique, plus au remboursement des frais liés à la rupture prématurée du bail, par 5000 fr. Comme la demanderesse n'avait pas allégué avoir subi un préjudice après le 31 juillet 2002, le Juge instructeur ne lui a rien alloué pour la période suivant cette date. 
 
A la dernière page de ce jugement figurent les indications suivantes: 
"Les parties peuvent recourir au Tribunal cantonal dans les dix jours dès la notification du présent jugement en déposant au greffe de la Cour civile un acte de recours en deux exemplaires désignant le jugement attaqué et contenant leurs conclusions en nullité, ou leurs conclusions en réforme dans les cas prévus par la loi. 
 
Les voies de recours au Tribunal fédéral sont réservées". 
C. 
C.a Par mémoire déposé au greffe du Tribunal cantonal vaudois le 17 juin 2003, la demanderesse a exercé un recours en réforme au Tribunal fédéral contre le jugement précité du Juge instructeur de la Cour civile. Elle a conclu à ce que cette décision soit réformée en ce sens que la défenderesse est condamnée à lui payer la somme de 183'720 fr. avec intérêts à 5 % l'an dès le 11 septembre 2002. 
 
L'intimée n'a pas répondu au recours. 
C.b Parallèlement audit recours en réforme, la demanderesse a déposé devant la Chambre des recours du Tribunal cantonal vaudois un recours cantonal en réforme contre le jugement rendu par le Juge instructeur le 4 février 2003. 
 
 
Par arrêt du 4 novembre 2003, la Chambre des recours a déclaré le recours irrecevable pour des motifs tenant au droit de procédure cantonal vaudois. 
La demanderesse forme un recours de droit public au Tribunal fédéral contre l'arrêt susmentionné de la Chambre des recours, qui sera examiné par arrêt séparé (cause 4P.254/2003). 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
1.1 Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 129 I 302 consid. 1; 129 II 453 consid. 2; 129 III 415 consid. 2.1; 129 IV 216 consid. 1). 
1.2 Aux termes de l'art. 57 al. 5 OJ, il est sursis en règle générale à l'arrêt sur le recours en réforme jusqu'à droit connu sur le recours de droit public. La jurisprudence déroge toutefois à cet ordre de priorité dans des situations particulières, qui justifient l'examen préalable du recours en réforme. Il en va notamment ainsi lorsque la décision sur le recours de droit public n'a aucune incidence sur le sort du recours en réforme (ATF 123 III 213 consid. 1; 122 I 81 consid. 1; 120 Ia 377 consid. 1), ce qui sera notamment le cas lorsque le recours en réforme apparaît irrecevable (ATF 117 II 630 consid. 1a; consid. 1 non publié de l'ATF 119 II 297). 
 
Cette hypothèse étant, comme on le verra, réalisée en l'espèce, il se justifie de statuer sur le recours en réforme avant le recours de droit public. 
2. 
L'art. 48 al. 1 OJ dispose que, pour être sujette à recours en réforme, la décision attaquée doit en règle générale être finale et émaner d'un tribunal ou d'une autre autorité suprême du canton; elle ne doit en outre pas pouvoir être l'objet d'un recours ordinaire de droit cantonal. 
2.1 Il n'est pas contesté que la décision déférée, qui a statué sur le droit litigieux avec l'autorité de la chose jugée, est finale au sens de cette disposition (ATF 127 III 433 consid. 1b, 474 consid. 1a; 126 III 445 consid. 3b). 
2.2 Pour être qualifié de suprême, le tribunal ou l'autorité doit avoir rang de tribunal cantonal, c'est-à-dire être placé, hiérarchiquement, sur le même rang que celui-ci (Jean-François Poudret, Commentaire OJ II, n. 1.2.3 ad art. 48 OJ, p. 299). Les cours ou sections d'un tribunal cantonal, à l'instar de la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois, doivent être assimilées à un tribunal supérieur (Alain Wurzburger, Le conditions objectives du recours en réforme au Tribunal fédéral, thèse Lausanne 1964, p. 170). 
 
L'art. 67 de la loi d'organisation judiciaire vaudoise du 12 décembre 1979 (RSV 2.1. A) prescrit que, outre la Cour plénière, le tribunal cantonal comprend des sections, qui siègent à trois ou cinq juges, lesquelles sont énumérées aux lettres a à j et l de la norme, plus un Tribunal des assurances, organisé par une loi spéciale. 
 
En procédure civile vaudoise, le juge instructeur, dans les causes portées devant la Cour civile, dirige l'instruction antérieure aux débats principaux (art. 260 du Code de procédure civile du canton de Vaud du 14 décembre 1966, disposition applicable devant la Cour civile, cf. Jean-FrançoisPoudret/Jacques Haldy/Denis Tappy, Procédure civile vaudoise, 3e éd., note ad chap. VII du Titre VIII, p. 482). 
 
Il suit de là que le Juge instructeur de la Cour civile vaudoise, qui est un juge unique, ne saurait constituer une section du Tribunal cantonal de ce canton. 
 
Comme la décision attaquée n'a ainsi pas été prise par un tribunal suprême tel que l'entend l'art. 48 al. 1 OJ, elle ne pouvait pas être soumise au Tribunal fédéral en instance de réforme, d'où l'irrecevabilité du présent recours. 
2.3 A cela s'ajoute, comme le montrera l'arrêt rendu dans la cause connexe 4P.254/2003, que le jugement rendu le 4 février 2003 par le Juge instructeur pouvait faire l'objet d'un recours ordinaire de droit cantonal, à savoir d'un recours déployant un effet dévolutif et suspensif et permettant un examen libre du droit fédéral (Bernard Corboz, Le recours en réforme au Tribunal fédéral, SJ 2000 II p. 14). Le recours en réforme est donc également irrecevable pour ce second motif. 
3. 
Vu l'issue du litige, les frais judiciaires seront mis à la charge de la recourante. Il n'y a pas lieu d'accorder des dépens à l'intimée, qui n'a pas déposé de réponse au recours. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est irrecevable. 
2. 
Un émolument judiciaire de 5'500 fr. est mis à la charge de la recourante. 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties et au Juge instructeur de la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois. 
Lausanne, le 22 mars 2004 
Au nom de la Ire Cour civile 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: