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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_796/2016  
   
   
 
 
 
Arrêt du 15 mai 2017  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari et Rüedi. 
Greffière : Mme Kistler Vianin. 
 
Participants à la procédure 
X.________, représenté par Me Serge Beuret, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton du Jura, 
intimé. 
 
Objet 
Indemnité pour frais de défense (art. 429 CPP), 
 
recours contre le jugement de la Cour pénale du Tribunal cantonal du canton du Jura du 14 juin 2016. 
 
 
Faits :  
 
A.   
Par jugement du 15 septembre 2015, le Juge pénal du Tribunal de première instance du canton du Jura a déclaré X.________ coupable de lésions corporelles graves par négligence au préjudice d'un subalterne lors d'un accident de chantier sur lequel il travaillait en qualité de contre-maître. 
 
B.   
Par jugement du 14 juin 2016, la Cour pénale du Tribunal cantonal jurassien a admis l'appel formé par X.________ et l'a libéré de la prévention de lésions corporelles graves par négligence. Il lui a alloué une indemnité de dépens de 10'678 fr. 50 pour la procédure de première instance et de 2'802 fr. 60 pour la procédure d'appel. 
 
C.   
Contre ce dernier jugement, X.________ dépose un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral. Il conclut à l'annulation du jugement attaqué et à sa réforme en ce sens que le canton du Jura est condamné à lui verser, au titre de l'indemnité prévue à l'art. 429 al. 1 let. a CPP, un montant de 22'561 fr. 20 pour la procédure de première instance et un montant de 4'665 fr. 60 pour la procédure de deuxième instance. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le recourant conteste le montant de l'indemnité qui lui a été allouée pour les dépenses occasionnées par l'exercice de ses droits de procédure (cf. art. 429 al. 1 let. a CPP). 
Selon l'art. 429 al. 1 CPP, applicable également à la procédure d'appel par le renvoi de l'art. 436 al. 1 CPP, le prévenu acquitté totalement ou en partie ou au bénéfice d'une ordonnance de classement a droit à une indemnité notamment pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure (let. a). 
 
L'art. 429 al. 2 CPP prévoit que l'autorité pénale examine d'office les prétentions du prévenu. Ignorant les opérations effectuées par l'avocat, elle sera toutefois souvent dans l'impossibilité de fixer le montant de l'indemnité. Elle devra donc enjoindre le prévenu à chiffrer et à justifier ses prétentions (art. 429 al. 2 2ème phrase CPP). Le prévenu a ainsi un devoir de collaboration (arrêt 6B_928/2014 du 10 mars 2014 consid. 2, non publié in ATF 124 IV 163). 
 
Savoir si le recours à un avocat procède d'un exercice raisonnable des droits de procédure et si, par conséquent, une indemnité pour les frais de défense selon l'art. 429 al. 1 let. a CPP peut être allouée au prévenu est une question de droit fédéral que le Tribunal fédéral revoit librement. Il s'impose toutefois une certaine retenue lors de l'examen de l'évaluation faite par l'autorité précédente, particulièrement de la détermination, dans le cas concret, des dépenses qui apparaissent raisonnables (ATF 142 IV 163 consid. 3.2.1 p. 169). 
 
Selon la jurisprudence rendue en matière de dépens, la garantie du droit d'être entendu implique que lorsque le juge statue sur la base d'une liste de frais, il doit, s'il entend s'en écarter, au moins brièvement indiquer les raisons pour lesquelles il tient certaines prétentions pour injustifiées, afin que son destinataire puisse attaquer la décision en connaissance de cause (cf. arrêts 6B_833/2015 du 30 août 2015 consid. 2.3; 6B_124/2012 du 22 juin 2012 consid. 2.2 et les références citées). 
 
2.   
Le recourant a déposé deux notes d'honoraires, l'une pour la procédure de première instance et, l'autre, pour la procédure d'appel. La cour cantonale s'est écartée de ces notes d'honoraires, ce que le recourant conteste. 
 
2.1.  
 
2.1.1. Pour la procédure de première instance, le recourant fait grief à la cour cantonale d'avoir constaté que la note d'honoraires de son avocat était considérablement plus élevée que celles produites par les autres avocats impliqués dans cette même procédure. Pour le recourant, il s'agirait d'un motif sur lequel la cour cantonale se serait fondée pour réduire l'indemnité pour les frais de défense qu'il réclame, motif qui ne serait pas pertinent, puisque l'activité déployée par les avocats serait différente.  
 
Par cette remarque, la cour cantonale n'a fait qu'une constatation, au demeurant exacte. Par la suite, elle a expliqué les raisons qui l'ont conduite à réduire l'indemnité réclamée par le recourant (cf. jugement attaqué p. 10 et 11). Le reproche du recourant est donc infondé. 
 
2.1.2. Le recourant fait valoir que l'affirmation de la cour cantonale, selon laquelle "  le détail des opérations décrites dans la note d'honoraires représentent un total de 3805 minutes, soit l'équivalent de 63h25 et non de 70h30 comme indiqué dans la note " est inexacte.  
 
Il est exact que si l'on tient compte du temps consacré à la correspondance (lequel n'est pas indiqué sur la note d'honoraires du 15 septembre 2015), on arrive au total de 70h30 (comme le mentionne ladite note d'honoraires). C'est donc à tort que la cour cantonale affirme que l'addition du temps consacré aux différentes opérations est erronée. A la décharge de la cour cantonale, il faut toutefois admettre que la note d'honoraires n'est pas claire. En tous les cas, peu importe que le total des heures soit de 63h25 ou de 70h30, puisque la cour cantonale a considéré que la note d'honoraires était trop élevée et que, faisant abstraction de celle-ci, elle a apprécié elle-même les opérations nécessaires à la procédure de première instance; or, dans cette appréciation, elle a retenu une heure pour les diverses correspondances (cf. consid. 2.1.4 ci-dessous). Le grief soulevé est donc infondé. 
 
2.1.3. Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir retranché 1h50 en relation avec une audience tenue le 7 mars 2013.  
 
Il est vrai que l'audience du 7 mars 2013 a été annulée, en raison de l'absence de la traductrice et que les mandataires présents, en particulier l'avocat du recourant, ont attendu en vain. Ce point n'est toutefois pas déterminant, dans la mesure où la cour cantonale s'est écartée de la note d'honoraires produite par le recourant et qu'elle a évalué le temps nécessaire pour une défense raisonnable (cf. consid. 2.1.4 ci-dessus). Le grief soulevé doit donc être rejeté. 
 
2.1.4. Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir retenu un temps de préparation pour les audiences d'instruction équivalent à celui des audiences elles-mêmes.  
 
S'écartant de la note d'honoraires, qu'elle considère comme trop élevée, la cour cantonale a apprécié les opérations nécessaires à une défense raisonnable, estimant le temps que le défenseur devait consacrer à chacune d'elles. Elle a retenu les opérations suivantes: 
 
audience d'instruction                                          5h15 
préparation des audiences d'instruction                            5h15 
débats de première instance                                   7h25 
préparation des débats de première instance                     12h 
préparation supplémentaire avant l'audience de jugement       1h 
rédaction de correspondance                                   1h 
Total                                                               31h55 
 
La cour cantonale a ainsi retenu 5h15 pour les audiences (ce qui n'est pas contesté par le recourant) et 5h15 pour leur préparation, à savoir une durée équivalente à celle des audiences. Elle a considéré que les conférences et les conférences téléphoniques (8h05) ne devaient pas être prises en compte dans ce temps de préparation, car celles-ci se recoupaient pour l'essentiel avec le temps d'étude et de préparation des audiences et constituaient des démarches allant au-delà de la défense strictement dite. Compte tenu de son large pouvoir d'appréciation, la réduction opérée par la cour cantonale n'est pas critiquable. Sa motivation, selon laquelle la durée de préparation des audiences devait correspondre à la durée des audiences, peut être suivie. Du reste, on peut relever que la note d'honoraires du défenseur du recourant fait état de 770 minutes (= env. 12 heures) pour les audiences et l'étude de dossier y relatif, ce qui correspond environ à ce qu'a retenu la cour cantonale. Le grief soulevé doit donc être rejeté. 
 
2.1.5. Le recourant fait grief à la cour cantonale d'avoir fixé le temps de préparation de l'audience de première instance à 12 heures.  
 
La cour cantonale a estimé qu'au vu de la nature et de la complexité de l'affaire, une préparation de 12 heures pouvait être admise, ajoutant que cela représentait d'ailleurs un pensum supérieur à celui qui ressortait des notes d'honoraires des avocats des autres parties à la procédure. Dans la mesure où, pour les mois d'août et de septembre 2015 (l'audience a eu lieu le 15 septembre 2015), la note d'honoraires du défenseur du recourant fait état de 780 minutes (= 13 heures) pour l'étude du dossier, l'appréciation de la cour cantonale fixant la durée de la préparation de l'audience à 12 heures n'est pas critiquable et cela d'autant moins qu'elle a ajouté une heure supplémentaire pour les autres activités. Le grief soulevé doit donc être rejeté. 
 
2.1.6. Le recourant dénonce une violation de son droit d'être entendu, au motif que la cour cantonale ne lui aurait pas donné l'occasion de se déterminer avant de rendre sa décision.  
 
Le droit d'être entendu garantit notamment au justiciable le droit de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1; 139 II 489 consid. 3.3 p. 496). 
 
En déposant la note d'honoraires de son avocat, le recourant a eu l'occasion de se prononcer avant que la décision ne soit rendue. La cour cantonale n'avait pas encore à l'interpeller pour qu'il donne des explications complémentaires, si la note d'honoraires n'était pas claire. Le grief soulevé doit être rejeté. 
 
2.1.7. Le recourant se plaint de la violation de son droit d'être entendu sous l'angle du défaut de motivation.  
 
L'obligation de motiver, telle qu'elle découle du droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.; cf. aussi art. 3 al. 2 let. c et 107 CPP), est respectée lorsque le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause. L'autorité n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais elle peut au contraire se limiter à ceux qui lui paraissent pertinents (ATF 139 IV 179 consid. 2.2 p. 183; 138 I 232 consid. 5.1 p. 237). 
 
En l'espèce, la cour cantonale a énuméré les opérations qu'elle considérait comme entrant dans une défense raisonnable et a apprécié le temps nécessaire pour chacune d'elles. Son raisonnement peut être aisément suivi. Du reste, le recourant l'a parfaitement compris, dans la mesure où il en conteste les termes. Le grief tiré du défaut de motivation doit donc être rejeté. 
 
2.2.  
 
2.2.1. Le recourant s'en prend à l'indemnité qui lui a été allouée pour les frais de défense pour la procédure de deuxième instance.  
 
Pour la procédure d'appel, la cour cantonale a retenu 8h30 de travail, au lieu des 15 heures qui ressortent de la note d'honoraires du 10 mai 2016. Elle a retenu une heure pour l'audience et une demi-heure pour le prononcé du jugement intervenu postérieurement. Elle a ajouté six heures pour la préparation au motif que celle-ci ne saurait excéder la moitié de la durée admise pour la préparation des débats de première instance, ainsi qu'une heure de conférence avec le client pour l'examen des considérants du jugement de première instance et la préparation de l'audience d'appel. 
La cour cantonale a expliqué les réductions opérées de manière détaillée. Il n'est pas déraisonnable de retenir, pour la procédure d'appel, une durée de préparation de la moitié de la durée admise pour la préparation des débats de première instance, dès lors que les questions qui se posaient étaient les mêmes. Le recourant conteste ces réductions, en invoquant les enjeux de la procédure et la complexité du dossier. Cette motivation est insuffisante et, partant, irrecevable. 
 
2.2.2. Le recourant critique l'indemnité de déplacement pour le déplacement de A.________ à B.________, puis retour. Il conteste le tarif horaire ainsi que le temps effectivement consacré pour le déplacement.  
On peut concevoir que le temps consacré aux déplacements ne soit pas taxé de la même manière que le temps consacré à l'étude du dossier. Ainsi, le Tribunal pénal fédéral admet un tarif inférieur pour les heures de déplacement (cf. ATF 142 IV 163 consid. 3.1.3 p. 169). Le canton du Jura a réglé spécifiquement cette question. Selon l'art. 15 al. 3 de l'ordonnance fixant le tarif des honoraires d'avocat, l'avocat peut porter en compte un montant maximum de 300 fr. pour une journée entière de voyage ou, si le voyage est de durée inférieure, une fraction adéquate de ce montant. Se fondant sur cette disposition, la circulaire n° 12 du 26 août 2015 relative à la fixation des honoraires d'avocat en justice, établie par le Tribunal cantonal jurassien, prévoit qu'un déplacement d'environ une heure, par exemple de A.________ ou C.________ à B.________ puis retour, est indemnisé à hauteur de 90 fr., correspondant à la moitié du tarif horaire de l'assistance judiciaire. 
Lorsqu'un tarif cantonal existe, il doit être pris en considération pour fixer le montant de l'indemnisation selon l'art. 429 al. 1 let. a CPP (ATF 142 IV 163 consid. 3 p. 162 ss; arrêts 6B_392/2013 du 4 novembre 2013 consid. 2.3; 6B_561/2014 du 11 septembre 2014 consid. 2.2.1). Dans la mesure où le canton du Jura a adopté un tarif spécifique pour la fixation des honoraires de l'avocat et a réglé le cas des frais de déplacement, il n'y a pas lieu de s'en écarter. Au demeurant, la cour de céans relève que, se conformant à la circulaire n° 12, le recourant n'a réclamé qu'une vacation de 90 fr. dans sa note d'honoraires du 10 mai 2016, et que la cour cantonale lui a accordé le double, à savoir une vacation de 180 fr. Le grief du recourant est donc infondé. 
 
3.   
Le recourant dénonce enfin une violation du droit à un procès équitable au sens de l'art. 6 al. 1 CEDH
 
Le recourant se réfère à un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme où l'art. 6 CEDH ne trouvait pas application (arrêt de la CourEDH Masson et van Zon Contre Pays-Bas du 28 septembre 1995, PCourEDH, A 327 A). Il n'explique pas pourquoi cette disposition serait applicable en l'espèce et en quoi elle serait violée. Son grief est insuffisamment motivé (art. 106 al. 2 LTF) et, donc, irrecevable. 
 
4.   
Le recours doit ainsi être rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
Le recourant qui succombe doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour pénale du Tribunal cantonal du canton du Jura. 
 
 
Lausanne, le 15 mai 2017 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Denys 
 
La Greffière : Kistler Vianin