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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4C.199/2004 /ech 
 
Arrêt du 11 janvier 2005 
Ire Cour civile 
 
Composition 
MM. et Mmes les Juges Corboz, président, Klett, Rottenberg Liatowitsch, Favre et Kiss. 
Greffier: M. Carruzzo. 
 
Parties 
X.________ SA, 
Y.________ SA, 
défenderesses et recourantes, toutes deux représentées par Me Patrick Udry, à 
 
contre 
 
A.________, 
demanderesse, intimée et recourante par voie de jonction, représentée par Me Emmanuel Bloch. 
 
Objet 
obligation de restituer des choses consignées ou vendues sous condition résolutoire; demeure du créancier, 
 
recours en réforme contre les arrêts de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève des 22 avril 1994 et 19 mars 2004. 
 
Faits: 
A. 
A.a A.________ (demanderesse), domiciliée à Téhéran, exploite un commerce de tapis et dispose d'un emplacement d'exposition au port franc de Genève. Ses frères, B.________ et C.________, domiciliés respectivement à Zurich et à Genève, travaillent dans la même branche et l'aident pour ses affaires en Suisse. 
 
Y.________ SA (ci-après: Y.________ ou la défenderesse n° 1), avec siège à Genève, est une société anonyme de droit suisse ayant notamment pour but la vente de produits alimentaires. D.________ en était l'administrateur unique et E.________ le fondé de pouvoirs, chacun disposant de la signature individuelle. Feu F.________, père de ce dernier, traitait alors aussi pour le compte de la société. Y.________ a été déclarée en faillite le 8 juillet 1994; sa dissolution de ce chef a toutefois été révoquée le 1er septembre 2000. 
 
La société anonyme de droit suisse X.________ SA (ci-après: X.________ ou la défenderesse n° 2), dont le siège est à Genève, a pour but la participation à toutes entreprises et sociétés financières, ainsi que l'exécution de toutes opérations commerciales. Son administrateur unique était G.________, frère de E.________. F.________ disposait d'une procuration générale lui permettant d'agir pour X.________ et de la signature sur les comptes bancaires de la société. 
 
F.________ et C.________ ont fait connaissance au printemps 1987 par le truchement de H.________. Dans un premier temps, à l'initiative de F.________, X.________ et H.________ ont acquis par parts égales le capital social de Z.________ SA, commerce de tapis ouvert à Genève par C.________. Quelques jours plus tard, X.________ a cédé à H.________ sa participation dans Z.________ SA. 
 
Le 4 mars 1987, F.________ a acheté à A.________, représentée par C.________, 4 tapis au prix de 30'000 fr. dont il s'est acquitté au moyen d'un chèque tiré sur un compte bancaire de X.________. 
A.b En avril 1987, H.________ et F.________ ont approché C.________ en vue de se procurer un lot de 26 tapis, d'une valeur de 330'000 fr., qui se trouvaient dans le dépôt de A.________ au port franc de Genève. 
 
Le 17 juin 1987, Y.________, représentée par F.________, a pris possession des 26 tapis qui ont été importés en Suisse à titre définitif le même jour. A réception de ceux-ci, F.________ a signé deux factures établies sur des formules préimprimées en langue allemande, à l'en-tête du commerce de A.________, et datées du jour précédent. La première, adressée à "F.________, Y.________ SA" et intitulée "Kommissions-Rechnung", portait sur 7 tapis remis au prix net de 122'300 fr. La seconde, établie à l'intention de "Y.________ SA" et intitulée "Kommissions-Rechnung", portait sur 19 tapis d'une valeur totale de 207'700 fr. Le texte standard, apposé au bas des deux formules, indiquait notamment que le commissionnaire s'obligeait à restituer la marchandise au commettant ou à en payer le prix, que le commettant restait propriétaire de la marchandise jusqu'à complet paiement et que le commissionnaire devait conserver la marchandise en lieu sûr ainsi que l'assurer contre l'incendie et le vol. Sur l'exemplaire de la seconde facture, F.________ a apposé la mention manuscrite suivante: "Nous confirmons par la présente que tous les tapis achetés ce jour sont l'objet d'un retour ou changer (sic) d'ici le 30.06.1988 (...) avec d'autres tapis de notre stock." Il a fait signer ce texte par C.________ qui représentait A.________. 
 
Le même jour, F.________ a tiré un chèque de 130'000 fr. sur un compte bancaire de X.________. A titre de communication destinée au porteur de l'effet, il a inscrit: "payement a. c. pour 26 tapis selon facture du 16.6.1987...". Ce chèque a été encaissé par A.________. 
 
Le 17 juin 1987 toujours, F.________ a inscrit, sur une formule de lettre de change, un engagement de payer la somme de 200'000 fr. à A.________ le 30 décembre 1987. Il a apposé le timbre humide de X.________ et sa signature sur ladite formule, de même que la mention manuscrite suivante signée par lui: "accepté avec suite d'une garantie de X.________ qui sera émise plus tard". Présenté sans succès au paiement à l'échéance, ce papier-valeur a donné lieu à une poursuite pour effet de change qui s'est soldée par un refus de lever l'opposition de X.________, refus motivé par la nullité pour vice de forme dudit effet. 
A.c Par courrier du 11 décembre 1987, F.________, agissant pour le compte de Y.________, a invité A.________ à reprendre les 26 tapis et à lui rembourser les 130'000 fr. déjà versés. L'intéressée a refusé de donner suite à cette invitation, expliquant, dans une lettre de son conseil du 16 décembre 1987, que la marchandise avait été vendue ferme à Y.________. Elle a maintenu son refus en dépit de deux mises en demeure ultérieures qui lui ont été adressées le 28 décembre 1987 et le 29 juin 1988. 
 
Le 10 août 1988, Y.________ a vendu un Héréqué, d'une valeur de 12'250 fr., qui faisait partie du lot de 26 tapis. 
B. 
B.a Le 28 juillet 1988, A.________ a introduit devant le Tribunal de première instance du canton de Genève une action dirigée contre Y.________, X.________ et F.________. Invoquant les dispositions relatives au contrat de vente, elle a conclu à ce que les défendeurs soient condamnés à lui payer la somme de 200'000 fr., intérêts et frais en sus, à titre de solde du prix des 26 tapis. D'entrée de cause, elle a renoncé à ses conclusions en tant qu'elles visaient F.________. 
 
X.________ et Y.________ se sont opposées à la demande, la première contestant de surcroît sa légitimation passive. Alléguant avoir été liée à la demanderesse par un contrat de consignation, la seconde a conclu reconventionnellement au paiement de 117'750 fr., plus 640 fr. 70 de frais d'entreposage et d'intérêts. Le montant réclamé correspond à l'acompte versé (130'000 fr.) sous déduction du prix de vente du tapis Héréqué (12'250 fr.). 
B.b Entre le 21 et le 25 décembre 1990, alors que la procédure était pendante, un cambriolage a été perpétré dans une cave servant de dépôt à Y.________ et à X.________. Des marchandises d'une valeur totale de 443'548 fr. ont été dérobées, dont les 23 tapis - estimés à 286'550 fr. - provenant du lot initial. 
 
Y.________ était assurée contre le vol auprès de l'assurance W.________ à hauteur de 200'000 fr. Elle a déclaré le sinistre à son assureur, le 10 janvier 1991, en faisant état d'un dommage total de 286'998 fr. 40. Ce montant incluait la somme de 130'000 fr. que l'assurée faisait valoir au titre du droit de rétention garantissant la restitution de l'acompte versé à A.________. Parallèlement, X.________, qui disposait d'un droit de gage général sur les biens de Y.________, a déclaré le sinistre à son propre assureur, l'assurance Z.________. 
 
L'assurance W.________ a refusé de verser une quelconque indemnité. S'en est suivie une procédure judiciaire au terme de laquelle le Tribunal de première instance, par jugement du 11 février 1993, a condamné l'assureur à payer 200'000 fr., plus intérêts. Ce montant comprenait notamment une indemnité pour les 23 tapis du lot de A.________ couverts en tant que choses appartenant à des tiers et confiées à l'assurée. Les frais d'avocat de Y.________ se sont élevés à 25'500 fr. 
 
Par une transaction signée le 19 avril 1993, l'assurance W.________ s'est engagée a retiré l'appel qu'elle avait interjeté contre ledit jugement et à verser la somme de 200'000 fr. En contrepartie, Y.________ a renoncé aux intérêts ainsi qu'à l'indemnité de procédure (20'000 fr.) qui lui avait été allouée. De plus, E.________, signant pour elle, s'est engagé à faire souscrire par un membre de sa famille une police d'assurance-vie à prime unique de 25'000 fr., somme à imputer sur l'indemnité de 200'000 fr. L'assurance W.________ a versé 175'000 fr. à Y.________ le 7 mai 1993. 
 
Le règlement de ce différend, auquel l'assurance Z.________ avait subordonné son intervention, a permis à X.________ de toucher une indemnité de 55'000 fr. pour solde de tout compte, le 7 juin 1993, en plus des 20'000 fr. que l'assureur lui avait déjà versés le 17 avril 1991, soit un total de 75'000 fr. 
B.c Par jugement du 19 juin 1992, le Tribunal de première instance a admis les conclusions de la demanderesse et rejeté les conclusions reconventionnelles. 
 
Statuant sur appel des défenderesses, la Cour de justice du canton de Genève, par arrêt du 22 avril 1994 (ci-après: l'arrêt n° 1), a annulé ce jugement et renvoyé la cause au Tribunal de première instance pour instruction complémentaire et nouvelle décision dans le sens des considérants. En premier lieu, la cour cantonale a exposé les raisons pour lesquelles il convenait d'examiner le cas au regard du droit suisse. Elle s'est ensuite employée à démontrer que la défenderesse n° 2, à l'instar de la défenderesse n° 1, avait été valablement représentée par F.________ lors de la conclusion de l'accord du 17 juin 1987 et que les deux défenderesses s'étaient engagées solidairement vis-à-vis de la demanderesse. Ces questions réglées, les juges cantonaux ont expliqué pourquoi la défenderesse n° 1 disposait d'un droit de retour, impliquant la restitution réciproque des prestations déjà effectuées, sans égard à la qualification du susdit accord (contrat de vente avec droit unilatéral de résolution donné à l'acquéreur ou contrat estimatoire). Toutefois, comme la quasi-totalité des tapis avaient été volés pendente lite, ils ont renvoyé la cause à la juridiction de première instance afin qu'elle examine l'incidence de ce vol sur les droits et obligations des parties, compte tenu notamment de la demeure de la demanderesse et de l'obligation d'assurer les tapis souscrite par la défenderesse n° 1. 
 
La procédure a été suspendue du 29 septembre 1994 au 11 mars 1998 en raison de la faillite de Y.________. 
B.d Le recours de droit public (cause 4P.169/1994) et le recours en réforme (cause 4C.233/1994) exercés par la demanderesse contre l'arrêt du 22 avril 1994 ont été, respectivement, rejeté dans la mesure où il était recevable et déclaré irrecevable par arrêts distincts du 24 avril 1998. 
C. 
C.a Statuant à nouveau, le Tribunal de première instance, par jugement du 20 mars 2003, a condamné solidairement les défenderesses à payer à la demanderesse la somme de 330'000 fr., avec intérêts à 5% dès le 30 décembre 1987, sous déduction d'un montant de 130'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er juillet 1988. 
 
Selon ce jugement, la demanderesse, du fait qu'elle se trouvait en demeure de reprendre les tapis, devait supporter la perte due à la disparition des 23 tapis, d'une valeur de 286'550 fr., tandis que les défenderesses étaient tenues de lui rembourser la quote-part des indemnités d'assurance relative à cette marchandise (177'661 fr.). Les défenderesses devaient en outre indemniser la demanderesse de son dommage résultant de la sous-assurance et correspondant à la différence entre ces deux montants (108'889 fr.). Elles devaient enfin lui payer la contre-valeur du tapis Héréqué vendu (12'250 fr.) et des deux autres tapis non restitués (31'200 fr.), ce qui donnait une dette totale de 330'000 fr. à compenser partiellement avec la créance en restitution de l'acompte de 130'000 fr. 
C.b Sur appel des défenderesses, la Cour de justice, par arrêt du 19 mars 2004 (ci-après: l'arrêt n° 2), a annulé le jugement de première instance et condamné solidairement les défenderesses à payer à la demanderesse la somme de 123'540 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 8 mai 1993, ainsi que la somme de 31'200 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 15 mai 2001, sous déduction d'un montant de 14'000 fr. La cour cantonale a rejeté toutes autres conclusions, en particulier celle que les défenderesses avaient prise à titre reconventionnel en vue d'obtenir le paiement, par la demanderesse, de 26'863 fr. plus intérêts. 
Ledit arrêt repose sur les motifs résumés ci-après. 
C.b.a Bien qu'elle ait été formulée après la clôture des enquêtes et plus de 14 ans après le début de l'instance, la conclusion reconventionnelle de la défenderesse n° 2, tendant au paiement de 26'863 fr., est recevable étant donné les circonstances. 
C.b.b Dans son arrêt n° 1, la Cour de justice a jugé que le contrat liant les parties comportait une faculté de retour que l'appelante n° 1 avait valablement exercée et qui impliquait la restitution des tapis à la demanderesse et le remboursement de l'acompte de 130'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er juillet 1988. Ce point n'est plus litigieux. 
 
En principe, la Cour de justice est liée par les décisions préjudicielles qu'elle a prises antérieurement dans la même affaire. Demeurent réservés les cas exceptionnels où le refus de revoir les questions tranchées dans de telles décisions entraînerait la violation du droit d'être entendu de l'une des parties. Conformément à ce principe, rien ne justifie un nouvel examen des questions touchant la représentation valable de la défenderesse n° 2 et l'existence d'un rapport de solidarité passive entre les deux défenderesses, ces questions ayant déjà été tranchées dans l'arrêt n° 1. En revanche, par exception au principe, il y a lieu d'examiner si la demanderesse s'est trouvée en demeure du créancier au moment du vol des tapis, étant donné que l'intéressée allègue à ce sujet des faits nouveaux pertinents et recevables. 
 
Pour contester l'application des règles relatives à la demeure du créancier, la demanderesse soutient, en premier lieu, que l'offre de restitution de la défenderesse n° 1 n'était pas réelle dans la mesure où elle avait elle-même tenté à plusieurs reprises, mais sans succès, de reprendre les tapis. Cependant, les allégués nouveaux formulés sur ce point ne convainquent pas l'autorité de jugement de la réalité de ces prétendues démarches. La demanderesse conteste, par ailleurs, la régularité de l'offre de restitution, en faisant valoir qu'elle a été invitée à venir reprendre la marchandise, alors que la dette de restitution était portable. La question du lieu d'exécution est toutefois secondaire en l'espèce. De fait, la demanderesse a refusé de reprendre les tapis parce qu'elle estimait - à tort - que ceux-ci avaient été vendus ferme. Ainsi motivé, son refus d'accepter la prestation offerte était injustifié, raison pour laquelle elle s'est trouvée en demeure. 
C.b.c Il reste à examiner l'incidence, sur les droits et obligations des parties, des événements postérieurs à l'exercice, par la défenderesse n° 1, le 11 décembre 1987, de la faculté de rendre les tapis à la demanderesse. 
 
En vendant le tapis Héréqué en date du 18 août 1988, la défenderesse n° 1 a accompli un acte relevant de la gestion d'affaires imparfaite. Par conséquent, elle doit restituer à la demanderesse le profit qu'elle a tiré de cette vente, c'est-à-dire la somme de 12'250 fr. S'y ajoutent les intérêts à 5% l'an dès le 11 août 1988. 
 
Les 23 tapis ont été volés sans qu'un manquement à son devoir de diligence puisse être reproché à la défenderesse n° 1. Celle-ci a donc été libérée de l'obligation de restitution, devenue objectivement impossible sans faute de sa part (art. 119 al. 1 CO). Etant en demeure de reprendre les tapis au moment où le vol est survenu, la demanderesse ne pouvait pas se prévaloir de l'art. 119 al. 2 CO, de sorte qu'elle supportait le risque de la prestation et du prix. Partant, elle est tenue de restituer l'acompte de 130'000 fr. 
 
Interprété objectivement, le texte préimprimé, figurant au bas des factures d'achat des tapis, signifie que l'acheteur/consignataire se voyait confier le mandat d'assurer la marchandise jusqu'à complet paiement ou restitution de celle-ci et d'entreprendre au besoin toutes démarches utiles pour encaisser les indemnités d'assurance, lesquelles devaient être ensuite restituées à la mandante. La défenderesse n° 1 a violé ses obligations de mandataire en sous-assurant les tapis. Cette violation est en relation de causalité directe avec le dommage subi par la demanderesse en raison du vol des tapis, dommage qui équivaut à l'intérêt positif qu'avait la mandante à la bonne exécution du mandat. L'intérêt positif correspond en l'occurrence à la valeur d'assurance des tapis volés, soit 286'550 fr. Il ne faut toutefois pas perdre de vue que la défenderesse n° 1 a dû engager un procès contre son assureur pour faire valoir son droit à une indemnité. Aussi est-il normal et conforme à l'art. 402 al. 1 CO que la demanderesse lui rembourse la quote-part, afférente à la valeur des tapis, des 25'500 fr. qu'elle a dû verser à son avocat pour ce procès. Il en résulte un montant de 16'474 fr. (25'500 fr. x [286'550 fr. / 443'548 fr.]) à imputer sur les 286'550 fr. susmentionnés. Le solde de 270'076 fr. représente la somme qui serait revenue à la demanderesse en cas de bonne et fidèle exécution du mandat. Il devra être versé à celle-ci par les défenderesses, avec intérêts à 5% dès le 7 mai 1993, date à laquelle l'assureur a indemnisé la défenderesse n° 1. 
Les défenderesses seront, en outre, condamnées à payer à la demanderesse le prix des deux tapis qui n'ont pas été volés et dont on ignore le sort. Elles lui verseront, de ce chef, la somme de 31'200 fr., non contestée par les parties, augmentée des intérêts à 5% dès le 15 mai 2001, la défenderesse n° 1 ayant été mise en demeure de restituer les deux tapis le 14 mai 2001. 
C.b.d Après compensation des créances réciproques et prise en considération des intérêts courus entre le 1er juillet 1988 et le 8 mai 1993, il subsiste une créance de 123'540 fr., en faveur de la demanderesse, créance qui portera intérêts à 5% l'an dès la dernière date citée. A cette créance, il convient d'ajouter la somme de 31'200 fr., sus-indiquée, ainsi que les intérêts y afférents. En seront déduits les 14'000 fr. de dépens que la demanderesse a été condamnée à payer à la défenderesse n° 2 pour les deux procédures de recours fédérales closes par les arrêts précités du 24 avril 1998. 
D. 
D.a 
Parallèlement à deux recours de droit public, qui ont été déclarés irrecevables par arrêt séparé de ce jour, chacune des deux défenderesses a déposé un recours en réforme. La défenderesse n° 1 invite le Tribunal fédéral à annuler l'arrêt n° 2, à débouter la demanderesse de toutes ses conclusions et à condamner celle-ci à lui payer la somme de 26'863 fr. avec intérêts à 5% dès le 7 juin 1993. A titre subsidiaire, elle requiert que cette condamnation pécuniaire soit prononcée en faveur des deux défenderesses. La défenderesse n° 2 conclut principalement, en plus de l'annulation des arrêts nos 1 et 2, à ce que la demande soit rejetée en tant qu'elle est dirigée contre elle. Les conclusions subsidiaires de la défenderesse n° 2 sont identiques aux conclusions subsidiaires de sa codéfenderesse. 
 
La défenderesse n° 1 fait grief à la cour cantonale d'avoir violé le droit fédéral en scindant artificiellement le rapport de base en deux contrats distincts - la convention de base (vente conditionnelle/consignation), d'une part, le mandat de conserver et d'assurer la chose, d'autre part - et en n'appliquant les effets de la demeure qu'à la convention de base, à l'exclusion du mandat. Concrètement, elle reproche aux juges genevois d'avoir retenu que l'obligation de conserver et d'assurer les tapis ne s'éteignait pas au moment de la résolution du contrat de base. 
En plus du même grief, la défenderesse n° 2 formule trois autres griefs se rapportant à la question de sa représentation par F.________ et à celle de la solidarité passive entre les deux défenderesses à l'égard de la demanderesse. 
D.b Dans ses réponses aux recours des défenderesses, la demanderesse propose le rejet de ceux-ci. Chacun de ses mémoires renferme un recours en réforme joint, au contenu identique, dans lequel elle conclut, après annulation des arrêts nos 1 et 2, à ce que le Tribunal fédéral condamne solidairement les défenderesses à lui payer la somme de 330'000 fr., avec intérêts à 6% dès le 30 décembre 1987, sous déduction de la somme de 130'000 fr., avec intérêts à 6% dès le 1er juillet 1988. En d'autres termes, la demanderesse reprend à son compte le dispositif du jugement du Tribunal de première instance du 20 mars 2003 (cf. let. C.a ci-dessus), sauf en ce qui concerne le taux des intérêts dus sur les deux sommes précitées. 
 
La demanderesse soutient, en premier lieu, que la cour cantonale ne s'est pas avisée de ce que l'effet de change émis le 17 juin 1987 et frappé de nullité pour vice de forme n'en constituait pas moins un contrat d'assignation, au sens des art. 466 ss CO, par lequel la défenderesse n° 2 s'était engagée à titre personnel à lui verser la somme de 200'000 fr. Dans un deuxième moyen, la demanderesse conteste avoir été valablement mise en demeure de venir reprendre ses tapis. En troisième lieu, elle expose les raisons pour lesquelles il n'y avait pas matière, à son avis, à imputer les frais d'avocat de la défenderesse n° 1 sur la valeur d'assurance des tapis volés pour calculer le préjudice subi par elle. La Cour de justice se voit encore reprocher, dans un quatrième et dernier moyen, d'avoir retenu un taux d'intérêts de 5% alors que les parties étaient convenues d'un taux de 6%. 
 
Les défenderesses concluent au rejet des recours joints. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Les recours en réforme interjetés séparément par les défenderesses, d'ailleurs représentées par le même avocat, visent tous deux l'arrêt n° 2. Le moyen qui y est soulevé à l'encontre de cette décision ne varie pas d'un recours à l'autre. Dans ces conditions, bien que le recours de la défenderesse n° 2 porte également sur l'arrêt n° 1, l'économie de la procédure commande, néanmoins, de traiter les deux recours dans un seul et même arrêt. Il en sera fait de même en ce qui concerne les deux recours joints distincts déposés par la demanderesse. Ainsi, les quatre recours soumis à l'examen de la juridiction fédérale de réforme seront traités dans le présent arrêt. 
2. 
La demanderesse avait exercé, contre l'arrêt n° 1, un recours en réforme et un recours de droit public connexes qui ont été jugés recevables sous l'angle des art. 50 et 87 OJ. La défenderesse n° 2, qui attaque aussi ledit arrêt, aurait sans doute été en mesure de le faire à l'époque déjà. Toutefois, en vertu de l'art. 48 al. 3 OJ, tel qu'interprété par la jurisprudence (ATF 127 III 351 consid. 1), elle n'a pas à souffrir de son abstention et peut ainsi conclure à l'annulation tant de cette décision incidente que de la décision finale matérialisée par l'arrêt n° 2. 
3. 
Interjetés par les défenderesses, qui ont été condamnées à verser une somme d'argent à la demanderesse, et dirigés contre une décision finale prise en dernière instance cantonale de même que, pour l'un d'eux, contre la décision incidente antérieure, les recours en réforme soumis à l'examen du Tribunal fédéral, dans une cause dont la valeur litigieuse dépasse nettement le minimum prescrit (art. 46 OJ), sont recevables, puisqu'ils ont été déposés en temps utile (art. 54 al. 1 OJ) et dans les formes requises (art. 55 OJ). Demeure réservé l'examen de la recevabilité des différents griefs qui y sont articulés. La recevabilité des recours en réforme joints ne prête pas non plus à discussion au regard des exigences fixées à l'art. 59 al. 2 et 3 OJ
4. 
4.1 Le recours en réforme est ouvert pour violation du droit fédéral, mais non pour violation directe d'un droit de rang constitutionnel (art. 43 al. 1 OJ), ni pour violation du droit cantonal (art. 55 al. 1 let. c in fine OJ). 
 
Saisi d'un tel recours, le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées, qu'il y ait lieu à rectification de constatations reposant sur une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter les constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents et régulièrement allégués (art. 64 OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c; 126 III 59 consid. 2a). 
4.2 
4.2.1 Sous chiffre 6 de son mémoire de recours, la défenderesse n° 2 s'en prend à une constatation, figurant dans l'arrêt n° 1, d'après laquelle "le 17 juin 1987, F.________, respectivement la société Y.________ SA, entèrent en possession des 26 tapis aux Ports Francs de Genève" (p. 2, let. C/d). A l'en croire, cette constatation procéderait d'une inadvertance manifeste dès lors qu'il serait établi, par les pièces 11 et 12 de son chargé du 10 mai 2001, que les tapis ont été livrés au dépôt de la défenderesse n° 1 situé ..., à Genève. 
4.2.2 
4.2.2.1 La jurisprudence n'admet l'existence d'une inadvertance manifeste, susceptible d'être rectifiée par le Tribunal fédéral en application de l'art. 63 al. 2 OJ, que lorsque l'autorité cantonale a omis de prendre en considération une pièce déterminée, versée au dossier, ou l'a mal lue, s'écartant par mégarde de sa teneur exacte, en particulier de son vrai sens littéral (ATF 115 II 399 consid. 2a; 109 II 159 consid. 2b; cf. également ATF 121 IV 104 consid. 2b). Tel est notamment le cas lorsque l'examen d'une pièce du dossier, qui n'a pas été prise en considération, révèle une erreur de fait évidente, qui ne peut s'expliquer que par l'inattention (Bernard Corboz, Le recours en réforme au Tribunal fédéral, in SJ 2000 II, p. 66). Par ailleurs, l'inadvertance invoquée doit porter sur une constatation propre à influer sur le sort du recours (cf. ATF 95 II 503 consid. 2a p. 507; Jean-François Poudret, COJ II, n. 1.6.2 in fine ad art. 55 et n. 5.1. ad art. 63; Georg Messmer/Hermann Imboden, Die eidgenössischen Rechtsmittel in Zivilsachen, p. 138). 
4.2.2.2 La défenderesse n° 2 ne fournit aucune explication quant au caractère causal de l'inadvertance imputée à la cour cantonale, sinon peut-être, de manière allusive, à la page 20, avant-dernier paragraphe, de son acte de recours, où elle indique, en se référant au chiffre 6 précité, que la prise de possession des tapis a été le fait de la défenderesse n° 1 et non d'elle-même. A son avis, sur la base de cette circonstance, parmi d'autres, la demanderesse ne pouvait pas admettre de bonne foi que F.________ avait agi pour le compte de la défenderesse n° 2. 
 
Que les tapis aient été livrés au dépôt de la rue ... plutôt qu'au port franc ne constitue pas un indice permettant de déterminer à coup sûr le destinataire de la livraison, d'autant plus que, selon une autre constatation figurant dans le même arrêt n° 1 (p. 5, let. G), la cave de l'immeuble sis 94, rue ... servait d'entrepôt aux deux défenderesses. 
 
Quoi qu'il en soit, le fait que les tapis aient été livrés dans les locaux utilisés par une partie n'implique pas que le contrat y relatif n'ait été conclu qu'avec cette partie-là. 
 
Cela étant, la rectification requise au titre de l'inadvertance manifeste ne s'impose nullement. 
4.3 Selon la défenderesse n° 2, les constatations de la Cour de justice devraient être complétées sur cinq points (ch. 11 de l'acte de recours, p. 11 à 13, et 1er grief, p. 16 à 17). 
4.3.1 L'art. 64 OJ ne confère pas aux parties la faculté de compléter ad libitum les faits constatés par l'autorité cantonale, en particulier en soutenant qu'un complètement desdits faits conduirait à une solution juridique différente du litige. Pour que la norme précitée entre en jeu, l'arrêt attaqué ne doit pas contenir les constatations nécessaires à l'application du droit fédéral (Corboz, op. cit., p. 67; Max Guldener, Schweizerisches Zivilprozessrecht, 3e éd., p. 552). Le complètement des faits est exclu lorsqu'il est fait grief à la cour cantonale d'avoir constaté les faits de manière erronée, car c'est l'appréciation des preuves qui est alors mise en cause, laquelle ne saurait être contrôlée en instance de réforme (arrêt 4C.336/1993 du 23 février 1994, consid. 1). Il n'entre pas non plus en ligne de compte s'il apparaît clairement que le fait pertinent n'a pas été allégué ou que l'allégué ne respectait pas les règles fixées par la procédure cantonale (Corboz, op. cit., p. 67, note 540; Messmer/Imboden, op. cit., p. 139, n. 101). Plus généralement, un complètement de l'état de fait est exclu dans tous les cas où le renvoi de la cause à la cour cantonale ne permettrait pas à celle-ci d'y procéder pour une raison ou une autre (cf. Poudret, op. cit., n. 2.3 ad art. 64). 
4.3.2 Le complètement requis par la défenderesse n° 2 a trait uniquement aux faits se rapportant aux questions de la représentation de cette partie par F.________ et à l'existence d'une relation de solidarité entre les deux défenderesses. Aux dires de l'intéressée, ces faits ont été allégués par elle dans son mémoire d'appel du 19 mai 2003. Cependant, comme le souligne avec raison la demanderesse, si la Cour de justice n'a pas pris en considération ces faits, c'est parce qu'elle a estimé - pour un motif tiré du droit de procédure genevois - ne pas pouvoir revenir sur les deux questions susmentionnées, qui avaient déjà été traitées dans l'arrêt n° 1. Comme la défenderesse n° 2 n'a pas attaqué, dans son recours de droit public connexe, le refus de la cour cantonale de rouvrir le débat sur ces deux questions, un renvoi de la cause à la cour cantonale ne permettrait pas à celle-ci de compléter ses constatations sur les points de fait en relation avec les deux questions non réexaminées par elle. 
 
La défenderesse n° 2 n'établit pas non plus, ni même ne soutient, qu'elle aurait déjà allégué les faits prétendument omis avant que la Cour de justice ne rende son premier arrêt, auquel cas un complètement des constatations posées dans cet arrêt eût été envisageable. Il ne l'est pas, en revanche, dans la mesure où il porte sur des faits allégués postérieurement. 
 
Au demeurant, en tant qu'elle se réfère aux dépositions des frères de la demanderesse et à celle de F.________ (ch. 11.1 à 11.3 de l'acte de recours), à un courrier du conseil de la demanderesse (ch. 11.5 de l'acte de recours) ainsi qu'aux allégations formulées par celle-ci dans sa demande (ch. 11.4 de l'acte de recours), la défenderesse n° 2 n'énonce pas des faits à compléter, mais remet en cause l'appréciation des preuves en reprochant à la cour cantonale de ne pas avoir tenu compte de ces différents éléments. Enfin, le fait que F.________ ne disposait pas, à l'égard de la défenderesse n° 2, de pouvoirs de représentation qui auraient été inscrits au registre du commerce (acte de recours p. 16, 1er tiret) ressort implicitement de la constatation selon laquelle il s'est vu délivrer, par l'administrateur unique de la défenderesse n° 2, une procuration générale lui permettant d'agir pour cette société. 
 
En tout état de cause, les constatations de fait de la cour cantonale sont suffisantes pour permettre à la Cour de céans de vérifier si les juges précédents ont appliqué correctement le droit fédéral. Il n'y a, dès lors, pas matière à les compléter. 
 
5. 
La Cour de justice a examiné tous les problèmes litigieux au regard du droit suisse. Elle s'en est expliquée dans l'arrêt n° 1. Aucune des parties n'a critiqué les considérations, d'ailleurs pertinentes, qu'elle a émises sous l'angle du droit international privé. Il n'y a donc pas lieu d'y revenir. L'argumentation des juges précédents n'est pas non plus critiquée dans la mesure où elle concerne la vente du tapis Héréqué et la non-restitution de deux autres tapis qui faisaient partie du lot de 26 tapis appartenant à la demanderesse. Il n'est pas non plus contesté que l'accord conclu le 17 juin 1987 - qu'il soit qualifié de contrat estimatoire ou de vente avec droit unilatéral de résolution conféré à l'acquéreur - comportait la faculté pour le consignataire/acheteur de restituer les tapis au consignateur/vendeur jusqu'au 30 juin 1988 et, corollairement, l'obligation pour celui-ci de reprendre la marchandise ainsi que de rembourser l'acompte perçu. La Cour de céans ne reverra donc pas ces différentes questions. 
 
Les autres questions seront examinées ci-après dans un ordre logique, lequel ne correspondra pas nécessairement à celui qui a été adopté par les défenderesses et la demanderesse dans leurs recours respectifs. 
6. 
Dans ses recours joints, la demanderesse soutient que la Cour de justice aurait dû condamner la défenderesse n° 2 à lui payer la somme de 200'000 fr. sur la base d'un contrat d'assignation. Ce chef de responsabilité autonome sera examiné en priorité car il pourrait rendre sans objet certains des griefs visant celui qui a été retenu par les juges cantonaux. 
6.1 La défenderesse n° 2 conteste la recevabilité de ce grief. Selon elle, la demanderesse n'aurait pas d'intérêt à son admission dès lors qu'elle conclut à la condamnation solidaire des défenderesses. D'autre part, à supposer que la conclusion prise par la demanderesse ait visé à la condamnation non solidaire de la défenderesse n° 2, il s'agirait d'une conclusion nouvelle, irrecevable en vertu de l'art. 55 al. 1 let. b OJ
 
Ces arguments ne sont pas convaincants. La conclusion tendant au paiement solidaire, par les défenderesses, de la somme de 330'000 fr. (sous déduction de la somme de 130'000 fr.), telle qu'elle a été prise par la demanderesse, manifeste la volonté de cette dernière d'obtenir à tout le moins que la défenderesse n° 2 soit condamnée - seule ou avec la défenderesse n° 1, peu importe - à lui payer la somme de 200'000 fr. Et l'on ne saurait dénier à la demanderesse un intérêt à faire admettre semblable conclusion. Que cette conclusion implicite ne vise qu'une seule des défenderesses ne constitue pas un obstacle à sa recevabilité, car il ne faudrait y voir qu'une réduction (ratione personae) admissible de ses prétentions (cf. Corboz, op. cit., p. 347, note 346 in fine). 
6.2 
6.2.1 L'assignation est un contrat par lequel l'assigné est autorisé à remettre à l'assignataire, pour le compte de l'assignant, une somme d'argent notamment, que l'assignataire a mandat de percevoir en son propre nom (art. 466 al. 1 CO). Servant de base aux relations issues d'une lettre de change ou d'un chèque, les dispositions des art. 466 ss CO cèdent le pas aux dispositions spéciales régissant ces papiers-valeurs. Néanmoins, elles peuvent s'y substituer, en particulier dans le cas d'un papier-valeur nul (ATF 80 II 82 consid. 4 p. 87; Pierre Tercier, Les contrats spéciaux, 3e éd., n. 5469). 
 
L'assigné peut notifier son acceptation à l'assignataire sans faire de réserves; dans ce cas, il est tenu de le payer et ne peut lui opposer que les exceptions résultant de leurs rapports personnels ou du contenu de l'assignation, à l'exclusion de celles qui dérivent de ses relations avec l'assignant (art. 468 al. 1 CO). Autrement dit, en cas d'acceptation pure et simple de l'assignation, l'assigné ne peut pas faire valoir des exceptions tirées du rapport de couverture ou du rapport de valeur (ATF 127 III 553 consid. 2e/bb p. 557 et les arrêts cités). L'acceptation suppose une manifestation de volonté adressée à l'assignataire ou à un représentant autorisé; elle n'a pas besoin de revêtir une forme spéciale et peut résulter d'actes concluants (ATF 122 III 237 consid. 3b). 
6.2.2 Selon la demanderesse, en date du 17 juin 1987, la défenderesse n° 2, agissant en qualité d'assignée, a émis un effet de change de 200'000 fr., qui certes était entaché de nullité pour vice de forme, mais qui n'en constituait pas moins une assignation valable. Ayant notifié son acceptation à l'assignataire (la demanderesse), par le truchement de F.________, sans faire de réserves, la défenderesse n° 2 serait ainsi tenue de lui payer la somme de 200'000 fr. sans pouvoir lui opposer une quelconque exception. 
Cette argumentation ne résiste pas à l'examen. L'assignation met en cause trois personnes (l'assignant, l'assigné, l'assignataire) et trois rapports juridiques (le rapport de couverture, le rapport de valeur, le rapport d'assignation). Or, la demanderesse ne démontre nullement l'existence d'une telle relation triangulaire. En particulier, elle n'indique pas qui serait en l'occurrence l'assignant. Ce ne peut être la défenderesse n° 1, dont le nom n'est pas mentionné sur l'effet de change. Ce ne peut pas non plus être F.________ puisque c'est lui qui aurait accepté l'assignation au nom de la défenderesse n° 2, d'après la thèse soutenue par la demanderesse. Il ressort des explications fournies par celle-ci que l'on se trouve, en réalité, dans une situation mettant aux prises deux parties, l'une d'elles (la défenderesse n° 2) s'engageant à verser un certain montant à l'autre (la demanderesse). Cet état de choses n'a d'ailleurs pas échappé au juge de la mainlevée qui a vu, dans l'effet de change souscrit le 17 juin 1987, un billet à ordre, au sens des art. 1096 ss CO, complété de manière inadmissible par l'acceptation du souscripteur (sur ce dernier point, cf. Martin Frey, Commentaire bâlois, 2e éd., n. 1 des Remarques préliminaires aux art. 1096-1099, p. 2067). Le billet à ordre constitue une reconnaissance de dette abstraite (art. 17 CO) revêtant la forme d'un effet de change (ATF 127 III 559 consid. 3a et les références). Il ne contient qu'un engagement inconditionnel et irrévocable de payer le créancier, sans indication de la cause de l'obligation. Le caractère abstrait de cette reconnaissance de dette ne signifie pourtant pas que celle-ci serait détachée du rapport de base. Par conséquent, le souscripteur du billet à ordre, tel l'auteur d'une reconnaissance de dette ordinaire (ATF 105 II 183 consid. 4a p. 187), dispose contre le premier porteur de toutes les exceptions et objections découlant de ce rapport (ATF 127 III 559 consid. 4 et les références). 
 
Dans le cas concret, le billet à ordre entaché de nullité constitue donc une reconnaissance de dette abstraite au sens de l'art. 17 CO. Dès lors, la défenderesse n° 2 peut opposer à la demanderesse toutes les objections et exceptions afférentes au rapport de base, c'est-à-dire au contrat portant sur les 26 tapis. C'est ce qu'elle fait en soutenant qu'elle n'a pas été valablement représentée par F.________ pour la conclusion de ce contrat, qu'elle ne s'est de toute façon pas engagée solidairement aux côtés de la défenderesse n° 1 envers la demanderesse et que celle-ci n'a, quoi qu'il en soit, plus aucune créance à faire valoir contre les défenderesses de ce chef. Il y a lieu d'examiner successivement ces différents moyens. 
7. 
La défenderesse n° 2 conteste qu'elle ait été valablement représentée par F.________ pour la conclusion du contrat litigieux. Elle nie, de ce fait, avoir la légitimation passive pour résister à l'action introduite par la demanderesse sur la base dudit contrat. 
7.1 L'art. 32 al. 1 CO dispose que les droits et les obligations dérivant d'un contrat fait au nom d'une autre personne par un représentant autorisé passent au représenté. Il s'ensuit que le représentant n'est pas lié par l'acte accompli. Les effets de la représentation ne naissent que si le représentant dispose du pouvoir de représentation et s'il a la volonté d'agir comme tel (ATF 126 III 59 consid. 1b). 
 
Le représentant peut manifester au tiers (expressément ou tacitement) sa volonté d'agir au nom d'autrui jusqu'au moment de la conclusion du contrat. Le tiers doit donc savoir ou être à même de savoir que le représentant agit non pas pour lui-même mais pour le représenté. Ce qui est décisif, ce n'est pas la volonté interne effective du représentant d'agir pour une autre personne. Il suffit que le tiers puisse inférer du comportement du représentant, interprété selon le principe de la confiance, qu'il existe un rapport de représentation (arrêt 4C.296/1995 du 26 mars 1996, publié in SJ 1996 p. 554 ss, consid. 5b et les auteurs cités). Demeure réservée l'hypothèse, visée à l'art. 32 al. 2 in fine CO, de l'indifférence du tiers en matière de représentation; en pareille hypothèse, le représentant doit avoir eu la volonté d'agir comme tel (ATF 117 II 387 consid. 2a et les références). 
7.2 
7.2.1 La défenderesse n° 2 ne conteste apparemment pas que F.________ ait disposé du pouvoir de la représenter. Elle affirme certes que le prénommé n'avait pas la volonté d'agir pour elle. Cela ne signifie toutefois pas qu'elle lui dénie ipso facto tout pouvoir de représentation à son égard. 
 
En tout état de cause, l'existence d'un tel pouvoir ressort clairement des constatations de la cour cantonale. Il en appert, entre autres circonstances concluantes, que F.________ s'est vu délivrer en 1984, par l'administrateur unique de la défenderesse n° 2, une procuration générale lui permettant d'agir au nom de celle-ci. L'intéressé disposait, par ailleurs, de la signature sur les comptes bancaires de la société. Il avait du reste, à plusieurs reprises et de sa propre initiative, tiré des chèques sur lesdits comptes pour des sommes importantes. 
La première des deux conditions cumulatives qui doivent être réunies pour qu'un acte accompli par une personne en lie une autre est ainsi réalisée en l'espèce. 
7.2.2 
7.2.2.1 C'est une démonstration vaine que la défenderesse n° 2 tente de faire lorsqu'elle cherche à établir que F.________ n'avait pas la volonté d'agir pour elle. En effet, comme on l'a déjà relevé, la volonté interne du représentant d'agir en tant que tel ne constitue une circonstance juridiquement pertinente que dans l'hypothèse où il est indifférent au tiers de traiter avec le représentant ou le représenté. Or, pareille hypothèse n'entre pas en ligne de compte en l'espèce dans la mesure où les faits constatés par les juges cantonaux n'autorisent pas à conclure qu'il était indifférent à la demanderesse de traiter avec F.________ ou avec la défenderesse n° 2. 
7.2.2.2 F.________ n'a, semble-t-il, pas indiqué expressément à la demanderesse qu'il agissait pour le compte de la défenderesse n° 2. Il n'est, en particulier, pas établi qu'il lui ait soumis la procuration générale au moment de conclure le contrat en cause. Il reste donc à examiner si la demanderesse pouvait inférer des circonstances l'existence du rapport de représentation. 
 
Pour nier que ce fût le cas, la défenderesse n° 2 avance un certain nombre de faits - le libellé des factures, le lieu de prise de possession des tapis, le texte des documents d'importation, l'objet des pourparlers contractuels, la réaction du conseil de la demanderesse à réception de l'offre de restitution des tapis - qui, pour certains, ne correspondent pas à des constatations ressortant de l'arrêt n° 1 et qui, de toute manière, ne constituent pas des indices concluants, propres à exclure l'existence du rapport de représentation litigieux, si on les compare aux circonstances invoquées par la demanderesse. 
 
Effectivement, comme le souligne celle-ci, F.________, par deux actes concluants, lui a clairement donné à entendre qu'il n'agissait pas pour lui-même mais pour le compte de la défenderesse n° 2. Premièrement, il lui a remis, le 17 juin 1987, un chèque de 130'000 fr. tiré sur ladite société, en précisant qu'il s'agissait du paiement d'un acompte sur le prix des 26 tapis. Secondement, F.________, toujours à la même date, a émis un effet de change au nom de la défenderesse n° 2, dans lequel cette dernière s'obligeait personnellement à payer le solde du prix des tapis. C'est le lieu de souligner que la demanderesse s'est vu délivrer ces deux papiers-valeurs le jour même de la conclusion du contrat portant sur les tapis. Aussi la défenderesse n° 2 avance-t-elle un argument spécieux lorsqu'elle affirme que la remise de ces deux pièces est intervenue postérieurement à la conclusion du contrat, plus précisément au stade de l'exécution de celui-ci. 
 
En considérant que la demanderesse pouvait inférer du comportement de F.________ que le rapport de représentation allégué par elle existait bel et bien, les juges genevois n'ont pas violé l'art. 32 CO. Partant, c'est à bon droit qu'ils ont appliqué cette disposition pour écarter le moyen pris du défaut de légitimation passive de la défenderesse n° 2. 
8. 
8.1 La défenderesse n° 2 conteste, par ailleurs, s'être engagée solidairement avec la défenderesse n° 1 à assumer les obligations découlant du contrat conclu avec la demanderesse. Selon elle, les circonstances du cas concret, interprétées selon le principe de la confiance, excluaient l'existence d'une solidarité passive entre les codéfenderesses. Tout au plus la Cour de justice aurait-elle pu admettre qu'il y avait eu, en l'espèce, une reprise cumulative de dette partielle, de la part de la défenderesse n° 2, portant uniquement sur l'obligation de paiement du prix des tapis, à l'exclusion des autres obligations découlant du contrat relatif à ceux-ci. 
8.2 
8.2.1 La solidarité conventionnelle, au sens de l'art. 143 al. 1 CO, suppose en principe que les codébiteurs solidaires adressent au créancier une déclaration dans ce sens. Cependant, la volonté de s'engager solidairement peut aussi s'exprimer par actes concluants, lorsqu'elle résulte indiscutablement du contexte. Pour dire si tel est le cas, il faut interpréter les circonstances selon le principe de la confiance (arrêt 4C.322/2000 du 24 janvier 2001, consid. 2d; ATF 116 II 707 consid. 3; 49 III 205 consid. 4). 
8.2.2 A l'appui de son grief, la défenderesse n° 2 invoque essentiellement, non pas des constatations faites par la Cour de justice, mais l'absence de constatations sur les différents points suivants: l'existence de rapports directs entre la défenderesse n° 2 et la demanderesse; d'éventuelles communications - écrites ou orales - concluantes adressées à la demanderesse; la connaissance par la défenderesse n° 2 du texte des factures; la connaissance par la demanderesse des liens existant entre les défenderesses; la volonté de la demanderesse d'accepter la défenderesse n° 2 en tant que débitrice des obligations issues du contrat conclu entre la demanderesse et la défenderesse n° 1; l'intérêt de la défenderesse n° 2 à l'exécution dudit contrat. Cette manière d'argumenter laisse pour le moins à désirer, car elle revient à tenir pour avérés des faits qui, pourtant, n'ont pas été constatés par la cour cantonale. Quant aux autres circonstances mentionnées par l'intéressée pour étayer sa thèse du défaut de solidarité passive, ce sont les mêmes que celles qui avaient été alléguées en rapport avec le problème de la représentation de la défenderesse n° 2 par F.________; la Cour de céans a déjà expliqué, plus haut, pourquoi lesdites circonstances ne revêtaient pas une importance décisive (cf. consid. 7.2.2.2 ci-dessus). 
 
En réalité, comme la demanderesse le fait remarquer avec raison, l'interprétation, selon le principe de la confiance, des circonstances caractérisant la présente cause autorise sans conteste à conclure que les deux défenderesses se sont engagées solidairement, en qualité de parties contractantes principales, vis-à-vis de la demanderesse. Que les deux défenderesses aient agi de concert dans cette affaire est indéniable: si la défenderesse n° 1 a fait émettre les factures à son nom, c'est la défenderesse n° 2 qui a payé l'acompte de 130'000 fr. et qui s'est reconnue débitrice envers la demanderesse du solde de 200'000 fr.; et lorsque la défenderesse n° 1 a invité la demanderesse à reprendre les 26 tapis, elle a également réclamé la restitution de l'acompte bien que celui-ci n'ait pas été versé par elle. Les intérêts des deux défenderesses relativement au marché portant sur ces tapis étaient ainsi fortement imbriqués. Il n'y a rien de surprenant à cela, du reste, puisque les deux entités étaient contrôlées et dirigées par les membres d'une même famille. On peut légitimement se demander, au demeurant, si les deux défenderesses ne se sont pas associées en vue d'acquérir et de revendre les tapis et s'il n'existait pas une société simple entre elles, auquel cas leur solidarité passive envers la demanderesse résulterait directement de la loi (art. 544 al. 3 CO). Mais même sans aller jusque-là, il faut bien admettre que la défenderesse n° 2, en payant un acompte substantiel et en se reconnaissant personnellement débitrice du solde du prix de vente des tapis à l'égard de la demanderesse, le tout au moment de la conclusion du contrat, a clairement manifesté sa volonté d'assumer elle aussi les obligations découlant de celui-ci, et non pas simplement de garantir son exécution. 
 
En raisonnant par l'absurde et en retenant que les deux défenderesses n'étaient pas liées par le même contrat, on aboutirait, de surcroît, à la constatation singulière selon laquelle c'est la société qui n'a pas payé (la défenderesse n° 1) qui réclame le remboursement de l'argent encaissé par la demanderesse, tandis que celle qui a payé (la défenderesse n° 2) non seulement n'en fait pas de même, mais encore n'exige pas de la défenderesse n° 1 la restitution des fonds qu'elle est censée lui avoir avancés - selon la thèse soutenue par elle - en versant pour elle à la demanderesse l'acompte de 130'000 fr. 
 
Il est enfin curieux de constater que la défenderesse n° 1, représentée par le même avocat que celui qui agit pour la défenderesse n° 2, n'a pas fait la moindre difficulté pour admettre sa légitimation passive et qu'elle n'a, en particulier, jamais contesté l'existence des pouvoirs de représentation de F.________ à son égard, bien que l'origine de ceux-ci fût inconnue. Or, si l'on se souvient que la défenderesse n° 1 était dans une situation financière pour le moins délicate, puisqu'elle est même tombée en faillite pendente lite avant que celle-ci ne soit révoquée, et qu'il n'est pas certain que cette situation soit florissante à l'heure actuelle, alors que rien n'indique que la santé financière de la défenderesse n° 2 serait mauvaise, il n'est pas interdit de penser que, par un artifice juridique, le conseil commun des deux défenderesses tente d'obtenir que l'éventuelle condamnation pécuniaire devant être prononcée par la juridiction fédérale de réforme ne vise pas la société qui est peut-être la seule à pouvoir y faire face, c'est-à-dire la défenderesse n° 2. 
 
Que semblable hypothèse soit fondée ou non, la Cour de justice n'a de toute façon pas violé le droit fédéral en admettant que les défenderesses étaient codébitrices solidaires de l'ensemble des obligations découlant du contrat conclu le 17 juin 1987 avec la demanderesse. 
 
En ce qui concerne les créances issues dudit contrat, dont la demanderesse serait le sujet passif, telles que celle visant à la restitution de l'acompte de 130'000 fr., il convient d'admettre, corrélativement, qu'il y avait solidarité active entre les défenderesses à leur égard, si bien que chacune d'elles pouvait en réclamer le paiement intégral à la demanderesse et celle-ci se libérer envers les deux défenderesses par un paiement fait à l'une d'elles (cf. art. 150 al. 1 et 2 CO). D'où il suit que la demanderesse ne saurait contester la légitimation active de la défenderesse n° 1 au seul motif que cette dernière a été la seule, dans un premier temps du moins, à conclure reconventionnellement au remboursement de la somme de 130'000 fr. versée par la défenderesse n° 2 pour le compte des deux défenderesses, cotitulaires de la créance correspondante. Dans le même ordre d'idées, on retiendra que la défenderesse n° 1 a valablement exercé seule, avec effet pour les deux défenderesses, les droits liés au rapport d'obligation, qu'il s'agisse du droit unilatéral de résoudre le contrat (hypothèse de la vente sous condition résolutoire) ou de la faculté d'opter pour la restitution des tapis (hypothèse du contrat estimatoire), car la demanderesse devait inférer des circonstances que la défenderesse n° 1 agissait, ce faisant, aussi bien pour elle-même que pour la défenderesse n° 2. 
9. 
9.1 
9.1.1 Ayant exercé, en décembre 1987, soit leur droit de résoudre le contrat de vente, soit celui d'opter pour la restitution de la chose, les défenderesses avaient l'obligation de rendre les tapis à la demanderesse. Il n'est pas contesté ni contestable que l'exécution de cette obligation, quel qu'en soit le fondement, est devenue impossible par suite d'une circonstance non imputable aux débitrices, à savoir le vol ultérieur des tapis. Par conséquent, ladite obligation s'est éteinte en vertu de l'art. 119 al. 1 CO, la demanderesse et créancière devant ainsi supporter le risque de la prestation. 
 
Selon les règles générales, dans un contrat synallagmatique, lorsque le débiteur est libéré de son obligation en raison d'une impossibilité non fautive, le créancier est lui aussi libéré de sa propre obligation conformément à l'art. 119 al. 2 CO. Il est généralement admis que cette disposition s'applique à d'autres rapports d'échange, tels que la restitution des prestations déjà faites en cas de résolution du contrat (cf., parmi d'autres: Luc Thévenoz, Commentaire romand, n. 11 ad art. 119 CO). En l'occurrence, comme l'impossibilité non fautive d'exécuter l'obligation de restituer les tapis est survenue après la résolution du contrat ou l'exercice du droit d'option, les défenderesses, libérées de cette obligation, ne devraient donc en principe plus pouvoir exiger le remboursement de l'acompte versé à la demanderesse (cf. Franz Schenker, Die Voraussetzungen und die Folgen des Schuldnerverzugs im schweizerischen Obligationenrecht, thèse Fribourg 1988, n. 725; Rolf H. Weber, Commentaire bernois, n. 75 ad art. 109 CO). 
9.1.2 L'art. 119 al. 3 CO réserve toutefois les cas dans lesquels la loi ou le contrat mettent les risques à la charge du créancier avant même que l'obligation soit exécutée. Ainsi, en matière de vente, l'art. 185 al. 1 CO fait en principe supporter par l'acheteur les risques de la chose vendue dès la conclusion du contrat (periculum est emptoris; au sujet de cette disposition, cf. l'ATF 128 III 370). Dans ce cas, l'acheteur, sur qui pèse le risque du prix, doit tout de même payer le prix de la chose qu'il ne reçoit pas ou qui lui a été enlevée sans faute de sa part. 
 
La demanderesse invoque cette exception en faisant valoir que tant dans la vente conclue sous condition résolutoire que dans le contrat de consignation, les profits et les risques passent à l'acquéreur, respectivement au consignataire, dès la conclusion du contrat. A son avis, le risque de perte des tapis a ainsi été transféré définitivement aux défenderesses le 17 juin 1987. 
 
De leur côté, les défenderesses soutiennent au contraire qu'en dérogation à la règle dispositive de l'art. 185 al. 1 CO, les parties sont convenues de faire supporter les risques et profits à la venderesse jusqu'à complet paiement de la marchandise, si bien que le risque de perte des tapis ne leur a jamais été transféré. Selon elles, en effet, l'obligation qui leur a été imposée d'assurer les tapis aurait été dénuée de sens si elles avaient dû supporter elles-mêmes le risque de perte de ceux-ci dès la conclusion du contrat. Les défenderesses se rallient, par ailleurs, à l'opinion de certains auteurs voulant que ce soit le consignateur qui supporte le risque de disparition de la chose jusqu'au moment où celle-ci est vendue à un tiers. 
 
Les thèses antagonistes ainsi résumées soulèvent des questions délicates. A cet égard, affirmer, à l'instar de la demanderesse, qu'une vente faite sous condition résolutoire justifie l'application de l'art. 185 al. 1 CO est par trop réducteur. En effet, cette proposition n'est vraie que dans l'hypothèse où la chose disparaît avant l'avènement de la condition résolutoire; si elle disparaît après, comme c'est ici le cas, c'est à nouveau le vendeur qui supporte le risque correspondant puisque le contrat cesse de produire ses effets (Silvio Venturi, Commentaire romand, n. 23 ad art. 185 CO et les auteurs cités; Hans Giger, Commentaire bernois, n. 58 ad art. 185 CO). En ce qui concerne l'argumentation développée par les défenderesses, il n'est pas sûr que l'on puisse considérer la clause relative à l'obligation d'assurer la marchandise comme un élément suffisamment explicite pour que la demanderesse ait dû en inférer la volonté de ses cocontractantes de déroger à la règle énoncée par l'art. 185 al. 1 CO. D'autre part, l'avis exprimé par les défenderesses au sujet du transfert des risques dans le contrat estimatoire est minoritaire, puisqu'il est généralement admis, à l'heure actuelle, qu'un tel contrat constitue une vente ferme avec obligation alternative, de sorte que les risques passent au consignataire dès sa conclusion (sur cette question controversée, cf. Tercier, op. cit., n. 6948 s. et n. 6955 ainsi que la jurisprudence et la doctrine citées). 
 
Il ne sera toutefois pas nécessaire de trancher ces différentes questions si l'on admet, avec la cour cantonale, que la demanderesse se trouvait dans la situation d'un créancier en demeure au moment où les tapis ont été volés. De fait, selon les juges genevois, le créancier en demeure supporte le risque du prix en plus du risque de la prestation, car il ne peut plus se prévaloir de l'art. 119 al. 2 CO. Appliqué au cas particulier, le principe énoncé par la cour cantonale, qui entraîne les mêmes conséquences que celles prévues à l'art. 185 al. 1 CO pour la vente de choses déterminées, implique que les défenderesses, libérées de leur obligation de restituer les tapis en vertu de l'art. 119 al. 1 CO, peuvent néanmoins exiger le remboursement de l'acompte de 130'000 fr. versé à la demanderesse. Cette dernière ne remet pas en cause ledit principe en tant que tel, lequel correspond à une règle de droit commun, reprise en droit allemand (cf. § 326 al. 2 BGB), qui a également été codifiée en droit suisse pour le contrat d'entreprise (cf. art. 376 al. 1 CO; plus généralement, cf. Andreas von Tuhr/Arnold Escher, Allgemeiner Teil des Schweizerischen Obligationenrechts, vol. II, 3e éd., p. 74 s., ch. 2). Dès lors, même si la règle voulant que les risques passent ipso jure au créancier en demeure n'est pas incontestée (au sujet des différentes opinions émises à son sujet, cf. Martin Bernet, Commentaire bâlois, 3e éd., n. 7 ad Remarques préliminaires aux art. 91-96 CO), il ne paraît pas indispensable d'examiner plus avant ce point de droit. Au reste, si l'on part de l'idée, raisonnable, que la demeure du créancier ne doit pas nuire au débiteur, il paraît normal que les défenderesses puissent exiger le remboursement de l'acompte qu'elles ont versé en vue de payer une marchandise dont elles ont été privées sans faute de leur part et qui n'aurait pas disparu si le créancier n'avait pas tardé à la reprendre. On aboutirait d'ailleurs au même résultat en appliquant par analogie l'art. 185 al. 1 CO à la situation présentement envisagée. En effet, l'obligation de restituer les prestations réciproques qu'avait fait naître, en décembre 1987, la résolution par les défenderesses de la vente conditionnelle (ou l'exercice du droit de retour inhérent au contrat estimatoire) avait créé un rapport d'échange comparable à une vente, en ce sens que les défenderesses - à l'égal d'un vendeur - devaient livrer la chose "vendue" à la demanderesse (i.e. lui restituer les tapis), tandis que cette dernière devait leur en payer le prix (i.e. leur rembourser l'acompte de 130'000 fr.), tel un acheteur. Dans ce cas de figure, c'était bien à la demanderesse de supporter et le risque de la prestation (i.e. l'impossibilité objective pour les défenderesses d'exécuter l'obligation de livraison des tapis "vendus") et le risque du prix (i.e. l'obligation pour la demanderesse de rembourser l'acompte versé par les "venderesses"), par une application analogique de la règle periculum est emptoris. Pour le reste, il était conforme à la nature et au but du rapport de liquidation que la demanderesse ne doive pas payer aux défenderesses un montant supérieur à celui de l'acompte, faute de quoi le statu quo ante n'eût pas été rétabli. 
 
Cela étant, il convient d'examiner les arguments avancés par la demanderesse à l'appui de son affirmation selon laquelle elle n'a jamais été mise valablement en demeure de reprendre les 23 tapis. 
9.1.3 
9.1.3.1 Selon l'art. 91 CO, le créancier est en demeure, notamment, lorsqu'il refuse sans motif légitime d'accepter la prestation qui lui est régulièrement offerte. 
 
Le débiteur doit offrir d'accomplir sa prestation. En principe, son offre doit être réelle. Il en va ainsi pour une dette portable: le débiteur doit avoir amené la chose au lieu de l'exécution. Une offre verbale suffit toutefois lorsque la dette est quérable ou encore dans d'autres hypothèses telles que le refus manifesté d'emblée par le créancier d'accepter la prestation (ATF 111 II 463 consid. 5a p. 469; Von Tuhr/Escher, op. cit., p. 71, 2e §; Denis Loertscher, Commentaire romand, n. 14 ad art. 91 CO; Pierre Engel, Traité des obligations en droit suisse, 2e éd., p. 663). 
9.1.3.2 La demanderesse conteste que l'offre de restitution faite par les défenderesses ait satisfait à ces exigences. Elle fait valoir que, l'obligation de restitution étant une dette portable, les défenderesses ne pouvaient pas la mettre en demeure de venir reprendre les tapis à leur entrepôt, mais auraient dû apporter ceux-ci à l'endroit fixé d'un commun accord par les parties (l'atelier du dénommé N.________), voire les ramener au port franc. La demanderesse soutient, par ailleurs, que les défenderesses n'ont jamais eu la volonté de lui restituer les tapis. Elle en veut pour preuve le fait qu'elles en ont cédé un postérieurement aux prétendues mises en demeure et que l'on ignore le sort des deux tapis qui n'ont pas été volés. 
Cette argumentation, qui repose sur un fait non constaté par la cour cantonale - l'existence d'un accord concernant le lieu de restitution des tapis (i.e. l'atelier précité) - et qui revêt en outre un caractère manifestement appellatoire, ne résiste pas à l'examen. Premièrement, il n'est pas démontré que l'obligation de restitution des tapis soit une dette portable. La loi, au contraire, en fait une dette quérable (art. 74 al. 2 ch. 2 CO; cf. ATF 119 II 437 consid. 2b p. 439; 109 II 26 consid. 4a). Ensuite, il faut admettre, avec les juges genevois, que la demanderesse a d'emblée refusé de reprendre les tapis au motif, erroné, que ceux-ci avaient été vendus ferme aux défenderesses. C'est dire que l'intéressée est malvenue de contester la régularité d'une offre à laquelle elle n'entendait de toute façon pas donner suite pour une raison qui n'était pas soutenable. Enfin, on ne voit pas ce qui autorise la demanderesse à mettre en doute la volonté effective des défenderesses de lui restituer les tapis qu'elles ont manifestée une première fois le 16 décembre 1987 et confirmée à deux reprises (le 28 décembre 1987 et le 29 juin 1988). Que les défenderesses aient saisi ultérieurement (le 10 août 1988) une occasion qui s'était présentée à elles de vendre l'un des tapis à un tiers ne signifie pas que la demanderesse pouvait inférer de bonne foi de cette circonstance, et sans les interpeller, qu'elles avaient renoncé définitivement à lui restituer les 25 tapis restants. Pareille intention serait d'ailleurs démentie par le fait que, dans leur mémoire de réponse du 27 avril 1989, les défenderesses ont offert derechef à la demanderesse de lui restituer lesdits tapis contre remboursement de l'acompte versé par elles et imputation de la valeur du tapis vendu. 
9.1.4 Force est de constater, dans ces conditions, que la demanderesse se trouvait en demeure d'accepter la restitution des 23 tapis au moment où ceux-ci ont été volés. Par conséquent, pour les motifs sus-indiqués, la Cour de justice n'a pas violé le droit fédéral en considérant que les défenderesses étaient en droit d'exiger le remboursement de l'acompte de 130'000 fr. qu'elles lui avaient versé. 
10. 
10.1 Lorsque le débiteur, libéré par l'impossibilité subséquente d'exécuter son obligation en raison de circonstances qui ne lui sont pas imputables (art. 119 al. 1 CO), obtient des valeurs de remplacement (stellvertretendes Commodum), telles qu'une indemnité d'assurance, le créancier de la prestation impossible peut exiger qu'il les lui remette (ATF 112 II 235 consid. 4c; Thévenoz, op. cit., n. 20 ad art. 119 CO). 
 
En application de ce principe, les défenderesses, dans leurs conclusions reconventionnelles, ont déduit - à juste titre - de l'acompte dont elles réclament le remboursement, les indemnités d'assurance qui leur ont été versées, plus précisément la part de celles-ci afférente aux tapis volés. 
 
Il s'agit d'examiner encore si la demanderesse peut les tenir responsables du fait que ces indemnités ne couvraient pas la valeur de la marchandise non restituée (cf. consid. 10.2 ci-dessous) et, dans l'affirmative, de déterminer l'incidence de la mauvaise exécution du mandat sur le droit des mandataires au remboursement de leurs impenses (cf. consid. 10.3. ci-dessous). 
10.2 
10.2.1 Pour contester toute responsabilité en rapport avec la couverture d'assurance insuffisante des tapis volés, les défenderesses avancent les arguments résumés ci-après. 
 
Il était contraire aux principes d'interprétation des contrats d'admettre - à l'instar de la cour cantonale - que l'obligation d'assurer les tapis, incluse dans le contrat de base (consignation ou vente conditionnelle), découlait d'un mandat, conclu entre la demanderesse (mandante) et la défenderesse n° 1 (mandataire), qui serait venu se greffer sur ledit contrat. En effet, la clause concernant l'assurance de la marchandise figure sur les factures matérialisant l'accord relatif à la remise des tapis. Il n'est du reste pas constaté que les parties aient compris ladite obligation comme résultant d'un mandat. 
 
Le créancier en demeure peut se trouver simultanément en demeure comme débiteur. Il en va ainsi en l'espèce, la demanderesse ayant une véritable obligation de prêter son concours pour la restitution des tapis et de rembourser l'acompte. Aussi les défenderesses pouvaient-elles se départir du contrat en conformité avec l'art. 107 al. 2 in fine CO, ce qu'elles ont fait par leurs courriers des 11 décembre 1987, 28 décembre 1987 et 29 juin 1988. L'obligation d'assurer s'est donc éteinte à ce moment-là. Il en irait de même du mandat, au cas où l'on admettrait l'existence de deux contrats superposés, la déclaration de résolution du contrat de base ne pouvant être comprise de bonne foi par son destinataire que comme une répudiation simultanée du mandat, possible en tout temps (art. 404 al. 1 CO). Par conséquent, la cour cantonale ne pouvait pas condamner les défenderesses à réparer le dommage lié à la sous-assurance d'une marchandise qui avait été volée postérieurement à l'extinction de l'obligation de l'assurer. 
 
Quoi qu'il en soit, une interprétation conforme au principe de la confiance ne permet pas de retenir que l'engagement pris par un consignataire/acheteur d'assurer la marchandise sans limite dans le temps devrait survivre à la demeure du créancier et même à la résolution du contrat de base. 
10.2.2 Les défenderesses se sont engagées envers la demanderesse à "assurer la marchandise contre le feu et le vol". Elles attachent de l'importance au fondement juridique dudit engagement: obligation accessoire incluse dans le contrat de base ou obligation autonome découlant d'un mandat ad hoc. Il ne ressort toutefois pas de leurs explications que le choix entre l'un des deux fondements envisageables impliquerait une réponse différente à la question de la durée de cet engagement. C'est plutôt à la conclusion inverse que semble conduire leur thèse voulant que le mandat superposé partage le sort du contrat de base sous-jacent en cas de résolution de ce dernier. Au demeurant, bien qu'elle utilise le verbe "superposer", la cour cantonale a vraisemblablement voulu dire, en réalité, que l'obligation d'assurer dérivant du contrat de base était soumise aux règles du mandat. Elle écrit, en effet, que ladite obligation a été valablement "incluse dans le contrat liant les parties" et se réfère à un arrêt genevois où ces règles-là ont été appliquées pour mettre au jour une éventuelle violation de l'engagement d'une partie, pris dans un contrat de prêt, de souscrire une assurance au profit de l'autre (cf. SJ 1999 p. 400 ss, spéc. p. 406 consid. 3.2 in fine et consid. 4). Force est encore de souligner que les défenderesses ne précisent pas en quoi la décision à rendre sur le fond - i.e. du point de vue du respect de l'engagement litigieux - serait différente si l'on appliquait l'art. 97 CO (hypothèse de l'engagement inclus dans le contrat de base) plutôt que l'art. 398 CO (hypothèse de l'engagement résultant d'un mandat distinct) pour juger de la violation de l'obligation (accessoire, resp. autonome) d'assurer la marchandise. 
 
La thèse des défenderesses ne convainc pas davantage en tant qu'elle trouve appui dans les dispositions traitant de la demeure du débiteur. Que les conditions matérielles d'une telle demeure aient été réalisées en la personne de la demanderesse et que les défenderesses se soient départies valablement du contrat au regard de l'art. 107 al. 2 in fine CO est déjà sujet à caution. A supposer que tel ait été le cas, la résolution du contrat n'en laissait pas moins subsister les obligations accessoires résultant de la bonne foi dans la mesure utile à la liquidation du rapport contractuel (Thévenoz, op. cit., n. 13 ad art. 109 CO), comme celle de prendre soin de la marchandise à restituer et de maintenir provisoirement sa couverture d'assurance. Les défenderesses ne pourraient donc pas se prévaloir, dans ce cas de figure, de la seule résolution du contrat pour s'affranchir de toute responsabilité liée au défaut de couverture d'assurance suffisante. 
 
Quoi qu'il en soit, les art. 102 à 109 CO relatifs à la demeure du débiteur étant de nature essentiellement dispositive (Thévenoz, op. cit., n. 9 ad art. 102 CO), rien n'empêchait les parties de stipuler le maintien de l'obligation d'assurer les tapis jusqu'à la restitution effective de ceux-ci ou leur paiement intégral, sans égard à la demeure de la partie tenue d'accepter cette restitution. Or, selon la cour cantonale, tel serait effectivement le sens à donner à la clause topique incluse dans le contrat de base. Les juges genevois ont fait une saine application du principe de la confiance pour aboutir à cette conclusion. Ils ont mis en évidence l'absence de limite temporelle expresse dans le texte de la clause en question, le but assigné à celle-ci (garantir une couverture sans lacune des risques assurés, quelle que soit la personne en possession de la marchandise) ainsi que les inconvénients liés à une extinction de l'obligation d'assurer avant la restitution des tapis. Ils ont encore indiqué les motifs pour lesquels leur interprétation n'imposait pas au débiteur de l'obligation de restituer de se soumettre purement et simplement au bon vouloir du créancier de cette obligation. Il convient de leur emboîter le pas. 
 
En tout état de cause, si l'on admettait, avec les défenderesses, qu'il leur était loisible de mettre un terme à leur obligation d'assurer les tapis avant la restitution de ceux-ci, pour quelque motif que ce fût, il faudrait également admettre, en vertu du principe de la bonne foi en affaires, qu'elles ne pouvaient pas le faire sans en avertir la demanderesse et lui donner ainsi l'occasion de prendre toutes mesures utiles pour protéger la marchandise contre les risques jusque-là assurés. A cet égard, la simple dénonciation du contrat de base ne permettait manifestement pas à la demanderesse d'admettre qu'il était mis fin à l'assurance des tapis et qu'elle devait désormais assumer seule les conséquences de la survenance de semblables risques. On en veut pour preuve, a contrario, le fait que la couverture d'assurance a été maintenue par les défenderesses jusqu'à la survenance du vol. 
Pour le surplus, les défenderesses ne s'en prennent pas aux considérations, d'ailleurs pertinentes, que la cour cantonale a émises au sujet des conditions de leur responsabilité du chef de la sous-assurance des tapis. Il faut dès lors retenir, à la suite des juges genevois, que la demanderesse pouvait leur réclamer une indemnité correspondant à l'intérêt qu'elle avait à la bonne exécution de l'obligation d'assurer cette marchandise. 
10.3 
10.3.1 La Cour de justice a imputé, sur les dommages-intérêts positifs alloués à la demanderesse, un montant de 16'474 fr. correspondant à une partie des frais d'avocat relatifs au procès que la défenderesse n° 1 avait intenté à la compagnie d'assurances couvrant le risque de vol des tapis. 
 
Dans ses recours joints, la demanderesse soutient qu'elle ne saurait être tenue de rembourser de telles impenses pour la raison, notamment, que le but de la clause d'assurance incluse dans le contrat de base était de lui permettre de recevoir la pleine contre-valeur de la marchandise, "sans déduction quelconque". Le passage de l'arrêt n° 2 auquel elle se réfère pour étayer sa thèse ne lui est toutefois d'aucun secours. En effet, s'il y est bien question d'une couverture des risques "sans lacune" (p. 22, 2e §), il ressort du contexte que la cour cantonale, en utilisant ces mots, avait en vue la validité dans le temps de l'obligation d'assurance et non pas l'étendue matérielle du risque assuré. 
 
La clause d'assurance elle-même ne prévoit pas de dérogation à l'obligation de remboursement des impenses du mandataire énoncée par la règle dispositive de l'art. 402 al. 1 CO. Dans le silence du texte, la défenderesse n° 1 ne devait pas nécessairement inférer des circonstances ayant entouré la conclusion du contrat comportant la clause d'assurance qu'il lui appartiendrait de prendre en charge toutes les dépenses liées au recouvrement de la prestation d'assurance. Que l'intéressée se soit abstenue de réclamer à la demanderesse le remboursement des primes d'assurance et du montant de 25'000 fr. - relatif à l'un des éléments de la transaction signée le 19 avril 1993 (voir plus haut, sous let. B.b, avant-dernier §) - imputé sur l'indemnité versée par la compagnie d'assurances n'est à cet égard pas décisif, car cette abstention peut s'expliquer par d'autres raisons, en particulier par le simple oubli ou la méconnaissance de ses droits. 
 
Dès lors, la défenderesse n° 1 pouvait exiger le remboursement de ses impenses pour autant que les conditions de l'art. 402 al. 1 CO fussent réalisées. 
10.3.2 
10.3.2.1 En vertu de l'art. 402 al. 1 CO, le mandant doit rembourser au mandataire, en principal et intérêts, les avances et frais que celui-ci a faits pour l'exécution régulière du mandat. 
 
Le qualificatif "régulière", utilisé par le législateur, est équivoque dans la mesure où il pourrait donner à penser que le mandataire perd tout droit au remboursement de ses impenses dès le moment où il doit répondre d'une mauvaise exécution du mandat engageant sa responsabilité envers le mandant. C'est aussi la conclusion qui paraît s'imposer à la lecture du passage topique du précédent cité par la demanderesse (ATF 110 II 283 consid. 3a, 1er §, p. 285). Telle n'est pourtant pas la véritable signification de la disposition considérée. Il faut, en effet, comprendre l'expression "exécution régulière du mandat" en ce sens que, pour être remboursable, une impense doit avoir été objectivement nécessaire à l'exécution du mandat ou correspondre aux instructions du mandant (cf. parmi d'autres: Tercier, op. cit., n. 4755; Waler Fellmann, Commentaire bernois, n. 37 ad art. 402 CO). Il n'en allait pas ainsi, dans le susdit arrêt, car le mandataire exigeait le remboursement de frais consentis en rapport avec l'exécution défectueuse d'un ordre de virement. En revanche, il est admis que les impenses du mandataire peuvent lui être remboursées, même en cas d'exécution défectueuse du mandat, lorsque les effets de celle-ci ont été corrigés par l'octroi de dommages-intérêts positifs et à la condition que l'exécution correcte du mandat eût engendré les mêmes dépenses (Fellmann, op. cit., n. 81 ad art. 402 CO). La jurisprudence applique d'ailleurs les mêmes principes en ce qui concerne la rémunération due au mandataire (ATF 124 III 423 consid. 3b p. 426 et consid. 4a). 
10.3.2.2 En l'espèce, la défenderesse n° 1 a certes violé ses obligations de mandataire en sous-assurant les tapis. Mais les effets de cette violation ont été corrigés puisque les défenderesses ont été condamnées à réparer le préjudice subi par la demanderesse en raison de la sous-assurance de la marchandise, c'est-à-dire à lui verser des dommages-intérêts positifs équivalant à la valeur d'assurance des tapis. Rien ne s'oppose donc à ce que la défenderesse n° 1 obtienne le remboursement des frais d'avocat qu'elle a dû payer pour peu qu'elle eût aussi été amenée à consentir le même sacrifice financier si elle avait souscrit une police d'assurance prévoyant une couverture suffisante de la marchandise assurée. Or, tel est bien le cas. La Cour de justice retient en effet, au sujet du procès ayant opposé la défenderesse n° 1 à la compagnie d'assurance, que ce "procès (...), à l'évidence, aurait eu lieu aussi dans l'hypothèse où les marchandises volées auraient été assurées à leur pleine valeur". En d'autres termes, les juges genevois ont exclu l'existence d'une relation de causalité entre l'omission d'assurer suffisamment les tapis, imputable à la défenderesse n° 1, et la nécessité dans laquelle cette dernière s'est trouvée de procéder par la voie judiciaire pour obtenir l'indemnité d'assurance. On est en présence d'une constatation, relative à l'absence de causalité d'une omission, qui ne se fonde pas uniquement sur l'expérience générale de la vie et qui lie, par conséquent, la juridiction fédérale de réforme (cf. ATF 115 II 440 consid. 5b). 
10.3.2.3 Outre qu'elles reposent essentiellement sur des faits qui n'ont pas été constatés dans les deux arrêts attaqués, comme le démontrent les défenderesses dans leurs réponses aux recours joints, les objections avancées par la demanderesse pour s'opposer au remboursement des frais d'avocat payés par la défenderesse n° 1 ne peuvent pas être accueillies. 
 
Force est d'écarter d'emblée toutes celles qui se rapportent de près ou de loin au problème de la sous-assurance. Le même sort doit être réservé à celles qui concernent le comportement adopté par la défenderesse n° 2 à l'égard de son propre assureur, la demanderesse n'ayant nullement établi en quoi ce comportement aurait influé peu ou prou sur le procès générateur des frais d'avocat litigieux. 
 
La demanderesse cherche encore à démontrer que les deux défenderesses, et surtout la défenderesse n° 1, n'auraient pas agi dans son intérêt, en souscrivant les polices d'assurance et en faisant valoir les droits qui en découlaient, mais dans leur propre intérêt. Pour étayer sa démonstration, elle souligne que les défenderesses ont conclu les polices d'assurance avant d'entrer en relation d'affaires avec elles, qu'elles n'ont déclaré le sinistre qu'à hauteur de l'acompte de 130'000 fr. versé par elles et qu'elles ont attendu jusqu'en 2002 avant d'admettre pour la première fois le principe du transfert à la mandante des indemnités d'assurances perçues par elles. A cette tentative de démonstration on opposera d'emblée la constatation suivante des juges cantonaux: "... c'est partiellement dans l'intérêt de l'intimée [i.e. la demanderesse], mandante, que l'appelante n° 1 [i.e. la défenderesse n °1], mandataire, a engagé un procès contre son assureur; la conduite du procès était même commandée par le devoir de diligence" (arrêt n° 2, p. 25, dernier §). Sans doute la défenderesse n° 1 n'a-t-elle pas agi exclusivement dans l'intérêt de la demanderesse. Mais cela s'explique déjà par le fait que, au nombre des choses dérobées et assurées contre le vol auprès de la même compagnie d'assurances que celle qui couvrait le risque de vol des tapis de la demanderesse, figuraient des marchandises qui étaient sa propriété. Déterminer le motif pour lequel la défenderesse n° 1 a intenté un procès à son assureur n'est d'ailleurs pas nécessaire. Seul est décisif le point de savoir si les circonstances commandaient objectivement de saisir la justice. Or, la cour cantonale a répondu par l'affirmative à cette question en posant une constatation de fait qui lie la juridiction fédérale de réforme. Il va sans dire, au demeurant, que, si la défenderesse n° 1, libérée de son obligation de restituer les tapis en raison de l'impossibilité objective d'exécuter cette obligation (art. 119 al. 1 CO), n'avait pas recherché son assureur, elle eût engagé sa responsabilité de mandataire envers la demanderesse, puisque cette dernière aurait dû assumer seule la perte de ses tapis, n'ayant aucune créance à faire valoir au titre du contrat de base. 
 
La défenderesse n° 1 ne pourrait pas exiger le remboursement des frais d'avocat au cas où la nécessité d'en appeler au juge aurait été la conséquence d'une circonstance à elle imputable. En effet, il faudrait alors admettre que, dans l'hypothèse inverse, elle aurait touché l'indemnité d'assurance sans avoir à entreprendre de démarches judiciaires ni, partant, à consentir de tels frais. C'est sous cet angle que la demanderesse argumente lorsqu'elle soutient que le procès ayant opposé la défenderesse n° 1 à sa compagnie d'assurances résulte du seul comportement de la prénommée, qui devrait se laisser opposer une réticence. Cependant, l'arrêt n° 2 ne contient aucune constatation permettant d'imputer semblable négligence à l'intéressée. La cour cantonale y relate certes que l'assureur a refusé de verser une quelconque indemnité en "alléguant une réticence au moment de la conclusion du contrat d'assurance et un manquement à la diligence requise", mais elle ajoute ce qui suit: "... le Tribunal de première instance, par jugement du 11 février 1993, a rejeté ces griefs ..." (p. 7, 2e §). Dans la mesure où la demanderesse conteste cette dernière conclusion en soutenant que la réticence a été admise dans ledit jugement, elle formule un grief qui a trait à l'appréciation des preuves et qui échappe à l'examen de la juridiction fédérale de réforme. 
10.3.2.4 Il résulte de ce qui précède que les frais d'avocat afférents au procès ayant conduit au jugement du 11 février 1993 doivent être considérés comme des impenses objectivement nécessaires à l'exécution du mandat confié par la demanderesse à la défenderesse n° 1. Celle-là était dès lors tenue de les rembourser à celle-ci. Comme elle ne remet pas en cause le montant retenu de ce chef par la cour cantonale, il n'y a pas lieu de vérifier le calcul effectué par cette autorité. 
10.3.3 La compagnie d'assurances avait appelé du jugement la condamnant à verser 200'000 fr. à la défenderesse n° 1. Toutefois, elle a retiré son appel en exécution d'une transaction signée le 19 avril 1993 dans laquelle l'assurée a, notamment, renoncé à l'indemnité de procédure de 20'000 fr. qui lui avait été allouée en première instance à titre de participation aux honoraires de son avocat. 
 
Devant la cour cantonale, la demanderesse s'est prévalue de cette circonstance pour s'opposer au remboursement des frais d'avocat litigieux. Comme l'ont bien vu les juges genevois, elle y a fait valoir en réalité une violation du mandat en reprochant à son mandataire (la défenderesse n° 1) d'avoir disposé sans droit d'une créance contre un tiers (une partie de l'indemnité de procédure à payer par la compagnie d'assurances), qui était devenue ipso jure la propriété de la mandante en vertu de la cession légale prévue par l'art. 401 al. 1 CO. Et c'est cette créance, fondée sur la responsabilité du mandataire (art. 398 CO), que la demanderesse entendait opposer en compensation à la créance de la défenderesse n° 1 visant au remboursement de ses impenses (i.e. ses frais d'avocat). 
 
Selon les juges précédents, il incombait à la demanderesse de démontrer en quoi la conclusion de la transaction aurait constitué une violation des devoirs contractuels de la défenderesse n° 1. Or, elle n'a pas réussi à apporter cette preuve. En effet, l'issue d'un procès est aléatoire, à de rares exceptions près, et il paraît très raisonnable de garantir le capital alloué par un jugement de première instance même au prix d'une renonciation aux dépens. 
 
La cour cantonale n'a pas méconnu les règles régissant le fardeau de la preuve. Il appartient effectivement au mandant d'établir que le mandataire a violé l'une des obligations qui lui incombent (cf. parmi d'autres: Tercier, op. cit., n. 4727). Dans ses recours joints, la demanderesse ne démontre nullement en quoi la conclusion de la transaction litigieuse portait atteinte à ses intérêts. Elle se réfère certes à une circonstance - le fait que la compagnie d'assurances aurait laissé périmer son droit d'invoquer la réticence - qui, à son avis, donnait à la défenderesse n° 1 de grandes chances de triompher en appel. Il s'agit là, toutefois, d'un élément de fait qui ne ressort pas des constatations figurant dans l'arrêt n° 2. Quant à la déduction d'un montant de 25'000 fr. sur l'indemnité d'assurance allouée à la défenderesse n° 1, qui constituait un autre élément de la transaction, la demanderesse ne saurait rien en déduire en faveur de sa thèse. En effet, la Cour de justice n'a pas tenu compte de cette circonstance, puisqu'elle a condamné les défenderesses à verser à la demanderesse un montant correspondant à la valeur d'assurance totale des tapis volés. 
 
La demanderesse ne prétend pas avoir donné des instructions précises à la défenderesse n° 1 quant à la conduite du procès opposant cette dernière à son assureur (cf. art. 397 al. 1 CO), pas plus qu'elle ne lui dénie a posteriori le droit d'avoir intenté le procès, puis transigé, sans un pouvoir spécial (art. 396 al. 2 CO). Elle relève simplement que la défenderesse n° 1 aurait au moins dû l'informer de la situation et prendre son avis sur la nécessité de poursuivre le procès en appel. Dans la mesure où elle laisse entendre par là avoir été tenue dans l'ignorance des démarches accomplies par la défenderesse n° 1 au cours dudit procès, elle allègue un fait qui va au-delà des constatations des juges précédents et qui ne peut donc pas être retenu. Aussi bien, on ne saurait tirer du silence des magistrats cantonaux sur ce point la conclusion nécessaire voulant que la mandante n'ait pas été informée de l'existence et de l'avancement de la procédure entre l'assurée et son assureur. Il n'y a pas lieu non plus de renvoyer le dossier à la cour cantonale pour qu'elle complète ses constatations à ce sujet dès lors que la demanderesse ne précise pas si et, le cas échéant, où elle a allégué ne pas avoir reçu les susdites informations de la part de la défenderesse n° 1. 
 
Le moyen pris de la violation des devoirs du mandataire n'est dès lors pas fondé. 
10.3.4 Dans le cadre du même complexe de griefs et bien qu'ils n'aient rien de commun avec les autres moyens examinés ci-dessus, la demanderesse soulève encore incidemment deux autres griefs. 
Le premier a trait au point de départ des intérêts, lequel devrait être fixé, à son avis, au 30 décembre 1987, pour toutes ses prétentions. La demanderesse rappelle, à ce propos, qu'elle a invité les défenderesses à lui payer la somme de 200'000 fr. par courrier du 16 décembre 1987 déjà. En argumentant ainsi, elle feint d'ignorer qu'elle avait réclamé ce montant au motif que les 26 tapis auraient fait l'objet d'une vente ferme aux défenderesses. Tel n'était pas le cas, comme on l'a exposé plus haut. En réalité, c'est elle qui s'est trouvée par la suite en demeure d'accepter la restitution des tapis, et elle ne peut prétendre qu'au versement de l'indemnité d'assurance correspondant à la valeur d'assurance des tapis volés (stellvertretendes Commodum), respectivement au paiement de dommages-intérêts destinés à remplacer la partie de l'indemnité non versée en raison de la sous-assurance de la marchandise. Aussi, en fixant le point de départ des intérêts au moment où la compagnie d'assurances avait versé la somme fixée par transaction à la défenderesse n° 1, les juges genevois n'ont-ils pas violé le droit fédéral. 
 
La demanderesse conteste en second lieu l'imputation sur sa créance des 14'000 fr. ( 2 x 7'000 fr.) qu'elle a été condamnée à verser à la défenderesse n° 2 au titre des dépens pour les procédures ayant abouti aux arrêts du Tribunal fédéral rendus le 24 août 1998 dans les causes 4P.169/1994 et 4C.233/1994. Cependant, on cherche en vain l'indication de la disposition du droit fédéral que la cour cantonale aurait pu violer en procédant à cette déduction. Le grief en question est, en conséquence, irrecevable. De toute manière, on ne voit pas pourquoi ladite créance - exigible (cf. art. 38 OJ) - ne pouvait pas être opposée en compensation par son titulaire pour éteindre à concurrence du montant précité sa dette envers la demanderesse, débitrice des dépens. 
11. 
La Cour de justice se voit enfin reprocher d'avoir violé le droit fédéral à différents égards en fixant le taux de l'intérêt moratoire à 5% alors que les parties étaient d'accord pour appliquer un taux de 6%. 
 
Dans ses dernières écritures déposées en première instance, la demanderesse a formulé des conclusions tendant au paiement des sommes qu'elle estimait lui être dues par les défenderesses. Elle a en outre réclamé des intérêts au taux de 5% (conclusions motivées après enquêtes du 2 décembre 2002). Le Tribunal de première instance, dans son jugement du 20 mars 2003, a porté en compte des intérêts au taux de 5%. Devant l'instance d'appel, la demanderesse et intimée a conclu à la confirmation du jugement en question. Il ressort de ces constatations que, dans la dernière instance cantonale, ladite partie a pris des conclusions tendant à l'application d'un taux d'intérêts de 5%. En réclamant, dans ses recours joints, que ce taux soit fixé à 6% - ce qui revient à augmenter ses prétentions -, elle prend donc une conclusion nouvelle, ce qui n'est possible ni dans un recours en réforme ni dans un recours joint (art. 55 al. 1 let. b OJ et art. 59 al. 3 OJ en liaison avec l'article précité). Cet ultime grief est dès lors irrecevable. 
12. 
Pour les motifs sus-indiqués, chacun des quatre recours formellement séparés soumis à l'examen du Tribunal fédéral devra être rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, avec suite de frais et dépens pour son auteur (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Les recours en réforme interjetés par X.________ SA et Y.________ SA sont rejetés dans la mesure où ils sont recevables. 
2. 
Les recours en réforme joints interjetés par A.________ sont rejetés dans la mesure où ils sont recevables. 
3. 
Un émolument judiciaire de 5'000 fr. est mis à la charge de chacune des défenderesses. 
4. 
Un émolument judiciaire de 4'000 fr. est mis à la charge de la demanderesse. 
5. 
Chacune des défenderesses est condamnée à verser à la demanderesse une indemnité de 6'000 fr. à titre de dépens. 
6. 
La demanderesse est condamnée à verser à chacune des défenderesses une indemnité de 2'500 fr. à titre de dépens. 
 
7. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
Lausanne, le 11 janvier 2005 
Au nom de la Ire Cour civile 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: