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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
8C_859/2018  
 
 
Arrêt du 6 septembre 2019  
 
Ire Cour de droit social  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Maillard, Président, Heine et Abrecht. 
Greffière : Mme Paris. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Charles Guerry, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Office de l'assurance-invalidité 
du canton de Fribourg, 
route du Mont-Carmel 5, 1762 Givisiez, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-invalidité (rente d'invalidité; évaluation de l'invalidité), 
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton de Fribourg, Cour des assurances sociales, du 29 octobre 2018 (605 2018 59). 
 
 
Faits :  
 
A.   
A.________, né en 1976, travaillait en tant que machiniste-grutier au service de la société B.________ SA. A ce titre, il était assuré obligatoirement contre le risque d'accident auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (ci-après: la CNA). Le 13 mars 2000, il a été victime d'un accident de la circulation routière lui causant des atteintes à la jambe droite, notamment au niveau des péroniers. Il a subi deux opérations, les 21 mars 2000 et 1er mars 2001. La CNA a pris en charge le cas. 
Dès le 14 juillet 2003, l'assuré a travaillé à plein temps au sein de la société C.________ Sàrl. Le 23 juin 2009, il a annoncé une rechute à la CNA, qui a pris le cas à sa charge. Le 13 novembre 2009, A.________ a bénéficié d'une révision de la plastie des péroniers droits en raison de la réapparition d'une symptomatologie douloureuse de la cheville et d'un phénomène de subluxation. L'évolution s'est avérée défavorable dès le troisième mois post-opératoire avec l'apparition d'importantes douleurs. Depuis cette intervention, l'assuré a été en incapacité de travail totale. Il a séjourné à la Clinique romande de réadaptation (CRR) du 9 juin au 13 juillet 2010 pour une rééducation stationnaire et une évaluation. Les médecins de la CRR ont diagnostiqué une possible algodystrophie (ou maladie de Sudeck) peu active de la cheville droite. 
Parallèlement à la procédure devant l'assurance-accidents, A.________ a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité le 2 juin 2010. Le 4 novembre 2010, l'office AI lui a reconnu le droit à la prise en charge du permis camion et remorques, qu'il a obtenu. 
Fin 2012, le docteur D.________, spécialiste en médecine interne et médecin traitant, a adressé A.________ au docteur E.________, spécialiste en anesthésiologie, pour des douleurs à forte connotation neuropathique du membre inférieur droit. Le 17 mars 2014, ce médecin a procédé à l'implantation d'un neurostimulateur, qu'il a remplacé le 13 avril 2015. A.________ a une nouvelle fois séjourné à la CRR, du 20 juin 2016 au 8 juillet suivant pour une évaluation multidisciplinaire et une rééducation. A l'issue de ce séjour, les médecins de la CRR ont retenu les limitations fonctionnelles orthopédiques suivantes: la marche sur terrains irréguliers et dans les escaliers, les marches très prolongées, les positions accroupies et à genoux, les activités sur des échelles et le port de charges lourdes en se déplaçant. Il existait également une limitation à la montée sur une échelle et à la position debout. En revanche, ils n'ont retenu aucune limitation à la position assise prolongée. Sur le plan professionnel, les médecins de la CRR ont retenu une capacité de travail entière dans l'activité de chauffeur de poids lourds pour laquelle l'assuré avait bénéficié d'un reclassement professionnel. Ils ont indiqué que le permis de l'assuré lui avait été retiré avant la pose du neurostimulateur en raison des résultats d'un examen neuropsychologique, à une époque où le recourant avait une médication antalgique, neuropathique et somatique conséquente, laquelle avait eu un effet sur ses performances. Toutefois, après la pose du neurostimulateur, la médication avait pu être simplifiée et adaptée et l'examen n'avait pas retrouvé de trouble au niveau du domaine cognitif, notamment pas de contre-indication neuropsychologique à la conduite automobile. En outre, concernant l'aptitude physique, le test effectué sur simulateur de conduite s'était révélé normal. 
Par décision du 26 juillet 2017, confirmée sur opposition le 29 septembre suivant, la CNA a refusé de verser à l'assuré une rente d'invalidité au motif que la perte de gain présentée était inférieure à 10 %, mais lui a alloué une indemnité pour atteinte à l'intégrité d'un taux de 10 %. 
L'office AI a pour sa part alloué à A.________ une rente entière d'invalidité du 1er novembre 2010 au 31 août 2014; pour la période ultérieure, la rente était supprimée en raison d'un degré d'invalidité de 5,58 % (décision du 1er février 2018). 
 
B.   
A.________ a déféré la décision de l'office AI à la Ie Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal fribourgeois. En cours de procédure, il a produit un rapport du docteur D.________ du 18 décembre 2017. L'assuré a également recouru contre la décision sur opposition rendue par la CNA. 
Statuant le 29 octobre 2018, la cour cantonale a partiellement admis le recours de l'assuré contre la décision de l'office AI du 1er février 2018; elle a modifié la décision entreprise en ce sens que le recourant avait droit à une rente entière de l'assurance-invalidité du 1er décembre 2010 au 31 octobre 2016. Par jugement du même jour, elle a rejeté le recours dirigé contre la décision sur opposition de la CNA (cause 605 2017 241). 
 
C.   
A.________ interjette deux recours en matière de droit public contre ces jugements. En matière d'assurance-invalidité, il conclut principalement à l'octroi d'une rente entière d'invalidité au-delà du 31 octobre 2016. Subsidiairement, il demande qu'une rente entière d'invalidité lui soit octroyée jusqu'au 31 octobre 2016 et que la cause soit renvoyée à l'office AI pour la mise en oeuvre d'une nouvelle expertise médicale bidisciplinaire (orthopédique et neurologique) afin de déterminer sa capacité de travail résiduelle à partir du 8 juillet 2016. 
L'intimé et la cour cantonale ont déclaré n'avoir pas de remarques particulières à formuler. Quant à l'Office fédéral des assurances sociales, il a renoncé à se déterminer. 
 
Considérant en droit :  
 
 
1.   
Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière de droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable. 
 
2.   
Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral fonde son raisonnement sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), à moins que ces faits n'aient été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 140 III 264 consid. 2.3 p. 266) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). 
 
3.   
Le litige porte sur le maintien éventuel du droit du recourant à une rente de l'assurance-invalidité au-delà du 31 octobre 2016. A cet égard, le jugement entrepris expose de manière complète les règles légales et les principes jurisprudentiels, de sorte qu'il suffit d'y renvoyer. 
 
4.   
La cour cantonale a reconnu au recourant une pleine capacité de travail adaptée à ses limitations fonctionnelles dès le 8 juillet 2016, soit depuis le dernier jour de son deuxième séjour à la CRR. 
 
5.  
 
5.1. Les premiers juges ont tout d'abord retenu que l'activité de chauffeur de poids lourds était compatible avec les limitations fonctionnelles du recourant. Pour ce faire, ils se sont fondés sur le rapport des médecins de la CRR auquel ils ont reconnu une pleine valeur probante. Ils ont constaté que leurs conclusions étaient corroborées par l'appréciation du docteur F.________, spécialiste en neurologie (rapport du 26 octobre 2016) et du docteur G.________, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur (avis du 17 novembre 2016), tous deux médecins-conseils de la CNA. Ils ont en outre considéré que ces conclusions n'étaient pas valablement remises en doute par l'avis des docteurs D.________ et E.________.  
La cour cantonale a ensuite déterminé le revenu d'invalide en se fondant sur les données de l'Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS) 2014, tableau TA1_skill_level, branches 49-52 "transports terrestres, par eau, aériens; entreposage", niveau de compétence 2 pour les hommes. Elle est parvenue à un revenu annuel de 72'287 fr. 20 (après adaptation à la durée hebdomadaire de travail [42,2 heures] selon la division économique [transports et entreposage] et l'évolution des salaires nominaux en 2016). La comparaison avec le revenu sans invalidité de 75'628 fr. 20, déterminé par le salaire figurant sur l'extrait de compte individuel de l'assuré pour l'année 2008 (indexé à l'évolution des salaires jusqu'en 2016), donnait un degré d'invalidité de 4 %, insuffisant pour ouvrir le droit à une rente. 
 
5.2. Invoquant une constatation inexacte et incomplète des faits, le recourant reproche à la juridiction précédente de s'être fondée sur le rapport des médecins de la CRR du 12 juillet 2016 dont il conteste la valeur probante. D'après lui, l'évaluation de la conduite effectuée lors du séjour à la CRR n'est pas pertinente dès lors que la résistance à l'effort n'a pas été testée. Il soutient en outre que les conclusions de ces médecins sont contredites par d'autres médecins, en particulier par le docteur E.________, lequel n'aurait nullement émis ses conclusions en se basant sur ses seules plaintes, mais en se fondant sur les nombreux examens cliniques effectués avant, pendant et après la pose du neurostimulateur. Il estime que la juridiction cantonale ne pouvait pas sans arbitraire retenir qu'il était apte à travailler à plein temps en tant que chauffeur de poids lourds. A tout le moins, elle aurait dû retenir qu'il existait de sérieux doutes quant à la fiabilité et la pertinence de l'avis des médecins de la CRR et mettre en oeuvre une expertise bidisciplinaire (orthopédique et neurologique) par un médecin indépendant.  
 
5.3. En l'espèce, le recourant a perdu sa capacité de gain dans sa profession de machiniste-grutier. Savoir s'il dispose d'une capacité de travail exigible en tant que chauffeur de poids lourds et le cas échéant à quel taux est une question qui peut rester indécise en l'état, car le recours doit de toute manière être rejeté pour les motifs qui suivent. Pour la même raison, il n'y a pas lieu de renvoyer la cause à l'autorité précédente pour nouvelle expertise médicale.  
 
6.  
 
6.1. La cour cantonale a constaté que même s'il fallait retenir que l'activité de chauffeur de poids lourds était inadaptée, le recourant ne pouvait se voir reconnaître le droit à une rente d'invalidité. Elle a en effet considéré que d'autres activités étaient exigibles, à plein temps, de sa part. Dans cette hypothèse, il fallait déterminer le revenu d'invalide en se fondant sur les données salariales statistiques ressortant de l'ESS 2014, singulièrement le total du tableau TA1_skill_level, niveau de compétence 1, pour les hommes. D'après les premiers juges, cette statistique comprenait un large éventail d'activités dont un nombre significatif était adapté aux limitations fonctionnelles reconnues par les différents médecins et aux aptitudes du recourant dans un marché du travail équilibré. Le niveau de compétence 1 permettait en outre de tenir compte de ce que le recourant ne possédait aucune formation. La cour cantonale est ainsi parvenue à un revenu d'invalide annuel de 67'052 fr. 40 (63'744 fr. adapté à l'évolution des salaires nominaux dans la branche et à la durée usuelle de travail de 41,7 heures par semaine en 2016). Après comparaison avec un revenu sans invalidité de 75'628 fr. 25, il en résultait un degré d'invalidité de 11 %, également insuffisant pour ouvrir le droit à une rente.  
 
6.2. Le recourant soutient d'une part que la juridiction précédente aurait dû tenir compte d'un taux d'activité de 35 % tel que retenu par le docteur E.________ dans son rapport du 18 janvier 2018. Il reproche, d'autre part, aux premiers juges de n'avoir retenu aucun abattement. D'après lui, ses limitations fonctionnelles auraient des incidences considérables même dans le cadre d'une activité légère. Il estime qu'il lui faudrait notamment plus de temps que ses collègues pour effectuer le même travail en raison du besoin fréquent de changer de position. Sa polyvalence serait également réduite, de sorte qu'aucun employeur n'accepterait de verser le même salaire qu'à une personne valide. Ainsi, le revenu d'invalide s'élèverait à 17'601 fr. (67'052 fr. 40 x 35 % x 75 %). Comparé au revenu sans invalidité de 75'628 fr. 25, on obtiendrait un degré d'invalidité de 76,72 %, donnant droit à une rente entière d'invalidité dès le 1er novembre 2016, pour une durée indéterminée.  
 
6.3. En l'espèce, s'agissant tout d'abord du taux d'activité exigible, selon les constatations des premiers juges, le docteur E.________ n'examine que les moyens d'adapter "l'activité professionnelle du patient", soit de rendre l'activité de chauffeur de poids lourds - exercée effectivement par le recourant - compatible avec son état de santé. Le recourant ne le conteste pas. Partant, la juridiction cantonale n'a pas fait preuve d'arbitraire en se fondant sur les autres avis médicaux concordants et en retenant une capacité de travail entière dans une activité adaptée. Concernant ensuite l'abattement, le grief du recourant doit être écarté. On doit en effet admettre que les limitations fonctionnelles qu'il présente n'ont pas d'incidence sur l'exercice des activités simples et légères qui restent exigibles de sa part. Un certain nombre d'entre elles ne requièrent pas de déplacement itératif (surtout sur terrain irrégulier), de station debout prolongée, de positions accroupies ou à genoux ni de port de charges lourdes.  
Il s'ensuit que le calcul effectué par la juridiction cantonale pour établir le revenu d'invalide de 67'323 fr. 25 ne prête pas le flanc à la critique. Il n'en va pas différemment du revenu sans invalidité de 73'842 fr. Le recourant ne soulève d'ailleurs aucune critique sur ce point. Le degré d'invalidité de 11 % auquel sont parvenus les premiers juges doit donc être confirmé. 
 
7.   
En conclusion, le recours doit être rejeté. Le recourant, qui succombe, supportera les frais de justice (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Fribourg et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 6 septembre 2019 
 
Au nom de la Ire Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Maillard 
 
La Greffière : Paris