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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 7} 
U 36/07 
 
Arrêt du 8 mai 2007 
Ire Cour de droit social 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Ursprung, Président, 
Leuzinger et Frésard. 
Greffière: Mme von Zwehl. 
 
Parties 
Helsana Assurances SA, Droit des assurances Suisse romande, chemin de la Colline 12, 1001 Lausanne, 
recourante, 
 
contre 
 
B.________, 
intimé, représenté par Me Jean-Marie Allimann, avocat, avenue de la Gare 41, 2800 Delémont. 
 
Objet 
Assurance-accidents, 
 
recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Chambre des assurances, du 18 décembre 2006. 
 
Faits: 
 
A. 
Le 16 novembre 1997, vers 4 heures du matin, B.________, né en 1956, aide-boucher à la Boucherie X.________, a été agressé par trois inconnus devant son domicile alors qu'il venait de garer sa voiture. Ceux-ci l'ont projeté à terre et roué de coups de bâtons avant de s'enfuir à la suite d'une intervention des voisins. B.________ a regagné seul son appartement. Sa femme l'a transporté le lendemain à l'hôpital Y.________ qui l'a transféré à l'hôpital Z.________. Il souffrait d'une fracture de la mâchoire qui a nécessité une opération le 28 novembre et de polycontusions (aux épaules, aux jambes, au bras gauche et à la main droite). Peu avant cette agression, il avait fait l'objet d'un racket de la part de l'organisation W.________ et avait refusé de payer la somme demandée. La compagnie Garanta (Suisse) Assurances SA (reprise par la suite par Helsana Accidents SA, ci-après : Helsana), auprès de laquelle il était assuré contre le ris-que d'accidents, a pris en charge le cas. 
 
Depuis l'agression, B.________ n'a plus repris son travail en raison essentiellement d'un état dépressif (cf. rapport du docteur A.________ du Centre médico-psychologique V.________). Une procédure pénale a été ouverte contre l'un des agresseurs, qui a été condamné à 14 mois de prison avec sursis pendant 4 ans pour lésions corporelles simples, tentative d'extorsion et de chantage, respectivement omission de prêter secours au préjudice de B.________ (jugement du 14 avril 2000 de la Cour pénale du Tribunal cantonal jurassien). Par ailleurs, l'assuré a été mis au bénéfice d'une rente d'invalidité entière avec effet au 1er novembre 1998 par l'Office AI du canton du Jura (décision du 7 septembre 2001). 
 
Le 13 décembre 2001, Helsana a rendu une décision par laquelle elle a mis un terme à ses prestations avec effet au 1er septembre 2001. L'assuré ayant formé opposition contre cette décision, Helsana a confié une expertise au docteur E.________, psychiatre, qui a posé le diagnostic d'épisode dépressif récurrent, épisode actuel léger, et estimé que le tableau clinique était imputable à 70 % à des facteurs étrangers à l'accident. Le 23 décembre 2002, l'assureur-accidents a rejeté l'opposition. 
 
B. 
B.a Par jugement du 30 septembre 2003, la Chambre des assurances du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura a admis le recours de l'assuré, annulé la décision sur opposition du 23 décembre 2002 et renvoyé le dossier à l'assureur-accidents pour instruction complémentaire et nouvelle décision. Ce jugement n'a pas été attaqué. 
 
Aussi Helsana a-t-elle chargé le Centre multidisciplinaire de la douleur U.________ d'une expertise psychiatrique. Se fondant sur ce rapport du 25 juin 2004, elle a derechef nié la poursuite du droit à des prestations au-delà du 31 août 2001 (décision du 27 décembre 2004, confirmée par décision sur opposition du 30 novembre 2005). 
B.b 
Saisi derechef d'un recours de B.________ et après avoir ordonné l'édition du dossier pénal, le tribunal cantonal a accueilli les conclusions du prénommé et condamné Helsana à verser les prestations requises au-delà du 1er septembre 2001, en particulier celles portant sur la prise en charge du traitement médical et de l'indemnité journalière (jugement du 18 décembre 2006). 
 
C. 
Helsana interjette recours de droit administratif contre ce dernier jugement, dont elle requiert l'annulation. 
 
Ni B.________ ni l'Office fédéral de la santé publique n'ont été invités à se déterminer sur le recours. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
La loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242). L'acte attaqué ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132 al. 1 LTF; ATF 132 V 395 consid. 1.2 p. 395). 
 
2. 
Le litige porte sur le point de savoir si la recourante était fondée, par sa décision sur opposition du 30 novembre 2005, à supprimer le droit de l'intimé à des prestations d'assurance à partir du 1er septembre 2001. 
 
3. 
Le jugement entrepris expose de manière exacte et complète les dispositions légales (dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002; cf. ATF 127 V 467 consid. 1) et les principes jurisprudentiels relatifs à l'exigence d'un lien de causalité naturelle et adéquate entre une atteinte à la santé physique et/ou psychique et un accident. Il suffit donc d'y renvoyer. 
 
4. 
En l'espèce, il est incontestable, au regard des pièces médicales au dossier, que les seules séquelles de l'accident susceptibles, le cas échéant, de fonder un droit à des prestations d'assurance à la charge de la recourante consistent en une atteinte à la santé psychique. 
 
5. 
5.1 Alors que les premiers juges ont limité leur examen à la question du rapport de causalité adéquate entre les troubles psychiques de l'assuré et l'accident, considérant que Helsana admettait l'existence d'un lien de causalité naturelle, celle-ci le conteste. S'appuyant sur les rapports des docteurs A.________, E.________ et L.________, elle soutient qu'un tel lien avait cessé d'exister au plus tard au 31 août 2001, voire au mois de novembre 1999 déjà. 
 
5.2 En l'occurrence et quoi qu'en dise la recourante, aucun des médecins psychiatres qui s'est prononcé sur le cas n'a démontré, de manière convaincante, la disparition du caractère causal de l'agression dont B.________ a été victime. On ne peut rien tirer à cet égard du rapport, peu motivé et plutôt équivoque, établi par le docteur A.________ du Centre médico-psychologique V.________ à l'intention des organes de l'AI. Quant au docteur E.________, s'il a certes exprimé l'opinion que l'état dépressif de l'assuré devait être rapporté pour l'essentiel à des facteurs étrangers à l'accident (état psychique défavorable préexistant), cela ne permet pas encore d'en inférer que l'accident n'y joue plus aucun rôle causal. Il en va de même de l'affirmation de la doctoresse L.________ du Centre multidisciplinaire de la douleur U.________ selon qui les troubles psychiques (anxiété généralisée [F41.1] et épisode dépressif moyen avec syndrome somatique [F32.11]), dont elle reconnaît au demeurant le rapport de cause à effet avec l'accident, « auraient dû disparaître dans l'espace de 2 ans, à la fin novembre 1999 ». C'est un fait que l'intimé souffre toujours desdits troubles et on ne constate rien dans les considérations médicales des psychiatres qui pourrait faire admettre que l'état psychique de l'intimé aurait évolué de la même manière sans l'événement assuré (status quo sine) nonobstant un état antérieur (la doctoresse L.________ parle de troubles mixtes de la personnalité dépendante et évitante [F61.0] jusqu'alors compensés). 
 
6. 
Il reste à examiner le lien de causalité adéquate. 
 
6.1 Les premiers juges ont estimé que l'on était en présence d'un accident de gravité moyenne, à la limite des accidents graves. De l'examen du dossier pénal, ils ont retenu que l'assuré avait fait l'objet d'une agression à la suite d'une tentative d'extorsion d'argent destinée à l'organisation W.________, de chantage et de menaces; l'agression s'était déroulée dans des circonstances inhabituelles (à 4h du matin trois inconnus habillés de noir l'avaient roué de coups tandis qu'il était à terre); enfin, les lésions subies (fracture de la mâchoire, contusions et hématomes de 7 cm de diamètre) montraient la violence de l'attaque qui avait fait craindre l'assuré pour sa vie. Ils en ont conclu que la nature de l'agression et les lésions subies étaient, d'un point de vue objectif, d'une « gravité certaine », ce qui les amenait à classer l'accident dans la catégorie de ceux de gravité moyenne à la limite du cas grave, et qu'il fallait dès lors aussi « considérer comme établi l'existence d'une relation de causalité adéquate [...] ». 
 
La recourante remet également en cause ces deux points du jugement attaqué. Selon elle, au regard du déroulement de l'événement (les agresseurs ont pris la fuite, l'assuré a pu rejoindre son domicile par ses propres moyens et s'est rendu à l'hôpital seulement le lendemain) et de l'intensité de l'atteinte qu'il a générée, il s'agit d'un accident de gravité moyenne. Plusieurs critères objectifs posés par la jurisprudence devaient donc être réunis pour faire admettre l'existence d'une relation de causalité adéquate, ce qui n'était pas le cas ici. 
 
6.2 En l'espèce, l'admission par les premiers juges du caractère adéquat des troubles psychiques dont l'intimé est encore atteint ensuite de son agression du 16 novembre 1997 n'est pas critiquable. A cet égard et par comparaison, le Tribunal fédéral des assurances a par exemple admis que cette condition fût remplie dans le cas d'une assurée qui avait développé un état psychique défavorable consécutivement à une agression commise par le fils de son compagnon lequel, après l'avoir jetée à terre, avait tenté de l'étrangler, lui avait frappé à plusieurs reprises la tête contre le sol et donné des coups de genoux dans le dos et les reins (RAMA 2001 n° U 440 p. 350 [arrêt U 9/00 du 28 août 2001]. Le tribunal avait retenu, d'une part, que cette agression faisait partie des accidents de gravité moyenne à la limite supérieure et, d'autre part, que le critère du caractère impressionnant de celle-ci avait revêtu en l'espèce une intensité particulière compte tenu de la brutalité et de l'imprévisibilité de l'attaque ainsi que de la disproportion des forces en présence, de sorte qu'il suffisait à lui seul pour l'on reconnaisse l'existence d'un lien de causalité adéquate. Or les circonstances dans lesquelles B.________ a été passé à tabac par trois inconnus en pleine nuit sont mêmes plus impressionnantes. L'intimé avait fait l'objet de menaces, de chantage et de tentative d'extorsion. Le lien entre ces menaces et l'agression n'a pas pu lui échapper sur le moment. Même si sa vie n'a jamais vraiment été mise en danger, il connaissait assurément la détermination de ses agresseurs et pouvait sérieusement craindre pour sa vie ou du moins pour une perte importante et permanente de son intégrité corporelle. Par conséquent, la responsabilité de la recourante reste engagée de ce chef même si aucun autre critère selon la jurisprudence topique en la matière (cf. ATF 115 V 133 consid. 6 c/aa p. 140) n'entre ici en ligne de compte. 
 
Le recours se révèle mal fondé. 
 
7. 
Vu la nature du litige, la procédure est gratuite (art. 134 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté. 
 
2. 
Il n'est pas perçu de frais de justice. 
 
3. 
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Chambre des assurances, et à l'Office fédéral de la santé publique. 
Lucerne, le 8 mai 2007 
Au nom de la Ire Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Président: p. la Greffière: