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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_395/2023  
 
 
Arrêt du 11 décembre 2023  
 
IIIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Parrino, Président, Stadelmann et Moser-Szeless. 
Greffière : Mme Perrenoud. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Jean-Michel Duc, 
avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, 
avenue du Général-Guisan 8, 1800 Vevey, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-invalidité, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 10 mai 2023 (AI 164/22 - 128/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Entre septembre 2002 et novembre 2018, A.________, né en 1962, a déposé successivement six demandes de prestations de l'assurance-invalidité, qui ont été rejetées par l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après: l'office AI) ou sur lesquelles celui-ci a refusé d'entrer en matière (cf., en dernier lieu, décision de non-entrée en matière du 10 juillet 2019, confirmée par arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, du 28 mai 2020). 
Le 23 juin 2020, l'assuré a annoncé à l'administration une aggravation de son état de santé, en indiquant qu'il lui transmettrait des rapports médicaux. Le 25 novembre 2020, le docteur B.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, a adressé un rapport à l'office AI, dans lequel il faisait état d'une aggravation de l'état de santé de son patient, en ce sens qu'il présentait, depuis sa prise en charge en juin 2020, un état dépressif sévère avec symptômes psychotiques et un trouble de la personnalité de type borderline. Le 14 juillet 2021, l'administration a adressé à l'assuré un formulaire officiel de demande de prestations, en lui impartissant un délai au 16 août 2021 pour le compléter et le retourner et en l'informant que, le cas échéant, la date du dépôt de la nouvelle demande serait fixée au 30 novembre 2020 (date de la réception du rapport du docteur B.________). L'assuré a transmis ledit formulaire à l'office AI le 12 août 2021. Après avoir notamment sollicité des renseignements auprès des médecins traitants de l'assuré (rapport du docteur B.________ du 30 novembre 2021, notamment), puis soumis ceux-ci à son Service médical régional (SMR; avis du docteur C.________ des 4 février et 2 mai 2022), l'office AI a rejeté la nouvelle demande (décision du 23 mai 2022). 
 
B.  
Statuant le 10 mai 2023 sur le recours formé par l'assuré contre cette décision, le Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, l'a rejeté. 
 
C.  
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre cet arrêt, dont il demande l'annulation, ainsi que celle de la décision du 23 mai 2022. Il conclut au renvoi de la cause à l'office AI pour instruction complémentaire et nouvelle décision. L'assuré sollicite également le bénéfice de l'assistance judiciaire. 
L'office AI conclut au rejet du recours en tant qu'il se réfère à l'arrêt cantonal, tandis que l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Même si A.________ se limite à prendre des conclusions cassatoires et en renvoi (à ce sujet ATF 137 II 313 consid. 1.3 et les références), son recours en matière de droit public, qui se caractérise comme un recours en réforme (art. 107 al. 2 LTF), est recevable. Les motifs du recours permettent de comprendre qu'il requiert la reconnaissance du droit à une rente de l'assurance-invalidité à la suite de l'aggravation de son état de santé qu'il a annoncée le 23 juin 2020, ainsi que la prise en charge, par l'office intimé, des frais relatifs au rapport du docteur B.________ du 25 novembre 2020. 
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière de droit public peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il statue par ailleurs sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant qui entend s'en écarter doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées sinon un état de fait divergent ne peut pas être pris en considération.  
 
2.2. Les constatations de l'autorité cantonale de recours sur l'atteinte à la santé, la capacité de travail de la personne assurée et l'exigibilité - pour autant qu'elles ne soient pas fondées sur l'expérience générale de la vie - relèvent d'une question de fait et ne peuvent donc être contrôlées par le Tribunal fédéral que sous un angle restreint (ATF 132 V 393 consid. 3.2). On rappellera, en particulier, qu'il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une solution autre que celle de l'autorité cantonale semble concevable, voire préférable (ATF 141 I 70 consid. 2.2; 140 I 201 consid. 6.1). Pour qu'une décision soit annulée pour cause d'arbitraire, il ne suffit pas que sa motivation soit insoutenable; il faut encore que cette décision soit arbitraire dans son résultat (ATF 141 I 49 consid. 3.4).  
 
3.  
 
3.1. Le litige porte sur le droit de l'assuré à une rente de l'assurance-invalidité dans le cadre de la nouvelle demande de prestations qu'il a déposée en relation avec l'aggravation de son état de santé qu'il a annoncée à l'administration en juin 2020 (cf. art. 17 al. 1 LPGA, applicable par analogie, en lien avec l'art. 87 al. 2 et 3 RAI; voir aussi ATF 147 V 167 consid. 4.1; 133 V 108 consid. 5 et les arrêts cités).  
 
3.2. L'arrêt attaqué expose de manière complète les dispositions légales - dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2021, applicable en l'espèce (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et les références) - et les principes jurisprudentiels relatifs notamment à la notion d'invalidité (art. 7 et 8 al. 1 LPGA en relation avec l'art. 4 al. 1 LAI) et à son évaluation (art. 16 LPGA et art. 28a LAI). Il rappelle également les règles applicables à la libre appréciation des preuves (art. 61 let. c LPGA) et à la valeur probante des rapports médicaux (ATF 134 V 231 consid. 5.1; 125 V 351 consid. 3). Il suffit d'y renvoyer.  
 
4.  
Examinant l'évolution de l'état de santé du recourant depuis la dernière décision entrée en force et reposant sur un examen matériel du droit à la rente (décision du 10 octobre 2013), la juridiction cantonale a d'abord exclu une aggravation sensible de son état de santé sur le plan somatique. Elle a ensuite constaté que les diagnostics retenus par les différents psychiatres traitants avaient été "écartés" à l'issue de deux expertises réalisées auprès du Centre d'expertises médicales (CEMed) de Nyon (rapport des docteurs D.________, spécialiste en médecine interne générale et en rhumatologie, et E.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, du 18 juin 2013). Elle en a inféré que l'appréciation du docteur B.________ (rapports des 25 novembre 2020 et 30 novembre 2021) ne constituait qu'une appréciation divergente d'une situation demeurée pour l'essentiel sans changement significatif sur le plan psychiatrique. Partant, les premiers juges ont confirmé la décision administrative du 23 mai 2022 et nié que les frais afférents au rapport du docteur B.________ du 25 novembre 2020 dussent être pris en charge par l'intimé (art. 45 al. 1 LPGA). 
 
5.  
 
5.1. A l'appui de son recours, l'assuré reproche d'abord à la juridiction cantonale d'avoir apprécié arbitrairement les faits et les preuves, en considérant que son état de santé psychique ne s'était pas aggravé dans une mesure susceptible de lui ouvrir droit à une rente de l'assurance-invalidité depuis la décision du 10 octobre 2013.  
 
5.2. Contrairement à ce qu'allègue en premier lieu l'assuré, les troubles de la personnalité mis en évidence notamment par le docteur F.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie d'enfants et d'adolescents, dans son rapport du 4 juin 2019, ne s'inscrivent pas au sein des diagnostics qui "ne pouvaient pas être [...] connus du CEMed en 2013". Il ressort à ce propos des constatations cantonales que le docteur F.________ avait déjà posé le diagnostic de personnalité émotionnellement labile de type impulsif (F60.30) en 2012 (rapport du 13 juin 2012) et que les docteurs D.________ et E.________ l'avaient examiné dans leur rapport du 18 juin 2013, avant d'exclure qu'il fût incapacitant. Le docteur B.________ a du reste indiqué, dans son rapport du 25 novembre 2020, que le trouble de la personnalité de type borderline (F60.31) du recourant était probablement antérieur à l'accident de 2001.  
 
5.3. L'argumentation du recourant, selon laquelle le docteur B.________ a retenu des éléments psychotiques (hallucinations visuelles et auditives et vision paranoïde du monde) qui "n'ont jamais été relevés auparavant" est en revanche bien fondée. On constate que dans leur rapport du 18 juin 2013, les experts D.________ et E.________ ont examiné si l'assuré présentait des symptômes de la lignée psychotique, ce qu'ils ont exclu, en relevant l'absence d'obsession, d'idée délirante et de signe indirect d'hallucinations. Or l'état dépressif sévère avec symptômes psychotiques (F 32.3) diagnostiqué par le docteur B.________ dans son rapport du 25 novembre 2020, soit postérieurement à l'expertise du CEMed de 2013, est un élément nouveau. Le médecin traitant a en effet indiqué que si les diagnostics d'autre modification durable de la personnalité et de syndrome douloureux somatoforme persistant, qu'il avait également posés, devaient être retenus depuis 2003, respectivement 2004, en revanche l'état dépressif sévère avec symptômes psychotiques avait été objectivé à sa consultation depuis le 29 juin 2020 (rapport du 25 novembre 2020). Il ne s'agissait dès lors pas d'un élément connu des médecins du CEMed et étudié par ceux-ci dans le cadre de leur expertise en 2013. Le docteur B.________ a par ailleurs motivé ce nouveau diagnostic en indiquant que son patient présente constamment des critères pour une hospitalisation en milieu psychiatrique spécialisé et des symptômes psychotiques sous formes d'hallucinations ("des personnes défuntes de génération le précédant sont à ses côtés par exemple ou la persécution"). La considération des premiers juges selon laquelle l'appréciation du docteur B.________ ne constitue qu'une appréciation divergente d'une situation demeurée pour l'essentiel sans changement significatif ne peut dès lors pas être suivie.  
 
5.4. Dans ces circonstances, en considérant que, sur le plan psychiatrique, le recourant présentait un état de santé globalement inchangé depuis la décision du 10 juin 2013, la juridiction cantonale a apprécié arbitrairement les faits et les preuves. Les constatations des premiers juges quant à l'absence d'aggravation des troubles somatiques de l'assuré lient en revanche le Tribunal fédéral, faute de tout grief formulé à cet égard. Cela étant, il n'est pas possible, en l'état du dossier, de déterminer l'influence de l'aggravation de l'état de santé psychique de l'assuré sur sa capacité de travail, les conclusions du docteur B.________ devant être confirmées ou infirmées par une expertise complémentaire. Aussi la cause est-elle renvoyée à l'office AI pour ce faire. Le recours est bien fondé sur ce point.  
 
6.  
 
6.1. Le recourant se plaint également d'une violation de l'art. 45 LPGA, en ce que la juridiction cantonale n'a pas mis les frais d'établissement du rapport du docteur B.________ du 25 novembre 2020 (1'960 fr.) à la charge de l'office intimé. Il fait valoir à cet égard que ledit rapport "a constitué la principale base de travail" de l'office intimé et de son SMR, pour apprécier son cas, si bien qu'il s'est révélé "déterminant".  
 
6.2. Aux termes de l'art. 45 al. 1 LPGA, les frais de l'instruction sont pris en charge par l'assureur qui a ordonné les mesures. A défaut, l'assureur rembourse les frais occasionnés par les mesures indispensables à l'appréciation du cas ou comprises dans les prestations accordées ultérieurement. Selon la jurisprudence, les frais d'expertise font partie des frais de procédure. Les frais d'expertise privée peuvent être inclus dans les dépens mis à la charge de l'assureur social lorsque cette expertise était nécessaire à la résolution du litige (ATF 115 V 62 consid. 5c; arrêt 9C_519/2020 du 6 mai 2021 consid. 2.2 et les arrêts cités).  
 
6.3. En l'espèce, après que l'assuré lui a transmis le rapport du docteur B.________ du 25 novembre 2020, l'office AI est entré en matière sur sa nouvelle demande et a ensuite procédé à des mesures d'instruction. On rappellera que dans le cadre d'une nouvelle demande, il appartient à l'assuré de rendre plausible que son invalidité s'est modifiée de manière à influencer ses droits (cf. ATF 133 V 108 consid. 5.2 et 5.3). En l'occurrence, le recourant y est parvenu puisque l'administration a instruit son cas. Par ailleurs, c'est en raison du rapport en question que des investigations supplémentaires sont nécessaires (consid. 5.3 supra), de sorte qu'il était déterminant pour l'appréciation du cas. A cet égard, l'admissibilité de l'imputation des frais d'un rapport médical à l'administration ne dépend pas de la question de savoir si ledit rapport a effectivement permis de fournir les éclaircissements attendus par l'instance précédente. Il peut suffire qu'il donne lieu à des investigations supplémentaires qui n'auraient pas été ordonnées en son absence (arrêts 9C_255/2022 du 3 mai 2023 consid. 3 et les arrêts cités; 8C_301/2016 du 7 juillet 2016 consid. 3.2), comme cela a été le cas en l'occurrence. Par conséquent, les frais relatifs au rapport du docteur B.________ du 25 novembre 2020 doivent être imputés à l'office intimé. Le recours est bien fondé sur ce point également.  
 
7.  
Vu le renvoi ordonné, qui revient à donner gain de cause au recourant, les frais judiciaires y afférents doivent être mis à la charge de l'intimé (art. 66 al. 1 LTF). Celui-ci versera par ailleurs une indemnité de dépens au recourant (art. 68 al. 1 LTF). La cause est renvoyée à la juridiction cantonale pour nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure antérieure (art. 67 et 68 al. 5 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est partiellement admis. L'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, du 10 mai 2023, et la décision de l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud du 23 mai 2022, sont annulés. L'office AI est tenu de prendre en charge les frais du rapport médical du 25 novembre 2020, à hauteur de 1'960 fr. Par ailleurs, la cause est renvoyée à l'office AI pour instruction complémentaire dans le sens des considérants et nouvelle décision. Le recours est rejeté pour le surplus. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de l'intimé. 
 
3.  
L'intimé versera au recourant la somme de 2'800 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
4.  
La cause est renvoyée au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, pour nouvelle décision sur les frais et les dépens de la procédure antérieure. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 11 décembre 2023 
 
Au nom de la IIIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Parrino 
 
La Greffière : Perrenoud