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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
8C_236/2023  
 
 
Arrêt du 22 février 2024  
 
IVe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Wirthlin, Président, Maillard et Métral. 
Greffière : Mme von Zwehl. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Butrint Ajredini, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA), Division juridique, Fluhmattstrasse 1, 6002 Lucerne, 
intimée. 
 
Objet 
Assurance-accidents (affection psychique; lien de causalité adéquate), 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 24 février 2023 (A/3577/2021 ATAS/132/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________, Suissesse d'origine érythréenne née en 1966, est arrivée en Suisse en 1983. Au bénéfice d'une formation de cafetier-restaurateur, elle a exploité un restaurant de 2007 à 2014 avant de travailler en tant que gouvernante de février 2014 à avril 2015. Le 14 février 2016, lors d'un séjour à U.________, elle a fait une chute en glissant sur du verglas et s'est blessée au poignet droit. Il en est résulté une fracture disloquée intra-articuliaire du radius distal hautement comminutive ainsi qu'une fracture du cubitus. A l'époque, A.________ percevait des prestations de l'assurance-chômage et était assurée obligatoirement contre le risque d'accidents auprès de la Caisse nationale suisse en cas d'accidents (CNA), qui a pris en charge le cas.  
 
A.b. Le 25 février 2016, l'assurée a été opérée par le docteur B.________, spécialiste en chirurgie de la main, à la Clinique C.________. L'évolution a été compliquée par un syndrome douloureux régional complexe (SDRC) de type 1 du poignet et de la main droite. A l'issue d'un séjour de l'assuré à la Clinique romande de réadaptation (CRR) du 27 avril au 8 juin 2016, les médecins de cet établissement ont constaté une raideur majeure du poignet et une position vicieuse en flexion, rendant nécessaire la poursuite du traitement d'ergothérapie et du fitness.  
 
A.c. Le 4 décembre 2016, A.________ a fait une nouvelle chute en glissant sur le sol mouillé d'un spa, ce qui lui a occasionné une fracture C2 de l'extrémité distale du radius gauche. Elle a été opérée le 6 décembre 2016 à l' Hôpital D.________ par le docteur E.________, qui l'a suivie à partir de cette date. L'évolution concernant le poignet gauche a été favorable et le traitement s'est terminé en juin 2017. L'état du poignet droit étant resté stationnaire, l'assurée a subi une nouvelle intervention le 7 juin 2017. Malgré cette opération, la position en flexion du poignet droit avec une déviation de la main en inclinaison radiale a persisté. Une infiltration au Botox, préconisée par le docteur F.________, de la CRR, n'a pas donné les résultats escomptés. En mai 2018, l'assurée a débuté un suivi psychiatrique auprès du docteur G.________, psychiatre. Celui-ci a diagnostiqué un état dépressif moyen avec syndrome somatique marqué par une angoisse permanente en lien avec les accidents subis. Le 10 octobre 2018, le docteur E.________ a procédé à une arthrodèse pancarpienne du poignet droit, qui s'est bien consolidée et a permis la récupération d'une mobilité digitale complète (compte-rendu du 1er mai 2019). L'assurée présentait toutefois toujours des douleurs neurogènes qui ont justifié un deuxième séjour à la CRR du 6 août au 10 septembre 2019. Selon les médecins de cet établissement, la situation était encore susceptible d'amélioration. Le 10 juin 2020, le docteur E.________ a procédé à l'ablation du matériel d'ostéosynthèse au poignet gauche.  
 
A.d. Dans l'intervalle, le 4 juin 2018, A.________ a informé la CNA qu'elle avait récemment chuté et qu'elle s'était égratigné le genou et le petit doigt de la main droite. Le 8 décembre 2019, elle a annoncé qu'elle s'était blessée à l'index droit avec un couteau, en cuisinant.  
 
A.e. A l'issue d'un examen personnel de l'assurée en septembre 2020, le docteur H.________, médecin-conseil psychiatre de la CNA, a posé les diagnostics de troubles dépressifs récurrents, épisode actuel moyen à sévère (F 33), boulimie (F 50.2) et probable modification durable de la personnalité après expérience de catastrophe (F 62.0). Il a exposé qu'il était difficile de distinguer ce qui était réactionnel à l'évolution négative sur le plan orthopédique de ce qui était présent antérieurement. Il existait une fragilité préexistante sous la forme d'une atteinte de la construction de soi, l'assurée ayant été exposée, enfant (entre 9 et 15 ans), à des violences, des maltraitances et des viols répétées à V.________ et à W.________, dans ce second pays de la part de son propre frère qu'elle a fini par fuir pour arriver en Suisse en tant que réfugiée mineure. Selon le psychiatre, le statu quo ante ne sera jamais atteint; le tableau psychique global devait être imputé à 50 % aux suites de l'atteinte orthopédique et le statu quo sine serait atteint à la fin de 2020.  
 
A.f. Le 12 janvier 2021, le docteur I.________, médecin d'arrondissement de la CNA et spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie, qui avait déjà vu l'assurée en mai 2020, a procédé à un examen final. Il a posé les diagnostics de fracture complexe du poignet droit avec syndrome algodystrophique sévère et séquelles avec acquisition d'une main bote radiale, d'arthrodèse actuellement consolidée du poignet droit et de fracture du poignet gauche avec ostéosynthèse et consolidation. La situation au niveau des deux membres supérieurs était désormais stabilisée. Le travail pouvait être repris sur le plan somatique à 100 % sans perte de rendement dans une activité respectant les limitations suivantes: pas d'utilisation en force ou de manipulation d'objets supérieurs à 2 kg à droite; jusqu'à 5 kg à gauche de manière coordonnée avec les deux mains; jusqu'à 10 kg à gauche isolément; manipulation fine d'objets possible avec le membre gauche, impossible avec le membre droit. Le docteur I.________ a évalué l'atteinte à l'intégrité à 20 % pour le poignet droit selon le tableau 5 de la CNA.  
 
A.g. La CNA a mis fin au paiement des soins médicaux ainsi qu'au versement des indemnités journalières respectivement au 31 janvier 2021 et au 30 avril 2021. Par décision du 19 avril 2021, elle a accordé à l'assurée une indemnité pour atteinte à l'intégrité de 20 %, mais lui a refusé une rente d'invalidité.  
Saisie d'une opposition, la CNA l'a rejetée dans une nouvelle décision du 14 septembre 2021. Elle a considéré que les événements des 14 février et 4 décembre 2016 constituaient des accidents de peu de gravité, si bien que l'existence d'un lien de causalité adéquate avec des troubles psychiques pouvait être niée d'emblée; par ailleurs, il ressortait de la comparaison des revenus de valide et d'invalide que l'assurée ne subissait aucune perte de gain. 
 
B.  
L'assurée a déféré la décision sur opposition du 14 septembre 2021 à la Cour des assurances sociales de la Cour de Justice de la République et canton de Genève. En cours de procédure, elle a notamment produit un avis de la doctoresse J.________, sa nouvelle médecin psychiatre, ainsi qu'un rapport daté du 18 mars 2022 du Service médical régional de l'assurance-invalidité selon lequel elle présentait une incapacité de travail totale dans toute activité depuis le 15 février 2016. 
Statuant le 24 février 2023, la cour cantonale a rejeté le recours. 
 
C.  
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre cet arrêt, en concluant principalement à sa réforme en ce sens que la CNA est condamnée à lui octroyer une rente entière LAA ainsi qu'une indemnité pour atteinte à l'intégrité de 50 %. A titre subsidiaire, elle conclut à l'annulation de l'arrêt entrepris et au renvoi de la cause à la cour cantonale afin qu'elle ordonne une expertise bi-disciplinaire en psychiatrie et en orthopédie/traumatologie. 
La CNA conclut au rejet du recours. La cour cantonale et l'Office fédéral de la santé publique ont renoncé à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière de droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable. 
 
2.  
 
2.1. Le litige porte sur le droit de la recourante à une rente d'invalidité et à une indemnité pour atteinte à l'intégrité d'un taux supérieur à 20 %. Plus particulièrement, il s'agit de savoir si la CNA doit répondre des conséquences économiques des troubles psychiques.  
 
2.2. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF) et n'est limité ni par les arguments de la partie recourante, ni par la motivation de l'autorité précédente. Cela étant, il n'examine en principe que les griefs invoqués, compte tenu de l'exigence de motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF, sauf en cas d'erreurs juridiques manifestes (ATF 145 V 304 consid. 1.1; 141 V 234 consid. 1).  
 
2.3. La procédure concerne l'octroi de prestations en espèces de l'assurance-accidents, de sorte que le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par l'autorité précédente (art. 97 al. 2 et art. 105 al. 3 LTF).  
 
3.  
En premier lieu, la recourante reproche aux juges cantonaux de ne pas avoir retenu un lien de causalité adéquate entre ses troubles psychiques et les événements accidentels assurés. 
 
3.1. L'arrêt entrepris expose correctement les principes jurisprudentiels applicables en présence de troubles psychiques consécutifs à un accident. Concernant l'examen de la causalité adéquate, on rappellera qu'il y a lieu, d'une part, d'opérer une classification des accidents en fonction de leur degré de gravité et, d'autre part, de prendre en considération un certain nombre d'autres critères déterminants, étant précisé que l'examen de ces critères se fait en excluant les aspects psychiques (cf. ATF 129 V 402 consid. 4.4.1; 115 V 133 consid. 6c/aa, 403 consid. 5c/aa). On soulignera également que lorsqu'à la suite de deux ou plusieurs accidents apparaissent des troubles psychiques, l'existence d'un lien de causalité adéquate doit en principe être examinée en regard de chaque accident considéré séparément. Cette règle s'applique en particulier dans les cas où les accidents ont porté sur différentes parties du corps et ont occasionné des atteintes diverses (ATF 115 V 138 ss consid. 6, 407 ss consid. 5; RAMA 1996 n° U 248 p. 177 consid. 4b; arrêts 8C_13/2022 du 29 septembre 2022 consid. 4.1.3 et 8C_816/2021 du 2 mai 2022 consid. 3.2 et la référence).  
 
3.2. En l'occurrence, se référant à la jurisprudence précitée, les juges cantonaux ont procédé à un examen séparé de la causalité adéquate pour les quatre accidents survenus respectivement les 14 février 2016, 4 décembre 2016, 4 juin 2018 et 8 décembre 2019. Ils ont écarté d'emblée l'existence d'un tel lien pour les deux derniers événements - celui d'une chute avec des égratignures au genou droit et à l'auriculaire de la main droite, puis celui d'une blessure superficielle au niveau de l'index droit - dès lors qu'il s'agissait d'accidents insignifiants ou de peu de gravité. Quant aux deux chutes de sa hauteur dont la recourante avait été victime, ils ont qualifié ces événements d'accidents de gravité moyenne à la limite des accidents de peu de gravité. Dans ces éventualités, selon la jurisprudence, il fallait un cumul de quatre critères jurisprudentiels sur les sept, ou au moins que l'un des critères retenus se fût manifesté de manière particulièrement marquante, pour admettre le caractère adéquat des troubles psychiques constatés, ce que les juges cantonaux ont nié en retenant que trois critères tout au plus pouvaient entrer en ligne de compte en l'espèce sans qu'aucun ne le fût de manière marquante.  
 
3.3. La recourante, qui ne critique pas la qualification des accidents en cause par la cour cantonale, soutient que suffisamment de critères jurisprudentiels seraient au contraire réalisés. Elle invoque le caractère particulièrement impressionnant ou dramatique de l'accident (critère n° 1), la gravité ou la nature particulière des lésions physiques (critère n° 2), la durée anormalement longue du traitement médical (critère n° 3), les douleurs physiques persistantes (critère n° 4), les difficultés particulières apparues au cours de la guérison (critère n° 6), ainsi que le degré et la durée de l'incapacité de travail causée par les lésions physiques (critère n° 7). En revanche, elle partage l'avis de la cour cantonale concernant l'absence d'erreur dans le traitement médical entraînant une aggravation des séquelles de l'accident (critère n° 5).  
 
3.4.  
 
3.4.1. La raison pour laquelle la jurisprudence a adopté le critère des circonstances concomitantes particulièrement dramatiques ou du caractère particulièrement impressionnant de l'accident repose sur l'idée que de telles circonstances sont propres à déclencher chez la personne qui les vit des processus psychiques pouvant conduire ultérieurement au développement d'une affection psychique. C'est le déroulement de l'accident dans son ensemble qu'il faut prendre en considération. L'examen se fait sur la base d'une appréciation objective des circonstances d'espèce et non pas en fonction du ressenti subjectif de l'assuré, en particulier de son sentiment d'angoisse. Il faut en effet observer qu'à tout accident de gravité moyenne est associé un certain caractère impressionnant, lequel ne suffit pas pour admettre l'existence du critère en question (par exemple arrêt 8C_816/2021 du 2 mai 2022 consid. 5.3.1).  
En l'espèce, on ne saurait, d'un point de vue objectif, conférer un caractère particulièrement dramatique ou impressionnant aux deux chutes de sa hauteur dont la recourante a été victime. Comme on vient de l'exposer, ce critère se rapporte au déroulement de l'accident et non pas à ses conséquences lesquelles sont prises en considération par le biais des autres critères. Par ailleurs, ce critère doit être examiné séparément pour chaque accident et ne saurait être admis, comme l'ont dit les juges cantonaux, du fait que la recourante a été victime de deux chutes successives survenus à dix mois d'intervalle, la rendant angoissée à l'idée de sortir de chez elle (cf. également l'arrêt 8C_1007/2012 du 11 décembre 2013 consid. 5.2). 
 
3.4.2. Pour être retenu, le critère de la gravité ou de la nature particulière des lésions physiques, compte tenu notamment du fait qu'elles sont propres, selon l'expérience, à entraîner des troubles psychiques, postule d'abord l'existence de lésions physiques graves ou, s'agissant de la nature particulière des lésions physiques, d'atteintes à des organes auxquels l'homme attache normalement une importance subjective particulière, par exemple la perte d'un oeil ou certains cas de mutilations à la main dominante (cf. arrêt 8C_235/2020 du 15 février 2021 consid. 4.3.2 et les références).  
L'atteinte au poignet gauche n'a pas présenté une nature particulière au sens de ce qui vient d'être exposé. La fracture s'est consolidée et la recourante a récupéré une fonction normale. L'atteinte au poignet droit, qui est le membre supérieur dominant de la recourante, a consisté en une fracture complexe du radius dont celle-ci a gardé des séquelles sous la forme d'une main bote radiale. Il y a toutefois lieu d'en relativiser la gravité, l'arthrodèse ayant amélioré la position de la main et la mobilisation des doigts. Depuis cette intervention, la recourante a certes perdu la fonction complète en flexion/extension du poignet droit et présente une dyskinésie du 4ème et 5ème doigt pris isolément, mais elle peut fermer complètement les cinq doigts en paume et se servir de son membre supérieur droit comme main d'appoint (voir le rapport d'examen du docteur I.________, de la CNA, du 13 janvier 2021). Le seuil de gravité justifiant l'admission de ce critère n'apparaît dès lors pas atteint, à l'instar de ce qu'ont retenu les juges cantonaux. 
 
3.4.3. S'agissant du critère de la durée anormalement longue du traitement médical, l'aspect temporel n'est pas seul décisif; il faut également prendre en considération la nature et l'intensité du traitement, et si l'on peut en attendre une amélioration de l'état de santé de l'assuré. La prise de médicaments antalgiques et la prescription de traitements par manipulations, même pendant une certaine durée, ne suffisent pas à fonder ce critère (ATF 148 V 138 consid. 5.3.1). La jurisprudence a notamment nié que ce critère fût rempli dans le cas d'un assuré ayant subi quatre interventions chirurgicales sur cinq ans, au motif notamment que les hospitalisations avaient été de courte durée et que mises à part lesdites interventions, l'essentiel du traitement médical avait consisté en des mesures conservatrices (arrêt 8C_249/2018 du 12 mars 2019 consid. 5.2.3).  
La recourante a subi trois interventions liées à sa fracture du radius droit, la première en février 2016 (réduction par voie sanglante et ostéosynthèse par plaque), la seconde en juin 2017 (ablation du matériel d'ostéosynthèse et libération des adhérences) et la troisième en octobre 2018 (arthrodèse pancarpienne). Elle en a subi deux autres en relation avec sa fracture du radius gauche, soit en décembre 2016 (pose d'une plaque) et en juin 2020 (ablation du matériel d'ostéosynthèse pratiquée en ambulatoire). Ainsi que l'a relevé la cour cantonale, les hospitalisations ont été de courte durée (du 25 au 29 février 2016, du 4 au 9 décembre 2016, du 7 au 17 juin 2017, du 10 au 15 octobre 2018 et le 10 juin 2020). Des infiltrations tout comme des séances de physiothérapie, d'ergothérapie et de rééducation ne constituent par ailleurs pas un traitement particulièrement pénible et invasif (voir l'arrêt 8C_566/2019 du 27 novembre 2020 consid. 7.1 relatif à un cas de SDRC). Même si l'on y ajoute les deux séjours que la recourante a accomplis à la CRR, le critère afférent à la durée et à l'intensité du traitement médical ne peut pas être considéré comme rempli en l'espèce (voir à titre de comparaison le cas jugé dans l'ATF 148 V 138 où ce critère a été admis). 
 
3.4.4. En ce qui concerne les critères n° 4, 6 et 7 (douleurs physiques persistantes; difficultés apparues au cours de la guérison; degré et durée de l'incapacité de travail causée par les lésions physiques) - dont il y a lieu d'admettre qu'ils sont pertinents avant tout pour l'événement du 14 février 2016 -, les juges cantonaux ont considéré ce qui suit.  
Il était douteux que le critère des douleurs physiques persistantes fût rempli; de toute façon, il ne s'était pas manifesté dans une mesure qualifiée puisque des périodes d'atténuation des douleurs étaient documentées au dossier. Dans ces conditions, il n'était pas nécessaire d'examiner les critères n° 6 et n° 7. Mais même si ces critères devaient être admis, aucun d'entre eux n'était suffisamment prégnant pour qu'un lien de causalité adéquate puisse être retenu. Soulignant que cette question devait être examinée en excluant les aspects psychiques, les juges cantonaux ont relevé que des facteurs psychogènes - notamment une fragilité psychique préexistante aux accidents liée à des violences et à des abus subis durant l'enfance et l'adolescence - avaient joué un rôle significatif dans l'évolution défavorable des troubles affectant le poignet droit de la recourante. Ces facteurs avaient contribué à une forme de chronicisation de son état et prolongé en conséquence la durée de l'incapacité de travail ainsi que le processus de guérison, comme cela pouvait être déduit des rapports versés au dossier, notamment ceux du docteur H.________ des 23 octobre 2019 et 7 octobre 2020. 
 
3.4.5. En l'occurrence, la recourante critique à juste titre cette partie du raisonnement des juges cantonaux. Lorsqu'un lien de causalité naturelle entre des troubles psychiques et un accident est admis - comme c'est le cas ici -, les critères objectifs pour juger de leur caractère adéquat ne sauraient être pondérés en fonction d'une prédisposition physique ou psychique de la personne assurée. Ces critères objectifs ont justement été établis pour parer au risque d'inégalité de traitement et couvrent également les risques présentés par les personnes qui, sur le plan psychique, assument moins bien l'accident que les assurés jouissant d'une constitution normale en raison d'une prédisposition liée à leur état physique ou psychique (ATF 115 V 133 consid. 4b). Il s'ensuit que la recourante ne peut se voir opposer les conséquences d'une fragilité préexistante à l'accident dans l'examen desdits critères. Il n'en demeure pas moins que le résultat auquel la cour cantonale est parvenue doit être confirmé.  
Pour que le critère des douleurs physiques persistantes soit rempli, il faut que des douleurs importantes aient existé sans interruption notable durant tout le temps écoulé entre l'accident et la clôture du cas (art. 19 al. 1 LAA). L'intensité des douleurs est examinée au regard de leur crédibilité, ainsi que de l'empêchement qu'elles entraînent dans la vie quotidienne (ATF 134 V 109 consid. 10.2.4). Or il convient de constater avec la cour cantonale que la recourante a connu des périodes d'atténuation des douleurs et qu'elle a indiqué prendre des antalgiques légers seulement en cas de besoin lors de l'examen final du 21 janvier 2021. Ce critère ne s'est donc pas manifesté avec une intensité particulière. En ce qui concerne l'existence de difficultés apparues au cours de la guérison et les complications importantes, il doit exister des motifs particuliers ayant entravé ou ralenti la guérison (cf. arrêt 8C_196/2016 du 9 février 2017 consid. 5.4 et les références). De tels motifs existent en l'espèce puisque le processus de guérison de l'atteinte au poignet droit de la recourante a été compliqué par le développement d'un SDRC qui a prolongé le traitement médical et nécessité une arthrodèse pour en réduire les séquelles les plus gênantes. Ce critère est réalisé, mais sans qu'il le soit de manière particulièrement marquante (voir pour d'autres cas de SDRC les arrêts 8C_816/2021 du 2 mai 2022 et 8C_566/2019 déjà cité). Enfin, le critère du degré et de la durée de l'incapacité de travail due aux lésions physiques doit se rapporter aux seules lésions physiques et ne se mesure pas uniquement au regard de la profession antérieurement exercée par l'assurée. Il est en principe admis en cas d'incapacité totale de travail de près de trois ans (arrêt 8C_600/2020 précité consid. 4.2.4 et les références). En l'espèce, ce critère est également rempli, mais pas de manière marquée dès lors qu'en janvier 2021 - quatre ans après l'accident - le docteur I.________ a jugé l'état de la recourante suffisamment stabilisé pour se prononcer sur sa capacité de travail et qu'il l'a considérée apte, sous l'angle somatique, à reprendre une activité adaptée à 100 % sans diminution de rendement. Bien que la recourante conteste cette appréciation, la Cour de céans n'a pas de motif de s'en écarter en l'absence d'un avis médical contraire et motivé se trouvant au dossier. 
En fin de compte, aucun des trois critères entrant en ligne de compte ne s'est manifesté de manière particulièrement marquante, de sorte que les troubles psychiques perdurant au-delà du mois d'avril 2021 ne sont pas à la charge de l'intimée, à défaut d'un lien de causalité adéquate. 
 
4.  
La recourante conteste encore le taux de l'atteinte à l'intégrité de 20 % retenu par l'intimée et confirmé par les juges cantonaux. 
En l'absence d'un lien de causalité adéquate entre les accidents et les affections psychiques de la recourante, celle-ci ne saurait prétendre une indemnité pour atteinte à l'intégrité pour ces troubles. Par ailleurs, l'estimation de l'atteinte à l'intégrité établie par le docteur I.________, qui n'est remise en cause par aucune autre appréciation médicale, apparaît convaincante. L'arrêt attaqué peut donc également être confirmé sur ce point. 
 
5.  
Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté. 
La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office fédéral de la santé publique. 
 
 
Lucerne, le 22 février 2024 
 
Au nom de la IVe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Wirthlin 
 
La Greffière : von Zwehl