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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1P.711/2005/col 
 
Arrêt du 8 décembre 2005 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Féraud, Président, 
Aeschlimann et Reeb. 
Greffier: M. Parmelin 
 
Parties 
A.________, 
recourant, représenté par Me Didier Nobs, avocat, 
 
contre 
 
Procureur général du canton de Berne, 
Hodlerstrasse 7, 3001 Berne, 
Cour suprême du canton de Berne, 
2ème Chambre pénale, rue de l'Université 17, 
case postale 7475, 3001 Berne. 
 
Objet 
procédure pénale; appréciation des preuves, 
 
recours de droit public contre le jugement de la 
2ème Chambre pénale de la Cour suprême du 
canton de Berne du 17 août 2005. 
 
Le Tribunal fédéral considère en fait et en droit: 
1. 
A.________ a ouvert le 22 février 2001 un magasin de chanvre. Le 5 décembre 2001, la police cantonale s'est rendue sur les lieux à la suite d'un cambriolage; elle a alors constaté que les locaux étaient utilisés pour la culture du chanvre. Le 25 février 2002, elle a procédé à une perquisition aux domiciles professionnel et privé de A.________. Elle a ainsi relevé la présence de 680 plantes de chanvre et de 25 bouquets de chanvre séché. L'analyse des échantillons du chanvre saisi effectuée par l'Institut de médecine légale de l'Université de Berne a révélé une concentration de tétrahydrocannabinol (THC) comprise entre 1 et 16 %. A.________ a déclaré avoir vendu 100 g de chanvre sec à un magasin pour la somme d'environ 700 fr. et 900 g de chanvre frais à un particulier, destinés à la production d'huile essentielle, pour la somme de 2'000 fr. Il aurait dû livrer 24 plantes de chanvre à un autre magasin de chanvre, le jour de la perquisition, et 64 plantes à usage décoratif à un particulier, en mars 2002, pour un prix variant entre 4 et 10 fr. 
Par jugement du 11 avril 2005, le Président 10 de l'arrondissement judiciaire II Bienne-Nidau a condamné A.________, pour infractions à la loi fédérale sur les stupéfiants (LStup) à la peine de 45 jours d'emprisonnement avec sursis pendant 2 ans et à une amende de 500 fr., pour avoir vendu une quantité totale d'un kilo de chanvre et avoir cultivé une quantité indéterminée de plants et de boutures de cannabis (plus de 650) pour les revendre en vue de produire des stupéfiants. Il a ordonné la confiscation pour destruction de la drogue saisie et renoncé à exiger une créance compensatrice en faveur de l'Etat pour le chiffre d'affaires obtenu par la vente des stupéfiants. 
Statuant le 17 août 2005 sur appel du condamné, la 2ème Chambre pénale de la Cour suprême du canton de Berne (ci-après: la Cour suprême) a déclaré A.________ coupable d'infractions à la LStup par le fait d'avoir vendu une quantité totale de 1 kg de chanvre et d'avoir cultivé une quantité indéterminée de plants et de boutures de cannabis, soit plusieurs centaines de plantes, pour les revendre en vue de produire des stupéfiants, et l'a condamné à 45 jours d'emprisonnement avec sursis pendant deux ans; elle a renoncé au prononcé d'une amende, compte tenu de la situation financière précaire du prévenu. 
Le 2 novembre 2005, A.________ a déposé un recours de droit public contre ce jugement dont il demande l'annulation; il conclut également au renvoi de la cause à la Cour suprême pour nouveau jugement. 
Il n'a pas été demandé de réponses. 
2. 
Au vu des arguments invoqués, seul le recours de droit public pour violation des droits constitutionnels au sens de l'art. 84 al. 1 let. a OJ est ouvert (ATF 127 IV 215 consid. 2d p. 218; 124 IV 81 consid. 2a p. 83; 120 Ia 31 consid. 2b p. 35/36). Formé en temps utile contre une décision finale prise en dernière instance cantonale et qui touche le recourant dans ses intérêts juridiquement protégés, le recours répond aux exigences des art. 86 al. 1, 88 et 89 al. 1 OJ. Vu la nature cassatoire du recours de droit public, la conclusion tendant au renvoi de la cause à la Cour suprême pour nouveau jugement est superfétatoire et, partant, irrecevable (ATF 131 I 166 consid. 1.3 p. 169; 129 I 173 consid. 1.5 p. 176). 
3. 
Le recourant reproche à la Cour suprême d'avoir admis sa culpabilité au terme d'une appréciation arbitraire des preuves. Les incertitudes quant à la destination réelle du chanvre vendu et cultivé auraient dû conduire à son acquittement en application du principe "in dubio pro reo" découlant de la présomption d'innocence ancrée à l'art. 32 Cst. 
3.1 Saisi d'un recours de droit public dirigé contre une condamnation pénale, le Tribunal fédéral ne revoit la constatation des faits et l'appréciation des preuves qu'avec un pouvoir d'examen limité à l'arbitraire, car il ne lui appartient pas de substituer sa propre appréciation à celle du juge de la cause. Par ailleurs, la présomption d'innocence garantie à l'art. 32 al. 1 Cst. n'est invoquée avec succès que si le recourant démontre, par une argumentation conforme aux exigences de l'art. 90 al. 1 let. b OJ, qu'à l'issue d'une appréciation exempte d'arbitraire de l'ensemble des preuves, le juge aurait dû éprouver des doutes sérieux et irréductibles sur la culpabilité du prévenu (ATF 127 I 38 consid. 2 p. 40; 125 I 492 consid. 1b p. 495; 124 IV 86 consid. 2a p. 87/88; 120 Ia 31 consid. 2e p. 38, consid. 4b p. 40). 
3.2 Selon la jurisprudence, tombent notamment sous le coup de l'art. 19 ch. 1 LStup la culture et la vente de chanvre, pour autant que ces comportements visent l'extraction de stupéfiants (ATF 126 IV 60 consid. 2a p. 62). L'infraction est objectivement réalisée lorsque l'auteur cultive ou vend du chanvre pouvant être consommé comme stupéfiant; tel est le cas lorsque, comme en l'espèce, la teneur en THC du chanvre cultivé ou vendu dépasse la limite légale supérieure admise pour le chanvre destiné à la production industrielle, alimentaire ou agricole (ATF 126 IV 198 consid. 2 p. 201). Sur le plan subjectif, l'infraction est en tout cas réalisée lorsque l'auteur agit avec dol direct, c'est-à-dire lorsqu'il sait que le chanvre qu'il cultive ou vend sera consommé comme stupéfiant et le cultive ou le vend néanmoins, acceptant ainsi qu'il en soit fait un tel usage; à tout le moins s'il cultive ou vend du chanvre ayant une teneur en THC supérieure à la limite légale, le dol éventuel est même suffisant (ATF 130 IV 83 consid. 1.2.2 p. 87 et les arrêts cités). 
3.3 La Cour suprême a considéré que le chanvre vendu et trouvé lors de la perquisition était destiné à des fins illicites, sous réserve d'une quantité négligeable de plantes destinées à des fins de décoration, à la consommation personnelle du recourant et à la recherche scientifique. Elle s'est fondée sur les déclarations divergentes et contradictoires du prévenu quant à sa propre consommation de cannabis, quant aux quantités et à la destination du chanvre vendu, estimant notamment invraisemblable la version suivant laquelle il aurait vendu 900 g de chanvre pour la somme de 2'000 fr. à une personne pour les distiller en vue d'en faire de l'huile essentielle qu'il aurait ensuite rachetée pour en faire différents produits; elle s'est également fondée sur la situation financière précaire du recourant, qui l'obligeait à réaliser des gains rapides, sur ses connaissances scientifiques en la matière, démontrant qu'il n'était pas un consommateur occasionnel ou un simple amateur de jolies plantes, mais un semi-professionnel, ainsi que sur le prix demandé par unité, excessivement cher pour de simples plantes de décoration. Elle a vu enfin un élément supplémentaire propre à établir que le recourant avait conscience de l'illicéité de ses activités dans le refus opposé à la police cantonale d'accéder à son appartement lors de l'intervention du 5 décembre 2001. 
La Cour suprême s'est ainsi fondée sur un faisceau d'indices, dont le recourant ne conteste la pertinence que de certains d'entre eux pour conclure à l'existence de doutes fondés sur sa culpabilité. Ce faisant, il perd de vue que l'appréciation des preuves doit être examinée dans son ensemble. Lorsque l'autorité de jugement a, comme en l'espèce, forgé sa conviction quant aux faits sur la base de plusieurs éléments ou indices convergents, il ne suffit pas que l'un ou l'autre de ceux-ci ou même que chacun d'eux pris isolément soit à lui seul insuffisant; il n'y a pas arbitraire si l'état de fait retenu pour conclure à la culpabilité de l'accusé pouvait être déduit de manière soutenable du rapprochement de divers éléments ou indices; de même, il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'un ou plusieurs arguments corroboratifs soient fragiles, si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (arrêt 6P.80/2005 du 3 juillet 2005 consid. 2.1). Ainsi, à supposer que sur les quelques points soulevés, le jugement de la Cour suprême fût insoutenable, cela ne suffirait pas encore à admettre que la condamnation du recourant reposerait sur une appréciation arbitraire, compte tenu des autres éléments retenus à sa charge et sur lesquels il ne se prononce pas. Peu importe en définitive, car les critiques formulées sont de toute manière infondées. 
S'il est vrai que sa belle-mère contribuait financièrement à l'entretien de la famille, le recourant ne pouvait pas nécessairement compter sur son aide à long terme ou sur les petits jobs qu'il déclarait faire au noir. Aussi, la Cour suprême pouvait de manière soutenable admettre que seule une commercialisation du chanvre cultivé sous la forme de stupéfiants était viable et aurait permis au prévenu de couvrir les quelque 10'000 fr. qu'il déclare avoir investis dans son entreprise. Le recourant se borne par ailleurs à affirmer sans le démontrer que le prix exigé pour une plante de chanvre correspondrait au prix du marché. Il ne saurait se plaindre du fait que la Cour suprême s'est fondée sur des indices pour apprécier si les conditions subjectives de l'infraction à l'art 19 ch. 1 LStup étaient réunies, dans la mesure où il a refusé d'indiquer le nom des personnes auxquelles il a vendu ou entendait vendre du chanvre, empêchant ainsi l'administration d'autres moyens de preuve sur la destination des plants vendus ou cultivés. Enfin, le recourant a déclaré que le chanvre sec trouvé dans son appartement était destiné soit à sa propre consommation médicale soit à des fins décoratives; il a également affirmé cultiver des plantes pour faire des recherches concernant d'autres applications possibles du chanvre. Aussi, on ne saurait dire qu'en concédant qu'une partie des boutures de chanvre pouvaient être destinées à des fins décoratives, à la consommation personnelle du recourant et à la recherche scientifique, la Cour suprême se serait contredite ou aurait éprouvé des doutes sur la culpabilité du prévenu; elle n'a au contraire fait que tenir compte des déclarations de celui-ci, dans la mesure qui lui était la plus favorable. 
4. 
Le recours de droit public doit ainsi être rejeté dans la mesure où il est recevable, aux frais du recourant qui succombe (art. 156 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
2. 
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant. 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, ainsi qu'au Procureur général et à la Cour suprême du canton de Berne. 
Lausanne, le 8 décembre 2005 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: