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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
6B_411/2020  
 
 
Arrêt du 26 avril 2021  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Denys, Juge présidant, 
Muschietti et Hurni. 
Greffier : M. Vallat. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Manuela Ryter Godel, avocate, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud, 
avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD, 
intimé. 
 
Objet 
Ordonnance de classement (mise en danger de la vie d'autrui, abus d'autorité), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale, du 17 février 2020 (... [PE1]). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Le 7 mars 2019, à U.________, B.________ et A.________, dans une BMW grise conduite par ce dernier, ont été interpellés dans la rue du Stand, qui se termine en cul-de-sac, après avoir été suivis depuis le centre de U.________ par la patrouille de police H.________, composée des agents C.________ et D.________. Les deux policiers ont fait usage de leurs armes. Ils ont ensuite été rejoints par une autre patrouille, composée des agents E.________ et F.________. 
Le même jour, une instruction pénale a été ouverte sous référence PE2 par le Ministère public de l'arrondissement de l'Est vaudois contre B.________ et A.________ en raison de la course-poursuite qui s'est déroulée entre le centre de U.________ et la rue du Stand. 
Lors de leurs auditions d'arrestation respectives du 9 mars 2019, B.________ et A.________ ont tous deux déposé plainte. A.________ affirmait notamment être entré dans le cul-de-sac du Restaurant I.________ volontairement pour mettre fin à la course-poursuite, parce qu'il avait réalisé le danger extrême qu'il faisait courir à tout le monde, ajoutant qu'il n'avait pas eu l'intention de sortir de cette rue en s'y engageant. Les policiers auraient tiré sur lui sans sommation. Il n'aurait redémarré et tenté à nouveau de leur échapper que par instinct de survie. Un policier l'aurait menacé en lui disant " je vais te buter " après qu'il fut sorti de sa voiture puis arrêté. Il pensait que les policiers avaient tiré lorsqu'il avait démarré. Lors de son audition du 26 mars 2019, A.________ a encore exposé vouloir porter plainte pour avoir été traité par un policier, lors de son arrestation, de " sale bâtard et petit enculé de merde ". Une instruction pénale a été ouverte contre inconnu sous la référence PE1 par le Ministère public central, division affaires spéciales, pour voies de fait, mise en danger de la vie d'autrui, menaces et abus d'autorité. 
Par ordonnance du 13 septembre 2019, le Ministère public central, division affaires spéciales, a ordonné le classement de la procédure pénale diligentée d'office et sur plainte de A.________ et B.________ contre inconnu pour voies de fait, mise en danger de la vie d'autrui, menace et abus d'autorité. 
 
B.   
Par arrêt du 17 février 2020, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté les recours interjetés par B.________ et A.________ contre l'ordonnance du 13 septembre 2019, qui a été confirmée. Cet arrêt statue également sur les frais et indemnités des conseils d'office des recourants. 
 
C.   
Par acte du 2 avril 2020, A.________ recourt en matière pénale au Tribunal fédéral contre cet arrêt. Il conclut, principalement, à l'annulation de cette décision et au renvoi de la cause au Ministère public afin qu'il complète l'instruction. A titre subsidiaire, il demande le renvoi de la cause à la cour cantonale afin qu'elle procède au sens des considérants. Il requiert, par ailleurs, le bénéfice de l'assistance judiciaire. 
Par courrier du 17 septembre 2020, A.________ a encore produit des procès-verbaux d'audition des policiers qui l'ont interpellé, établis dans l'enquête parallèle dirigée contre lui et B.________. 
 
D.   
Invités à formuler des observations, la cour cantonale y a renoncé par lettre du 8 mars 2021 en se référant aux considérants de son arrêt, cependant que, par courrier du 17 mars 2021, le ministère public a conclu au rejet du recours dans la meure de sa recevabilité. Ces prises de position ont été transmises au recourant, qui a répliqué par pli du 14 avril 2021, communiqué le lendemain à la cour cantonale et au ministère public intimé. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Les pièces produites avec l'envoi du 17 septembre 2020 l'ont été après l'échéance du délai de recours (art. 100 al. 1 LTF). Elles sont irrecevables (art. 42 al. 3 et 48 al. 1 LTF). Par surabondance, ces documents, datés du 20 août 2020, sont postérieurs à la décision querellée et constituent, partant, des pièces nouvelles irrecevables dans le recours en matière pénale (art. 99 al. 1 LTF). 
 
2.   
Le recourant, qui a participé comme partie à la procédure de dernière instance cantonale, admet, quant à sa qualité pour recourir, n'avoir pas de conclusions civiles au sens de l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 5 LTF s'agissant d'actes qu'il reproche d'avoir commis à des agents de l'État. Il n'invoque pas expressément non plus son droit de porter plainte au sens de l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 6 LTF. 
 
3.   
Selon la jurisprudence, la victime qui se prévaut des garanties offertes par les art. 2 (droit à la vie) et 3 CEDH (interdiction de la torture), en corrélation avec l'art. 13 CEDH (droit à un recours effectif), peut fonder son droit de recours sur ces dispositions (ATF 138 IV 86 consid. 3.1.1 p. 88; arrêts 6B_364/2011 du 24 octobre 2011 consid. 2.2; 6B_274/2009 du 16 février 2010 précité, consid. 3.1.2.1). Il en va ainsi, en particulier, de celui qui se dit victime d'une mise en danger au sens de l'art. 129 CP, lorsque ce comportement est reproché à un agent de l'Etat (ATF 138 IV 86 consid. 3.2 p. 89). 
 
4.   
Le recourant soutient que l'instruction aurait été d'emblée déséquilibrée. Il relève que les policiers auteurs des coups de feu n'ont jamais été mis en prévention. Lors même que des impacts de balles ont été constatés sur le véhicule conduit par le recourant, la désignation d'un avocat d'office pour l'assister aurait été retardée et il aurait été procédé à l'audition de tous les témoins directs et policiers impliqués sans que la possibilité ne soit donnée aux occupants du véhicule de participer à ces auditions. Les policiers mis en cause, entendus en qualité de personnes appelées à donner des renseignements, avaient immédiatement bénéficié de l'assistance d'avocats, désignés comme " défenseurs " dans les procès-verbaux. Selon le recourant, il résulterait de la disjonction de cette procédure et de celle relative aux faits qui lui sont reprochés une situation artificielle, les auditions des policiers étant exploitables dans la présente procédure mais non dans celle dirigée contre le recourant lui-même. Selon le recourant, il aurait obtenu la réaudition des policiers dans la procédure parallèle, de sorte que la simple jonction des deux procédures permettrait de faire porter ces auditions également sur les griefs pénaux formulés par le recourant contre les agents. Le recourant reproche aussi à la cour cantonale, dans ce contexte et dans la perspective de son droit d'être entendu, respectivement de son droit à une décision motivée, de n'avoir pas répondu au même grief soulevé devant elle. 
 
4.1. Tels qu'ils sont articulés, et à ce stade des démarches judiciaires du recourant, ces griefs relèvent des volets dits procéduraux des art. 2 et 3 CEDH.  
 
4.1.1. L'application de l'art. 2 CEDH n'est pas exclue du seul fait que la victime n'est pas décédée (arrêt CourEDH [Grande Chambre] Nicolae Virgiliu Tanase c. Roumanie, du 25 juin 2019, Requête no 41720/13, § 139). De manière générale, seules des circonstances exceptionnelles imposent toutefois que des sévices corporels infligés par des agents de l'État soient analysés en une violation de l'art. 2 CEDH lorsqu'il n'y a pas de décès de la victime.  
Aussi, dans pratiquement tous les cas, lorsqu'une personne est agressée ou maltraitée par des policiers ou des militaires, ses griefs doivent-ils être examinés plutôt sous l'angle de l'art. 3 CEDH (arrêts CourEDH Makaratzis c. Grèce du 20 décembre 2004 [Requête no 50385/99] § 51; Ilhan c. Turquie du 27 juin 2000 [Requête no 22277/93] § 76). La Cour européenne a, néanmoins, admis l'application de l'art. 2 CEDH dans un cas de blessure par balle à une oreille (arrêt CourEDH Camekan c. Turquie du 28 janvier 2014, Requête no 54241/08, § 38). Elle a également relevé dans l'arrêt Makaratzis c. Grèce que le requérant, qui n'avait été que blessé (néanmoins de manière assez grave), n'avait eu la vie sauve que par hasard. On comprend ainsi que la dangerosité du comportement des forces de l'ordre constitue un élément d'appréciation important. 
 
4.1.2. En ce qui concerne l'art. 3 CEDH, il faut rappeler aussi que pour tomber sous le coup de cette disposition, un mauvais traitement doit atteindre un minimum de gravité, dont l'appréciation dépend de l'ensemble des circonstances de la cause, notamment de la durée du traitement et de ses effets physiques ou mentaux, ainsi que, parfois, du sexe, de l'âge, de l'état de santé de la victime. Parmi les autres facteurs à considérer figurent le but dans lequel le traitement a été infligé ainsi que l'intention ou la motivation qui l'ont inspiré, étant entendu que la circonstance qu'un traitement n'avait pas pour but d'humilier ou de rabaisser la victime n'exclut pas de façon définitive un constat de violation de l'art. 3 CEDH. Doit également être pris en compte le contexte dans lequel le traitement a été infligé, telle une atmosphère de vive tension et à forte charge émotionnelle (v. p. ex.: arrêt CourEDH [Grande Chambre] El-Masri c. l'Ex-République Yougoslave de Macédoine, du 13 décembre 2012, Requête no 39630/09, § 196). Dans la règle un mauvais traitement qui atteint un tel seuil minimum de gravité devrait impliquer des lésions corporelles ou de vives souffrances physiques ou mentales. Toutefois, même en l'absence de sévices de ce type, dès lors que le traitement humilie ou avilit un individu, témoignant d'un manque de respect pour sa dignité humaine ou la diminuant, ou qu'il suscite chez l'intéressé des sentiments de peur, d'angoisse ou d'infériorité propres à briser sa résistance morale et physique, il peut être qualifié de dégradant et tomber ainsi également sous le coup de l'interdiction énoncée à l'art. 3 CEDH. Une gifle a ainsi, déjà, pu être appréhendée, dans les circonstances d'espèce, comme un traitement dégradant. La Cour européenne a également souligné, dans ce contexte, qu'il suffisait que la victime soit humiliée à ses propres yeux pour qu'il y ait traitement dégradant et que la circonstance que la gifle avait pu être infligée inconsidérément par un agent excédé par le comportement irrespectueux ou provocateur de la victime était dénuée de pertinence (arrêt CourEDH [Grande Chambre] Bouyid c. Belgique du 28 septembre 2015, Requête no 23380/09, § 87, § 105 et § 108 ainsi que l'opinion partiellement dissidente des Juges De Gaetano, Lemmens et Mahoney).  
 
4.2. En l'espèce, il est tout d'abord constant que le recourant n'a subi  aucune blessure durant son interpellation. Sous cet angle, il est douteux qu'il puisse réellement invoquer le bénéfice de l'art. 2 CEDH. Toutefois, en dernière analyse, étant rappelé que les interventions de police armées pour assurer la défense de toute personne contre la violence illégale ou pour une arrestation régulière constituent deux clauses d'exception à l'art. 2 par. 1 CEDH, la question d'une éventuelle applicabilité de cette norme se confondrait entièrement avec celle du caractère imminent et réel du risque pour la vie lié à la nature de l'activité des agents (cf. arrêt CourEDH [Grande Chambre] Nicolae Virgiliu Tanase c. Roumanie, du 25 juin 2019, Requête no 41720/13, § 140 et 144 ss). Cette question ne peut donc être dissociée, à ce stade, de celle relative au caractère suffisant de l'enquête.  
Dans la perspective de l'art. 3 CEDH, le recourant, qui n'a donc pas été blessé, n'a pas tenté de démontrer non plus qu'il serait résulté un trouble mental ou psychique des comportements policiers dont il se plaint. S'il a exprimé, à plusieurs reprises, le souhait de consulter un psychiatre ensuite de son interpellation, il a toujours invoqué qu'il désirait obtenir des médicaments pour sa bipolarité. Le recourant évoque aussi des voies de fait dans son recours, mais rien n'indique qu'il aurait subi personnellement de telles atteintes, dont seul B.________ paraît s'être plaint (cf. arrêt entrepris, consid. 1b p. 4 s.). Il n'apparaît, dès lors, pas qu'il pourrait justifier d'un intérêt personnel au recours sur ce point précis. Le recourant a, par ailleurs, aussi expliqué avoir eu peur lorsque les policiers avaient sorti leurs armes, respectivement lorsque l'un d'entre eux l'aurait menacé et il se plaint également d'atteinte à son honneur en raison d'une injure. Il n'en est pas moins douteux que tous ces comportements, même considérés dans leur ensemble, aient pu approcher le seuil de gravité requis pour entrer dans le domaine des traitement dégradants, eu égard notamment au temps très restreint durant lequel ils se sont inscrits, au contexte de tension qui a nécessairement entouré la course-poursuite puis l'intervention armée des forces de l'ordre ainsi qu'à l'âge du recourant (plus de 30 ans au moment des faits). Néanmoins, le recourant allègue que les agents auraient tiré sur son véhicule alors que celui-ci était à l'arrêt, et qu'il n'aurait lui-même redémarré qu'en raison des craintes pour sa vie suscitées par les tirs des agents dirigés sur son véhicule. Ces questions se confondent donc, elles aussi, en large part avec celle du caractère suffisant ou non de l'enquête, soit en particulier quant à établir le caractère proportionné aux circonstances du comportement des agents, selon lesquels c'est précisément le comportement du recourant, qui aurait redémarré pour forcer le passage, qui les aurait conduits à ouvrir le feu. Il convient donc d'examiner si l'enquête réalisée l'a été conformément aux exigences conventionnelles. 
 
5.   
Indépendamment de la protection offerte par l'art. 13 CEDH (v. arrêt CourEDH [Grande Chambre] Giuliani et Gaggio c. Italie, du 24 mars 2011, Requête no 23458/02, § 299), les art. 2 et 3 CEDH comportent chacun un volet dit procédural, qui confère, lorsqu'est alléguée de manière crédible une violation de l'une ou l'autre de ces normes conventionnelles, en particulier par le fait de fonctionnaires de police ou d'autres agents de l'État, un droit à une enquête effective, soit une enquête adéquate, rapide et approfondie. 
 
5.1. Pour répondre aux exigences conventionnelles, l'enquête doit être apte à établir les faits (critère d'adéquation). Les autorités doivent toujours s'efforcer sérieusement de découvrir ce qui s'est passé et elles ne doivent pas s'appuyer sur des conclusions hâtives ou mal fondées pour clore l'enquête, mais prendre toutes les mesures raisonnables à leur disposition pour obtenir les preuves relatives à l'incident en question, y compris, entre autres, les dépositions des témoins oculaires et les expertises criminalistiques (enquête approfondie).  
Dans le domaine de l'art. 2 CEDH, lorsque la victime n'est pas décédée, cette obligation procédurale demeure tant qu'il n'a pas été établi que le risque pour sa vie n'était ni réel ni imminent ou que ses blessures n'étaient pas de nature à mettre gravement sa vie en danger, étant rappelé que moins le caractère imminent et réel du risque lié à la nature de l'activité est évident, plus l'exigence relative à la gravité des blessures subies devient importante (arrêt CourEDH [Grande Chambre] Nicolae Virgiliu Tanase c. Roumanie, du 25 juin 2019, Requête no 41720/13, § 140 et § 144 s.). 
Dans la perspective de l'art. 3 CEDH, lorsque cette disposition est invoquée dans le contexte d'interventions de police, l'enquête doit, en particulier, permettre de déterminer si le recours à la force était justifié ou non dans les circonstances concrètes ainsi que d'identifier et, cas échéant, de sanctionner les responsables. Il peut, en particulier, s'agir de déterminer dans quelle mesure la force utilisée contre des individus a été justifiée eu égard au comportement de ces derniers (arrêt CourEDH Iltümür Ozan et autres c. Turquie du 16 février 2021, requête no 38949/09, § 39). 
 
5.2. L'enquête doit, par ailleurs, être menée de manière indépendante, ce qui s'entend non seulement de l'absence de lien hiérarchique ou institutionnel, mais aussi de l'indépendance concrète de l'autorité chargée de l'instruction.  
 
5.3. Enfin, la victime (directe ou indirecte notamment en cas de violation de l'art. 2 CEDH ayant conduit au décès de la victime directe) doit être en mesure de participer effectivement, d'une manière ou d'une autre à l'enquête (v. parmi d'autres: dans le domaine de l'art. 3 CEDH: arrêt CourEDH [Grande Chambre] El-Masri c. l'Ex-République Yougoslave de Macédoine, du 13 décembre 2012, Requête no 39630/09, § 182 ss; dans celui de l'art. 2 CEDH: arrêt CourEDH [Grande Chambre] Nicolae Virgiliu Tanase c. Roumanie, du 25 juin 2019, Requête no 41720/13, § 136 ss).  
Autant que ces dispositions confèrent un droit à la participation de la victime à l'enquête, il n'est pas nécessaire d'examiner séparément les critiques du recourant dans la perspective de l'art. 6 CEDH
 
5.4. Le recourant n'élève, tout d'abord, aucune critique au sujet de l'indépendance des autorités qui ont mené l'enquête. On peut se limiter à souligner que la Brigade scientifique qui a établi le rapport de police, qui dépend du canton de Vaud, est sans relation organique ou hiérarchique avec les agents intercommunaux de la police mis en cause par le recourant. Enfin, ce volet de l'enquête a été confié à un procureur distinct de celui chargé de l'instruction dirigée contre le recourant. Aucun élément ne suscite dès lors de doute quant à l'indépendance des autorités chargées de l'enquête.  
 
5.5. Il est ensuite constant qu'une enquête a été ouverte d'office immédiatement après les faits et qu'un certain nombre de mesures d'instruction ont été prises sans délai, soit les auditions de divers témoins présents sur les lieux ainsi que celles, en tant que personnes appelées à donner des renseignements, des policiers impliqués dans la poursuite puis l'interception du véhicule du recourant. Les recherches effectuées  in situ ont notamment permis de localiser les douilles des projectiles tirés. Des photographies et un scan 3D ont été réalisés le jour-même, qui renseignent sur la topographie ainsi que la situation des objets déterminants (notamment les véhicules, les douilles et divers objets jetés par le recourant, soit deux sachets de cannabis et une clé). Les armes des policiers ont été saisies et analysées, ce qui a permis d'attribuer les douilles retrouvées à chacune des deux armes et de déterminer précisément combien de coups de feu avaient été tirés et par qui. Le véhicule du recourant a, lui aussi, été l'objet d'investigations afin d'établir les trajectoires des projectiles qui l'avaient atteint. Ces éléments ont ensuite été confrontés aux déclarations des agents et l'ensemble a fait l'objet d'un rapport de la Brigade scientifique de la Police de sûreté cantonale, incluant notamment un cahier, riche d'une trentaine de clichés.  
Le recourant estime certes que l'instruction aurait été d'emblée déséquilibrée parce les policiers (assistés d'avocats) n'ont pas été mis en prévention malgré les soupçons pesant sur eux d'avoir eu un comportement pénalement répréhensible. Il relève aussi que tous les témoins et les personnes appelées à donner des renseignements ont été entendus, sans que la possibilité lui ait été donnée, respectivement ait été donnée à son conseil, de participer à ces auditions. Assisté d'un avocat, il n'en a pas moins pu consulter le dossier de la cause; il a été informé du résultat des investigations et a pu formuler des réquisitions. Il a également pu contester le refus d'entrer en matière devant la cour cantonale, puis devant le Tribunal fédéral. Le recourant n'a donc pas été exclu de la procédure, à laquelle il a été en mesure de participer, même si ses demandes de mesures d'instruction ont, en définitive, été rejetées (cf. arrêts CourEDH Ghédir et autres c. France, Requête no 20579/12, du 16 juillet 2015, § 131 et § 135; Fernandez Kerr c. Belgique, Requête no 19328/09, du 26 septembre 2013, § 73; Dimcho Dimov c. Bulgarie, Requête no 57123/08, du 16 décembre 2014, § 79). Pour le surplus, le point de savoir si le refus de procéder à de nouvelles auditions des témoins et personnes appelées à donner des renseignements imposerait de considérer l'enquête comme insuffisante au regard des exigences des art. 2 et 3 CEDH ne peut être dissocié des critiques d'ordre matériel formulées par le recourant au sujet des actes d'instruction réalisés et de l'appréciation portée par les autorités cantonales sur les preuves déjà réunies (cf. arrêt CourEDH Perrillat-Bottonet c. Suisse, Requête no 66773/13, du 20 novembre 2014, § 68). 
 
5.6. Il s'agit, dès lors, de savoir si l'enquête a été menée assez loin pour établir à satisfaction de droit que le recours à la force était justifié dans les circonstances concrètes, compte tenu notamment du comportement du recourant, respectivement pour établir que le risque pour la vie du recourant, qui n'a subi aucune blessure, n'était ni réel ni imminent.  
 
5.6.1. Les autorités cantonales ont considéré que la version des deux parties plaignantes, qui s'étaient contredites ne trouvait pas appui dans les éléments du dossier. Concrètement, outre ces contradictions, les autorités cantonales ont principalement relevé que le rapport balistique infirmait l'hypothèse selon laquelle les tirs étaient intervenus avant que la voiture ne démarre, respectivement que le recourant avait démarré à cause des tirs, parce qu'il craignait pour sa vie (arrêt entrepris consid. 4.1 p. 19 ss).  
 
5.6.2. Le recourant objecte que les déclarations des témoins, y compris parmi les policiers, seraient variables. De possibles imprécisions dans les propres déclarations du recourant seraient imputables à un état de grave décompensation psychique. Sa version n'en serait pas incohérente pour autant et la capacité d'autocritique démontrée a posteriori en renforcerait la crédibilité. Un témoin neutre avait expliqué avoir d'abord entendu les coups de feu puis n'avoir vu la BMW du recourant tenter de contourner un véhicule de police qu'après avoir eu le temps de se déplacer pour verrouiller une porte (mémoire de recours, p. 3 et p. 10). Selon le recourant le refus de réentendre certains témoins et personnes appelées à donner des renseignements violerait, par ailleurs, son droit déduit de l'art. 147 al. 3 CPP à la répétition de l'administration des preuves. Dans la perspective de la violation du principe  in dubio pro duriore, le recourant invoque encore que les impacts de balles confirmeraient que les policiers n'avaient pas exclusivement tiré depuis l'arrière du véhicule. Rien ne permettrait, en particulier, d'affirmer que les premières balles tirées auraient atteint le véhicule. Les impacts latéraux ne permettraient pas non plus d'affirmer que les coups de feu seraient intervenus alors que le recourant avait déjà redémarré " en trombe ", point de fait sur lequel une reconstitution se serait imposée (mémoire de recours, p. 10 s.). Quant à la réalité de la mise en danger, le recourant objecte que cinq coups de feu ont été tirés sur son véhicule, à courte distance. Il se serait probablement agi de balles blindées, ce qui aurait accru le risque de ricochets. Les occupants du véhicule n'auraient été épargnés que par chance. Le recourant souligne à ce propos que les vitres de son véhicule sont teintées ce qui aurait empêché toute visée précise, que la présence d'un passager à l'arrière du véhicule ne pouvait être exclue, que les policiers avaient tiré pour arrêter la voiture et non à fin de sommation et que l'objectif était ainsi très probablement d'atteindre le conducteur, dès lors que la seule crevaison d'un pneu ne serait pas propre à stopper un véhicule. Le recourant relève aussi que le rapport balistique n'analyserait les impacts que sur la base des déclarations des policiers, la version du recourant n'étant même pas mentionnée. La voiture du recourant aurait été susceptible de se remettre en mouvement et le risque n'aurait pas été diminué dans la version des policiers, soit s'il fallait admettre que le véhicule se déplaçait déjà à une vitesse significative (mémoire de recours, p. 11 s.). Quant à la proportionnalité des tirs, le recourant oppose que deux véhicules auraient été placés en travers de l'impasse, si bien qu'il aurait été impossible d'en sortir (mémoire de recours, p. 13). Le recourant reproche, enfin, aux autorités cantonales d'avoir refusé d'entrer en matière sur les injures, les menaces et les voies de fait au motif que la version du recourant avait été écartée sur la question de la mise en danger. Il en conclut que ce raisonnement, fondé sur le caractère irrémédiablement contradictoire des explications des uns et des autres, serait étranger au principe  in dubio pro duriore (mémoire de recours, p. 13).  
 
5.6.3. Conformément à l'art. 147 CPP, les parties ont le droit d'assister à l'administration des preuves par le ministère public et les tribunaux et de poser des questions aux comparants. La présence des défenseurs lors des interrogatoires de police est régie par l'art. 159 CPP (al. 1). Celui qui fait valoir son droit de participer à la procédure ne peut exiger que l'administration des preuves soit ajournée (al. 2). Une partie ou son conseil juridique peuvent demander que l'administration des preuves soit répétée lorsque, pour des motifs impérieux, le conseil juridique ou la partie non représentée n'a pas pu y prendre part. Il peut être renoncé à cette répétition lorsqu'elle entraînerait des frais et démarches disproportionnés et que le droit des parties d'être entendues, en particulier celui de poser des questions aux comparants, peut être satisfait d'une autre manière (al. 3). Les preuves administrées en violation du présent article ne sont pas exploitables à la charge de la partie qui n'était pas présente (al. 4).  
 
5.6.4. En l'espèce, le rapport de police mentionne tout d'abord qu'un projectile retrouvé sur les lieux était de type Action 4. Le cahier photo permet, par ailleurs, aisément de constater que toutes les munitions dont étaient chargées les armes de service des deux agents qui ont tiré étaient de même type et la police vaudoise est notoirement équipée de munition dites " à déformation contrôlée " Action 4 depuis de nombreuses années. Rien ne suggère, partant, que le recourant aurait pu, comme il le soutient, essuyer des tirs à balles blindées, de type militaire, et qu'il en serait résulté un risque accru de ricochet (v. Réponse du Conseil d'État vaudois de mars 2009 à l'interpellation Pierre Zwahlen concernant l'usage des balles expansives par la Police cantonale). On ne perçoit pas non plus concrètement ce que le recourant entend déduire en sa faveur du fait que les tirs sont intervenus à courte distance, ce qui semblerait plutôt en faveur d'un risque moindre de rater la cible. Dans le même sens, le recourant souligne vainement que les vitres de son véhicule auraient été teintées. En effet, autant qu'il reproche aux policiers d'avoir éventuellement fait feu avant qu'il ne démarre, soit alors qu'ils auraient été face à son véhicule, il est aisé de constater sur les clichés figurant au dossier que le pare-brise du véhicule n'est pas obscurci. Pour le reste, aucun élément n'accréditant sérieusement l'hypothèse de tirs sciemment dirigés sur les occupants du véhicule à travers les vitres, et les autres tirs étant visiblement dirigés vers le bas du véhicule, soit les pneus et au mieux un feu arrière, la couleur des vitres demeure manifestement sans pertinence pour l'appréciation d'un éventuel risque lié aux tirs. Le recourant soutient, certes, que ceux-ci auraient eu pour but d'immobiliser le véhicule et qu'à ses yeux cet objectif n'aurait pu être atteint qu'en touchant le conducteur, mais cette supposition ne repose sur aucun élément objectif. Par ailleurs, qu'un véhicule fut placé en travers de la rue n'a pas empêché le recourant de tenter de le contourner avant de n'être stoppé que par le choc contre un second véhicule de police et l'intervention de deux autres policiers armés arrivés en renfort. Cet élément plaide, dès lors, plutôt en faveur d'un tir justifié compte tenu du comportement adopté par le recourant durant la course-poursuite puis dans l'impasse. Cela étant, il n'en reste pas moins que seuls trois projectiles ont causé des impacts interprétables sur la voiture du recourant, alors que cinq tirs ont été effectués. Par ailleurs, si le gendarme D.________ a expliqué, dans son procès-verbal d'audition, avoir tiré à trois reprises en direction de la roue arrière gauche, le rapport de la police cantonale n'identifie comme provenant de son arme que la balle ayant traversé le feu arrière, mais mentionne que " Sur place, il indique avoir tiré en direction de l'avant du véhicule ". Enfin, si le ministère public a souligné qu'à ses yeux les déclarations des personnes auxquelles le recourant n'avait pas été confronté ne pouvaient être retenues contre lui et ne l'avaient pas été, il ne ressort pas moins de la décision querellée que la cour cantonale s'est référée à ces déclarations notamment quant à savoir quel ordre avait été donné au recourant par les forces de l'ordre et à quel moment (arrêt entrepris, consid. 4.1 p. 19). Plus généralement, dans la mesure où la décision de dernière instance cantonale se réfère au rapport de la police cantonale, celui-ci renvoie également aux explications fournies par les agents. Enfin, rien n'indique que de simples auditions auraient entraîné des frais disproportionnés et il n'apparaît pas non plus que le droit du recourant de poser des questions aux témoins et personnes appelées à donner des renseignements aurait pu être satisfait d'une autre manière. Il s'ensuit qu'en s'appuyant sur ces éléments, sans permettre au recourant, qui en avait fait la demande, de pouvoir participer à l'audition de ces personnes, la cour cantonale a méconnu les droits conférés au recourant par l'art. 147 al. 3 et 4 CPP.  
 
5.6.5. Le ministère public objecte, pour sa part, en se référant à l'ATF 140 IV 148 [recte: 172] consid. 1.2.3, que selon la jurisprudence, dans des procédures conduites séparément, la qualité de partie n'est pas accordée au prévenu dans les autres procédures, si bien qu'il n'existerait pas de droit de participer à l'instruction et aux débats menés séparément contre un autre prévenu.  
Ce parallèle n'est cependant pas pertinent en l'espèce, dès lors que le recourant a bien la qualité de partie plaignante dans la procédure dirigée contre les agents et qu'il peut, de surcroît, déduire des règles de la CEDH un véritable droit de participer à l'enquête. 
 
5.6.6. Il résulte de ce qui précède que les autorités cantonales se sont fondées de manière illicite sur les déclarations des agents ayant participé à l'interpellation du recourant notamment pour établir que le recours à la force était justifié dans les circonstances concrètes, respectivement pour écarter tout risque pour la vie du recourant. Par ailleurs, l'enquête menée par les autorités cantonales ne fournit presqu'aucune information précise sur deux des cinq coups de feu, qui auraient, toutefois, pu être tirés non en direction des roues arrières de la BMW, mais vers l'avant de celle-ci. Etant rappelé que, bien qu'il s'agisse d'une obligation non pas de résultat mais de moyens, toute carence de l'enquête affaiblissant sa capacité à établir les circonstances de l'affaire ou l'identité des responsables risque de faire conclure qu'elle ne répond pas à la norme d'effectivité requise (arrêt CourEDH [Grande Chambre] Bouyid c. Belgique du 28 septembre 2015, Requête no 23380/09, § 120), il convient d'annuler la décision entreprise et de renvoyer la cause à la cour cantonale, afin qu'elle complète ou fasse compléter l'instruction, notamment par les auditions requises (cas échéant en faisant produire celles auxquelles il a été procédé dans le cadre de l'instruction menée en parallèle contre le recourant), dans le respect des droits conférés par l'art. 147 CPP, avant de rendre une nouvelle décision en relation avec la plainte du recourant en tant qu'elle avait pour objet l'usage d'armes à feu par la police.  
 
5.6.7. Compte tenu de cette issue du recours et dès lors que le recourant bénéficie de l'assistance d'un conseil, on peut se dispenser d'examiner plus avant son argumentation relative à un éventuel déséquilibre des forces au début de l'enquête, résultant, selon lui, du fait que les agents ont bénéficié de l'assistance de " défenseurs " dès leur première audition. Il n'y a pas non plus, dans ces conditions, lieu de constater une éventuelle violation du droit du recourant à une décision suffisamment motivée sur ce point précis.  
 
5.6.8. Pour le surplus, la décision querellée constate le dépôt de plainte du 26 mars 2019 et conclut que le ministère public a ordonné à bon droit et sans violation du principe  in dubio pro duriore le classement de la procédure quant aux infractions de menaces, de voies de fait et d'injure (arrêt entrepris, consid. 4.3 p. 22 s.). On recherche, cependant en vain dans cet arrêt toute motivation explicite relative au classement de la plainte pour injure. Le renvoi à l'ordonnance de classement du 13 septembre 2019, laquelle ne fait même pas mention de la plainte pour cette infraction qu'elle ne cite pas non plus dans son dispositif, ne constitue singulièrement pas une motivation suffisante de cet aspect du classement. La cour cantonale a certes indiqué, de manière générale, partager l'appréciation du ministère public selon laquelle la crédibilité des plaignants avait été fortement mise à mal. Pour les motifs indiqués ci-dessus, cette conclusion apparaît toutefois prématurée.  
 
5.6.9. En revanche, comme on l'a vu (v. supra consid. 4.2), le recourant n'a pas d'intérêt à contester le refus d'entrer en matière sur l'accusation de voies de fait qu'il ne paraît pas avoir subies personnellement. En ce qui concerne, enfin, d'éventuelles menaces, la cour cantonale ne s'est pas limitée, comme le soutient le recourant, à poser que les occupants du véhicules auraient menti en renvoyant à la motivation de l'ordonnance du ministère public, elle a aussi relevé que le recourant avait lui-même admis que la prétendue menace avait dû être proférée sur le coup de l'énervement, ce qui lui enlevait tout caractère pénal, en l'absence d'intention d'intimider la victime. A défaut de toute discussion de ce pan précis de la double motivation de la décision cantonale, le moyen est irrecevable (cf. ATF 133 IV 119 consid. 6.3 p. 120).  
 
6.   
Le recourant obtient gain de cause. Il ne supporte pas de frais (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF) mais peut prétendre à des dépens (art. 68 al. 1 LTF), ce qui rend sans objet sa demande d'assistance judiciaire (art. 64 al. 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est admis dans la mesure où il est recevable. La décision entreprise est annulée et la cause renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision. 
 
2.   
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.   
Le canton de Vaud versera en mains de l'avocate du recourant la somme de 3000 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale. 
 
 
Lausanne, le 26 avril 2021 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Juge présidant : Denys 
 
Le Greffier : Vallat