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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal  
 
 
 
 
2C_78/2022  
 
 
Arrêt du 9 août 2023  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz, 
Hänni, Hartmann et Ryter. 
Greffière : Mme Vuadens. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Maîtres David Wallace Wilson et Christian Girod, avocats, Schellenberg Wittmer SA, 
recourant, 
 
contre  
 
Administration fédérale des contributions AFC, Division principale impôt fédéral direct, impôt anticipé, droits de timbre, Eigerstrasse 65, 3003 Berne, 
intimée. 
 
Objet 
Echange automatique de renseignements 
(MAC/MCAA; CH-SA), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour I, du 22 décembre 2021 (A-3308/2020). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________, résidente saoudienne, est la settlor du trust B.________ (ci-après: le trust), dont le trustee est la société C._______ SA, sise à U.________ (ci-après: le trustee). 
Le 27 juin 2019, le trustee a, en tant qu'institution financière déclarante aux fins de l'échange automatique de renseignements, transmis à l'Administration fédérale des contributions (ci-après: l'Administration fédérale) des informations concernant un compte bancaire ouvert auprès de la banque D.________ AG et détenu par A.________ en lien avec le trust. Le 31 juillet 2019, cette dernière a demandé à l'Administration fédérale de suspendre la transmission des données la concernant jusqu'au prononcé d'une décision, respectivement de renoncer à transmettre les renseignements à l'Arabie Saoudite. 
 
B.  
Par décision du 22 mai 2020, l'Administration fédérale a ordonné la transmission des renseignements en cause à l'Arabie Saoudite. 
Le 24 juin 2020, A.________ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif fédéral, concluant à l'annulation de la décision du 22 mai 2020, l'Administration fédérale. 
Au cours de la procédure, l'Administration fédérale a informé le Tribunal administratif fédéral qu'il avait confirmé à l'intéressée qu'elle s'abstiendrait de transmettre les renseignements en cause à l'Arabie Saoudite jusqu'à l'entrée en force d'une décision judiciaire définitive et exécutoire. 
Par arrêt du 22 décembre 2021, le Tribunal administratif fédéral a rejeté le recours. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt du 22 décembre 2021 du Tribunal administratif fédéral, ainsi que la décision du 22 mai 2020 de l'Administration fédérale, et d'interdire à cette dernière toute transmission de renseignements la concernant à l'Arabie Saoudite; subsidiairement, d'annuler l'arrêt du 22 décembre 2021 du Tribunal administratif fédéral, ainsi que la décision du 22 mai 2020 de l'Administration fédérale, et de renvoyer la cause au Tribunal administratif fédéral pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
Le Tribunal administratif fédéral s'en tient à son arrêt. L'Administration fédérale conclut au rejet du recours et à la confirmation de l'arrêt attaqué. La recourante a dupliqué. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
L'arrêt attaqué est une décision finale (art. 90 LTF), rendue dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) émanant du Tribunal administratif fédéral (art. 86 al. 1 let. a LTF). Seul un recours en matière de droit public est donc envisageable (cf. art. 113 LTF a contrario). 
 
1.1. Le litige concerne un domaine relevant de l'assistance administrative internationale en matière fiscale (arrêt 2C_946/2021 du 6 juin 2023 destiné à la publication consid. 1.1). Conformément à l'art. 84a LTF, le recours en matière de droit public n'est recevable que si une question juridique de principe se pose ou qu'il s'agit pour d'autres motifs d'un cas particulièrement important au sens de l'art. 84 al. 2 LTF.  
 
1.1.1. Selon la jurisprudence, la présence d'une question juridique de principe suppose que la décision en cause soit importante pour la pratique; cette condition est en particulier réalisée lorsque les instances inférieures doivent traiter de nombreuses causes analogues ou lorsqu'il est nécessaire de trancher une question juridique qui se pose pour la première fois et qui donne lieu à une incertitude caractérisée, laquelle appelle de manière pressante un éclaircissement de la part du Tribunal fédéral (ATF 139 II 404 consid. 1.3; arrêt 2C_289/2015 du 5 avril 2016 consid. 1.2.1 non publié in ATF 142 II 218). Le Tribunal fédéral entre aussi en matière lorsqu'une cause soulevant une question qui justifie une entrée en matière en vertu de l'art. 84a LTF était encore ouverte au moment du dépôt du recours (arrêts 2C_596/2022 du 8 novembre 2022 consid. 1.2; 2C_216/2015 du 8 novembre 2015 consid. 1.3.2).  
 
1.1.2. La recourante fait valoir que la présente cause soulève la question juridique de principe consistant à déterminer la portée de l'art. 19 al. 2 2e phrase de la loi fédérale du 18 décembre 2015 sur l'échange international automatique de renseignements en matière fiscale (LEAR; RS 653.1, ci-après aussi abrégée: loi fédérale sur l'échange automatique), qui prévoit une protection individuelle contre l'échange automatique de renseignements. Elle soutient que cette disposition lui permet de s'opposer à la transmission de ses données à l'Arabie Saoudite.  
Le Tribunal fédéral a répondu à cette question juridique de principe dans l'arrêt 2C_946/2021 du 6 juin 2023 destiné à la publication. Comme celle-ci était encore ouverte lors du dépôt du recours dans la présente cause, le recours remplit néanmoins la condition de recevabilité de l'art. 84a LTF (supra consid. 1.1.1 in fine). Il convient donc d'entrer en matière. 
 
1.2. Au surplus, la recourante, qui a qualité pour recourir (cf. art. 89 al. 1 LTF), a agi en temps utile (art. 100 al. 2 let. b LTF) et dans les formes prescrites par l'art. 42 LTF, de sorte que son recours est recevable, sous réserve de la conclusion tendant à l'annulation de la décision de l'Administration fédérale du 22 mai 2020. Cette conclusion est irrecevable au vu de l'effet dévolutif du recours au Tribunal administratif fédéral (art. 54 PA), dont seule la décision peut être attaquée devant le Tribunal fédéral (cf. art. 86 al. 1 let. a LTF; arrêt 2C_39/2020 du 3 août 2022 consid. 1.2; ATF 146 II 335 consid. 1.1.2).  
 
2.  
 
2.1. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Toutefois, en vertu de l'art. 106 al. 2 LTF, il n'examine la violation de droits fondamentaux, que si ce grief a été invoqué et motivé par la partie recourante, c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de façon claire et détaillée (ATF 149 III 81 consid. 1.3; 148 I 127 consid. 4.3; 145 V 304 consid. 1.2).  
 
2.2. Pour statuer, le Tribunal fédéral se fonde sur les faits établis par l'autorité précédente (cf. art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des situations visées à l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 148 V 366 consid. 3.3; 147 I 73 consid. 2.2) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause. Conformément aux exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF qui viennent d'être rappelées, le recourant doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions sont réalisées. A défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait divergeant de celui qui est contenu dans l'acte attaqué (ATF 148 I 160 consid. 3; V 366 consid. 3.3; 145 V 188 consid. 2).  
Dans son mémoire, la recourante allègue de manière appellatoire des faits qui ne sont pas constatés dans l'arrêt attaqué, sans indiquer en quoi les conditions qui viennent d'être rappelées sont remplies. Ces faits ne seront donc pas pris en considération. 
 
3.  
Le litige porte sur le point de savoir si c'est à bon droit que le Tribunal administratif fédéral a confirmé la décision du 22 mai 2020 de l'Administration fédérale, par laquelle celle-ci a ordonné la transmission automatique des renseignements concernant la recourante à l'Arabie Saoudite. 
 
4.  
Il convient de commencer par présenter les caractéristiques de l'échange automatique de renseignements, de manière générale (infra consid. 4.1) et en lien avec l'Arabie Saoudite (infra consid. 4.2), ainsi que les règles applicables en droit interne en vertu de la loi fédérale sur l'échange automatique, en particulier celles qui concernent les prétentions qu'une personne peut faire valoir dans le cadre de la procédure d'échange automatique (consid. 4.3). 
 
4.1. L'échange automatique de renseignements est le résultat de travaux menés par l'OCDE, qui ont conduit à l'adoption en 2014 d'une norme internationale en la matière ("Norme EAR"; arrêt 2C_946/2021 du 6 juin 2023 destiné à la publication consid. 4.1). Il consiste à mettre en place à large échelle un système d'échange automatique de renseignements sur des comptes financiers selon une norme commune de déclaration, dans le but d'identifier des avoirs détenus à l'étranger et de contribuer à éviter que du substrat fiscal échappe au fisc d'un Etat en étant dissimulé à l'étranger (arrêt 2C_946/2021 précité consid. 4.1 et 4.2). Le mécanisme de l'échange automatique de renseignements implique en substance que les institutions financières d'un Etat collectent des renseignements spécifiques sur les comptes financiers détenus par leurs clients résidant à l'étranger, qu'elles communiquent aux autorités fiscales de l'Etat dans lesquelles elles sont situées. Ces autorités les transmettent ensuite automatiquement aux autorités fiscales des Etats partenaires concernés (arrêt 2C_946/2021 précité consid. 4.2).  
 
4.1.1. L'échange intervient par définition de manière automatique, ce qui signifie qu'il est exécuté par les autorités fiscales d'un Etat de manière mécanique, en principe sans décision préalable de sa part, sans vérification de l'exactitude matérielle des renseignements qui lui parviennent des institutions financières déclarantes et indépendamment de l'intérêt de l'Etat destinataire à les recevoir (arrêt 2C_946/2021 du 6 juin 2023 destiné à la publication consid. 4.3). L'échange automatique de renseignements est un acte matériel. Il se distingue de l'échange de renseignements sur demande, lequel limite la transmission aux renseignements vraisemblablement pertinents pour l'Etat requérant, ce qui suppose que l'Etat requis vérifie matériellement que les renseignements demandés remplissent cette condition et qu'il statue sur la demande par décision (arrêt 2C_946/2021 précité consid. 4.3).  
 
4.1.2. Au plan juridique, le principe de l'échange automatique de renseignements figurait déjà à l'art. 6 de la Convention du 25 janvier 1988 concernant l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale (communément abrégée " MAC ", pour Mutual Assistance Convention), mais doit faire l'objet d'une transcription dans un accord international pour être mis en oeuvre. A cet effet, l'Accord multilatéral du 29 octobre 2014 entre autorités compétentes concernant l'échange automatique de renseignements relatifs aux comptes financiers (communément abrégée "MCAA", pour Multilateral Competent Authority Agreement) a été élaboré (arrêt 2C_946/2021 du 6 juin 2023 destiné à la publication consid. 4.4). Le MCAA contient notamment des définitions (Section 1), détaille les renseignements devant faire l'objet de l'échange automatique (Section 2), indique les modalités de transmission (Section 3), traite de la collaboration en matière d'application et de mise en oeuvre de l'accord (Section 4), énonce les exigences en matière de confidentialité et de protection des données (Section 5), définit les modalités en cas d'adhésion au MCAA et la durée de l'accord (Section 7) et reproduit en annexe la norme commune de déclaration (cf. arrêt 2C_946/2021 précité consid. 4.4).  
 
4.1.3. Pour être admis à participer à l'échange automatique de renseignements, un Etat doit notamment montrer qu'il est en mesure d'assurer une protection suffisante des données dans sa législation et dans sa pratique (arrêt 2C_946/2021 du 6 juin 2023 destiné à la publication consid. 4.5). La confidentialité et la sécurité des informations échangées, de même que leur utilisation conforme au but de l'échange automatique, est en effet l'une des exigences fondamentales de la Norme EAR et fait l'objet de termes de référence spécifiques dans le cadre des contrôles périodiques effectués ensuite par les pairs (cf. arrêt 2C_946/2021 précité consid. 4.5). L'importance de la confidentialité et de la protection des données se traduit aussi dans le MCAA. La Section 5 du MCAA rappelle ainsi que tous les renseignements échangés sont soumis aux obligations de confidentialité et prévoit un système de notification de tout manquement à cet égard par un Etat partenaire, alors que la Section 7 par. 3 MCAA permet de suspendre l'EAR avec un Etat partenaire en cas de problème de confidentialité des données, qui est qualifié de manquement grave à l'accord (arrêt 2C_946/2021 précité consid. 4.5).  
 
4.1.4. L'échange automatique de renseignements fondé sur le MCAA intervient de manière bilatérale. Une activation de l'échange automatique entre deux Etats qui ont adhéré à cet accord est nécessaire (arrêt 2C_946/2021 du 6 juin 2023 destiné à la publication consid. 4.6). A cet effet, un Etat doit indiquer au Secrétariat de l'Organe de coordination (soit le Secrétariat de l'OCDE, cf. Section 1 ch. 1 let. g MCAA) la liste des juridictions (notion désignant les pays et territoires qui sont parties à la MAC et qui ont signé le MCAA, cf. Section 1 par. 1 let. a MCAA) à l'égard desquelles il souhaite que le MCAA prenne effet (Section 7 par. 1 let. f MCAA).  
Une fois le MCAA activé entre deux Etats, l'échange de renseignements est exécuté automatiquement entre eux chaque année. Un Etat peut suspendre l'échange de renseignements avec un autre Etat si celui-ci commet ou a commis un manquement grave au MCAA, par exemple en cas d'irrespect des obligations de confidentialité et des dispositions relatives à la protection des données (supra consid. 4.1.3; Section 7 par. 3 MCAA). Un Etat peut aussi dénoncer sa participation au MCAA ou vis-à-vis d'un Etat en particulier (Section 7 par. 4 MCAA). Le MCAA ne prévoit en revanche pas d'exception à l'obligation d'exécuter l'EAR dans des situations individuelles. Toutefois, la réserve générale de l'ordre public, qui est codifiée dans la MAC (cf. art. 21 par. 2 let. d MAC) et, dans le domaine de l'échange de renseignements sur demande, à l'art. 26 par. 3 let. c du Modèle de Convention fiscale de l'OCDE sur le revenu et la fortune (ci-après: MC OCDE), est un motif de refus d'exécuter l'échange automatique dans un cas particulier sans que ce refus ne soit constitutif par l'Etat concerné d'une violation de ses obligations internationales (arrêt 2C_946/2021 précité consid. 4.7). 
 
4.1.5. La Suisse a participé à l'élaboration de la Norme EAR et ratifié la MAC et le MCAA, qui sont en vigueur depuis le 1er janvier 2017 (RS 0.652.1 et RS 0.653.1). Au 1er janvier 2017, la Suisse avait activé l'échange automatique de renseignements sur la base du MCAA avec 38 Etats.  
 
4.2. Le 16 juin 2017, le Conseil fédéral a proposé à l'Assemblée fédérale d'activer l'échange automatique selon le MCAA avec 41 nouveaux Etats, dont l'Arabie Saoudite, à partir de 2018/2019 (Message du 16 juin 2017 concernant l'introduction de l'échange automatique de renseignements relatifs aux comptes financiers avec 41 États partenaires à partir de 2018/2019, FF 2017 4591, ci-après: Message EAR 2017). A l'appui de cette proposition, il soulignait notamment les effets positifs que la Suisse pourrait en retirer, notamment sous l'angle fiscal (en lien avec la réception d'informations financières de l'étranger) et sous l'angle économique et commercial (Message EAR 2017 ch. 3.1 et 3.3).  
 
4.2.1. S'agissant de l'Arabie Saoudite, le Conseil fédéral a précisé (cf. Message EAR 2017, p. 4675 ch. 36) que le cadre juridique, administratif et technique concernant la confidentialité et la sécurité des données dans ce pays avait été jugé satisfaisant par le panel d'experts du Forum mondial, que le Département fédéral des finances avait qualifié ces résultats d'adéquats et que, dans le cadre de l'évaluation de l'échange de renseignements sur demande effectuée en mars 2016, le Forum mondial avait considéré que le niveau de confidentialité dans le domaine fiscal y était conforme à la norme. Il a aussi relevé que tous les accords concernant l'échange de renseignements en matière fiscale conclus par l'Arabie saoudite comprenaient une clause de confidentialité correspondant à celle du MC OCDE et que diverses lois saoudiennes contenaient des dispositions sur la confidentialité. Le Message relève en outre (Message EAR 2017 p. 4611 ch. 1.2.2 2e §) que les Etats qui, comme l'Arabie Saoudite, ne figurent pas dans la liste du préposé fédéral à la protection des données et à la transparence en tant que pays dans lesquels le niveau de protection des données est adéquat devraient s'engager à respecter les garanties en matière de protection des données que la Suisse impose à ses partenaires selon la notification qui avait été adressée le 4 mai 2017 au Secrétariat de l'Organe de coordination, conformément à la Section 7 par. 1 let. d MCAA (notification publiée in RO 2017 3533 et consultable sous RS 0.653.1; sur les assurances fournies par l'Arabie Saoudite, cf. infra consid. 4.2.3).  
 
4.2.2. A la suite du Message du 16 juin 2017, le Conseil national et le Conseil des Etats ont fait savoir qu'ils approuveraient les arrêtés fédéraux activant l'échange automatique pour chacun des 41 Etats concernés, mais qu'avant l'exécution du premier échange, prévu en septembre 2019, le Conseil fédéral devrait procéder une nouvelle fois à un contrôle de la situation concrète dans chacun d'eux (cf. la synthèse des délibérations du Conseil national du 27 septembre 2017 et du Conseil aux Etats le 5 décembre 2017, consultable à l'adresse https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId =20170040, sous l'onglet "Synthèse Message/Rapport"). L'Assemblée fédérale a défini les éléments de ce contrôle en adoptant, le 6 décembre 2017, l'arrêté fédéral concernant le mécanisme de contrôle permettant de garantir la mise en oeuvre conforme à la norme de l'échange automatique de renseignements relatifs aux comptes financiers avec les Etats partenaires à partir de 2018/2019 (publié in FF 2018 39; ci-après: l'arrêté concernant le mécanisme de contrôle). Il en ressort que ce contrôle doit porter sur le point de savoir si l'Etat partenaire examiné respecte les principes de la spécialité, de la confidentialité et de la protection des données, s'il a fait l'objet d'une notification à l'organe de coordination en raison d'une violation de dispositions concernant la confidentialité ou de défaillances des mesures de protection et si des personnes concernées ont été exposées dans cet Etat à des procédures qui pourraient de manière vérifiable impliquer de sévères violations des droits de l'homme (pour le détail, cf. art. 1 al. 2 let. a à f de l'arrêté concernant le mécanisme de contrôle). L'art. 2 de l'arrêté prévoit que le Conseil fédéral soumet son rapport aux commissions parlementaires compétentes (cf. al. 1), décide des mesures exigées par le MCAA en tenant compte de leurs recommandations (cf. al. 2) et examine par la suite régulièrement et du point de vue des risques si les Etats partenaires remplissent toujours les conditions de l'art. 1, en soumettant ses rapports aux commissions pour consultation (cf. al. 3).  
 
4.2.3. L'Assemblée fédérale a approuvé l'activation de l'échange automatique de renseignements avec l'Arabie Saoudite par arrêté fédéral du 6 décembre 2017 (RO 2017 7745).  
Conformément à l'arrêté concernant le mécanisme de contrôle (supra consid. 4.2.2), le Conseil fédéral a établi, le 29 mai 2019, un rapport concernant l'échange de renseignements à l'attention des commissions de l'économie et des redevances du Conseil national et du Conseil des Etats (consultable à l'adresse https://www.admin.ch/gov/fr/accueil/ documentation/communiques.msg-id-75269.html). S'agissant de l'Arabie saoudite, ce rapport conclut que cet Etat remplit les conditions figurant à l'art. 1 al. 2 de cet arrêté (cf. le tableau figurant en page 18 de ce rapport). Il relève notamment que l'Arabie Saoudite s'est engagée à respecter les normes de protection des données de ses Etats partenaires et qu'aucun retour négatif fondé n'était parvenu de la part d'autres pays, de particuliers ou d'entreprises au sujet de déficits significatifs à cet égard. Il mentionne aussi que des responsables saoudiens (le directeur de l'autorité fiscale, le gouverneur de la banque centrale et un ministre d'Etat) ont confirmé que les données ne seraient utilisées qu'à des fins fiscales et que des mesures organisationnelles et administratives avaient été prises pour garantir le respect de la confidentialité des données. 
Conformément à l'art. 2 al. 3 de l'arrêté concernant le mécanisme de contrôle, le Conseil fédéral a établi un nouveau rapport le 25 mai 2022 (consultable à l'adresse https://www.efd.admin.ch/efd/fr/home/le-dff/nsb-news_list.msg-id-89021.html.), limité à un simple contrôle des risques pour les Etats partenaires qui, comme l'Arabie Saoudite, avaient déjà fait l'objet d'un contrôle (Rapport 2022, chiffre 1 p. 4 et chiffre 3.2 p. 7). Pour ces Etats, le rapport relève que l'OCDE n'avait à ce jour constaté aucun fait ou événement indiquant qu'ils ne remplissaient pas les conditions de la norme internationale, qu'il n'existait pas d'informations spécifiques indiquant que les règles pertinentes de la MAC n'avaient pas été respectées en matière de fiscalité ou d'assistance administrative fiscale, "particulièrement pour les pays où le respect des droits de l'homme en général et la protection de la vie privée en particulier sont problématiques", qu'il n'y avait actuellement aucune preuve que les données personnelles sensibles transmises à ces États avaient été utilisées de manière abusive et qu'il n'existait aucun cas connu dans lequel un État partenaire aurait suspendu ou mis fin à l'échange de données avec un tel État (Rapport 2022, chiffre 3.2.2 p. 8 s.). 
A la suite de ces rapports, l'échange automatique de renseignements avec l'Arabie Saoudite n'a fait l'objet d'aucune recommandation spécifique de la part des commissions des redevances et partant d'aucune mesure. Il s'applique donc en principe sans restriction (cf. toutefois infra consid. 4.3 à 4.3.2). 
 
4.3. En droit interne, la loi fédérale sur l'échange automatique (supra consid. 1.1.2) a été édictée pour régler la mise en oeuvre de l'échange automatique de renseignements entre la Suisse et un État partenaire fondé sur le MCAA ou sur d'autres conventions internationales (art. 1 al. 1 LEAR). Il s'agit ainsi d'une loi d'exécution (arrêt 2C_946/2021 précité consid. 5.2).  
 
4.3.1. L'art. 19 al. 2 LEAR concerne les prétentions que les personnes qui font l'objet d'un échange automatique peuvent faire valoir à l'égard de l'Administration fédérale. L'art. 19 al. 2 2e phrase LEAR prévoit à cet égard qu'une personne concernée par l'échange de renseignements est en droit d'obtenir une décision de l'Administration fédérale au sens de l'art. 25a PA si l'échange entraînerait pour elle un "préjudice déraisonnable par manque de garanties de l'Etat de droit" (et, selon la formulation de l'art. 19 al. 2 2e phrase LEAR en vigueur depuis le 1er janvier 2022, qui a la même portée, "faute de garanties de l'état de droit" [RO 2021 673]; cf. arrêt 2C_946/2021 précité consid. 6.2). Cette disposition ouvre le droit à une décision et partant à un contrôle judiciaire dans le domaine de l'échange automatique de renseignements, en dérogation au caractère automatique de ce type d'échange (supra consid. 4.1.1).  
 
4.3.2. Le Tribunal fédéral a défini la portée de l'art. 19 al. 2 2e phrase LEAR dans l'arrêt 2C_946/2021 du 6 juin 2023 précité, destiné à la publication. Il en ressort que, pour être compatible avec les engagements internationaux pris par la Suisse, cette disposition doit être comprise en ce sens qu'une personne concernée par l'échange automatique de renseignements ne peut obtenir de l'Administration fédérale qu'elle rende une décision quant au caractère exécutable de l'échange que si elle fait valoir de manière suffisamment précise et crédible que cet échange l'exposera concrètement, dans l'Etat qui reçoit les renseignements, à des actes contraires à l'ordre public. Il s'agit principalement d'actes contraires au jus cogens, ce dernier englobant l'interdiction de la torture, du génocide et de l'esclavage, les principes fondamentaux du droit humanitaire des conflits armés, ainsi que les garanties de la CEDH en cas d'état d'urgence, soit les art. 2 (sauf pour le cas de décès résultant d'actes licites de guerre), 3, 4 par. 1 et 7 CEDH (art. 15 par. 2 CEDH; arrêt 2C_946/2021 précité consid. 6.5 et 6.6 in fine).  
Le Tribunal fédéral a précisé (pour le détail, cf. arrêt 2C_946/2021 du 6 juin 2023 consid. 7 destiné à la publication) qu'une personne faisant l'objet d'un échange automatique de renseignements ne pouvait invoquer une violation de l'art. 8 CEDH et, partant, de l'art. 13 CEDH, pour obtenir une décision de l'Administration fédérale en vertu de l'art. 19 al. 2 2e phrase LEAR que si son grief se confondait avec une violation de l'ordre public. Il a en effet rappelé que l'échange automatique de renseignements, qui ne porte que sur des renseignements de nature financière et non pas sur des données intimes requérant une protection accrue, est conçu de manière à limiter autant que possible l'ingérence dans la vie privée des personnes et à garantir une utilisation conforme des données transmises à l'étranger, par le biais de contrôles préalables puis de contrôles périodiques par le Forum mondial, et qu'en outre, un mécanisme de suspension de l'échange est prévu s'il est constaté qu'un Etat ne respecte pas ses obligations en la matière (cf. la présentation du système supra consid. 4.1). Sous l'angle individuel, le Tribunal fédéral a rappelé que, selon le droit suisse, les personnes faisant l'objet d'un échange automatique peuvent demander à l'institution financière déclarante, qui doit les aviser au préalable des renseignements destinés à être échangés, le cas échéant par la voie de l'action civile, de procéder à la correction d'une donnée qui serait inexacte ou dont la communication ne serait pas prévue par la Norme commune de déclaration, et faire valoir les droits découlant de l'art 6 LPD (RS 235.1); elles peuvent en outre demander à l'Administration fédérale la rectification de données qui seraient devenues inexactes en raison d'une erreur de transmission. Au vu de l'ensemble de ces circonstances, le Tribunal fédéral a conclu qu'interpréter l'art. 19 al. 2 2e phrase LEAR en limitant son application aux seuls cas dans lesquels l'échange automatique de renseignements représenterait concrètement une violation de l'ordre public n'était pas contraire à l'art. 8 CEDH et, partant, ne violait pas l'art. 13 CEDH
 
5.  
A l'encontre de l'arrêt attaqué, la recourante soutient que le Tribunal administratif fédéral a violé l'art. 19 al. 2 2e phrase LEAR en ne retenant pas l'inexistence de garanties de l'Etat de droit en Arabie saoudite, alors qu'il avait pourtant reconnu que les rapports et documents qu'elle avait produits faisaient état de problèmes de respect des droits de l'homme dans ce pays. 
 
5.1. Comme déjà indiqué (supra consid. 4.3.2), l'application de l'art. 19 al. 2 2e phrase LEAR suppose que la personne concernée par l'échange automatique de renseignements fasse valoir de manière suffisamment précise et crédible que l'échange l'exposerait concrètement, dans l'Etat partenaire, à des actes contraires à l'ordre public. Il ne suffit donc pas d'invoquer de manière générale la situation des droits de l'homme dans l'Etat étranger avec lequel l'échange a été activé. Admettre le contraire reviendrait à permettre à l'Administration fédérale, puis, le cas échéant, au juge, de se substituer à l'appréciation du Conseil fédéral et de l'Assemblée fédérale, qui ont proposé, respectivement approuvé, l'activation de l'échange automatique avec l'Etat en question, conformément à leurs compétences constitutionnelles et légales respectives (art. 54 et art. 163 al. 2 Cst.; art. 39 LEAR; Message EAR 2017 p. 4626 ch. 5.1). Du reste, s'agissant de l'Arabie Saoudite, il convient de rappeler que l'Assemblée fédérale a imposé au Conseil fédéral qu'il procède à des contrôles réguliers pour vérifier que les conditions de l'échange automatique de renseignements avec cet Etat étaient toujours remplies, ce que les rapports de 2019 et de 2022 du Conseil fédéral ont confirmé (supra consid. 4.2.3).  
 
5.2. Dans la mesure où la recourante expose de manière générale les risques encourus en Arabie Saoudite sans lien direct avec l'échange automatique de renseignements litigieux, ses critiques ne sont donc pas admissibles. On ne peut donc pas reprocher au Tribunal administratif fédéral, sous l'angle de l'art. 19 al. 2 2e phrase LEAR, de s'être limité à un examen de la situation individuelle et concrète de la recourante.  
 
6.  
Encore faut-il déterminer si, compte tenu des circonstances du cas d'espèce, c'est à bon droit que le Tribunal administratif fédéral a estimé que l'échange de renseignements litigieux avec l'Arabie Saoudite ne constituait pas pour la recourante, dans sa situation concrète, un préjudice déraisonnable par manque de garanties de l'Etat de droit au sens de l'art. 19 al. 2 2e phrase LEAR. La recourante le conteste, soutenant que l'échange de renseignements l'exposerait personnellement à des risques d'actes constitutifs d'atteintes à la vie (art. 2 CEDH), à l'interdiction de la torture (art. 3 CEDH), ainsi qu'à la liberté et à la sûreté (art. 5 CEDH). Elle se plaint à cet égard d'une appréciation arbitraire (art. 9 Cst.) des preuves produites et soutient que le Tribunal administratif fédéral a fait preuve de formalisme excessif (art. 29 al. 2 Cst.) en lui imposant un degré de preuve trop élevé. 
 
6.1. Les juges précédents ont retenu qu'il incombait à la recourante de rendre vraisemblable qu'elle subirait un acte contraire à l'ordre public en cas d'échange automatique. On ne voit donc pas en quoi ils lui auraient imposé un degré de preuve "excessif", compte tenu de la jurisprudence (supra consid. 4.3.2). Le grief de formalisme excessif (sur la notion, cf. ATF 148 I 271 consid. 2.3; 132 I 249 consid. 5), manifestement infondé, peut donc être d'emblée rejeté.  
 
6.2. Lorsque la partie recourante s'en prend à l'appréciation des preuves et à l'établissement des faits, la décision n'est arbitraire (art. 9 Cst.) que si le juge n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision attaquée ou encore si, sur la base des éléments recueillis, il a procédé à des déductions insoutenables (cf. ATF 147 V 35 consid. 4.2; 143 IV 500 consid. 1.1; 140 III 264 consid. 2.3).  
 
6.2.1. Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal administratif fédéral a procédé à l'appréciation des éléments de preuve fournis par la recourante et en a conclu qu'ils n'étaient pas propres à faire apparaître, même au stade de la vraisemblance, que l'échange automatique de renseignements entraînerait pour elle un préjudice déraisonnable concret. Il a d'abord relevé que, même s'il fallait admettre - ce qui n'était pas établi - que la recourante faisait l'objet de mesures prises par le gouvernement saoudien en lien avec sa surveillance ou son obligation de s'acquitter de montants en argent en raison de son appartenance à la mauvaise branche de la famille royale, cela ne démontrait pas encore de lien avec l'échange automatique de renseignements. Il a ensuite retenu que la recourante n'avait pas démontré que sa situation de vie actuelle, qui était également décrite sur son site internet personnel, pourrait être mise en péril par la transmission des informations. Elle indiquait par ailleurs avoir une activité philanthropique importante et pouvoir se déplacer entre la France et l'Arabie Saoudite, qu'elle considérait comme ses lieux de vie. Le Tribunal administratif fédéral a retenu qu'il ne voyait pas quelles seraient les conséquences négatives qui pourraient résulter de la transmission des informations concernées, respectivement quel serait le risque supplémentaire, voire le préjudice déraisonnable que la recourante en subirait, dès lors qu'il ne s'agissait pas de déterminer objectivement la situation réelle et concrète en Arabie saoudite de manière générale, mais celle de la recourante dans le cas concret. Le Tribunal administratif fédéral a finalement souligné que l'argument selon lequel la transmission des renseignements augmenterait la visibilité de la recourante était infondé, dès lors qu'au vu de son titre, de son statut social et de sa fortune qui lui permettaient une action philanthropique, qu'elle ne cachait aucunement, la transmission ne pouvait pas être considérée comme un facteur créant un risque de préjudice déraisonnable.  
 
6.3. La recourante conteste cette appréciation, mais se limite à opposer de manière appellatoire sa propre interprétation des éléments fournis à celle des juges précédents, sans démontrer en quoi les juges précédents auraient procédé arbitrairement.  
 
6.4. Il n'apparaît pas, sur la base des faits constatés que l'échange automatique de renseignements fasse courir à la recourante un risque de nature à représenter un préjudice déraisonnable par manque de garanties de l'Etat de droit. Dans ces circonstances, on ne peut pas reprocher aux juges précédents d'avoir violé l'art. 19 al. 2 2e phrase LEAR en considérant que les conditions d'application de cette disposition n'étaient pas remplies et en rejetant par conséquent son recours contre la décision du 22 mai 2020 de l'Administration fédérale.  
 
7.  
Au surplus, en tant que la recourante semble mettre en cause l'existence d'un intérêt public à la transmission des renseignements la concernant parce qu'elle ne paie aucun impôt en Arabie Saoudite, alors que l'échange automatique a pour but de lutter contre l'évasion fiscale, elle perd de vue que l'échange automatique de renseignements intervient indépendamment de l'intérêt concret de l'Etat à les recevoir (supra consid. 4.1.1). En outre, s'il n'est pas contestable que l'échange automatique de renseignements est un instrument de lutte contre l'évasion fiscale internationale (supra consid. 4.1), cela ne signifie pas pour autant que la Suisse ne puisse pas, lorsqu'elle choisit avec quels Etats elle entend activer l'échange automatique, prendre également en compte ses propres intérêts (sur les motifs qui ont amené le Conseil fédéral à proposer l'activation de l'échange automatique de renseignements avec l'Arabie Saoudite, supra consid. 4.2) et permettre à ce titre la réciprocité dans l'échange des renseignements avec cet Etat. 
 
8.  
Ce qui précède conduit au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité. Succombant, la recourante doit supporter les frais de justice devant le Tribunal fédéral (art. 66 al. 1 LTF). Il ne sera pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure de sa recevabilité. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires de la recourante, à l'Administration fédérale des contributions, Division principale impôt fédéral direct, impôt anticipé, droits de timbre, et au Tribunal administratif fédéral, Cour I. 
 
 
Lausanne, le 9 août 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
La Greffière : S. Vuadens