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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6S.96/2006 /rod 
 
Arrêt du 3 avril 2006 
Cour de cassation pénale 
 
Composition 
MM. les Juges Schneider, Président, 
Kolly et Karlen. 
Greffière: Mme Kistler. 
 
Parties 
X.________, 
recourant, représenté par Me Pierre Heinis, avocat, 
 
contre 
 
Ministère public du canton de Neuchâtel, 
rue du Pommier 3, case postale 2672, 2001 Neuchâtel 1. 
 
Objet 
Homicide par négligence (art. 117 CP), 
 
pourvoi en nullité contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel du 23 janvier 2006. 
 
Faits: 
 
A. 
Le dimanche 7 mars 2004, X.________ traversait la localité de Dombresson au volant de son véhicule, sur la route principale en direction de Villiez, à une vitesse minimale de 58 km/h. A l'arrêt de bus "Mon Foyer", qui se trouvait sur l'autre côté de la chaussée, un bus des transports publics était arrêté, l'arrière du véhicule empiétant sur le passage de sécurité. Arrivé à la hauteur du bus, X.________ a vu surgir, de derrière le véhicule, la jeune Y.________, née le 13 juin 1996, qui s'était élancée sur la chaussée, après avoir longé le bus, en passant entre celui-ci et l'abri. Malgré un freinage d'urgence, l'automobiliste n'a pas pu éviter la collision frontale, l'enfant étant projetée à environ 18 mètres de l'impact. Grièvement blessée, Y.________ est décédée le 7 mars 2004 à l'hôpital de l'Ile à Berne. 
 
B. 
Par jugement du 11 juillet 2005, le Tribunal de police du district du Val-de-Ruz a condamné X.________, pour homicide par négligence, à une amende de 1'000 francs et à une peine de trente jours d'emprisonnement, avec sursis pendant trois ans. 
 
Par arrêt du 23 janvier 2006, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal neuchâtelois a rejeté le pourvoi en cassation formé par X.________. 
 
C. 
Contre cet arrêt cantonal, X.________ dépose un pourvoi en nullité devant le Tribunal fédéral. Dénonçant une violation de l'art. 117 CP, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
 
1. 
Le pourvoi en nullité ne peut être formé que pour violation du droit fédéral, à l'exclusion de la violation de droits constitutionnels (art. 269 PPF). 
 
Le Tribunal fédéral n'est pas lié par les motifs invoqués, mais il ne peut aller au-delà des conclusions du recourant (art. 277bis PPF). Les conclusions, qui doivent être interprétées à la lumière de leur motivation, circonscrivent donc les points litigieux (ATF 127 IV 101 consid. 1 p. 103). 
 
Le pourvoi n'est pas ouvert pour se plaindre de l'appréciation des preuves et des constatations de fait qui en découlent (ATF 124 IV 81 consid. 2a p. 83). Sous réserve de la rectification d'une inadvertance manifeste, le Tribunal fédéral est lié par les constatations de fait de l'autorité cantonale (art. 277bis al. 1 PPF). Il ne peut être présenté de griefs contre celles-ci, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 273 al. 1 let. b PPF). Le raisonnement juridique doit être mené sur la base des faits retenus dans la décision attaquée, dont le recourant est irrecevable à s'écarter (ATF 126 IV 65 consid. 1 p. 66/67). Il s'ensuit que l'argumentation du recourant est irrecevable dans la mesure où il conteste sa vitesse et les calculs de l'expert, puisque de la sorte il s'en prend à l'établissement des faits et à l'appréciation des preuves. 
 
2. 
Le recourant conteste s'être rendu coupable d'homicide par négligence. 
 
L'art. 117 CP, qui réprime l'homicide par négligence, suppose la réunion de trois conditions: le décès d'une personne, une négligence et un lien de causalité entre la négligence et la mort (ATF 122 IV 145 consid. 3 p. 147). 
 
2.1 La première condition est réalisée en l'espèce, puisque la victime est décédée des suites de l'accident. 
 
2.2 La négligence est définie à l'art. 18 al. 3 CP, selon lequel "celui-là commet un crime ou un délit par négligence, qui, par une imprévoyance coupable, agit sans se rendre compte ou sans tenir compte des conséquences de son acte. L'imprévoyance est coupable quand l'auteur de l'acte n'a pas usé des précautions commandées par les circonstances et par sa situation personnelle." 
Pour qu'il y ait homicide par négligence, il faut tout d'abord que l'auteur ait violé les règles de prudence que les circonstances lui imposaient pour ne pas excéder les limites du risque admissible (ATF 122 IV 145 consid. 3b/aa p. 147). Pour déterminer plus précisément quels étaient les devoirs imposés par la prudence, on peut se référer à des normes édictées par l'ordre juridique pour assurer la sécurité et éviter les accidents. Dans le domaine du trafic routier, on se référera donc aux règles de la circulation (ATF 126 IV 91 consid. 4a/aa p. 92; 122 IV 133 consid. 2a p. 135, 225 consid. 2a p. 227). 
 
Selon l'art. 31 al. 1 LCR, "le conducteur devra rester constamment maître de son véhicule de façon à pouvoir se conformer aux devoirs de la prudence". L'art. 33 LCR prévoit que "le conducteur facilitera aux piétons la traversée de la chaussée " (al. 1). "Avant les passages pour piétons, le conducteur circulera avec une prudence particulière et, au besoin, s'arrêtera pour laisser la priorité aux piétons qui se trouvent déjà sur le passage ou s'y engagent" (al. 2). "Aux endroits destinés à l'arrêt des véhicules des transports publics, le conducteur aura égard aux personnes qui montent dans ces véhicules ou qui en descendent" (al. 3). 
 
Le conducteur doit vouer à la route et au trafic toute l'attention possible, le degré de cette attention devant être apprécié au regard de toutes les circonstances, telles que la densité du trafic, la configuration des lieux, l'heure, la visibilité et les sources de danger prévisibles (ATF 103 IV 101 consid. 2b p. 104). La "prudence particulière" avant les passages pour piétons que doit adopter le conducteur selon l'art. 33 al. 2 LCR signifie qu'il doit porter une attention accrue à ces passages protégés et à leurs abords par rapport au reste du trafic et être prêt à s'arrêter à temps si un piéton traverse la chaussée ou en manifeste la volonté (cf. ATF 121 IV 286 consid. 4b p. 291/292; 115 II 283 consid. 1a p. 285). Normalement, le conducteur n'est toutefois pas obligé de réduire sa vitesse à l'approche d'un passage pour piétons lorsque personne ne se trouve à proximité, s'il peut admettre qu'aucun piéton ne va surgir à l'improviste ou encore si on lui fait clairement comprendre qu'il a la priorité. La visibilité du conducteur doit néanmoins porter sur toute la chaussée et sur le trottoir à proximité du passage. Si le conducteur ne bénéficie pas d'une telle visibilité, il doit ralentir de manière à pouvoir accorder la priorité aux piétons dissimulés derrière l'obstacle (cf. ZR 1991 p. 250 n° 78, JT 1993 I p. 710). La situation n'est pas différente de celle où un bus s'arrête à un arrêt, ce qui crée souvent un état de fait dangereux (ATF 97 IV 242 consid. 2 p. 244 s.). 
 
Selon les faits constatés, qui lient le Tribunal fédéral, un bus des transports publics était arrêté de l'autre côté de la chaussée et empêchait le recourant d'observer la situation à proximité du passage pour piétons. Contrairement à ce que semble croire le recourant, il ne lui est pas reproché d'avoir été surpris par une enfant s'élançant à l'improviste sur la route, mais de ne pas avoir adapté son attitude à la configuration particulière où un bus des transports publics réduisait sa visibilité. Dans ces conditions, le recourant aurait dû réduire sa vitesse de manière à pouvoir s'arrêter et ainsi parer à l'éventuel comportement d'un piéton dissimulé derrière le bus, l'expérience enseignant qu'en pareil cas des piétons descendant du bus s'engagent sur la chaussée et la traversent parfois sans s'assurer qu'elle est libre. Or, selon les constatations cantonales, le recourant circulait à une vitesse de 58 km/h (alors que la vitesse autorisée était de 50 km/h), ne freinant qu'au moment du choc. Aussi, le recourant a-t-il négligé le devoir de prudence découlant en particulier de l'art. 33 al. 2 LCR, qui lui imposait d'adapter sa vitesse de manière à pouvoir immobiliser son véhicule avant le passage pour piétons. Il est à cet égard sans importance que la fillette ait traversé sur le passage pour piétons ou à quelques mètres de celui-ci (le bus recouvrant la totalité du passage), dès lors que la prudence particulière exigée par l'art. 33 al. 2 LCR s'étend également aux abords du passage de sécurité. 
 
2.3 Lorsque, comme en l'espèce, il y a eu violation des règles de la prudence, il faut encore se demander si celle-ci peut être imputée à faute, c'est-à-dire si l'on peut reprocher à l'auteur, compte tenu de ses circonstances personnelles, d'avoir fait preuve d'un manque d'effort blâmable (ATF 122 IV 17 consid. 2b/ee p. 22, 145 consid. 3b/aa p. 148; 121 IV 207 consid. 2a p. 211/212). Il ne ressort nullement des faits constatés que des circonstances particulières auraient empêché le recourant de se conformer à ses devoirs. Il faut donc conclure qu'il a commis une négligence. 
 
2.4 Pour que l'infraction d'homicide par négligence soit réalisée, il ne suffit pas qu'il y ait d'une part une violation fautive d'un devoir de prudence et d'autre part le décès d'autrui. Il faut encore que soit établi un rapport de causalité entre cette violation et le décès. 
 
Le recourant ne remet pas en cause le rapport de causalité naturelle entre son comportement et le décès, ce qu'il ne pourrait d'ailleurs faire dans un pourvoi s'agissant d'une question de fait (ATF 122 IV 17 consid. 2c/aa p. 23), mais conteste l'existence d'un lien de causalité adéquate. 
 
Lorsque la causalité naturelle est retenue, il convient d'examiner si le rapport de causalité peut être qualifié d'adéquat, c'est-à-dire si le comportement était propre, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, à entraîner un résultat du genre de celui qui s'est produit, ce qui constitue une question de droit que la Cour de cassation revoit librement (ATF 122 IV 17 consid. 2c/bb p. 23). La causalité adéquate peut encore être exclue, l'enchaînement des faits perdant sa portée juridique, si une autre cause concomitante, par exemple une force naturelle, le comportement de la victime ou d'un tiers, constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si extraordinaire que l'on ne pouvait pas s'y attendre. L'imprévisibilité d'un acte concurrent ne suffit pas en soi à interrompre le lien de causalité adéquate. Il faut encore que cet acte revête une importance telle qu'il s'impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l'événement considéré, reléguant à l'arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à l'amener et notamment le comportement de l'auteur (ATF 122 IV 17 consid. 2c/bb p. 23). 
 
En l'espèce, il faut admettre qu'en circulant à une vitesse supérieure à la vitesse prescrite et en n'adaptant pas sa vitesse aux circonstances, le recourant a adopté un comportement de nature, dans le cours ordinaire des choses et selon l'expérience générale de la vie, à entraîner un accident aux conséquences mortelles ou au moins à en favoriser l'avènement. Au demeurant, il n'y a rien d'extraordinaire à ce qu'un enfant surgisse de derrière un bus et s'élance de manière irréfléchie sur un passage de sécurité, de sorte que cet aspect ne saurait reléguer à l'arrière-plan l'autre facteur qui a contribué à l'avènement du résultat, soit la manière de conduire du recourant. Ainsi, l'enchaînement des faits n'est pas de nature à exclure la causalité adéquate entre la violation des devoirs de la prudence du recourant et l'accident. 
 
2.5 Compte tenu de ce qui précède, c'est sans violer le droit fédéral que la cour cantonale a condamné le recourant sur la base de l'art. 117 CP
 
3. 
Dans la mesure où il est recevable, le pourvoi doit ainsi être rejeté (art. 278 al. 1 PPF). 
 
Succombant, le recourant sera condamné aux frais. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le pourvoi est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2. 
Un émolument judiciaire de 2'000 francs est mis à la charge du recourant. 
 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Ministère public et à la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel. 
 
Lausanne, le 3 avril 2006 
Au nom de la Cour de cassation pénale 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: