Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
Grössere Schrift
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_95/2023  
 
 
Arrêt du 12 décembre 2023  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jametti, Présidente, Hohl, Kiss, Rüedi et May Canellas. 
Greffier : M. Botteron. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par 
Me Blaise Stucki, 
et 
Me Daniel Tunik, 
recourante, 
 
contre  
 
B.________ SA, 
représentée par 
Me Thomas Steinmann et 
Me Philippe Ciocca, 
intimée. 
 
Objet 
contrat de prise en charge du courrier par la Poste suisse, respect du délai d'appel, degré de la preuve et moyens de preuve; 
 
recours contre l'arrêt rendu le 4 janvier 2023 par la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud (PT13.018389-211652, 5). 
 
 
Faits :  
 
A. La société B.________ SA (ci-après: la demanderesse ou l'intimée), dont le siège est à U.________, a ouvert une action en paiement contre A.________ SA (ci-après: la défenderesse ou l'appelante ou la recourante), dont le siège est à Y.________, devant la Chambre patrimoniale du canton de Vaud le 15 avril 2013.  
La Chambre patrimoniale cantonale a partiellement admis la demande et condamné la défenderesse à payer à la demanderesse le montant de 52'218'922 USD avec intérêts à 5 % l'an dès le 2 février 2012, par jugement du 21 septembre 2021, envoyé aux parties par pli recommandé du même jour. Ce jugement a été notifié à la défenderesse le lendemain 22 septembre 2021, de sorte que le délai d'appel de 30 jours venait à échéance le vendredi 22 octobre 2021 à minuit. 
 
B.  
 
B.a. La défenderesse, représentée par deux études d'avocat, a rédigé un appel motivé daté du 22 octobre 2021 contre ce jugement, concluant à l'admission de son appel, à l'annulation du jugement et à sa réforme en ce sens que, principalement, il lui soit donné acte qu'elle s'engage à payer à la demanderesse le montant de 3'797'361 USD avec intérêts à 5 % l'an dès le 15 avril 2014 et qu'elle y soit condamnée en tant que de besoin, subsidiairement, qu'elle soit condamnée à payer à la demanderesse le montant de 6'151'074,21 USD avec les mêmes intérêts, ainsi que, dans les deux cas, qu'elle soit condamnée à payer en sus à la demanderesse la somme de 2'226'599 USD avec les mêmes intérêts. Plus subsidiairement, elle conclut à l'annulation du jugement et au renvoi de la cause à la Chambre patrimoniale pour nouvelle décision dans le sens des considérants.  
L'acte d'appel daté du 22 octobre 2021 indique qu'il est envoyé le même jour. 
 
B.b. L'étude d'avocats de la défenderesse chargée de l'envoi de l'appel est au bénéfice d'un contrat de prise en charge avec la Poste suisse, lequel prévoit que celle-ci, par un coursier, vient directement à l'étude chaque jour de semaine, soit du lundi au vendredi, entre 17h et 17h30, pour prendre en charge ses envois postaux.  
 
B.c. En ce qui concerne l'envoi de l'appel en question, il résulte de l'extrait du suivi des envois postaux, fondé sur le code-barres (n. xxx) de l'étiquette apposée par l'appelante sur l'enveloppe dans laquelle cet appel était inséré, que la première opération attestée par la Poste suisse est le triage, en vue de sa distribution, du colis PostPac Economy, de 0,96 kg, au Centre colis de Daillens le lundi 25 octobre 2021 à 6h39. Le paquet a été distribué et est parvenu au Tribunal cantonal le mercredi 27 octobre à 7h27.  
Ayant eu des doutes quant au dépôt en temps utile de cet appel, le juge délégué de la cour d'appel civile du Tribunal cantonal vaudois a instruit cette question en sollicitant des déterminations de la part de l'appelante et de la Poste suisse. Il en est résulté les constatations suivantes: 
 
- Le 22 octobre 2021, à 16h30, C.________, collaboratrice au sein de l'étude d'avocats chargée de l'envoi par la poste, a envoyé à Me Tunik, ainsi qu'à trois autres personnes, le courriel suivant, auquel étaient joints l'appel et des pièces de forme: 
 
"L'appel joint part ce jour en recommandé avec ses annexes". 
- Puis, par courriel du même jour à 18h52, Me Tunik a confirmé à son co-mandataire Me Stucki, qui l'interrogeait à ce propos par courriel de 18h00, que l'envoi recommandé de l'appel était parti. 
- Ensuite, à 19h15, Me Tunik a adressé un courriel à trois représentants de la défenderesse indiquant l'objet de l'affaire, avec copie à Me Stucki, courriel qui comportait une version signée du mémoire d'appel destiné à la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
- Un courrier de la Poste suisse du 5 novembre 2021 indique que la Poste suisse "avait cherché le colis référencé... le vendredi 22 octobre dans le cadre de sa prestation de prise en charge". 
- Sollicitée par le Juge délégué de la cour d'appel, la Poste suisse a, par courrier du 13 décembre 2021, indiqué que "l'envoi... avait été pris en charge chez son client le vendredi 22 octobre 2021 entre 17h et 17h30", le client disposant "d'un contrat de prise en charge des envois du lundi au vendredi". 
- Enfin, le juge délégué ayant demandé à la Poste suisse "s'il existait une preuve matérielle objective" permettant d'établir formellement que le colis a été pris en charge par la poste, précisant qu'il s'agit "d'attester formellement de la date de prise en charge de ce coli [sic] spécifiquement", la poste a indiqué, par courrier du 12 janvier 2022, que les envois pris en charge par le coursier ne font pas l'objet d'une saisie électronique, que les heures ne sont pas scannées, que si l'expéditeur veut disposer de l'heure du dépôt, il doit déposer l'envoi séparément dans une filiale ou une base de distribution contre quittance de dépôt, et qu'en cas de tri du colis le 25 octobre 2021 à 6h39, il faut partir du principe qu'un dépôt devrait avoir eu lieu au plus tard le soir du 22 octobre 2021, ce qui correspondrait au contrat passé avec l'expéditeur. 
 
B.d. Selon l'appelante, l'enveloppe contenant l'acte d'appel a été remise au coursier de la Poste suisse qui est passé le vendredi 22 octobre 2021 entre 17h et 17h30 et cela vaut remise au sens de l'art. 143 CPC.  
De son côté, l'intimée a contesté la recevabilité de l'appel, faisant valoir que l'appelante n'est pas en mesure d'apporter la preuve stricte du dépôt de son acte d'appel dans le délai légal de 30 jours et qu'il est notoire que les envois collectés par la Poste suisse au domicile d'un client avec qui un contrat de prise en charge du courrier a été passé ne sont pas timbrés au moment où ils sont remis au coursier; elle s'est prévalue de la similitude existant avec la situation de celui qui dépose un pli dans une boîte postale après la fermeture des guichets et a soutenu que l'appelante aurait dû mentionner des indications concrètes directement sur son enveloppe pour pouvoir apporter par d'autres moyens la preuve d'une remise en temps utile; elle n'a pas exclu que l'appel ait pu être déposé dans une boîte postale publique; elle a encore soutenu que les offres de preuves de l'appelante sont tardives. 
L'appelante a encore répliqué spontanément et produit un bordereau de quinze pièces le 17 mars 2022. 
L'intimée a déposé une duplique spontanée, confirmant les conclusions de sa réponse à l'appel. 
L'appelante s'est encore déterminée sur la duplique et l'intimée sur cette dernière. 
 
B.e. Statuant par arrêt du 4 janvier 2023, la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal a déclaré l'appel de la défenderesse irrecevable.  
En substance, dans une motivation principale, la cour cantonale a considéré, en appliquant aux envois remis au coursier de la poste, qui vient chaque jour à l'étude prendre en charge le courrier, la jurisprudence relative au dépôt d'un pli simple dans une boîte postale, que l'appel, qui n'a pas été envoyé en recommandé, mais comme Colis PostPac Economy, est présumé avoir été déposé à la date ressortant du sceau postal, soit le 25 octobre 2021, que l'expéditeur qui entend renverser cette présomption doit indiquer spontanément - avant l'échéance du délai de recours et non après - à l'autorité compétente les moyens de preuve permettant de prouver qu'il a respecté le délai et que, ne l'ayant pas fait, malgré les éléments de preuve objectifs requis par l'autorité d'appel, ses offres de preuves sont tardives et, partant, que son appel est irrecevable. 
Dans une motivation subsidiaire ("Au demeurant"), la cour cantonale a commencé par rediscuter la tardiveté des moyens de preuve offerts, reprochant à l'avocat de l'appelante, qui doit savoir que le courrier pris en charge par le coursier de la poste n'est pas saisi électroniquement ni scanné, de n'avoir pas indiqué ses moyens de preuve sur l'enveloppe. Puis ("Par ailleurs..."), elle a considéré que la force probante des preuves offertes est insuffisante pour renverser la présomption d'une remise à la poste le lundi 25 octobre 2021 au regard de l'exigence de la preuve stricte imposée par la jurisprudence. Ainsi, elle a écarté tout d'abord les deux courriel du 5 novembre 2021 et courrier du 13 décembre 2021 de la poste au motif que leurs auteurs n'ont fourni que des informations générales, qu'ils n'étaient pas chargés d'exécuter le contrat en question et qu'ils ne pouvaient pas attester de la réalité effective de la remise de l'envoi litigieux le 22 octobre 2021; elle a relevé que le courrier du 12 janvier 2022 confirme qu'il n'y a pas de saisie électronique de la date du dépôt lors d'une remise effectuée selon le contrat de prise en charge, la preuve ne pouvant être rapportée par référence au cours ordinaire des choses. 
Ensuite, elle a écarté les moyens de preuve produits par l'appelante: elle a écarté le courriel de l'assistante de l'étude du 22 octobre 2021, interprétant "l'appel part" en ce sens que l'appel "doit partir", et écarté aussi les deux courriels des avocats parce qu'ils n'ont pas procédé eux-mêmes à la remise au coursier; elle a écarté les offres de témoignages des deux avocats, comme non pertinentes, et des deux employés concernés au sein de l'étude, compte tenu de leur lien de subordination avec leur employeuse, réitérant que ces offres de preuves sont tardives. Puis, revenant à nouveau sur les mêmes moyens, elle retient que l'assistante n'a fait qu'indiquer que l'acte de recours doit être expédié, que les avocats ne se sont pas occupés personnellement de la remise de l'envoi à la poste, et qu'il n'existe aucune preuve admissible de la remise effective. En outre, même si le coursier est, par hypothèse, passé à l'étude le 22 octobre 2021, rien n'établit que l'envoi litigieux lui aurait été remis. 
Enfin, elle a écarté l'application du principe de la confiance invoquée par les avocats de la défenderesse, lesquels indiquent qu'ils ont toujours utilisé cette manière de procéder sans difficulté, en insistant sur l'ATF 142 V 389 notamment, qui devait leur être connu. 
 
C.  
Contre cet arrêt, qui lui a été notifié le 11 janvier 2023, la défenderesse appelante a interjeté un recours en matière civile au Tribunal fédéral le 9 février 2023, concluant principalement à son annulation et à sa réforme en ce sens que son appel soit déclaré recevable et que la cause soit renvoyée à la cour cantonale pour suite de la procédure; subsidiairement, elle conclut à l'annulation de l'arrêt et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants et, plus subsidiairement encore, au renvoi de la cause à la cour cantonale pour instruction sur la recevabilité de son appel. Elle invoque la violation de l'art. 143 CPC, la violation de son droit à la preuve des art. 8 CC et 152 CPC, la violation du principe de la libre appréciation des preuves de l'art. 157 CPC et l'arbitraire dans l'appréciation des preuves au sens de l'art. 9 Cst., la violation de son droit à la preuve de l'art. 152 CPC et l'arbitraire dans l'appréciation anticipée des preuves. 
La demanderesse intimée conclut au rejet du recours. Outre sa détermination sur les griefs du recours, elle soulève un grief propre, soit la violation de l'art. 317 CPC
La cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt. 
Les parties ont encore déposé chacune des observations. 
Le 12 décembre 2023, la Cour de céans a délibéré sur le recours en séance publique. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre un arrêt final (art. 90 LTF), rendu par le tribunal supérieur du canton de Vaud (art. 75 LTF) et prononçant l'irrecevabilité de l'appel déposé par la défenderesse recourante (art. 76 al. 1 LTF), dans une affaire civile (art. 72 al. 1 LTF), dont la valeur litigieuse dépasse 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF), le recours en matière civile est recevable au regard de ces dispositions. 
 
2.  
Saisi d'un recours en matière civile, le Tribunal fédéral n'est pas lié par l'argumentation juridique développée par les parties ou par l'autorité précédente; il peut admettre le recours, comme il peut le rejeter en procédant à une substitution de motifs (ATF 135 III 397 consid. 1.4). 
 
3.  
Avant toute chose, il s'impose de rappeler les règles et principes jurisprudentiels applicables à l'envoi par la poste des actes judiciaires des parties. 
 
3.1. Selon l'art. 143 al. 1 CPC, l'acte doit être remis au plus tard le dernier jour du délai, à l'attention du tribunal, à la Poste suisse. Cette disposition est applicable au dépôt de l'acte d'appel qui, en vertu de l'art. 311 al. 1 CPC, doit être introduit dans les 30 jours à compter de la notification du jugement motivé.  
Le contenu matériel de l'art. 143 al. 1 CPC étant identique à celui des dispositions correspondantes des différentes lois de procédure fédérales, la jurisprudence rendue à propos de ces autres dispositions sera prise en considération (sur l'identité de contenu matériel avec l'art. 48 LTF, cf. l'arrêt 5A_972/2018 du 5 février 2019 consid. 4.1; 4A_215/2015 du 2 octobre 2015 consid. 3.1; avec l'art. 91 al. 2 CPP, cf. ATF 145 IV 259 consid. 1.4.1). 
 
3.2. En pratique, l'envoi postal est la règle. Le délai est sauvegardé si l'acte est remis à la Poste suisse le dernier jour du délai à minuit, le principe de l'expédition étant applicable (ATF 147 IV 526 consid. 3.1; 142 V 389 consid. 2.2; cf. arrêts 4A_466/2022 du 10 février 2023 consid, 3.1; 4A_71/2021 du 13 juillet 2021 consid. 2.3; 5A_503/2019 du 20 décembre 2019 consid. 4.1). L'acte est remis à la Poste suisse notamment au moment où il est déposé à un guichet postal, dans une boîte aux lettres postale, dans un automate "MyPost 24" (ATF 142 V 389 consid. 2.2 p. 391; arrêt 5A_972/2018 du 5 février 2019 consid. 4.2) ou encore à un guichet commercial durant les heures d'ouverture, accessible au moyen d'une carte d'accès magnétique (arrêt 4A_466/2022 du 10 février 2023 consid. 2-4). Il l'est également lorsque l'expéditeur a conclu avec la Poste suisse un contrat de prise en charge de ses envois postaux, et ce au moment où le coursier envoyé par la Poste suisse vient prendre livraison de ceux-ci au domicile de l'expéditeur (ATF 142 V 389 consid. 2-3).  
Autre est la question de savoir si le mode de transmission postal choisi par la partie fournit ou non une attestation de la date de la remise effective du pli à la poste 
 
3.3. La preuve de l'expédition d'un acte de procédure, en temps utile, incombe à la partie, conformément à l'art. 8 CC, qui est une règle de portée générale sur le fardeau de la preuve et qui s'applique par analogie en matière de procédure civile, notamment à la preuve du respect des conditions de recevabilité (ATF 142 V 389 consid. 2.2; 122 III 249 consid. 3b/cc; 106 Ib 77 consid. 2a/aa; WALTER, Berner Kommentar ZGB, n. 42 ss, 46, 251 ss, 268 ad art. 8 CC; ZINGG, Berner Kommentar ZPO, n. 15 ad art. 60 CPC; FREI, Berner Kommentar ZPO, n. 23 ad art. 143 CPC).  
La partie doit apporter la preuve certaine (ou stricte) de l'expédition de l'acte procédural en temps utile (ATF 142 V 389 consid. 2.2). Une telle preuve peut résulter du sceau postal, du récépissé de l'envoi posté en recommandé, de l'accusé de réception obtenu au guichet postal, de la quittance imprimée par l'automate MyPost 24 ou de tout autre moyen adéquat (tauglich), tel le témoignage d'une ou de plusieurs personnes (ATF 142 V 389 consid. 2.2; arrêt précité 5A_972/2018 consid. 4). 
La date du dépôt (c'est-à-dire de l'expédition) de l'acte est présumée coïncider avec celle du sceau postal. Toutefois, la partie qui prétend avoir déposé son acte antérieurement à la date attestée par le sceau postal a le droit de renverser la présomption, déduite du sceau postal, que sa remise à la poste serait tardive par tous moyens de preuve adéquats (ATF 147 IV 526 consid. 3.1; 142 V 389 consid. 2.2 et les arrêts cités). Le droit à la preuve est garanti directement par l'art. 152 al. 1 CPC, mais également par les art. 8 CC et 29 al. 2 Cst. 
 
3.4. Dans le cas où l'expéditeur a conclu avec la Poste suisse un contrat de prise en charge de ses envois postaux, contrat conformément auquel un coursier dépêché par la poste se rend à son domicile chaque jour de la semaine pour prendre en charge les envois du jour, le coursier ne délivre pas d'attestation, ni générale, ni pour un pli déterminé. La poste n'est pas obligée et ne garantit pas que les envois ainsi remis seront timbrés immédiatement après leur prise en charge. La première opération attestée par la Poste suisse, qui figure dans le système "Easy Track", est celle de la saisie au centre de tri dénommée "saisie en vue de distribution", laquelle peut être effectuée le lendemain ou même plus tard. Selon la jurisprudence, l'expéditeur court donc un risque considérable ("ganz erhebliches Risiko") de ne pas pouvoir apporter la preuve de la remise en temps utile de l'envoi à la poste. La preuve stricte que l'envoi a été pris en charge dans les locaux de l'expéditeur ne peut pas être considérée comme rapportée par la seule référence au cours ordinaire des choses. Une liste interne de l'expéditeur n'est pas suffisante, n'ayant que la valeur d'une allégation de partie. La preuve de la remise de l'envoi concret doit être apportée par d'autres moyens de preuve, comme des déclarations de témoins ou des prises de position de la poste (ATF 142 V 389 consid. 3.4).  
 
4.  
Est litigieuse en l'espèce la question de savoir si l'appelante est parvenue à renverser la présomption, qui découle de la date du sceau postal du lundi 25 octobre 2021, que la remise de l'acte d'appel à la poste est tardive, en prouvant qu'elle a bien remis le pli contenant l'acte d'appel en mains du coursier de la Poste suisse le vendredi 22 octobre 2021 entre 17h et 17h30. 
Vu les motifs de l'arrêt attaqué et les griefs des parties, il y a lieu d'examiner tout d'abord si les moyens de preuve ont été présentés en temps utile, l'intimée se prévalant de la violation de l'art. 317 al. 1 CPC (consid. 4.1 ci-après), puis si la jurisprudence en matière de remise d'un pli dans une boîte aux lettres publique en dehors des heures d'ouverture de la poste est applicable en cas de remise d'un acte au coursier de la poste (consid. 4.2 ci-après). Enfin, cas échéant, il faudra apprécier si la présomption a été renversée (consid. 4.3 ci-après). 
 
4.1. Premièrement, la demanderesse, intimée au présent recours, soutient que l'appel de la défenderesse serait irrecevable parce que les offres de preuves de celle-ci et les moyens de preuve recueillis d'office par la cour d'appel pour renverser la présomption découlant du sceau postal, ne peuvent être pris en considération, sauf à violer l'art. 317 al. 1 CPC.  
 
4.1.1. En vertu de l'art. 60 CPC, le tribunal examine d'office si les conditions de recevabilité de la demande sont remplies.  
Selon la jurisprudence, même lorsque le procès au fond est régi par la maxime des débats (art. 55 al. 1 CPC), l'établissement des faits nécessaires pour juger des conditions de recevabilité de la demande est soumis à la maxime inquisitoire simple en vertu de l'art. 60 CPC (ATF 139 III 278 consid. 4.3; arrêts 4A_165/2021 du 22 janvier 2022 consid. 3.2.3; 4A_100/2016 consid. 2.1). Selon cette dernière maxime, le tribunal doit admettre les faits et moyens de preuve nouveaux jusqu'aux délibérations, conformément à l'art. 229 al. 3 CPC. Doivent ainsi être admis les faits et moyens de preuve nouveaux - qu'il s'agisse de faux faits nouveaux ou de vrais faits nouveaux - en tout temps et sans condition jusqu'au début des délibérations de première instance (ATF 138 III 788 consid. 4.2). La règle de l'art. 229 al. 1-2 CPC qui ne donne aux parties le droit de s'exprimer librement que deux fois (ATF 146 III 55 consid. 2.3; 144 III 117 consid. 2.2) n'est pas applicable aux conditions de recevabilité (arrêt 4A_165/2021 précité consid. 3.2.3). L'obligation faite au tribunal d'examiner d'office les conditions de recevabilité ne signifie toutefois pas qu'il doive rechercher lui-même les faits justifiant la recevabilité de la demande. L'examen d'office ne dispense pas les parties de collaborer à l'établissement des faits, en alléguant ceux qui sont pertinents et en indiquant les moyens de preuve propres à les établir (ATF 141 III 294 consid. 6.1; 139 III 278 consid. 4.3; arrêt 4A_165/2021 précité consid. 3.2.2). 
Les règles et principes applicables à la recevabilité de la demande s'appliquent mutatis mutandis aux conditions de recevabilité des actes d'appel (art. 318 ss CPC) ou de recours (art. 319 ss CPC). Les restrictions imposées actuellement par la jurisprudence pour l'invocation des faits et moyens de preuve en appel (ATF 138 III 625 consid. 2.1-2.2, qui seront supprimées par l'art. 317 al. 1bis CPC à dater du 1er janvier 2025), ne sont toutefois pas applicables aux moyens de preuve relatifs au respect du délai d'appel, dès lors qu'il s'agit d'une question qui ne survient qu'en cours de procédure d'appel et où elle y est examinée pour la première fois. 
 
4.1.2. En l'espèce, toutes les preuves offertes par l'appelante et les preuves administrées d'office par la cour d'appel doivent être considérées comme recevables au regard des art. 60 et 317 al. 1 CPC, de sorte que l'appel ne peut être irrecevable pour le motif invoqué par l'intimée.  
 
4.2. Deuxièmement, la cour cantonale considère, dans sa motivation principale, que l'appel serait irrecevable parce que, contrairement à ce qu'exige la jurisprudence relative au dépôt d'un pli dans une boîte postale, l'appelante n'a pas indiqué, avant l'expiration du délai d'appel, ses moyens de preuve permettant de renverser la présomption, autrement dit, parce qu'elle n'a pas indiqué sur l'enveloppe (ou le colis) ayant contenu son appel, le nom d'un ou de plusieurs témoins susceptibles d'attester de la remise du pli en temps utile.  
 
4.2.1. Selon la jurisprudence rendue à propos du dépôt d'un acte par un avocat dans une boîte postale, le tribunal qui a ou doit avoir des doutes quant à la remise de l'acte en temps utile, alors que l'acte lui-même indique que le délai est respecté, doit donner l'occasion à l'expéditeur de fournir tous les moyens de preuve propres à établir ce fait. Il en va du respect de la garantie constitutionnelle de son droit d'être entendu et de son droit à la preuve de l'art. 29 al. 2 Cst. (arrêts 5P.113 et 114/2005 du 13 septembre 2006, rendus après échange de vues avec toutes les cours du Tribunal fédéral, consid. 3.1; 5D_101/2013 du 26 juillet 2013 consid. 3.2.3; 5A_599/2016 du 21 novembre 2016 consid. 3.2; 4A_556/2022 du 4 avril 2023 consid. 2; 5A_185/2022 du 21 décembre 2022 consid. 6; 6B_477/2015 du 22 décembre 2015 consid. 2.1.2).  
Toutefois, puisque l'avocat sait que le dépôt d'un pli dans une boîte postale après les heures de fermeture de la poste ne sera pas enregistré le jour même, mais à une date ultérieure, il ne peut se contenter de ce seul dépôt; selon les règles de la bonne foi, on peut attendre de lui, s'il souhaite pouvoir renverser la présomption résultant du sceau postal, qu'il indique spontanément (unaufgefordert) à l'autorité compétente avoir respecté le délai en présentant les moyens de preuve en attestant. Il pourra s'agir de l'inscription, sur l'enveloppe contenant l'acte, qu'il l'a déposée dans la boîte aux lettres postale avant l'échéance du délai en présence d'un ou de plusieurs témoins, avec indication de leurs noms et adresses, étant précisé que ce n'est pas leur signature sur l'enveloppe qui est le moyen de prouver le dépôt en temps utile, mais le témoignage qu'ils pourront en fournir en procédure (arrêts 4A_162/2023 du 23 mars 2023 consid. 4.1; 4A_106/2022 du 5 mai 2022 consid. 3.1.1; 5A_972/2018 du 5 février 2019 consid. 4.1). Il pourra aussi s'agir des mêmes indications dans l'acte de recours lui-même ou dans ses annexes, voire d'une séquence audiovisuelle filmant le dépôt (avec une incidence sur les frais de justice; ATF 147 IV 526 consid. 4; arrêt 4A_466/2022 du 10 février 2023 consid. 2). Exceptionnellement, dans certaines circonstances, l'intéressé pourra encore fournir la preuve dans un délai adapté (arrêt 4A_106/2022 précité consid. 3.1.1; 4A_216/2021 du 2 novembre 2021 consid. 2; 5A_965/2020 du 11 janvier 2021 consid. 4.2.3 et les arrêts cités). 
Il découle de cette jurisprudence que le tribunal ne peut en principe pas prononcer l'irrecevabilité, sans entendre au préalable l'expéditeur (art. 29 al. 2 Cst. et 152 CPC), s'il a ou doit avoir un doute quant à la tardiveté de l'acte déposé dans une boîte postale en dehors des heures d'ouverture de la poste, à moins que, de son côté, le justiciable ne se soit pas conformé aux règles de la bonne foi (art. 9 Cst. et 52 CPC) en indiquant spontanément au tribunal les moyens de preuve propres à établir que le délai a été respecté. 
 
4.2.2. En l'espèce, le tribunal, qui a clairement eu des doutes sur la tardiveté de l'appel, n'a pas prononcé l'irrecevabilité de celui-ci sans entendre au préalable l'appelante et son adverse partie sur la question du respect du délai, comme dans les arrêts 5P.113 et 114/2005 consid. 3.1, puisqu'il a instruit la question de la date du dépôt de l'acte.  
Quant à l'application de la jurisprudence relative au dépôt dans une boîte postale, qui exige que la partie indique spontanément les moyens de preuve permettant de contrôler le respect du délai, elle est fondée sur les règles de la bonne foi. Or, cette jurisprudence n'a pas été appliquée par le Tribunal fédéral dans son ATF 142 V 389, qui concerne précisément la remise d'un pli au coursier de la poste conformément à un contrat de prise en charge des envois postaux; le Tribunal fédéral a uniquement jugé que les moyens de preuve ne permettaient pas d'établir la preuve de la remise en temps utile (consid. 3.4). Même si le coursier de la poste ne délivre pas d'attestation (datée) de la remise d'un pli déterminé, la situation n'est pas comparable à celle de l'avocat qui jette un pli dans une boîte postale après les heures d'ouverture de la poste, contrairement à ce que soutient l'intimée. L'avocat qui procède à la remise de celui-ci au coursier durant les heures d'ouverture ne saurait être considéré comme agissant en violation des règles de la bonne foi et, partant, être privé de son droit de prouver par d'autres moyens de preuve adéquats qu'il a effectivement remis le pli en question au coursier à l'heure et à la date alléguées. 
En tant qu'elle ne fait en réalité qu'invoquer que la remise d'un pli au coursier de la poste est semblable au pli déposé dans une boîte postale en dehors des heures d'ouverture, puisque, dans les deux cas, aucune attestation n'est délivrée par la poste et que le risque encouru en matière de preuve est le même, l'intimée ne s'en prend pas à la question de la bonne foi dans le cas concret, de sorte que son grief est sans pertinence. 
 
4.3. Troisièmement, dans sa motivation subsidiaire, la cour cantonale considère que l'appel est irrecevable au motif que l'appelante n'a pas prouvé avoir remis à temps son envoi contenant l'appel, soit au plus tard le 22 octobre 2021.  
 
4.3.1. Selon la définition qui en est donnée par la jurisprudence, la preuve certaine (ou stricte; Gewissheit, Sicherheit) d'un fait est rapportée si le juge a acquis, en se fondant sur des éléments objectifs, la conviction de l'existence de ce fait. Une certitude absolue ne peut pas être exigée. Il suffit que le tribunal n'ait plus de doutes sérieux quant à l'existence de ce fait ou que les doutes qui subsistent semblent légers (ATF 130 III 321 consid. 3.2; cf. également les ATF 148 III 105 consid. 3.3.1; 148 III 134 consid. 3.4.1; 140 III 610 consid. 4.1; 132 III 715 consid. 3.1; arrêt 4A_531/2022 du 20 octobre 2023 consid. 3.1.4; 4A_599/2022 du 3 août 2023, destiné à publication, consid. 6.2.2; sur la degré de la preuve réduit de la vraisemblance prépondérante, cf. les mêmes arrêts).  
Cette définition du degré de la certitude adoptée pour les faits pertinents, soit les faits constitutifs des règles de droit matériel, doit s'appliquer également aux faits procéduraux, comme la remise à la poste de l'acte d'appel dans le délai de 30 jours de l'art. 311 al. 1 CPC
Il ne faut pas confondre la question du degré de la preuve - la certitude ou, cas échéant en cas de fait difficile à prouver de par sa nature, la vraisemblance prépondérante - avec la preuve par titre, qui est un moyen de preuve au sens de l'art. 168 let. b CPC (art. 177 ss CPC, cf. art. 254 al. 1 CPC). Si, dans certaines procédures spéciales, comme la procédure sommaire de mainlevée (ATF 145 III 160 consid. 5) ou la procédure d'opposition au séquestre (ATF 138 III 636 consid. 4.3), seule la preuve par titre est recevable, une telle exigence pour l'acte d'appel ne résulte ni du CPC, ni de la jurisprudence, qui admet expressément que le respect du délai peut être prouvé par tous les moyens de preuve adéquats. Sont des moyens de preuve adéquats (tauglich, cf. art. 152 al. 1 CPC) tous les moyens de preuve propres (ou aptes ou idoines ou utiles) à prouver le fait en question, en d'autres termes qui sont utiles pour découvrir la vérité (ATF 132 III 222 consid, 2.3; 129 III 18 consid. 2.6). L'expéditeur peut donc tenter la contre-preuve de la présomption de tardiveté découlant du sceau postal par tous moyens de preuve adéquats. 
Autrement dit, l'expéditeur qui choisit un mode de transmission postal sans délivrance par la poste d'une attestation - avec date et heure de remise - court le risque de ne pas pouvoir apporter la preuve certaine de la remise de l'envoi en temps utile à la Poste suisse, mais il a le droit de la tenter par tout autre moyen de preuve adéquat, notamment par témoignages, ce droit lui étant garanti tant par l'art. 29 al. 2 Cst., que par les art. 152 al. 1 CPC et 8 CC. 
 
4.3.2. En l'espèce, il résulte des courriers adressés par la cour cantonale à la Poste suisse et à l'avocat de l'appelante, par lesquels elle requiert une "preuve matérielle objective" permettant "d'attester formellement de la date de prise en charge de ce coli [sic] spécifiquement" par le coursier de la poste le 22 octobre 2021, que la conception du degré de la preuve de la cour cantonale est erronée. De plus, selon la loi et la jurisprudence, la preuve n'a pas à être apportée par titre, mais peut l'être par tous moyens de preuve adéquats.  
Lorsqu'elle écarte ensuite le courriel de l'assistante de l'avocat du 22 octobre 2021 à 16h30 ainsi que les courriels des avocats de la même date à 18h52 et 19h15, lesquels sont pourtant antérieurs à la survenance de la problématique du respect du délai d'appel et dont elle ne retient pas qu'ils auraient été fabriqués, c'est-à-dire falsifiés, pour les "besoins de la cause" et refuse, par appréciation anticipée des preuves, d'entendre les témoignages offerts, la cour cantonale pose des exigences qui sont exorbitantes au regard du degré de la preuve certaine applicable, ce degré de preuve tolérant, selon la définition qu'en a donnée la jurisprudence, la persistance, dans l'esprit du juge, de légers doutes. 
Les critiques de l'intimée doivent être écartées pour les mêmes motifs. En effet, en tant qu'elle exige une attestation formelle de la date de prise en charge par le coursier, qu'elle reproche à l'avocat de sa partie adverse de n'avoir pas pris la peine de se rendre à un guichet postal, elle ne fait qu'épouser la conception de la cour cantonale, dont on vient d'admettre qu'elle n'est pas conforme à la loi et à la jurisprudence. 
Le recours doit donc être admis pour violation du droit fédéral, ce qui rend superflu d'examiner les autres griefs de la recourante. 
 
4.4. La Cour de céans peut néanmoins se dispenser de renvoyer la cause à la cour cantonale pour qu'elle entende les témoins offerts par l'appelante et statue à nouveau, dès lors que l'arrêt attaqué contient tous les éléments de fait qui lui permettent de statuer immédiatement sur la question litigieuse.  
Comme on l'a vu, la remise de l'envoi contenant l'acte d'appel au coursier de la poste vaut remise à la poste. Il s'agit donc uniquement de savoir si les faits constatés permettent de se convaincre, au degré de la certitude, selon la définition donnée par la jurisprudence, premièrement, que le coursier de la poste est bien venu prendre livraison des envois postaux dans les locaux de l'étude le vendredi 22 octobre 2021 entre 17h et 17h30 et, deuxièmement, que le pli contenant l'acte d'appel de 0,960 kg (en trois exemplaires et avec annexes) lui a bien été remis à ce moment-là. 
 
4.4.1. En ce qui concerne le premier fait, le contrat de prise en charge conclu avec la poste prévoit qu'un coursier vient directement à l'étude, chaque jour de semaine, soit du lundi au vendredi, entre 17h et 17h30, pour prendre en charge les envois postaux. Il ne ressort pas des courriers de la poste qu'il y aurait eu une défaillance dans le service de la poste ce jour-là; la poste affirme même que le coursier est passé. La Cour de céans est ainsi convaincue que le coursier est bien passé prendre le courrier à l'étude ce jour-là.  
 
4.4.2. Quant à la remise du pli litigieux au coursier de la poste, la Cour de céans est convaincue que tel a bien été le cas sur la base du courriel de l'assistante de l'avocat, de l'échange de courriels entre les avocats et du courriel de l'avocat aux représentants de sa cliente. En effet, le courriel de l'assistante de l'avocat du 22 octobre 2021 à 16h30 confirme à celui-ci que "l'appel joint part ce jour... avec ses annexes", par quoi il faut entendre que l'enveloppe contenant l'appel qui a été rédigé (qui n'est pas un appel joint, mais un appel dont elle lui joint une copie) est prêt pour être emporté par le coursier. Puis, des courriels des deux avocats mandatés de 18h00 et 18h52, il résulte que le premier s'enquiert de savoir si l'envoi de l'appel est bien parti et que le second l'assure de ce fait. Enfin, le courriel de l'avocat à la défenderesse de 19h15 indique à celle-ci que l'appel a été adressé ce jour et lui joint une copie de l'appel signé. Par ailleurs, aucun indice de falsification des courriels n'a été évoqué par la partie adverse; tout au plus, précise-t-elle que la problématique de savoir si l'enregistrement le lundi matin est la seule explication avec une remise de l'envoi le vendredi ne se pose pas "quant au fait que le moyen de preuve soit falsifié ou non, mais quant à son degré de certitude". Et la cour cantonale n'a pas retenu de falsification. En conséquence, si un léger doute subsiste inévitablement, vu l'absence d'une attestation formelle de la poste offrant une preuve à 100%, comme celle qui est délivrée en cas d'envoi posté en recommandé, il est compatible avec la définition du degré de la certitude adoptée par la jurisprudence. La cour cantonale ne présuppose pas non plus que les avocats mandataires auraient encore modifié l'appel le samedi ou le dimanche et auraient ensuite jeté l'envoi dans une boîte postale suffisamment tôt pour être trié à Daillens à 6h39 le lundi. De la même façon, dans l'arrêt 4A_466/2022 du 10 février 2023, la cour de céans a déjà été convaincue qu'une secrétaire qui est allée remettre au guichet commercial de la poste le courrier du jour - son entrée dans le guichet ayant pu être établie - a bien remis l'acte litigieux (et ne l'a pas oublié à l'étude) alors même qu'aucune attestation spécifique concernant le pli en question n'avait été produite. L'intimée se trompe lorsqu'elle croit que cet arrêt était fort différent de la présente situation.  
Contrairement à ce qu'a retenu la cour cantonale, les courriels susmentionnés, qui sont antérieurs à l'objection de tardiveté, ne sont pas dénués de toute force probante et l'interprétation faite par la cour cantonale des termes du courriel de l'assistante "l'appel... part" en l'appel "doit partir" ou l'appel "doit être expédié"..., dont elle déduit qu'il n'attesterait pas que le pli est parti, ne peut être suivie. 
 
5.  
Il s'ensuit que le recours doit être admis, l'arrêt attaqué annulé et réformé en ce sens que l'appel de la défenderesse a bien été déposé dans le délai de 30 jours et est donc de ce point de vue recevable. Les frais de la présente procédure de recours ayant été causés par la recourante, qui a pris le risque d'un mode de transmission sans attestation de dépôt, ils seront mis à sa charge conformément à l'art. 66 al. 3 LTF (arrêt 6B_157/2020 du 7 février 2020 consid. 2.5). La cause sera renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure d'appel cantonale. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis et l'arrêt attaqué est annulé et réformé en ce sens que l'appel est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires de la procédure fédérale, arrêtés à 10'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 12'000 fr. à titre de dépens pour la procédure fédérale. 
 
4.  
La cause est renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure d'appel et pour suite de la procédure sur le fond. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 12 décembre 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jametti 
 
Le Greffier : Botteron