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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_709/2022  
 
 
Arrêt du 14 juillet 2023  
 
IIIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Stadelmann, Juge présidant, Moser-Szeless et Beusch. 
Greffier : M. Bürgisser. 
 
Participants à la procédure 
A.A.________, 
recourante, 
 
contre  
 
Administration fiscale cantonale du canton de Genève, 
rue du Stand 26, 1204 Genève, 
intimée. 
 
Objet 
Impôts cantonaux et communaux du canton de Genève, périodes fiscales 2015 à 2018, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 18 octobre 2022 (A/642/2021-ICCIFD - ATA/1062/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. B.A.________ était l'unique propriétaire d'une maison sise sur la parcelle n° xxx de la Commune de B.________ (canton de Genève), comprenant un appartement qu'il occupait avec son épouse, A.A.________ (ci-après: la contribuable), ainsi qu'un appartement loué à des tiers.  
Au décès de B.A.________, survenu en 2006, la contribuable est devenue usufruitière de l'immeuble et leurs deux enfants en ont hérité la nue-propriété. A.A.________ a continué d'habiter dans l'appartement dans lequel elle vivait avec son époux. Au moment du décès de celui-ci, la valeur fiscale de l'immeuble a été fixée à 7'513'000 fr. 
 
A.b. Par décision sur réclamation du 20 janvier 2021, l'Administration fiscale cantonale du canton de Genève (ci-après: l'Administration fiscale) a, pour les impôts cantonaux et communaux (ci-après: ICC) de l'année 2014, fixé la valeur de l'appartement occupé par la contribuable à 525'806 fr. (correspondant à une valeur de 949'140 fr., multipliée par la surface occupée par la contribuable de 92,33 %, à laquelle un abattement de 40 % pour occupation continue a été appliqué) et à 576'222 fr. pour l'appartement loué à des tiers.  
Dans ses déclarations fiscales des années 2015, 2016 et 2017, A.A.________ a déclaré une estimation fiscale sans abattement de 702'438 fr. pour l'appartement qu'elle occupait et de 248'221 fr. pour l'appartement loué à des tiers. Pour l'année 2018, elle a déclaré une valeur sans abattement de 666'350 fr. pour l'appartement qu'elle occupait et un montant de 1'410'030 fr. pour l'appartement loué. 
 
A.c. Statuant par décisions sur réclamation du 20 janvier 2021, l'Administration fiscale a, pour les ICC des années 2015 à 2017, fixé la valeur de l'appartement occupé par la contribuable à 4'162'067 fr. (correspondant à une valeur de 7'513'000 fr., multipliée par la surface occupée par la contribuable de 92,33 %, à laquelle un abattement pour utilisation continue de 40 % a été appliqué) et à 576'022 fr. pour la partie de la maison louée à des tiers. En bref, l'Administration fiscale a considéré qu'à la suite du décès de l'époux de la contribuable en 2006, la valeur fiscale de l'immeuble avait été fixée à 7'513'000 fr. La prise en compte de cette valeur n'était toutefois pas immédiate puisque le droit cantonal genevois prévoyait à cet égard un "effet suspensif" jusqu'à la fin de la période décennale des estimations fiscales de certains immeubles, soit en l'occurrence le 31 décembre 2014. Partant, il était correct d'adapter les valeurs fiscales en fonction de la valeur successorale précitée à compter de la période fiscale 2015, puis pour les années 2016 et 2017.  
Dans une décision sur réclamation du 10 février 2021 qui concerne les ICC de l'année 2018, l'Administration fiscale a repris les mêmes valeurs et les mêmes explications que dans ses décisions sur réclamation du 20 janvier 2021 portant sur les années fiscales 2015 à 2017. 
 
B.  
 
B.a. Statuant par jugement du 29 novembre 2021, le Tribunal administratif de première instance de la République et canton de Genève a rejeté le recours de la contribuable contre les décisions sur réclamation du 20 janvier 2021 (ICC 2015 à 2017) et du 10 février 2021 (ICC 2018).  
 
B.b. Par arrêt du 18 octobre 2022, la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative (ci-après: la Cour de justice), a rejeté le recours de la contribuable.  
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.A.________ conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal. A titre principal, elle demande en substance, pour les années 2015 à 2018, à ce que les décisions "de taxation sur réclamation", de même que les bordereaux rectificatifs y afférents soient annulés, et que la valeur fiscale brute de la partie de l'immeuble qu'elle occupe soit fixée, avant l'abattement de 40 % pour occupation continue, à 876'344 fr. De plus, elle conclut à ce que l'Administration fiscale soit invitée à "produire" des avis de taxation et bordereaux rectifiés en ce sens. Subsidiairement, elle conclut au renvoi de la cause à "une autorité cantonale afin que cette dernière adopte une nouvelle décision dûment motivée". 
Après que l'Administration fiscale a conclu au rejet du recours, la contribuable s'est encore déterminée. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Le recours est dirigé contre une décision rendue dans une cause de droit public (cf. art. 82 let. a LTF) par une autorité judiciaire cantonale supérieure de dernière instance (cf. art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF) sans qu'aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF ne soit réalisée, de sorte que la voie du recours en matière de droit public est en principe ouverte (cf. aussi art. 73 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes [LHID; RS 642.14]).  
 
1.2. La conclusion de la recourante relative à l'annulation des "décisions de taxation sur réclamation ICC 2015 à 2018" et des bordereaux rectificatifs y afférents de l'Administration fiscale est irrecevable, en raison de l'effet dévolutif complet du recours auprès de la Cour de justice (ATF 136 II 539 consid. 1.2; arrêt 2C_66/2022 du 8 décembre 2022 consid. 1.4).  
 
2.  
 
2.1. Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF et en dérogation à l'art. 106 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral n'examine la violation de droits fondamentaux ainsi que celle de dispositions de droit cantonal et intercantonal que si ce grief a été invoqué et motivé par le recourant, à savoir exposé de manière claire et détaillée (ATF 143 II 283 consid. 1.2.2). Il en va de même lorsque la LHID laisse une certaine marge de manoeuvre aux cantons ou lorsque l'on est en présence d'impôts purement cantonaux (cf. art. 95 LTF; ATF 134 II 207 consid. 2). Tel est le cas en l'espèce, puisqu'est en cause le point de savoir, pour les ICC des années 2015 à 2018, quelle est l'estimation fiscale du bien immobilier sur lequel la recourante jouit d'un usufruit.  
L'art. 14 LHID pose à cet égard des règles générales d'évaluation de la fortune, comme le principe de l'estimation à la valeur vénale. Selon la jurisprudence, les cantons disposent néanmoins d'une marge de manoeuvre importante pour concrétiser cette disposition (cf. arrêt 2C_194/2018 du 1 er octobre 2018 consid. 2). Aussi le pouvoir d'examen du Tribunal fédéral par rapport aux normes de droit cantonal qui respectent le cadre fixé par l'art. 14 LHID et concrétisent la marge de manoeuvre laissée aux cantons se limite-t-il à l'interdiction de l'arbitraire, grief qu'il appartient au recourant d'invoquer conformément aux exigences de motivation accrues de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 134 II 207 consid. 2 p. 209 s.; aussi arrêt 2C_83/2009 du 8 mai 2009 consid. 3.2). Dans ce cadre, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci apparaît insoutenable ou en contradiction manifeste avec la situation effective, ou encore si elle a été adoptée sans motifs objectifs ou en violation d'un droit certain. Lorsque l'interprétation défendue par l'autorité cantonale ne se révèle pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, elle est confirmée, même si une autre solution paraît également concevable, voire préférable. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision critiquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF 148 I 145 consid. 6.1; 142 V 513 consid. 4.2; 141 I 49 consid. 3.4).  
 
2.2. Pour statuer, le Tribunal fédéral se fonde sur les faits établis par l'autorité précédente (cf. art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des situations visées à l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (ATF 145 V 188 consid. 2; 142 II 355 consid. 6; 139 II 373 consid. 1.6).  
 
3.  
 
3.1. Selon l'art. 14 al. 1 LHID, la fortune est estimée à la valeur vénale. Toutefois, la valeur de rendement peut être prise en considération de façon appropriée. Cependant, la LHID ne prescrit pas au législateur cantonal une méthode d'évaluation précise pour déterminer la valeur vénale/de rendement et l'art. 14 al. 1 LHID laisse donc une importante liberté aux cantons pour élaborer et mettre en oeuvre leur réglementation, aussi bien quant au choix de la méthode de calcul applicable pour estimer la valeur vénale que pour déterminer dans quelle mesure le critère du rendement doit, le cas échéant, également être intégré dans l'estimation. Un certain schématisme est admis en la matière, pourvu que l'évaluation ne soit pas fondée sur le seul critère du rendement et qu'elle n'aboutisse pas à des résultats qui s'écartent par trop de la valeur vénale. La marge de manoeuvre des cantons se limite cependant aux règles d'évaluation et ne saurait permettre d'imposer un élément qui n'entre pas dans la notion de fortune au sens de l'art. 13 LHID (ATF 148 I 210 consid. 4.4.2; 134 II 207 consid. 3.6 et les références; arrêt 9C_670/2022 du 19 avril 2023 consid. 3.1.1).  
 
3.2. Le législateur genevois a concrétisé ces principes dans la loi cantonale du 27 septembre 2009 sur l'imposition des personnes physiques (LIPP; rs/GE D 3 08). L'art. 49 al. 2 LIPP prévoit que la fortune est estimée, en général, à la valeur vénale. L'art. 50 let. e LIPP précise que les "autres immeubles" situés dans le canton, soit notamment les villas, parcs, jardins d'agrément, ainsi que les immeubles en copropriété par étage, sont estimés en tenant compte du coût de leur construction, de leur état de vétusté, de leur ancienneté, des nuisances éventuelles, de leur situation, des servitudes et autres charges foncières les grevant, de prix d'achats récents ou d'attribution ensuite de succession ou de donation et des prix obtenus pour d'autres propriétés de même nature qui se trouvent dans des conditions analogues, à l'exception des ventes effectuées à des prix de caractère spéculatif. Cette estimation est diminuée de 4 % par année d'occupation continue par le même propriétaire ou usufruitier, jusqu'à concurrence de 40 %. Il est également tenu compte de la durée d'occupation continue par le précédent propriétaire, lorsqu'il s'agit, en cas de liquidation du régime matrimonial, de donation, d'acquisition par avancement d'hoirie ou par succession, du conjoint, de ses parents en ligne directe ou de ses frères et soeurs.  
Selon l'art. 52 al. 2 LIPP, l'évaluation des "autres immeubles" est faite par des commissions d'experts et vaut pour une période de 10 ans appelée période décennale. L'art. 52 al. 3 LIPP prévoit que lorsque, pendant cette période, un immeuble est aliéné à titre onéreux ou à titre gratuit, ou dévolu pour cause de mort, la valeur d'aliénation ou la valeur de succession retenue par le département pour la perception des droits d'enregistrement et de succession se substitue à la valeur d'estimation pour le reste de la période décennale. Selon l'art. 52 al. 4 let. b LIPP, pour le reste de la période décennale, l'adaptation de la valeur d'estimation selon l'al. 3 est suspendue en cas de succession, pour le logement principal de la personne décédée, s'il est attribué en propriété ou en usufruit à un héritier qui faisait ménage commun avec elle, tant que cet héritier continue à occuper personnellement le logement comme résidence principale. 
 
3.3. Comme l'a exposé la juridiction cantonale, une expertise générale des immeubles du canton de Genève a eu lieu pour la dernière fois en 1964. Par souci d'économie, le Grand Conseil du canton de Genève a prorogé à différentes reprises, à chaque fois pour une période décennale, les estimations alors déterminées avec une majoration de 20 %, sans nouvelle estimation par la commission d'experts. Pour la période décennale 2005-2014, le Grand Conseil a toutefois prorogé sans majoration les valeurs fiscales déterminantes au 31 décembre 2004. Le 24 août 2014, il a adopté la loi sur les estimations fiscales de certains immeubles (abrogeant l'ancienne loi du 29 novembre 2012 et entrée en vigueur le 1 er janvier 2015 [art. 3 aLEFI; cf. arrêts 9C_670/2022 du 19 avril 2023 consid. 3.1.2; 2C_194/2018 du 1 er octobre 2018 consid. 5.2.3 et les références]). Son article premier prévoyait que la durée de validité des estimations de la valeur fiscale des immeubles visés à l'art. 50 let. b à e de la LIPP était prorogée jusqu'au 31 décembre 2018; était reconduite jusqu'à cette date la valeur fiscale de ces immeubles au 31 décembre 2014, sans nouvelle estimation de la commission d'experts. L'art. 2 aLEFI prévoyait que "la valeur fiscale actuelle au sens de l'article 1 est celle qui est déterminante au 31 décembre 2014". Le Grand Conseil a adopté, le 22 novembre 2018, une nouvelle loi sur les estimations fiscales de certains immeubles (LEFI; rs/GE D 3 10), entrée en vigueur le 1 er janvier 2019, qui a derechef prorogé la durée de validité des estimations de la valeur fiscale de certains immeubles jusqu'au 31 décembre 2028 (art. 1 LEFI), avec une majoration de 7 % de la "valeur fiscale actuelle" au 31 décembre 2018 (art. 2 LEFI).  
 
4.  
La Cour de justice a considéré qu'à la suite du décès de l'époux de la recourante survenu en 2006, la valeur d'acquisition pour cause de mort du bien en usufruit s'était, à cette date, substituée à celle de 876'344 fr. qui avait cours durant la période décennale considérée (soit du 1 er janvier 2005 au 31 décembre 2014; cf. supra consid. 3.2). Toutefois, une prise en compte de la valeur du bien immobilier arrêtée à 7'513'000 fr. à l'occasion de la succession avait été "suspendue" en application de l'art. 52 al. 4 let. b LIPP jusqu'au 31 décembre 2014 uniquement. En revanche, et à compter du 1 er janvier 2015, la suspension avait pris fin au terme de la période décennale, de sorte que la valeur d'acquisition pour cause de mort constituait la valeur déterminante pour les ICC. Partant, l'intimée était fondée à fixer la valeur du bien immobilier sis à B.________ à 6'936'778 fr. (correspondant à la valeur de 7'513'000 fr., multiplié par 93,22 %) pour les périodes fiscales 2015 à 2018.  
 
5.  
 
5.1. Dans un grief qu'il convient d'examiner en premier, la recourante reproche à la juridiction cantonale d'avoir commis un déni de justice formel, puisque celle-ci n'aurait pas traité son argument tiré d'une "violation du principe de la légalité en lien avec les art. 1 et 2 LEFI". Elle avait en particulier invoqué, en instance cantonale, qu'"en refusant d'appliquer les art. 1 et 2 LEFI, le jugement attaqué [du Tribunal administratif de première instance du 29 novembre 2021] viole [...] le principe de la légalité" (mémoire de recours déposé devant la Cour de justice, p. 19).  
 
5.1.1. La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) le devoir pour le juge de motiver sa décision, afin que le justiciable puisse la comprendre, la contester utilement s'il y a lieu et exercer son droit de recours à bon escient. Pour répondre à ces exigences, le juge doit mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1; 134 I 83 consid. 4.1). En revanche, une autorité se rend coupable d'un déni de justice formel prohibé par l'art. 29 al. 2 Cst. lorsqu'elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre. L'autorité ne doit toutefois pas se prononcer sur tous les moyens des parties; elle peut se limiter aux questions décisives (ATF 142 II 154 consid. 4.2; 141 V 557 consid. 3.2.1; 137 II 266 consid. 3.2; 136 I 229 consid. 5.2).  
 
5.1.2. En l'espèce, la juridiction cantonale a considéré, en référence notamment à l'arrêt du Tribunal fédéral 2C_194/2018 du 1 er octobre 2018, que les lois sur l'estimation de divers immeubles, adoptées successivement par le Grand Conseil genevois, n'avaient pas pour objectif de remplacer entièrement le système d'estimation mis en place par le législateur cantonal; ces lois ne permettaient en particulier pas de déroger aux nouvelles valeurs d'estimation au sens de l'art. 52 al. 3 LIPP, et les adaptations prévues par cette disposition visaient à fixer des valeurs fiscales qui, comme l'exige l'art. 14 al. 1 LHID, correspondaient au mieux à la valeur vénale.  
Dès lors et contrairement à ce que prétend la recourante, la Cour de justice n'a pas fait montre d'un déni de justice formel en n'ayant "procédé à aucun examen du contenu matériel des art. 1 et 2 LEFI". Au contraire, elle a considéré que l'art. 52 al. 3 LIPP demeurait applicable en l'espèce, et ce nonobstant l'adoption par le législateur genevois des diverses lois sur les estimations fiscales de certains immeubles. Le fait que la juridiction cantonale a adopté un autre raisonnement juridique que celui de la recourante, qui fonde son argumentation uniquement sur la LEFI pour la détermination de la valeur du bien immobilier litigieux, n'est pas constitutif d'une violation de l'art. 29 al. 2 Cst. On ne saurait davantage déceler une violation de cette disposition constitutionnelle, lorsque la recourante prétend que la Cour de justice n'explique pas en quoi "l'art. 52 al. 3 LIP aurait vocation à trouver application au-delà de la période décennale, alors que la LEFI représente la seule base légale qui à vocation à s'appliquer". En effet, la juridiction cantonale a expliqué de manière claire que l'application de l'art. 52 al. 3 LIPP permettait d'obtenir des valeurs fiscales correspondant au mieux à la valeur vénale au sens de l'art. 14 LHID. Privé de fondement, le grief doit donc être écarté. 
 
5.2. Invoquant ensuite une violation de l'art. 29a Cst., la recourante reproche à la Cour de justice de s'être référée à "un obiter dictum formulé par le TF sous l'angle restreint de l'arbitraire" et d'avoir "implicitement restreint son pouvoir de cognition à l'arbitraire, alors qu'elle disposait d'un plein pouvoir de cognition dont elle devait faire usage" en application de la disposition constitutionnelle précitée.  
S'il est vrai que juger au sens de l'art. 29a Cst. signifie un examen complet des faits et du droit (ATF 147 IV 274 consid. 1.8.1 et la référence), rien ne permet toutefois d'affirmer que la Cour de justice aurait en l'espèce restreint son pouvoir d'examen du droit cantonal genevois à l'arbitraire. A la lecture de l'arrêt déféré, on doit au contraire conclure qu'elle a interprété librement le droit cantonal, tout en demeurant dans le cadre prescrit par l'art. 14 LHID (supra consid. 3.1). 
 
5.3.  
 
5.3.1. La recourante reproche également à la juridiction d'avoir violé le principe de la légalité (art. 127 al. 1 Cst.), en ce sens que les estimations afférentes à des immeubles "non locatifs" visés par la LIPP seraient périmées en fin de période décennale. Dès lors, la LIPP ne constituerait pas une base légale suffisante pour permettre au canton de Genève de prélever un impôt calculé "sur une estimation visée par la LIPP en cours de période décennale subséquente". Pour la recourante, la valeur déduite de l'art. 52 al. 3 LIPP n'aurait vocation à s'appliquer que pour le reste de la période décennale (soit en l'occurrence que jusqu'au 31 décembre 2014) et non pas pour la période décennale suivante, car ce sont les art. 1 et 2 LEFI qui constitueraient la base légale formelle exigée par la Constitution. Partant, selon le raisonnement de la recourante, la "valeur déterminante" pour l'estimation fiscale de l'immeuble en cause pour les années 2015 à 2018 serait celle résultant de la taxation définitive de l'année 2014 (soit 876'344 fr.), et non celle calculée en application de l'art. 52 al. 3 LIPP (soit 6'936'778 fr.).  
 
5.3.2. On rappellera que le principe de la légalité en droit fiscal, érigé en droit constitutionnel indépendant à l'art. 127 al. 1 Cst. et qui s'applique à toutes les contributions publiques, tant fédérales que cantonales ou communales, prévoit que les principes généraux régissant le régime fiscal, notamment la qualité de contribuable, l'objet de l'impôt et son mode de calcul, doivent être définis par la loi (cf. aussi art. 164 al. 1 let. d Cst.; ATF 148 II 121 consid. 5.1 et les arrêts cités).  
Sous l'angle uniquement du respect du principe de la légalité, le grief de la recourante doit être écarté. Il suffit de constater que l'art. 52 al. 3 LIPP fixe notamment l'objet de l'imp ôt et son mode de calcul, dans le cadre ici déterminant. Du reste, la recourante, lorsqu'elle se limite à affirmer que l'art. 52 al. 3 LIPP ne constituerait pas une "base légale présentant les caractéristiques requises par la Constitution fédérale" et que l'art. 52 LIPP serait "périmé", ne démontre pas de violation de l'art. 127 al. 1 Cst. conformément aux exigences accrues de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF
 
5.4. Pour le reste, la recourante confond le moyen tiré de la violation du principe de la légalité avec celui de l'interdiction de l'arbitraire dans l'application du droit cantonal, lorsqu'elle prétend que la "valeur déterminante" au 31 décembre 2014 au sens de l'art. 2 aLEFI (dans sa version au 1er janvier 2015) serait celle résultant de sa décision de taxation de la période fiscale 2014 et non celle résultant de la succession intervenue en 2006 selon l'art. 52 al. 3 LIPP, alors "suspendue par application de l'art. 52 al. 4 let. b LIPP". Sous cet angle, le grief tombe également à faux, en tant que la recourante ne parvient pas à démontrer que la cour cantonale a interprété le droit cantonal de manière arbitraire.  
En effet, suivre le raisonnement de la recourante reviendrait à enlever toute portée à l'art. 52 al. 3 et al. 4 let. b LIPP, puisque les valeurs "suspendues" en application du droit genevois pendant la période décennale arriveraient toujours à échéance au terme de celle-ci et ne pourraient plus être prises en compte pour la période décennale subséquente. Or le législateur genevois n'a jamais modifié ou supprimé l'art. 52 al. 3 et al. 4 let. b LIPP lors de l'adoption des lois successives sur l'estimation de certains immeubles. La recourante perd également de vue que le Tribunal fédéral, au considérant 6.4 de son arrêt 2C_194/2018 du 1er octobre 2018, a jugé qu'il n'est pas arbitraire de considérer que les LEFI, dans leur teneur successive, n'ont pas pour objectif de remplacer entièrement le système d'estimation mis en place par le législateur cantonal et, en particulier, qu'elles ne permettent pas de déroger aux nouvelles valeurs d'estimation au sens de l'art. 52 al. 3 LIPP. En outre, il a jugé que les adaptations prévues par cette disposition en cas d'aliénation ou de succession tendent à faire en sorte que les valeurs fiscales reconnues correspondent au mieux à la valeur vénale, comme l'exige l'art. 14 al. 1 LHID
 
5.5. Invoquant ensuite une violation du principe de l'égalité de traitement, la recourante requiert l'application à son cas d'un arrêt rendu par la Cour de justice le 6 février 2018 (ATA/127/2018), selon lequel celle-ci aurait jugé que la LEFI dans sa teneur depuis le 1er janvier 2015 prolongeait la suspension de l'adaptation de la valeur d'estimation en cas de succession au sens de l'art. 52 al. 4 let. b LIPP. A cet égard, la recourante méconnaît que le Tribunal fédéral a écarté un argument similaire dans son arrêt 2C_194/2018 du 1er octobre 2018. Comme il l'a dit à cette occasion, le Tribunal fédéral ne se fonde en principe pas sur des arrêts cantonaux dont il n'a pas à connaître (arrêt 2C_194/2018 du 1er octobre 2018 consid. 6.5 et les références). On doit également considérer que la contribuable, pour peu qu'on la comprenne lorsqu'elle effectue une analogie entre les faits résultant de l'arrêt 2C_194/2018 et sa propre situation, ne démontre pas que la Cour de justice aurait mal appliqué le droit cantonal. La recourante se réfère en effet en vain, en rapport avec l'arrêt 2C_194/2018, à un remaniement parcellaire intervenu en 2008, alors qu'il n'est pas question d'un tel remaniement en l'espèce. De plus, celui-ci concernait une parcelle sur laquelle le logement n'était pas occupé par la contribuable (cf. arrêt 2C_194/2018 du 1er octobre 2018 consid. 6.3 et 6.5). En outre, la recourante ne s'en prend pas aux considérations de la juridiction cantonale selon lesquelles l'arrêt cantonal qu'elle invoque (ATA/127/2018) constituait une décision isolée; celle-ci n'avait pas été reprise dans des arrêts subséquents, dans lesquels elle a posé des principes relatifs à la coordination entre la LIPP et la LEFI qu'elle a également appliqués dans l'arrêt entrepris. Selon les juges cantonaux, leur jurisprudence depuis 2021 se montrait plus conforme à l'art. 14 LHID que l'arrêt cantonal invoqué par la recourante, de sorte que le principe d'interdiction de l'égalité dans l'illégalité empêchait de toute façon de traiter le cas de la recourante de manière similaire à celui ayant donné lieu à l'arrêt ATA/127/2018. Il n'y a dès lors pas lieu de revenir sur ces considérations, pas plus que sur les autres moyens invoqués par la recourante en lien avec une application à son cas de l'arrêt du 6 février 2018 (ATA/127/2018), soit l'absence de lacune dans la LEFI - prétendument démontrée à l'aide d'une exégèse du droit cantonal topique - que la Cour de justice ne pouvait pas combler par sa jurisprudence.  
 
6.  
Entièrement mal fondé, le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. 
 
7.  
Succombant, la recourante doit supporter un émolument judiciaire (art. 66 al. 1 LTF). Il ne sera pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué à la recourante, à l'Administration fiscale cantonale du canton de Genève, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 4 ème section, et à l'Administration fédérale des contributions.  
 
 
Lucerne, le 14 juillet 2023 
 
Au nom de la IIIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Juge présidant : Stadelmann 
 
Le Greffier : Bürgisser