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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1P.778/2003 /col 
 
Arrêt du 26 janvier 2004 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Féraud, Juge présidant, Aeschlimann 
et Fonjallaz. 
Greffier: M. Thélin. 
 
Parties 
B.________, 
recourant, représenté par Me Marc Wollmann, avocat, 
 
contre 
 
Juge d'instruction du canton du Jura, 
Le Château, 2900 Porrentruy, 
Procureur général du canton du Jura, 
Le Château, 2900 Porrentruy, 
Tribunal cantonal du canton du Jura, 
Chambre d'accusation, Le Château, 2900 Porrentruy. 
 
Objet 
détention préventive 
 
recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre d'accusation du 21 novembre 2003. 
 
Le Tribunal fédéral considère en fait et en droit: 
1. 
B.________ est soupçonné d'avoir pris part à un brigandage commis le 28 novembre 2002 au Casino du Jura à Courrendlin, de sorte que depuis le 3 janvier 2003, il se trouve en détention préventive pour les besoins de la poursuite pénale ouverte par les autorités jurassiennes. Il a présenté une demande de mise en liberté le 4 novembre 2003, que le Juge d'instruction a rejetée le 6 suivant. Conformément au droit cantonal de procédure, ce magistrat a transmis la demande, pour décision, à la Chambre d'accusation du Tribunal cantonal. Cette autorité a confirmé le rejet de la requête par arrêt du 21 novembre 2003, en raison d'un risque de fuite. 
2. 
Agissant par la voie du recours de droit public, B.________ requiert le Tribunal fédéral d'annuler ce dernier prononcé et d'ordonner sa mise en liberté immédiate. Il conteste l'existence d'un risque pertinent de fuite et il tient donc son incarcération pour contraire à l'art. 31 al. 1 Cst. Une demande d'assistance judiciaire est jointe au recours. 
Invités à répondre, le Ministère public cantonal et la juridiction intimée proposent le rejet du recours; le Juge d'instruction n'a pas déposé d'observations. 
Le recourant a pu déposer une réplique; il persiste dans son argumentation et ses conclusions. 
3. 
Le recours de droit public ne peut en principe tendre qu'à l'annulation de la décision attaquée. La personne qui recourt contre une décision ordonnant ou prolongeant sa détention préventive, ou contre une décision rejetant une demande de mise en liberté provisoire, peut cependant requérir du Tribunal fédéral d'ordonner lui-même sa mise en liberté ou d'inviter l'autorité cantonale à le faire après avoir, au besoin, fixé certaines conditions (ATF 124 I 327 consid. 4b/aa p. 332/333, 115 Ia 293 consid. 1a, 107 Ia 257 consid. 1). Les conclusions présentées par le recourant sont ainsi recevables. 
 
4. 
La détention préventive est une restriction de la liberté personnelle qui est actuellement garantie, notamment, par l'art. 31 al. 1 Cst. A ce titre, elle n'est admissible que dans la mesure où elle repose sur une base légale, répond à un intérêt public et respecte le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 1 à 3 Cst.; ATF 128 I 184 consid. 2.1 p. 186; 124 I 203 consid. 2b p. 204/205; 123 I 268 consid. 2c p. 270, 120 Ia 147 consid. 2b p. 150). Dans le canton du Jura, la détention préventive est prévue par l'art. 129 al. 2 CPP jur.; en l'espèce, l'existence de la base légale n'est d'ailleurs pas contestée. 
La détention préventive ne répond à un intérêt public que si, entre autres conditions, il existe des raisons plausibles de soupçonner la personne concernée d'avoir commis une infraction (art. 5 par. 1 let. c CEDH). En outre, l'incarcération doit être justifiée par les besoins de l'instruction ou du jugement de la cause pénale, ou par la sauvegarde de l'ordre public. Il faut qu'en raison des circonstances, l'élargissement du prévenu fasse naître un risque concret de fuite, de collusion ou de récidive. La gravité de l'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier la prolongation de la détention, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite en raison de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé (ATF 125 I 60 consid. 3a p. 62, 117 Ia 69 consid. 4a p. 70, 108 Ia 64 consid. 3 p. 67). 
5. 
Le recourant conteste le rôle qui lui est imputé dans le brigandage perpétré le 28 novembre 2002 mais il admet néanmoins, en précisant que cela ne doit pas être retenu comme un aveu, l'existence d'indices de culpabilité suffisamment graves pour justifier la détention préventive. Il encourt une lourde peine de réclusion, de durée supérieure à cinq ans, selon l'art. 140 ch. 4 CP. En effet, d'après les constatations médicales recueillies dans l'enquête, la vie de la victime a été mise en danger par l'agression subie. En outre, selon le récit de cet employé du casino, les agresseurs lui ont tiré une balle dans la jambe alors que, après l'avoir frappé et maîtrisé, ils le traînaient sur le sol; on ne saurait exclure que cette violence puisse être considérée comme un traitement cruel selon la disposition précitée. 
6. 
Pour réfuter l'appréciation litigieuse concernant le risque de fuite, le recourant fait valoir qu'il est citoyen suisse et qu'il vit dans notre pays, avec son père et d'autres parents, depuis l'âge de sept ans. Il se dit fiancé avec une suissesse dont il a un enfant âgé de deux ans. Il affirme encore qu'il lui serait impossible de se reconstituer une situation en Bosnie et Herzégovine, pays dont il a aussi la nationalité, parce qu'il n'y conserve plus de relations familiales proches, que les conditions de vie y sont très défavorables et qu'il risquerait, là également, d'être arrêté et jugé pour les événements survenus à Courrendlin. 
Interrogé le 1er janvier 2003 par la police de son lieu de domicile, soit immédiatement avant son incarcération, le recourant a indiqué qu'il avait été fiancé trois ans auparavant et qu'un enfant était issu de cette relation, celui-ci vivant avec sa mère; il avait depuis une autre amie, mais sans ménage commun avec elle. Cette amie, de même que l'ancienne fiancée, a demandé l'autorisation de rendre visite au détenu. Dans sa réplique aux observations des autorités intimées, celui-ci explique toutefois qu'il a renoué avec cette précédente compagne et qu'elle vient régulièrement le voir; en annexe, il produit une déclaration qu'elle a établie pour les besoins de la présente procédure, attestant de leurs projets de vie commune, de mariage et d'un deuxième enfant. 
Le recourant a une formation de peintre en carrosserie mais lors de l'interrogatoire précité, il était chômeur et son dernier emploi, en automne 2002, avait duré trois mois. Avant sa privation de liberté, il n'avait donc pas de situation familiale et professionnelle stable. 
Dépourvu d'économies, il avait au contraire des dettes pour un total d'environ 55'000 fr.; selon des explications ultérieures à la police jurassienne, le 3 janvier 2003, il les avait contractées pour des achats de voitures ou des locations d'appartements. Il avait d'ailleurs deux véhicules immatriculés à son nom dans son canton de domicile, dont une Jaguar. Le 16 mai 2003, il a encore expliqué au Juge d'instruction que pour lui, l'apparence est importante, en particulier quant à ses vêtements. En décembre 2002, il a fait ouvrir un compte postal dans l'espérance que, même sans provision, il puisse retirer de l'argent. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de mettre en doute l'appréciation que le Juge d'instruction a consignée dans son ordonnance rejetant la demande de mise en liberté, selon laquelle le recourant attribue une importance excessive à son aspect extérieur et lui consacre des moyens financiers sans rapport avec ses ressources effectives. Or, une personne qui pratique ce mode de vie n'est généralement pas disposée à envisager sereinement l'éventualité d'entrer en prison pour de longues années. 
A fin 2002, selon ses déclarations du 3 janvier suivant, le recourant s'est rendu durant une semaine et demie dans son pays d'origine, à la suite du décès de sa grand-mère. Cela dénote qu'en dépit de ses affirmations, il conserve vraisemblablement des relations assez étroites en Bosnie et Herzégovine. Compte tenu de son âge - il a vingt-cinq ans - et de la gravité de la peine entrant en considération, ainsi que de l'ensemble des circonstances précitées, on doit prévoir que s'il était remis en liberté, le recourant serait sérieusement tenté de prendre la fuite dans ledit pays plutôt que se soumettre à la justice suisse. Ainsi, les autorités jurassiennes évaluent le risque de fuite d'une façon conforme à l'art. 31 al. 1 Cst. 
7. 
Le principe de la proportionnalité n'est pas en cause dans la présente affaire; en particulier, le recourant ne prétend pas que les autorités jurassiennes puissent parer au risque de fuite par une mesure moins contraignante que la détention préventive. Le recours pour violation de l'art. 31 al. 1 Cst. se révèle donc mal fondé, ce qui entraîne son rejet. 
8. 
Selon l'art. 152 OJ, le Tribunal fédéral peut accorder l'assistance judiciaire à une partie à condition que celle-ci soit dans le besoin et que ses conclusions ne paraissent pas d'emblée vouées à l'échec. En l'occurrence, ces exigences peuvent être tenues pour satisfaites, de sorte que la demande d'assistance judiciaire sera admise. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté. 
2. 
La demande d'assistance judiciaire est admise et Me Marc Wollmann est désigné en qualité d'avocat d'office du recourant. 
3. 
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire. 
4. 
La caisse du Tribunal fédéral versera une indemnité de 1'500 fr. à Me Wollmann à titre d'honoraires. 
5. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Juge d'instruction, au Procureur général et au Tribunal cantonal du canton du Jura. 
Lausanne, le 26 janvier 2004 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le juge présidant: Le greffier: