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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_537/2022  
 
 
Arrêt du 7 février 2023  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Haag et Merz. 
Greffier : M. Kurz. 
 
Participants à la procédure 
A.A.________ et B.A.________, 
tous les deux représentés par 
Me Henri-Philippe Sambuc, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
Municipalité de Mies, 
rue du Village 1, 1295 Mies, 
représentée par Me Patrick Michod, avocat. 
 
Objet 
Récusation, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud, 
du 2 septembre 2022 (AC.2021.0166). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le 4 octobre 1999, la Municipalité de Mies a accordé aux frères A.A.________, C.A.________ et D.A.________ l'autorisation de construire une villa de deux logements avec piscine sur la parcelle n° 105, alors sise en zone de villas A. Le permis précise notamment que les combles ne sont pas habitables. 
Par décision du 8 février 2002, la municipalité a constaté que la villa comportait quatre cuisines au lieu de deux et que les portes de communication intérieures n'avaient pas été réalisées, ce qui modifiait la conception du bâtiment et allait également dans le sens de l'aménagement de quatre logements au lieu de deux. Le permis d'habiter ne pouvait être délivré dans ces conditions et un délai au 30 avril 2002 était imparti pour démolir les cuisines non réglementaires et créer les portes intérieures manquantes. Le permis d'habiter a été délivré le 17 décembre 2002 et le délai de mise en conformité a été reporté au 28 février 2003. 
 
B.  
Le 6 novembre 2019, D.A.________, faisant état d'un conflit familial qui l'opposait à son père B.A.________ (lequel était devenu copropriétaire après le décès de C.A.________ en mars 2002) et à son frère A.A.________, a dénoncé l'existence de trois logements (dont un dans les combles) et de quatre cuisines dans la villa. Après l'organisation de diverses séances entre les parties, le Syndic F.________ et le Vice-syndic G.________ pour obtenir un accord afin de régulariser la situation par le biais d'une division de parcelle, la municipalité a fait savoir, le 22 février 2021, qu'elle procéderait le 5 mai 2021 à une inspection du bâtiment pour en vérifier la conformité. 
Le 9 mars 2021, B.A.________ et A.A.________ ont reproché au Syndic de s'être impliqué dans le conflit et d'avoir pris position en faveur de D.A.________. Par conséquent, toute nouvelle décision ne pourrait être signée ni par le Syndic, ni par le Vice-syndic. 
Par décision du 13 avril 2021, prise sans la participation des deux municipaux concernés, la municipalité a indiqué qu'elle avait accepté la proposition de ceux-ci de ne plus traiter dorénavant ce dossier (tout en estimant qu'aucun motif de récusation ne pouvait être retenu à leur encontre), et a maintenu la date du 5 mai 2021 pour procéder à l'inspection. 
 
C.  
B.A.________ et A.A.________ ont saisi la Direction générale des affaires institutionnelles et des communes du canton de Vaud en demandant l'annulation de la visite fixée au 5 mai 2021 et la récusation de l'ensemble des membres de la municipalité. La cause a été transmise à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud (CDAP), comme objet de sa compétence. 
En dépit de ce recours, la visite de la villa a eu lieu le 5 mai 2022. Y ont participé le Municipal H.________, un représentant du service technique intercommunal, un technicien et l'avocate de la commune. Le 31 mai suivant, la municipalité (sous la plume du Municipal précité et de la Secrétaire municipale) a constaté la non-conformité de la villa avec les permis de construire et d'habiter, et a ordonné sa mise en conformité. B.A.________ et A.A.________ ont également saisi la CDAP. 
 
D.  
Par arrêt du 2 septembre 2022, la CDAP a rejeté le recours concernant la récusation des membres de la Municipalité, après avoir refusé de procéder à leur audition. La municipalité était intervenue en toute transparence auprès des trois concernés, suite à la demande initiale de D.A.________, afin de trouver une solution au litige familial et de régulariser la villa. Après la demande de récusation, le Syndic et le Vice-syndic n'étaient plus intervenus de sorte que la question de l'existence d'un motif de récusation était sans objet. Il n'existait pas de motif de récusation à l'encontre des trois autres membres de la municipalité: la décision du 12 avril 2021 confirmant la visite de la villa faisait logiquement suite à l'échec de la tentative de conciliation, et entrait dans les compétences habituelles de la municipalité. 
Par arrêt du même jour, la CDAP a rejeté le recours formé contre l'ordre de remise en état. 
 
E.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, B.A.________ et A.A.________ demandent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt cantonal et de récuser les cinq membres de la Municipalité de Mies pour tout ce qui concerne les questions administratives liées à l'immeuble n° 105 des recourants. Subsidiairement, ils concluent au renvoi de la cause à la CDAP pour nouvelle décision selon les considérants du Tribunal fédéral. Les mêmes recourants forment également un recours contre l'arrêt cantonal concernant l'ordre de remise en état (cause 1C_538/2022). 
La CDAP renonce à se déterminer et se réfère aux considérants de son arrêt. La Municipalité de Mies conclut à l'irrecevabilité, subsidiairement au rejet du recours. Les recourants ont déposé une réplique spontanée, demandant la jonction des causes 1C_537/2022 et 1C_538/2022. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre un arrêt rendu dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF). Il est formé, dans les trente jours (art. 100 al. 1 LTF), contre un arrêt émanant d'une autorité de dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF). L'arrêt attaqué portant sur la question de la récusation des membres de la municipalité, le recours est recevable selon l'art. 92 al. 1 LTF et les recourants, auteurs de la demande de récusation qui a été écartée, ont qualité pour recourir (art. 89 al. 1 LTF). 
 
1.1. Les recourants demandent formellement, dans leur réplique, la jonction des deux causes les concernant. La procédure concernant l'ordre de démolition comprend toutefois une partie supplémentaire (D.E.________ - anciennement D.A.________) qui ne participe pas à la procédure concernant la récusation. Une telle jonction ne se justifie donc pas, dès lors que les parties et les objets litigieux sont différents.  
 
1.2. Comme on le verra, le recours apparaît certes manifestement mal fondé; il n'y a pas, cela étant, à s'interroger comme le voudrait la municipalité sur l'existence d'une cause d'irrecevabilité au sens de l'art. 42 al. 7 LTF (recours procédurier ou abusif).  
 
2.  
Les recourants contestent que leur recours cantonal soit devenu sans objet en ce qui concerne la récusation du Syndic et du Vice-syndic, après que ceux-ci se sont spontanément récusés. Les recourants relèvent que cette récusation spontanée n'est pas intervenue pour un motif légal (notamment l'existence d'un intérêt personnel ou matériel), mais uniquement pour couper court à toute discussion et éviter de perdre du temps. Cette manière de procéder serait abusive (art. 5 al. 3 Cst.) car elle permettrait d'éviter aux magistrats de satisfaire à leurs obligations d'impartialité (art. 29 al. 1 Cst.). La question de la récusation ne pouvait pas être évitée puisque les magistrats concernés, réélus jusqu'en 2026, seront appelés à rendre de nombreuses décisions concernant l'immeuble familial des recourants. 
Comme le relève la cour cantonale, la municipalité a décidé de procéder hors la présence du Syndic et du Vice-syndic, et d'accepter la proposition de ceux-ci "de ne plus traiter dorénavant ce dossier". Ce faisant, l'autorité a donné satisfaction aux recourants qui se plaignaient de prévention de la part des deux magistrats en question. La demande de récusation était dès lors manifestement sans objet sur ce point et les recourants ne disposent d'aucun intérêt digne de protection à ce que la question d'une éventuelle prévention soit encore examinée (cf. arrêts 5A_545/2020 du 7 février 2022 consid. 1.7 non publié in ATF 148 III 245; 1B_167/2022 du 10 août 2022 consid. 2; 4A_258/2022 du 4 août 2022; 2C_454/2020 du 5 août 2021 consid. 2). La municipalité ayant accepté la proposition des deux intéressés "de ne plus traiter dorénavant ce dossier", une intervention ultérieure des deux magistrats en rapport avec la villa familiale est également exclue. L'arrêt attaqué ne prête pas le flanc à la critique sur ce point. 
Dans la mesure où la demande de récusation concernant le Syndic et le Vice-syndic pouvait être déclarée sans objet, les autres griefs relatifs à cette question (chapitres II et III du recours) sont eux aussi dépourvus d'objet. 
 
3.  
Les recourants soutiennent ensuite que les trois autres Municipaux devaient eux aussi se récuser. Ils contestent l'appréciation de la cour cantonale selon laquelle aucune cause de récusation n'était invoquée à leur encontre, et relèvent qu'en réplique ils avaient critiqué les motifs de la décision du 13 avril 2021, relevant que les intéressés avaient ainsi "coupé court et dénié toute réalité aux griefs à l'encontre de leurs collègues; avec effet de valider une pseudo-conciliation; organisé de manière partisane, unilatérale et trompeuse; en dénigrant les recourants pénalement suspects; en les accusant de procédure purement dilatoire; le tout sous l'influence avérée du syndic". 
 
3.1. L'art. 29 al. 1 Cst. dispose que toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement. Selon la jurisprudence, ce droit permet notamment d'exiger la récusation des membres d'une autorité administrative dont la situation ou le comportement sont de nature à faire naître un doute sur leur indépendance ou leur impartialité; il tend à éviter que des circonstances extérieures à l'affaire ne puissent influencer une décision en faveur ou au détriment de la personne concernée. La récusation peut s'imposer même si une prévention effective du membre de l'autorité visée n'est pas établie, car une disposition interne de sa part ne peut guère être prouvée; il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale. Cependant, seules des circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération; les impressions purement individuelles d'une des personnes impliquées ne sont pas décisives (cf. ATF 139 III 120 consid. 3.2.1; arrêt 2C_931/2015 du 12 octobre 2016 consid. 5.1).  
De manière générale, les dispositions sur la récusation sont moins sévères pour les membres des autorités administratives que pour les autorités judiciaires. Contrairement à l'art. 30 al. 1 Cst., l'art. 29 al. 1 Cst. n'impose pas l'indépendance et l'impartialité comme maxime d'organisation. En règle générale, les prises de position qui s'inscrivent dans l'exercice normal des fonctions gouvernementales, administratives ou de gestion, ou dans les attributions normales de l'autorité partie à la procédure, ne permettent pas, dès lors que l'autorité s'exprime avec la réserve nécessaire, de conclure à l'apparence de la partialité et ne sauraient justifier une récusation, au risque sinon de vider de son sens la procédure administrative (arrêt 1C_657/2018 du 18 mars 2021, consid. 4.1 non publié in ATF 147 II 319; ATF 140 I 326 consid. 5.2). Le membre d'une autorité a en revanche le devoir de se récuser lorsqu'il dispose d'un intérêt personnel dans l'affaire à traiter, qu'il manifeste expressément son antipathie envers l'une des parties ou s'est forgé une opinion inébranlable avant même d'avoir pris connaissance de tous les faits pertinents de la cause (arrêt 1C_265/2021 du 11 octobre 2021 consid. 4.1). La récusation ne touche en principe que les personnes physiques individuelles composant les autorités, et non l'autorité en tant que telle. Une demande de récusation dirigée contre une autorité dans son ensemble peut cependant être examinée comme si elle était dirigée contre chacun des membres de l'autorité pris individuellement (arrêts 1C_265/2021 du 11 octobre 2021 consid. 4.1; 2C_187/2021 du 11 mai 2021 consid. 3.1; 2C_110/2019 du 9 décembre 2019 consid. 5.3 et les références citées). 
 
3.2. Contrairement à ce que soutiennent les recourants, la cour cantonale n'a pas considéré qu'aucun motif de récusation n'était soulevé à l'encontre des trois municipaux, mais qu'aucun d'entre eux n'était "de nature à faire naître un doute sur l'impartialité ou l'indépendance" de ceux-ci: ils n'avaient pas été impliqués dans les tentatives de conciliation, et le fait de tenir compte d'un courrier de D.E.________ démontrait simplement que l'ensemble du dossier avait été pris en considération. La décision de maintenir la visite de la villa était logique après l'échec de la tentative de conciliation, la remise en état d'une construction non conforme faisant partie de l'activité habituelle d'une municipalité. Les arguments évoqués par les recourants ne permettent pas de remettre en cause cette appréciation. Les termes de la décision du 13 avril 2021 ne font apparaître aucun parti pris en défaveur des recourants, et il n'est pas prétendu que les municipaux concernés auraient un quelconque intérêt personnel dans l'affaire. Le maintien de l'inspection du 5 mai 2021 rentre manifestement dans les attributions de l'autorité communale. Les magistrats récusés n'ont pas pris part à cette décision et l'affirmation selon laquelle ils exerceraient une influence sur leurs collègues ne repose sur aucun fait concret. La demande de récusation apparaît, également sur ce point, manifestement mal fondée, et le grief d'arbitraire soulevé à ce propos doit, a fortiori, être écarté.  
 
4.  
Sur le vu de ce qui précède, le recours, à la limite de la témérité, est rejeté. Conformément à l'art. 66 al. 1 LTF, les frais judiciaires sont mis à la charge des recourants qui succombent. Il n'est pas alloué de dépens à la Municipalité de Mies, qui agit dans le cadre de ses attributions officielles (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge des recourants. Il n'est pas allouée de dépens. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des recourants et de la Municipalité de Mies et à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 7 février 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
Le Greffier : Kurz