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[AZA 1/2] 
 
4C.199/2001 
 
Ie COUR CIVILE 
************************ 
 
6 novembre 2001 
 
Composition de la Cour: M. Walter, président, M. Leu, 
M. Corboz, Mme Klett et M. Nyffeler, juges. 
Greffière: Mme Aubry Girardin. 
 
___________ 
 
Dans la cause civile pendante 
entre 
A udi A G, à Ingolstadt (Allemagne), demanderesse et recourante, représentée par Me Kamen Troller, avocat à Genève, 
 
et 
Banque A u d i (Suisse) S.A., à Genève, défenderesse et recourante (dans la procédure de réforme), représentée par Me Daniel Tunik et par Me Jacques Busset, avocats à Genève; 
 
(droit des marques; concurrence déloyale; droit au nom) 
Vu les pièces du dossier d'où ressortent 
les faits suivants: 
 
A.- Fondée en 1884, Audi AG est une société anonyme de droit allemand, qui exerce ses activités dans le domaine de l'industrie automobile depuis 1910 en tout cas, sous diverses raisons sociales, dans lesquelles il a été retenu que la désignation "Audi" était toujours apparue. 
 
Ce signe est aussi utilisé comme marque en Suisse depuis 1965, date à laquelle les véhicules fabriqués par cette société ont commencé à être commercialisés dans le pays. 
 
Audi AG n'est pas inscrite au Registre du commerce suisse et n'y possède pas de filiale ou d'autre établissement. 
Dès 1969, c'est la société Amag AG qui a été chargée de commercialiser ses véhicules en Suisse. 
 
De 1965 à 1981, Audi AG a vendu en Suisse 115'000 voitures. 
 
Audi AG est titulaire de diverses marques suisses et internationales, protégées en Suisse, avec priorité remontant à 1971. 
 
En 1989, Audi AG a lancé la marque verbale "Audi" dans la classe internationale 36 (assurances; affaires financières; affaires monétaires; affaires immobilières) pour les services suivants: "consultations concernant le crédit; courtage et crédit-bail". La protection de cette marque internationale, enregistrée dans divers pays, ne s'est pas étendue à la Suisse. 
 
Le 31 octobre 1990, elle a fait enregistrer en Allemagne la raison de commerce "Audi Bank, succursale de la banque Vag GmbH". Cette banque offre un système de cartes de crédit lié à Eurocard et Visa, utilisé aussi bien en Allemagne qu'en Suisse, ainsi que des services financiers comprenant aussi des prestations en matière d'assurances. 
 
Le 5 juillet 1994, Audi AG a déposé auprès de l'Institut fédéral de la propriété intellectuelle (anciennement Office fédéral de la propriété intellectuelle) les marques de service "Audi" (no 622. 241) et "Audi-Bank" (no 622. 242) dans la classe internationale 36. 
 
B.- Banque Audi (Suisse) S.A. (ci-après: la Banque) a été inscrite au Registre du commerce en Suisse le 17 décembre 1963 sous la dénomination NBC Bank AG. Elle a modifié sa raison sociale, dans sa teneur actuelle, le 14 juillet 1981, date à laquelle elle a utilisé pour la première fois le nom de famille d'origine libanaise "Audi", patronyme de différents administrateurs, dirigeants et actionnaires. 
 
Le but de cette société réside, selon le Registre du commerce, dans l'exploitation d'une banque dont les activités sont orientées principalement dans le domaine de la banque privée et de la gestion de fortune. 
 
Le 26 avril 1993, la Banque a déposé trois marques suisses dans la classe internationale 36, à savoir "Audi" (no 406. 133), "Banque Audi" (no 406. 132), et "Banaudi" (no 406. 131), revendiquant une priorité d'usage au 1er janvier 1978. 
 
Audi AG, qui prétend avoir appris l'existence de la Banque le 6 mai 1991, lui a alors proposé de résoudre à l'amiable le conflit portant sur leurs marques respectives. 
Des négociations ont eu lieu de 1991 à 1993, sans résultat. 
 
C.- Le 22 décembre 1994, Audi AG a introduit une action à Genève, tendant à interdire à la Banque, sous menace des peines prévues à l'art. 292 CP, de faire usage de sa raison sociale en français et en allemand, ainsi que de ses marques de service "Audi" (no 406. 133) et "Banque Audi" (no 406. 132), dont la constatation de la nullité était requise. 
 
La Banque a conclu au déboutement d'Audi AG. Elle a, par ailleurs, formé une demande reconventionnelle tendant en particulier à faire constater la nullité des marques de service "Audi" (no 622. 241) et "Audi-Bank" (no 622. 242). 
 
Audi AG a finalement conclu à l'irrecevabilité de la demande reconventionnelle. 
 
D.- Par arrêt du 29 mars 1996, la Cour de justice genevoise a rejeté la demande principale, au motif que les droits d'Audi AG étaient périmés, tout en reconnaissant que cette société était titulaire d'une marque de haute renommée. 
Pour cette raison, elle a également rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, la demande reconventionnelle formée par la Banque. 
 
Contre cet arrêt, Audi AG et la Banque ont toutes les deux déposé à la fois un recours de droit public et un recours en réforme au Tribunal fédéral. 
 
Le 13 novembre 1998, la Ie Cour civile du Tribunal fédéral a rejeté, dans la mesure de leur recevabilité, les recours de droit public interjetés par les deux parties. En revanche, elle a partiellement admis leurs recours en réforme respectifs, annulé l'arrêt du 29 mars 1996 et renvoyé la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
La Cour de céans a considéré en substance que c'était à juste titre que les juges cantonaux avaient admis la péremption des droits d'Audi AG dans la désignation de la raison sociale de la Banque. En revanche, on ne pouvait conclure que les droits d'Audi AG concernant la nullité des marques de service "Audi" et "Banque Audi" de la défenderesse étaient périmés. L'admission des conclusions d'Audi AG concernant ces marques supposait toutefois que le caractère de haute renommée de la marque "Audi", propriété de la firme automobile, soit reconnu. Cette question était également déterminante pour statuer sur les conclusions reconventionnelles de la Banque. Or, le Tribunal fédéral a relevé que la cour cantonale ne pouvait, sur la base des faits retenus, admettre le caractère de haute renommée de la marque "Audi". 
 
E.- Dans son mémoire de reprise d'instance du 9 avril 1999 sur le plan cantonal, la Banque a précisé ses conclusions reconventionnelles, tout en formant une demande reconventionnelle additionnelle tendant, pour l'essentiel, à faire constater la nullité d'une marque de service "Audi" (no 425. 973) déposée le 17 février 1995 par Audi AG. 
 
Audi AG a conclu à l'irrecevabilité de la demande reconventionnelle additionnelle et au rejet des conclusions sur demande reconventionnelle de la Banque. Elle a en outre enjoint à la Cour de justice de dire que ses propres marques nos 622. 241 et 622. 242 étaient des marques de haute renommée et de constater la nullité des marques "Audi" (no 406. 133) et "Banque Audi" (no 406. 132) de la défenderesse. 
 
Par arrêt du 27 avril 2001, la Chambre civile de la Cour de justice genevoise, statuant sur la demande principale, a débouté Audi AG de l'ensemble de ses conclusions; elle a également débouté la Banque de l'ensemble de ses conclusions reconventionnelles et déclaré irrecevable sa demande reconventionnelle additionnelle du 9 avril 1999. 
 
F.- Contre l'arrêt du 27 avril 2001, tant Audi AG (la demanderesse) que la Banque (la défenderesse) ont interjeté un recours en réforme au Tribunal fédéral. 
 
Audi AG conclut à la réforme et à l'annulation de l'arrêt entrepris dans la mesure où il rejette la demande principale; elle demande au Tribunal fédéral, statuant à nouveau, de dire que ses marques Audi (622. 241 et 622. 242) sont des marques de haute renommée, de constater la nullité des marques suisses nos 406. 133 Audi et 406. 132 Banque Audi et de communiquer le dispositif du jugement à l'Institut fédéral de la Propriété intellectuelle en vue de la radiation des deux marques précitées, sous suite de frais et dépens. 
 
Pour sa part, la Banque conclut à l'annulation de l'arrêt du 27 avril 2001 en tant qu'il rejette sa demande reconventionnelle. Elle requiert la constatation de la nullité des marques de service 622. 241 Audi et 622. 242 Audi-Bank, la communication du dispositif du jugement à l'Institut fédéral de la Propriété intellectuelle en vue de la radiation des marques précitées et l'interdiction, pour Audi AG, sous la menace des peines prévues à l'art. 292 CP, "d'utiliser le signe Audi pour offrir ou fournir en Suisse des services financiers, bancaires, immobiliers ou en matière d'assurances, en particulier en le faisant figurer sur des cartes de crédit, ainsi que d'en faire tout autre usage en relation avec l'une ou l'autre des prestations de service visées par la classe 36 de l'Arrangement de Nice, si ce n'est éventuellement en lui adjoignant des éléments distinctifs par lesquels tout risque de confusion avec les marques ou les activités de la Banque pourra être éliminé". Enfin, elle prie le Tribunal fédéral d'ordonner la publication du jugement à intervenir à trois reprises dans trois quotidiens suisses de son choix, sous suite de frais et dépens, également s'agissant des frais de l'instance cantonale. 
 
La Banque propose de déclarer irrecevable le recours interjeté par Audi AG, subsidiairement de le rejeter dans la mesure de sa recevabilité, alors que, dans sa réponse, Audi AG demande la confirmation du jugement entrepris dans la mesure où il rejette la demande reconventionnelle formée par la Banque et le déboutement de celle-ci de toutes les conclusions de son recours en réforme. 
 
Statuant le 6 novembre 2001, la Cour de céans a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, le recours de droit public déposé parallèlement par Audi AG. 
 
Considérant en droit : 
 
1.- a) Les recours émanant des deux parties se rapportent à la même décision et comportent des liens étroits, de sorte qu'il se justifie de les joindre pour des motifs d'économie de procédure et de les traiter dans un seul arrêt (cf. ATF 124 III 382 consid. 1a et les arrêts cités). 
 
b) Dirigés contre l'arrêt cantonal déboutant chacune des parties de ses conclusions respectives, à la suite du renvoi de la cause par le Tribunal fédéral en application de l'art. 64 al. 1 OJ, les deux recours sont en principe recevables (art. 66 al. 2 OJ), puisqu'ils ont été déposés en temps utile (art. 54 al. 1 OJ), dans les formes requises (art. 55 OJ). 
 
c) La défenderesse ne s'en prend, devant le Tribunal fédéral, qu'au rejet de ses conclusions reconventionnelles. 
En revanche, elle ne critique pas la cour cantonale dans la mesure où celle-ci a déclaré irrecevable sa demande reconventionnelle additionnelle. Non contestée, cette partie du dispositif de l'arrêt entrepris doit donc être considérée comme définitivement tranchée (cf. art 55 al. 1 let. b et c OJ). 
 
2.- a) Dans l'arrêt attaqué, la cour cantonale a rejeté la demande principale en considérant en substance que la demanderesse n'était pas parvenue à démontrer qu'elle était titulaire d'une marque de haute renommée en juillet 1981, soit au moment où la défenderesse a commencé à offrir ses services sous la dénomination "Audi", de sorte que cette dernière pouvait se prévaloir de droits acquis. Les juges ont encore examiné si les marques de la banque portaient atteinte à la raison sociale de la demanderesse, comme le soutenait cette dernière. Après une pesée des intérêts en présence, il a été retenu que l'intérêt de la banque à utiliser ses marques pour désigner ses services bancaires et financiers l'emportait sur l'intérêt de la firme automobile à se prévaloir de son droit à la protection de sa raison sociale. Quant aux conclusions reconventionnelles de la défenderesse tendant à la constatation de la nullité des marques de service déposées par la firme automobile, elles ont également été rejetées au motif que les marques litigieuses n'étaient pas destinées à des services identiques et qu'il n'existait pas de risque de confusion entre elles, de sorte qu'il n'y avait pas d'obstacle légal à ce qu'elles coexistent. 
 
b) Dans son recours, la demanderesse s'en prend au refus de la cour cantonale d'admettre le caractère de haute renommée de sa marque et de lui reconnaître une protection issue de sa raison sociale, ce qui lui aurait permis de faire constater la nullité de deux des marques déposées par la défenderesse en 1993. Les prétentions de celle-ci qui tendent à la constatation de la nullité des marques de service de la demanderesse, ont ainsi un caractère subsidiaire. Il sera donc tout d'abord statué sur le recours en réforme interjeté par la firme automobile. 
 
I. Recours en réforme de la demanderesse 
 
3.- La demanderesse se plaint d'inadvertances manifestes et d'une violation flagrante de l'art. 8 CC, en reprenant les critiques qu'elle avait présentées dans son recours de droit public déposé parallèlement. Or, savoir si les pièces produites, les témoignages et le sondage d'opinion étaient de nature à démontrer le haut degré de connaissance ainsi que d'estime dont jouissait la marque automobile Audi à l'époque considérée et si c'est à tort que la cour cantonale a écarté ces éléments relèvent de l'appréciation des preuves. 
Ces griefs, déjà traités dans le cadre du recours de droit public (cf. arrêt du Tribunal fédéral du 6 novembre 2001 dans la cause opposant les parties, consid. 3a), échappent ainsi à la cognition du Tribunal fédéral saisi d'un recours en réforme (ATF 126 III 10 consid. 2b p. 13; 125 III 78 consid. 3a). 
Comme il a été jugé que la position des juges cantonaux n'était, sur ces points, pas entachée d'arbitraire (cf. arrêt précité, consid. 3c à e), la Cour de céans examinera les violations du droit fédéral invoquées à la lumière des faits tels qu'ils ressortent de l'arrêt entrepris. 
 
Il convient de rappeler que la cour cantonale n'a pas refusé d'emblée le sondage d'opinion présenté par la demanderesse en tant que moyen de preuve. C'est après l'avoir examiné de manière détaillée qu'elle a considéré que celui-ci était en l'espèce impropre à démontrer les faits pertinents. 
Son attitude n'équivaut donc pas à dénier a priori l'utilité du sondage d'opinion pour évaluer le degré de connaissance d'une marque, de sorte qu'elle ne contrevient pas à ce qui a été dit dans l'ATF 126 III 315 consid. 4c/bb p. 319, contrairement à ce que soutient la firme automobile. 
 
4.- La demanderesse reproche à la cour cantonale d'avoir méconnu la notion juridique de la marque de haute renommée. 
 
a) La marque de haute renommée est spécialement protégée par l'art. 15 de la Loi fédérale du 28 août 1992 sur la protection des marques (LPM; RS 232. 11). Cette disposition prévoit que le titulaire d'une marque de haute renommée peut interdire à des tiers l'usage de cette marque pour tous les produits ou les services pour autant qu'un tel usage menace le caractère distinctif de la marque, exploite sa réputation ou lui porte atteinte (al. 1). Les droits acquis avant que la marque ne gagne sa haute renommée sont réservés (al. 2). 
 
En l'espèce, il n'est pas contesté que les droits de la défenderesse sur les désignations "Audi" et "Banque Audi" remontent au mois de juillet 1981. Le litige revient donc à se demander si, à cette époque-là, le caractère de haute renommée de la marque de la demanderesse aurait dû être admis par la cour cantonale, ce qui aurait légitimé la firme automobile à faire valoir les droits découlant de l'art. 15 LPM à l'encontre de la défenderesse. En revanche, il n'est pas pertinent de se demander si actuellement la marque automobile "Audi" devrait être qualifiée de haute renommée. Les considérations de la cour cantonale sur ce dernier point n'ont donc pas à être revues dans le cadre de la présente procédure, puisqu'elles ne sont pas de nature à influencer le dispositif de la décision entreprise (cf. ATF 126 III 198 consid. 2b; 111 II 1; 106 II 117 consid. 1; Bernard Corboz, Le recours en réforme au Tribunal fédéral, SJ 2000 II p. 1 ss, 30). 
 
b) La définition de la haute renommée ne ressort pas de la loi (Lucas David, Commentaire bâlois, art. 15 LPM no 3). Se fondant sur le but poursuivi par l'art. 15 LPM, le Tribunal fédéral a indiqué que la haute renommée suppose que la marque jouisse d'une considération générale auprès d'un large public; en effet, tant que la marque n'est connue et appréciée que d'un cercle d'acheteurs se restreignant à un produit spécifique, il n'existe pas d'intérêt légitime à lui assurer une protection étendue. En revanche, il n'est pas nécessaire que la marque soit absolument unique; une "position relativement exclusive" suffit (ATF 124 III 277 consid. 1a et les auteurs cités). La Cour de céans a précisé qu'il n'est pas suffisant, pour juger si l'on a affaire à une marque de haute renommée, de déterminer la proportion des personnes qui connaissent l'existence de la marque, d'une part, et le degré de cette connaissance, d'autre part. On en viendrait sinon à confondre la notoriété d'une marque avec sa haute renommée (arrêt du Tribunal fédéral du 13 novembre 1998 opposant les parties, publié in sic! 1999 p. 132 ss consid. 8d). L'image positive que représente la marque auprès du public est donc un critère qui ne doit pas être négligé. 
 
En l'espèce, il ressort des faits retenus, d'une manière qui lie le Tribunal fédéral en instance de réforme (art. 63 al. 2 OJ), qu'il n'a pas été établi qu'une large part de la population connaissait la marque automobile "Audi" en juillet 1981 ni qu'elle était, à cette époque, synonyme de qualité et de prestige. Sur la base de ces constatations, on ne voit pas que la cour cantonale ait violé le droit fédéral en refusant à la demanderesse la prérogative de se prévaloir de la protection spéciale de l'art. 15 al. 1 LPM à l'encontre des marques de la défenderesse. 
 
Certes, comme le relève la demanderesse, la motivation de la cour cantonale peut, sur certains aspects, paraître discutable, en particulier lorsqu'elle mentionne comme critère le caractère unique de la marque. Il n'y a toutefois pas lieu d'entrer en matière, dès lors que ces considérations se réfèrent à la situation actuelle et ne sont, par conséquent, pas de nature à influencer le sort du litige (cf. supra let. a in fine) 
 
5.- La demanderesse invoque enfin une violation de l'art. 8 de la Convention d'Union de Paris pour la protection de la propriété industrielle dans sa version révisée à Stockholm le 14 juillet 1967 (CUP; RS 0.232. 04) (RO 1970 p. 601), de l'art. 29 CC et de l'art. 3 let. d de la loi fédérale du 19 décembre 1986 contre la concurrence déloyale (LCD; RS 241). Elle fait grief à la cour cantonale de ne pas avoir reconnu que les marques de la banque portaient également atteinte à son nom commercial. 
 
a) Que la défenderesse soit autorisée, en regard de la LPM, à utiliser les marques "Audi" et "Banque Audi" (cf. 
supra consid. 4) n'empêche pas que son comportement puisse contrevenir à d'autres dispositions, en particulier à la LCD (cf. ATF 127 III 33 consid. 3a). 
 
b) L'Allemagne et la Suisse sont deux Etats liés par la CUP. D'après l'art 8 CUP, le nom commercial doit être protégé en Suisse sans obligation de dépôt ou d'enregistrement, qu'il fasse ou non partie d'une marque de fabrique ou de commerce. Contrairement à ce que soutient la demanderesse, cette disposition n'offre pas une protection absolue au nom commercial. En vertu du principe du traitement national figurant à l'art. 2 CUP, les Etats s'engagent seulement à accorder la même protection à un nom commercial étranger que celle octroyée aux noms commerciaux nationaux (G.H.C. 
Bodenhausen, Guide d'application de la Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle, Genève 1969, art. 8 CUP p. 139). Or, en droit suisse, lorsqu'une entreprise n'est pas inscrite au registre du commerce suisse, ce qui est le cas de la demanderesse, sa désignation n'est protégée qu'à la condition que son droit au nom ait été atteint ou en présence d'un acte de concurrence déloyale (ATF 114 II 106 consid. 2; 98 II 57 consid. 1 et les arrêts cités; cf. 
François Dessemontet, La propriété intellectuelle, Lausanne 2000, p. 297 no 634). 
 
Il convient donc d'examiner en premier lieu si la demanderesse peut se prévaloir d'une atteinte à l'art. 29 CC ou d'un comportement contraire à la LCD de la part de la défenderesse. 
Ce n'est que si l'une ou l'autre de ces hypothèses devait être retenue qu'il y aurait alors lieu de s'interroger sur un éventuel conflit entre la LPM l'art. 29 CC et/ou la LCD. 
 
c) Il découle de l'art. 29 al. 2 CC que celui qui est lésé par une usurpation de son nom peut demander au juge de la faire cesser. L'élément déterminant à cet égard est le risque de confusion (ATF 116 II 463 consid. 3b; 102 II 161 consid. 4a). La notion de risque de confusion sanctionné par l'art. 29 al. 2 CC est la même que celle admise en droit de la concurrence (ATF 127 III 33 consid. 4; 116 II 463 consid. 4c). En cette matière, l'art. 3 let. d LCD qualifie de déloyal le comportement de celui qui "prend des mesures qui sont de nature à faire naître une confusion avec les marchandises, les oeuvres, les prestations ou les affaires d'autrui". 
Est visé tout comportement au terme duquel le public est induit en erreur par la création d'un danger de confusion, en particulier lorsque celui-ci est mis en place pour exploiter la réputation du concurrent (ATF 126 III 239 consid. 3a et les références citées). Le risque de confusion est une notion de droit que le Tribunal fédéral apprécie librement, du moins dans les cas où le litige revient à évaluer l'impact du comportement contesté sur le grand public et non sur un cercle de personnes disposant de connaissances spécifiques dans un secteur particulier (ATF 127 III 33 consid. 3c/aa p. 39; 126 III 239 consid. 3a). 
 
 
 
 
En l'occurrence, la question litigieuse revient à déterminer si, en regard des faits retenus, il y a risque de confusion, parmi les consommateurs suisses, entre le nom commercial de la firme automobile et les marques "Audi" et "Banque Audi" utilisées par la banque. Ce point doit être distingué du risque de confusion entre les marques de service appartenant aux deux parties au sens de la LPM, qui sera examiné dans le cadre du recours de la défenderesse (cf. infra consid. 6f). 
 
La cour cantonale a relevé que la raison sociale de la demanderesse, qui ne figure pas au Registre du commerce suisse et ne possède pas d'établissement dans ce pays, n'était en tant que telle pas largement connue en Suisse. 
Pour sa part, la défenderesse n'apparaissait pas comme un nouveau concurrent qui aurait cherché, par le dépôt de ses marques, à profiter de la raison sociale de la firme automobile. 
La banque a au contraire fait usage de la dénomination "Audi", parce qu'elle correspondait au patronyme de certains de ses administrateurs et actionnaires. Les marques de la défenderesse ne constituaient nullement des qualifications pouvant suggérer une volonté d'appropriation de la raison sociale de la demanderesse, mais apparaissaient comme des dénominations fondées sur des raisons objectives, liées à l'existence de la propre raison de commerce de la banque. 
 
Dans ce contexte, on ne voit pas que le public ait pu être induit en erreur et assimiler le nom commercial de la firme automobile aux marques portant sur des services financiers offerts par un établissement bancaire du même nom. En outre, rien n'indique que la défenderesse ait cherché à profiter de la réputation liée au nom commercial d'une firme automobile pour offrir des services financiers propres à une banque privée. Aucun risque de confusion au sens où l'entend la jurisprudence ne peut donc être retenu, ce qui exclu que la demanderesse puisse se prévaloir d'une violation de l'art. 29 CC ou de l'art. 3 let. d LCD. Dans la mesure où l'arrêt attaqué rejette les prétentions de la banque fondées sur son nom commercial, il doit être confirmé. Il n'y a dès lors pas lieu d'entrer en matière sur la motivation de la cour cantonale en matière de conflit de lois, critiquée par la demanderesse, car elle n'est pas de nature à modifier le résultat de la décision entreprise (cf. supra consid. 4a in fine). 
 
 
Le recours en réforme de la demanderesse sera par conséquent rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
 
II. Recours en réforme de la défenderesse 
 
6.- Dans son recours, la défenderesse soutient que la cour cantonale a violé le droit fédéral en n'admettant pas que les marques de service déposées par la demanderesse devaient être exclues de la protection en vertu de l'art. 3 LPM
 
a) Cette disposition confère au titulaire d'une marque antérieure le droit de s'opposer à une marque en principe susceptible de constituer une marque valable en invoquant des motifs d'exclusion qualifiés de relatifs (cf. 
Dessemontet, op. cit. , p. 216 no 443). Sont ainsi exclus de la protection les signes identiques à une marque antérieure et destinés à des produits ou services identiques (art. 3 al. 1 let. a LPM), les signes identiques à une marque antérieure et destinés à des produits ou services similaires, lorsqu'il en résulte un risque de confusion (art. 3 al. 1 let. b LPM) et les signes similaires à une marque antérieure et destinés à des produits ou services identiques ou similaires, lorsqu'il en résulte un risque de confusion (art. 3 al. 1 let. c LPM). 
 
 
b) Tout en laissant ouvert le point de savoir si les marques "Banque Audi" et "Audi-Bank" devaient être qualifiées d'identiques, la cour cantonale a en substance exclu que les marques litigieuses soient destinées à des services identiques, rejetant ainsi le motif prévu à l'art. 3 al. 1 let. a LPM; elle a également écarté tout risque de confusion entre celles-ci, ce qui empêchait l'application de l'art. 3 al. 1 let. b et c LPM. 
 
c) La défenderesse critique ce raisonnement en développant une argumentation largement appellatoire, discutant et complétant les faits retenus, en particulier s'agissant des prestations de service offertes par les parties, ce qui, comme on l'a déjà souligné à propos du recours de la partie adverse, n'est pas admissible dans un recours en réforme (art. 55 al. 1 let. c OJ; ATF 126 III 59 consid. 2a, 189 consid. 2a; 125 III 368 consid. 3 in fine). La Cour de céans n'entrera donc pas en matière sur les griefs concernant les constatations qui, d'après la défenderesse, ne tiendraient pas compte des pièces du dossier et elle se fondera uniquement sur les faits ressortant de l'arrêt entrepris. 
 
 
d) Les critiques qui ne sont de toute manière pas de nature à modifier le résultat de la décision attaquée ne seront pas non plus prises en considération (cf. supra consid. 4a in fine). Tel est le cas lorsque la défenderesse reproche à la cour cantonale d'avoir conclu que les marques en cause étaient à tout le moins similaires s'agissant des marques "Banque Audi" et "Audi-Bank", dès lors que les juges cantonaux ont raisonné comme si les signes utilisés étaient identiques. 
 
 
e) D'après la défenderesse, la cour cantonale aurait dû reconnaître que les marques des parties étaient destinées à des services identiques et faire application de l'art. 3 al. 1 let. a LPM
 
La LPM ne donne pas de définition de ce qu'elle entend par produits ou services identiques (David, op. cit. , art. 3 LPM no 10). Comme le Tribunal fédéral l'a formulé en matière d'inscription au registre du commerce, l'identité ne peut pas être définie de manière générale et abstraite en raison de la multitude d'éléments qui doivent être pris en considération, mais elle doit en fin de compte être examinée au cas par cas (arrêt du Tribunal fédéral du 11 septembre 1998 publié in sic! 1999 p. 42 ss, consid. 4a; cf. Mario M. 
Pedrazzini/Roland von Büren/Eugen Marbach, Immaterialgüter- und Wettbewerbsrecht, Berne 1998, no 518). Lors de cet examen, il ne faut pas perdre de vue que la formule utilisée par l'art. 3 al. 1 let. a LPM - "les signes identiques à une marque antérieure et destinés à des produits ou services identiques" - concerne typiquement l'apposition d'une marque protégée par un tiers sur sa propre marchandise ou ses propres services ainsi que le piratage (ATF 122 III 469 consid. 5e p. 477). 
 
En l'occurrence, on est loin de ce cas de figure. 
En effet, il ressort de l'arrêt entrepris que la défenderesse, en tant que banque privée, offre ses propres services bancaires dans le cadre de la gestion de la fortune de ses clients. La demanderesse cherche, pour sa part, à pouvoir développer en Suisse des services financiers liés à la vente des véhicules de sa marque, comme elle le pratique déjà aux Pays-Bas, et offrir un système de carte de crédit, dont il est apparemment déjà fait usage dans notre pays. Il ressort de ces constatations, dont on ne voit pas qu'elles puissent consister en de simples conjectures comme le soutient à tort la défenderesse, que les services liés aux marques de la demanderesse ne sont pas identiques à ceux offerts par la banque. 
On ne peut donc reprocher à la cour cantonale de ne pas avoir retenu de motif relatif d'exclusion au sens de l'art. 3 al. 1 let. a LPM
 
f) Il reste à examiner l'éventuelle application de l'art. 3 al. 1 let. b et c LPM, ce qui suppose, dans les deux cas, l'existence d'un risque de confusion. 
 
Dans le domaine des marques, le risque de confusion a les mêmes caractéristiques qu'en matière de LCD et de droit au nom, de sorte que l'on peut renvoyer à ce qui a été dit précédemment à ce sujet (cf. supra consid. 5c; cf. ATF 127 III 160 consid. 2a; 126 III 315 consid. 4b). La détermination de ce risque implique que l'on examine l'impression d'ensemble qui se dégage de la marque pour le public intéressé par le produit ou le service (ATF 122 III 382 consid. 5a; 121 III 377 consid. 2a et b; 117 II 321 consid. 4; 112 II 362 consid. 2 p. 364). Pour en juger, il faut prendre en considération toutes les circonstances (ATF 122 III 382 consid. 1 in fine; 121 III 377 consid. 2a), en particulier la capacité de perception des destinataires et leur comportement effectif lorsqu'ils sont mis en situation concrète de se procurer le produit ou le service sur un certain marché (cf. Katrin Klett, Die durchschnittlich aufmerksame Verbraucherin und der durchschnittlich gut ausgebildete Fachmann, GRUR 2001 p. 549 ss, p. 551 no 6). On se montrera plus strict lorsque les marchandises ou les services sont quasiment semblables, voire identiques ou lorsqu'il s'agit de biens de consommation courante (arrêt du Tribunal fédéral du 18 janvier 2000 publié in sic! 2000 p. 194 ss, consid. 4b; ATF 126 III 315 consid. 6b/bb p. 320 et les arrêts cités; cf. Eugen Marbach, Gleichartigkeit - ein markenrechtlicher Schlüsselbegriff ohne Konturen ?, RDS 2001 p. 255 ss, 258). 
 
 
 
En l'espèce, on est en présence de marques ressemblantes, voire identiques, mais qui portent sur des services bancaires ou financiers pour lesquels on peut légitimement s'attendre à un degré d'attention et de discernement accru de la part de la personne qui entend y souscrire. Il n'y a donc pas lieu de se montrer particulièrement sévère, ce d'autant que, selon l'arrêt attaqué, les marques de service concernées ne s'adressent pas aux mêmes cercles de consommateurs : la firme automobile vise le grand public, alors que la banque, définie comme un établissement privé agissant dans le domaine de la gestion de fortune, s'adresse à un cercle relativement restreint et fermé. Il a également été constaté que, pour la clientèle visée par la banque, il est notoire que celle-ci n'a aucun lien avec le constructeur automobile, personne n'ignorant, dans le milieu bancaire, que la défenderesse est associée à une famille libanaise très connue portant le même nom. Enfin, comme le souligne avec pertinence la cour cantonale, on envisage mal qu'une personne désireuse de confier la gestion de sa fortune à une banque privée puisse être trompée sur l'identité de celle-ci, ainsi que sur la provenance et la nature des services fournis, au point de les confondre avec des services financiers liés à la vente de véhicules automobiles. 
 
Dans ces circonstances, on ne peut reprocher à la cour cantonale d'avoir nié l'existence d'un risque de confusion, de sorte que la défenderesse ne peut se prévaloir des motifs d'exclusion prévus aux let. b et c de l'art. 3 al. 1 LPM
 
Il convient encore de préciser que, dans le cadre de la présente procédure, le Tribunal fédéral n'a pas à se demander si les activités financières faisant l'objet des marques de service "Audi" et "Audi-Bank" de la demanderesse sont conformes à la législation sur les banques. A fortiori, il n'a pas à supputer les conditions qui pourraient être fixées à la demanderesse pour obtenir l'autorisation de la Commission fédérale des banques ni à en tirer des conséquences en matière de droit des marques. 
 
La Cour de céans, qui applique le droit suisse, n'a pas davantage à tenir compte de décisions judiciaires françaises et luxembourgeoises selon lesquelles la défenderesse a apparemment obtenu le prononcé de la nullité de certaines marques de service déposées par la demanderesse dans ces pays. 
 
Le recours formé par la défenderesse doit par conséquent également être rejeté et l'arrêt attaqué confirmé. 
 
7.- Compte tenu de l'issue du litige, un émolument judiciaire sera mis à la charge de chacune des deux parties (art. 156 al. 1 OJ) et celles-ci supporteront leurs propres dépens (art. 159 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, 
 
le Tribunal fédéral : 
 
1. Rejette le recours de la demanderesse dans la mesure où il est recevable; rejette le recours de la défenderesse; confirme l'arrêt attaqué. 
 
2. Met un émolument judiciaire de 10'000 fr. à la charge de la demanderesse. 
 
3. Met un émolument judiciaire de 10'000 fr. à la charge de la défenderesse. 
 
4. Dit qu'il n'est pas alloué de dépens. 
 
5. Communique le présent arrêt en copie aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice genevoise. 
 
__________ 
Lausanne, le 6 novembre 2001 ECH 
 
Au nom de la Ie Cour civile 
du TRIBUNAL FÉDÉRAL SUISSE: 
Le Président, 
 
La Greffière,