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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_527/2023  
 
 
Arrêt du 29 août 2023  
 
Ire Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, 
Muschietti et van de Graaf. 
Greffier : M. Vallat. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Jean-Luc Maradan, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
1. Ministère public de l'Etat de Fribourg, case postale 1638, 1701 Fribourg, 
2. B.________, 
3. C.________, 
intimés. 
 
Objet 
Lésions corporelles simples par négligence; entrave 
aux mesures de constatation de l'incapacité de 
conduire et violation des obligations en cas d'accident, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal 
de l'Etat de Fribourg, Cour d'appel pénal, 
du 20 février 2023 (501 2022 15). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________ est né en 1994. Il est salarié, administrateur-président d'une société anonyme, qui exploite un "escape game". 
Par jugement du 10 novembre 2021, statuant sur opposition à une ordonnance pénale du 30 avril 2021, le Juge de police de l'arrondissement de la Sarine a reconnu A.________ coupable de lésions corporelles simples par négligence, d'entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire et de violation des obligations en cas d'accident et l'a condamné à une peine pécuniaire de 150 jours-amende à 30 fr. l'unité, avec sursis pendant 2 ans. Il a partiellement admis les conclusions civiles formulées par B.________ et condamné A.________ à lui verser la somme de 272 fr. 60 à titre de dommages et intérêts. Il a également pris acte de la renonciation de C.________ à faire valoir des prétentions civiles, le tout sous suite de frais et de rejet de la demande d'indemnité (art. 429 CPP). 
 
B.  
Saisie par le condamné, par arrêt du 20 février 2023, la Cour d'appel pénal du Tribunal cantonal fribourgeois a rejeté l'appel et confirmé le jugement du 10 novembre 2021 avec suite de frais de deuxième instance (2200 fr.). Cet arrêt repose sur l'état de fait pertinent suivant: 
 
Le 27 juin 2020, vers 3h05, A.________, qui rentrait d'une soirée lors de laquelle il avait bu de l'alcool, a circulé au volant du véhicule immatriculé FR xxx xxx à U.________, route V.________, en direction de ce dernier village. Peu après l'arrêt de bus W.________, dans une courbe à gauche, il n'a pas remarqué la présence notamment des piétons B.________ et C.________, lesquels traversaient la route hors du passage clouté de gauche à droite selon son sens de marche. Un choc s'est produit entre l'avant du véhicule et les deux piétons, lesquels ont chuté au sol. A.________, qui s'en est rendu compte a néanmoins poursuivi sa route, sans se soucier de l'état de santé des piétons. B.________ a subi une dermabrasion importante au bas du dos, une autre au niveau du coude droit avec une légère tuméfaction et une hématurie microscopique, tandis que C.________ a souffert d'une entorse modérée du ligament latéro-externe de la cheville droite, ainsi que d'un hématome à la cuisse du même côté. Ils ont déposé plainte.  
 
Sous réserve de ce qui sera encore discuté en droit, on renvoie pour le surplus à l'intégralité de l'arrêt du 20 février 2023 et du jugement du 10 novembre 2021, en tant que celui-là renvoie également à celui-ci. 
 
C.  
Par acte du 24 avril 2023, A.________ recourt en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 20 février 2023. Il conclut avec suite de frais et dépens, principalement, à sa réforme dans le sens de son acquittement, les conclusions civiles formulées par B.________ étant rejetées et des indemnités lui étant accordées en application de l'art. 429 CPP à concurrence respectivement de 7400 fr. 35 pour la procédure de première et 6252 fr. pour celle de seconde instances. A titre subsidiaire, il demande l'annulation de l'arrêt entrepris et le renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Dans le recours en matière pénale, le Tribunal fédéral est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), sous les réserves découlant des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de l'arbitraire dans la constatation des faits (sur cette notion, v. ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1). Le Tribunal fédéral n'examine de tels griefs ainsi que, de manière plus générale, tous ceux qui relèvent de la violation de droits fondamentaux, que s'ils sont invoqués et motivés par le recourant (art. 106 al. 2 LTF), soit s'ils ont été expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée. Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 146 IV 88 consid. 1.3.1). 
 
2.  
Le recourant conteste avoir été le conducteur impliqué dans l'accident du 27 juin 2020, sans toutefois nier avoir conduit le véhicule D.________ immatriculé FR xxx xxx ce soir-là en rentrant de X.________ à Y.________ (jugement de première instance, consid. 2.a.a). Il invoque la violation de son droit à un procès équitable (art. 3 al. 2 CPP en lien avec les art. 29 al. 2 et 32 al. 2 Cst. ainsi que 6 par. 3 CEDH). En bref, les deux seuls éléments le reliant à l'accident (l'information que l'immatriculation de l'automobile impliquée commençait par "FR xxx..." et la présence dans le village de U.________ d'un véhicule stationné, correspondant au signalement d'une limousine noire, immatriculé FR xxx xxx), résultent de déclarations de personnes n'ayant jamais été entendues formellement et dont l'identité ne ressort pas du rapport de police du 14 janvier 2021. Aucune pièce au dossier ne permettrait de vérifier ces renseignements. Aucune disposition du CPP n'autoriserait les autorités de poursuite pénale à procéder à des auditions par téléphone. Il en résulterait une violation du droit d'être entendu du recourant dans ses composantes du droit d'accéder au dossier de la cause et de celui d'interroger ou de faire interroger les témoins à charge et d'obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que ceux à charge. 
 
2.1. Tel qu'il est articulé, le grief porte principalement sur le respect de la garantie du procès équitable, en lien avec la conformité des preuves administrées aux règles formelles du CPP relatives aux témoins (art. 163 ss CPP, ainsi que l'art. 177 al. 1 CPP en corrélation avec l'art. 307 CP), la possibilité d'accéder au dossier et celle de pouvoir être confronté avec les témoins à charge. Il convient d'examiner préalablement la question soulevée en relation avec le respect des règles formelles relatives aux auditions, dans la mesure où le recourant en déduit qu'il aurait été restreint dans l'exercice de son droit d'accéder au dossier et que cela aurait également compromis l'équité de la procédure.  
 
2.1.1. Les dépositions des parties, des témoins, des personnes appelées à donner des renseignements et des experts sont consignées au procès-verbal séance tenante (art. 78 al. 1 CPP). Au début de l'audition, le comparant, dans une langue qu'il comprend, est interrogé sur son identité, informé de l'objet de la procédure et de la qualité en laquelle il est entendu et avisé de façon complète de ses droits et obligations (art. 143 al. 1 CPP). L'observation des dispositions prévues à l'al. 1 doit être consignée au procès-verbal (al. 2). Le CPP prévoit, par ailleurs spécifiquement, sous certaines conditions, la possibilité de procéder à des auditions par vidéoconférence (art. 144 CPP). Conformément à l'art. 177 al. 1 CPP, au début de chaque audition, l'autorité qui entend le témoin lui signale son obligation de témoigner et de répondre conformément à la vérité et l'avertit de la punissabilité d'un faux témoignage au sens de l'art. 307 CP. À défaut de ces informations, l'audition n'est pas valable.  
 
Le but de la verbalisation des auditions est de permettre de restituer, autant que possible, à une personne qui, ultérieurement, ne disposerait plus que du procès-verbal, l'impression objective qu'elle aurait eue si elle avait elle-même procédé à l'audition (PHILIPP NÄPFLI, in Basler Kommentar Strafprozessordnung, 2e éd. 2014, no2 ad art. 78 CPP). Les exigences de forme relatives à la verbalisation sont de nature impérative. Elles protègent, dans cette mesure, tant les parties à la procédure que les autorités et assurent la valeur probante qualifiée du procès-verbal (NÄPFLI, op. cit., no 19 ad art. 78 CPP).  
 
2.1.2. L'art. 141 CPP règle l'exploitation des moyens de preuves obtenus illégalement. Les preuves obtenues au moyen de méthodes interdites (art. 140 CPP) sont absolument inexploitables. Il en va de même lorsque le CPP dispose qu'une preuve n'est pas exploitable (art. 141 al. 1 CPP). Les preuves qui ont été administrées d'une manière illicite ou en violation de règles de validité par les autorités pénales ne sont pas exploitables, à moins que leur exploitation soit indispensable pour élucider des infractions graves (al. 2), cependant que celles qui n'ont été administrées qu'en violation de prescriptions d'ordre le sont (al. 3). Comme l'indiquent sans ambiguïté les textes en langues allemande et italienne de l'art. 141 al. 2 CPP, l'illicéité visée par cette disposition s'entend de la violation de normes pénales ( in strafbarer Weise; in modo penalmente illecito; JÉRÔME BÉNÉDICT, in Commentaire romand Code de procédure pénale suisse, 2e éd. 2019, ch. 9 ad art. 141 CPP). L'application de cette norme suppose aussi que le comportement en cause ne relève pas déjà de l'art. 140 CPP. Quant à la délimitation entre règles de validité (al. 2) et simples prescriptions d'ordre (al. 3), c'est en premier lieu le but de protection de la disposition qui permet de l'opérer lorsque la loi ne le fait pas explicitement. Il s'agit d'une règle de validité si elle revêt une importance telle pour la sauvegarde des intérêts à protéger de la personne concernée qu'elle ne peut atteindre son objectif que moyennant l'invalidation de l'acte de procédure non conforme (ATF 148 IV 22 consid. 5.5.1). L'art. 141 al. 4 CPP ne sanctionne pas d'une "inexploitabilité absolue" les preuves dérivées, soit celles recueillies grâce à une preuve non exploitable au sens de l'al. 2. Un tel moyen de preuve n'est inexploitable qu'autant qu'il n'aurait pas pu être recueilli sans l'administration de la première preuve (arrêt 1B_572/2021 du 5 novembre 2021 consid. 2.2). Enfin, les pièces relatives aux moyens de preuves non exploitables doivent être retirées du dossier pénal, conservées à part jusqu'à la clôture définitive de la procédure, puis détruites (al. 5).  
 
2.1.3. En l'espèce, l'hypothèse visée par l'art. 140 CPP n'entre manifestement pas en considération et il n'est pas question non plus de preuves recueillies au prix d'infractions pénales. On peut, tout au plus, s'interroger sur le respect d'éventuelles règles de validité relatives à la collecte d'informations fournies oralement à la police, cas échéant par téléphone, dans le sens du grief formulé par le recourant à propos de la violation des art. 163 ss et 177 CPP.  
 
A cet égard, il est vrai que certains des premiers renseignements ayant permis d'établir un lien entre l'accident du 27 juin 2020 et le véhicule accidenté (puis aussitôt réparé) immatriculé au nom de la société administrée par le recourant ne ressortent d'aucun procès-verbal d'audition. Si le témoin E.________, qui a fait état d'un véhicule noir, a été entendue formellement le jeudi 3 décembre 2020, dans un premier temps, seul le rapport de police, qui n'a été établi que le 14 janvier 2021 soit plus de 6 mois après les faits, indiquait que " sur place, les personnes présentes déclarèrent qu'un véhicule avait percuté le piéton [...] avant de continuer sa route en direction de [... en précisant] qu'il s'agissait d'un véhicule noir dont les plaques d'immatriculation commençaient par «FR xxx»", sans fournir aucune précision quant à l'identité du ou des déclarants.  
 
Toutefois, tout au moins au début de l'instruction, l'utilisation d'éléments de preuve et indices obtenus par la police, notamment d'informateurs, qui ne figurent que dans ses rapports et qui ne sont pas étayés de manière plus solide n'est pas totalement exclue (cf. ATF 142 IV 289 consid. 2.2.3). Du reste, les règles formelles entourant la prise d'un procès-verbal d'audition brièvement rappelées ci-dessus ne s'appliquent pas nécessairement de manière complète et impérative avant toute ouverture formelle de l'enquête, singulièrement lorsque, en présence d'un accident de la circulation, la police tente au moyen de quelques questions de se faire une première idée de la situation ou lorsqu'elle recueille des déclarations spontanées. Dans l'hypothèse, notamment, où la personne qui s'exprime brièvement sur les lieux d'un accident n'est manifestement pas impliquée directement et s'il apparaît de surcroît d'emblée que l'information particulière prévue en faveur du prévenu par l'art. 158 CPP n'est pas nécessaire, la proportionnalité permet d'exonérer la police du respect scrupuleux de toutes les exigences de forme d'une audition verbalisée (GUNHILD GODENZI, in Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung, 3e éd. 2020, no 6 ad art. 143 CPP; au risque toutefois que les déclarations recueillies ne puissent être exploitées contre celui qui les a émises s'il apparaît ultérieurement qu'il aurait dû être entendu comme prévenu). Il peut alors suffire que le contenu essentiel du résultat de ces investigations sommaires, s'il doit figurer au dossier, soit consigné dans le rapport de police (DANIEL HÄRING, in Basler Kommentar Strafprozessordnung, 2e éd. 2014, no 9a et 9c ad remarques préliminaires aux art. 142-146 CPP; THORMANN/MÉGEVAND, in Commentaire romand, Code de procédure pénale, 2e éd. 2019, no 4a ad art. 142 CPP). De tels premiers indices - comme en l'espèce l'indication du début du numéro de plaques puis l'information spontanée relative à la présence dans le village voisin d'un véhicule correspondant -, permettent souvent d'orienter les recherches de la police. Ils ne sauraient, même recueillis de manière peu formelle, être tenus pour des preuves illicites qui "contamineraient" toutes celles recueillies par la suite.  
 
2.1.4. Il résulte de ce qui précède que les informations en question, qui figuraient dans le rapport de police, étaient suffisamment documentées. Le recourant ne peut, dès lors, rien déduire en sa faveur de ses développements relatifs à la possibilité de procéder à des auditions par vidéoconférence (art. 144 CPP) et il invoque de même vainement que le dossier de la cause aurait été incomplet. Comme on le verra ci-dessous, les informations initialement fournies par la police ont, de toute manière et en réponse à une requête du recourant, été augmentées par un rapport complémentaire au stade de la procédure de première instance indiquant notamment l'identité des personnes ayant renseigné les forces de l'ordre (v. infra consid. 2.2.4).  
 
2.2. Il reste à examiner si, comme le soutient le recourant, il n'aurait pas bénéficié d'un procès équitable, en particulier faute de pouvoir interroger des témoins à charge.  
 
2.2.1. Selon l'art. 6 par. 3 let. d CEDH, tout accusé a le droit d'interroger ou de faire interroger les témoins à charge et d'obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge. Cette disposition exclut qu'un jugement pénal soit fondé sur les déclarations de témoins sans qu'une occasion appropriée et suffisante soit au moins une fois offerte au prévenu de mettre ces témoignages en doute et d'interroger les témoins, à quelque stade de la procédure que ce soit. Il s'agit de l'un des aspects du droit à un procès équitable institué à l'art. 6 par. 1 CEDH. En tant qu'elle concrétise le droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.), cette exigence est également garantie par l'art. 32 al. 2 Cst. (ATF 148 I 295 consid. 2.1 et les références citées).  
 
2.2.2. Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, il ne peut être renoncé à une confrontation de l'accusé avec le témoin à charge ou à un interrogatoire complémentaire que dans des circonstances particulières. La CourEDH a admis que la déposition recueillie en cours d'enquête puisse être prise en considération sans audition contradictoire lorsque le témoin était décédé (arrêt de la CourEDH Ferrantelli contre Italie du 7 août 1996, Recueil CourEDH 1996-III p. 937), qu'il restait introuvable malgré des recherches (arrêt de la CourEDH Artner contre Autriche du 28 août 1992, Série A vol. 242 A, également in EuGRZ 1992 p. 476; arrêt de la CourEDH Doorson contre Pays-Bas du 26 mars 1996, requête n° 20524/92, Recueil CourEDH 1996-II p. 446) ou encore qu'il invoquait à juste titre son droit de refuser de déposer (arrêt de la CourEDH Asch contre Autriche du 26 avril 1991, requête n° 12398/86, Série A vol. 203, également in EuGRZ 1992 p. 474; arrêt de la CourEDH Unterpertinger contre Autriche du 24 novembre 1986, requête n° 9120/80, Série A vol. 110). Dans ces cas, il était toutefois nécessaire que la déposition soit soumise à un examen attentif, que le prévenu puisse prendre position à son sujet et que le verdict de culpabilité ne soit pas fondé sur cette seule preuve (ATF 148 I 295 consid. 2.1 et les références citées; 131 I 476 consid. 2.2 avec de nombreuses références aux arrêts de la CourEDH). Les autorités ne devraient pas non plus être elles-mêmes responsables du fait que l'accusé n'ait pas pu exercer ses droits en temps utile (ATF 148 I 295 consid. 2.1 et les références citées; 131 I 476 consid. 2.3.4; cf. aussi arrêts 6B_249/2021 du 13 septembre 2021 consid. 2.1; 6B_1028/2020 du 1er avril 2021 consid. 1.2.1; 6B_1314/2015 du 10 octobre 2016 consid. 2.1 et arrêt cité).  
 
Ces principes ont été relativisés dans l'arrêt rendu dans l'affaire Al-Khawaja et Tahery contre Royaume-Uni, dans la mesure où la CourEDH a admis que, dans certaines circonstances, même un témoignage contesté d'importance décisive ("preuve unique ou déterminante") pouvait être pris en considération sans audition contradictoire s'il existait des éléments suffisamment compensateurs pour garantir le droit de l'accusé à un procès équitable et la fiabilité des preuves (arrêt de la CourEDH Al-Khawaja et Tahery contre Royaume-Uni du 15 décembre 2011, requêtes nos 26766/05 et 22228/06, § 147).  
 
Dans l'affaire Schatschaschwili contre Allemagne, la CourEDH a transposé ces mêmes principes en les précisant. En bref, il convient d'adopter une démarche en trois étapes. La première consiste à rechercher s'il existait un motif sérieux justifiant la non-comparution. On doit ensuite se demander si cette déposition a constitué le fondement unique ou déterminant de la condamnation. Enfin, il faut examiner s'il existait des éléments compensateurs, notamment des garanties procédurales solides, suffisants pour contrebalancer les difficultés causées à la défense et assurer, de cette manière, l'équité de la procédure dans son ensemble. S'il est, en règle générale, pertinent d'examiner ces trois étapes dans cet ordre, elles sont toutefois interdépendantes et, prises ensemble, servent à établir si la procédure pénale en cause a été globalement équitable. Il peut donc être approprié, dans une affaire donnée, d'examiner ces points du critère dans un ordre différent, notamment lorsque l'un d'eux se révèle particulièrement probant pour déterminer si la procédure a ou non été équitable (arrêt de la CourEDH Schatschaschwili contre Allemagne du 15 décembre 2015, requête n° 9154/10, § 100 ss et 118).  
 
La CourEDH considère comme éléments susceptibles de rétablir l'équilibre du procès en permettant une appréciation correcte et équitable de la fiabilité de pareilles preuves, notamment, le fait que les juridictions internes se sont penchées avec prudence sur les déclarations non vérifiées d'un témoin absent, qu'elles aient montré avoir été conscientes de la valeur réduite de ces déclarations, soit qu'elles aient exposé en détail pourquoi elles considéraient que ces déclarations étaient fiables, tout en tenant compte des autres éléments de preuve disponibles. Cas échéant il faut se demander si des instructions ont été données au jury, soit aux membres non professionnels de la cour, quant à la façon d'aborder la déposition d'un témoin absent. Une autre compensation peut résider dans la diffusion en audience d'un enregistrement vidéo de l'interrogatoire au stade de l'enquête. La production au procès d'éléments de preuve venant corroborer la déposition non vérifiée constitue une autre garantie de grand poids, à l'instar de déclarations faites au procès par des personnes auxquelles le témoin absent a rapporté les événements immédiatement après leur survenue, la collecte d'autres preuves, notamment médico-légales ou des expertises relatives aux blessures ou à la crédibilité de la victime. La CourEDH considère aussi comme des facteurs importants la déposition d'un autre témoin rapportant, avec de grandes similitudes, une infraction similaire, pour autant qu'il n'y ait pas collusion et de surcroît si ce témoin a pu être entendu en audience et faire l'objet d'un contre-interrogatoire. De même, la possibilité de poser des questions par écrit au témoin absent et le fait d'avoir donné à l'accusé ou à son avocat la possibilité d'interroger le témoin au stade de l'enquête peuvent compenser le déséquilibre procédural. La défense doit se voir en outre offrir la possibilité de donner sa propre version des faits et de mettre en doute la crédibilité du témoin absent en soulignant toute incohérence ou contradiction avec les déclarations d'autres témoins. Le fait que la défense connaît l'identité du témoin constitue un élément supplémentaire susceptible d'améliorer la situation de la défense en la mettant en mesure d'identifier et d'analyser les motifs que le témoin peut avoir de mentir, et donc de contester la crédibilité de manière effective, même en son absence (arrêt de la CourEDH Schatschaschwili contre Allemagne, précité, § 125 ss; arrêt 6B_862/2015 et 6B_949/2015 du 7 novembre 2016 consid. 4.3.3).  
 
2.2.3. L'exercice du droit d'être confronté à un témoin ou d'interroger un expert suppose de toute manière un comportement actif du prévenu ou de son avocat; il leur incombe de réclamer l'audition en temps utile et dans les formes prescrites (ATF 120 Ia 48 consid. 2e/bb, p. 55; arrêts 6B_1080/2021 du 8 décembre 2021 consid. 2.3.1, 6B_625/2015 du 28 octobre 2015 consid. 2.1). Ainsi, le prévenu qui omet de requérir en temps utile et dans les formes une telle audition peut-il se voir reproché d'y avoir renoncé, quand bien même il incombe aux autorités de pourvoir d'office à ce que les preuves nécessaires soient administrées (v. art. 6, art. 343 et art. 389 al. 3 CPP; ATF 143 IV 397 consid. 3.3.1; 125 I 127 consid. 6c/bb; arrêts 6B_172/2023 du 24 mai 2023 consid. 2.3; 6B_665/2022 du 14 septembre 2022 consid. 3.3.2; 6B_100/2017 du 9 mars 2017 consid. 3.2; 6B_522/2016 du 30 août 2016 consid. 1.3).  
 
2.2.4. En l'espèce, comme le souligne le recourant, la première indication relative à la séquence initiale de chiffres du numéro de plaques recueillie sur les lieux de l'accident, puis celle fournie par téléphone quant à la présence dans le village tout proche d'un véhicule stationné correspondant au signalement (couleur et numéro de plaques), ont conduit la police à soupçonner le recourant. Au stade du jugement, tout au moins de deuxième instance, il ne s'agissait toutefois guère que d'indices convergents, parmi d'autres éléments (arrêt entrepris, consid. 2.3.5) soit en particulier la nature des dégâts constatés sur le véhicule (qui ont pu être établis grâce au dossier d'assurance et nonobstant les importantes réparations que le recourant a fait effectuer), l'absence de crédibilité du recourant dans ses explications à ce propos ainsi que le résultat des investigations techniques opérées (présence de fibres textiles de couleur orange sur l'avant droit du véhicule où B.________ dit avoir été heurté, identiques à celles prélevées sur le t-shirt de ce dernier; fibres de couleur rouge et bleue, correspondant au t-shirt de C.________, prélevées sur l'avant-gauche de l'automobile).  
Il s'ensuit que les déclarations précitées ne constituaient en tout cas pas l'élément unique à la charge du recourant et il est même douteux qu'elles fussent prépondérantes au stade du jugement. Cela étant précisé, il suffit de relever que F.________, qui a indiqué les premiers chiffres du numéro de plaques est décédé au mois de janvier 2021. Il s'ensuit que l'absence de toute audition formelle et contradictoire de cette personne ne peut être imputée aux autorités cantonales. Par ailleurs, si les indications fournies au recourant par le rapport de police étaient peu détaillées au sujet de ces premiers indices, l'intéressé n'en a pas moins été mis en mesure de donner sa propre version des faits, ce qu'il a fait de manière peu convainquante en raison d'"amnésies sélectives", d'explications fausses quant à de prétendues réparations effectuées en 2019 puis de déclarations variables et ne concordant pas avec celles données à son assureur à propos du choc avec un gibier, respectivement de griffures d'animaux et de collision avec un pneu tombé d'un semi-remorque en 2019 (ou en 2020; jugement de première instance, consid. 2). Le recourant s'est, par ailleurs, vu communiquer les identités des deux informateurs en question au stade du jugement de première instance (dossier cantonal, p. n° 13076; complément au rapport d'enquête du 14 janvier 2021). Il était donc en mesure de contester de manière effective la crédibilité de ces personnes, ce qu'il a fait (arrêt entrepris, consid. 2.3.5) et plus généralement de discuter les preuves présentées à sa charge. Il n'a toutefois, ni à ce stade ni en appel, requis l'audition de la personne qui avait annoncé à la police la présence de sa voiture au village. Il est donc malvenu de se plaindre d'une violation de son droit à un procès équitable à ce sujet. 
 
2.3. Il résulte de ce qui précède que le recourant ne peut rien déduire en sa faveur de la prétendue non-conformité au CPP des preuves administrées et que, appréciée dans sa globalité, la procédure n'apparaît de toute manière pas avoir été inéquitable. Le recourant a, en effet, lui-même renoncé à requérir sa confrontation avec la personne ayant informé la police de la présence au village d'un véhicule correspondant aux informations dont disposait l'autorité, renseignement qui n'apparaît pas non plus avoir été la preuve à charge unique, ni même un élément particulièrement déterminant. Cela conduit au rejet du grief.  
 
3.  
Le recourant invoque ensuite l'interdiction de l'arbitraire et la présomption d'innocence en lien avec l'appréciation des preuves opérée par la cour cantonale. On renvoie quant aux principes à ce qui a été évoqué ci-dessus (v. supra consid. 1) en rappelant que le principe in dubio pro reo, n'a pas de portée plus large que l'art. 9 Cst. lorsqu'il est invoqué à l'appui de telles critiques (ATF 145 IV 154 consid. 1.1; 143 IV 500 consid. 1.1), que son application suppose la persistance, à l'issue de l'administration des preuves, de doutes sérieux et irréductibles et non seulement abstraits et théoriques (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1 et les références citées) et que l'arbitraire s'entend plus du résultat que des motifs de la décision critiquée (cf. ATF 148 II 465 consid. 8.1; 144 I 170 consid. 7.3).  
 
3.1. En tant que le recourant rediscute la quasi totalité des éléments de preuve retenus par la cour cantonale et oppose au raisonnement de celle-ci sa propre appréciation de ces preuves, son argumentaire est essentiellement appellatoire. Ainsi, en particulier, en tant qu'il reproche vainement à la cour cantonale d'avoir retenu de manière insoutenable que l'absence de débris de phare sur les lieux de l'accident pouvait s'expliquer parce que ces morceaux seraient restés à l'intérieur du projecteur dont seule la partie supérieure était brisée ou lorsqu'il avance, sans étayer sa supposition, que le témoin E.________ aurait pu être influencée par des tiers (F.________, G.________ ou d'autres personnes dont on ignorerait tout). Ainsi également lorsqu'il discute les explications du témoin précité (qui a simplement fait état de la présence d'un véhicule noir peu après avoir entendu des cris) et dans la mesure où il fait grief à la cour cantonale d'avoir cité la pièce no 2050 du dossier cantonal pour décrire le mécanisme de protection des piétons contre les chocs qui équipe sa voiture, alors que ce système est bien décrit par la pièce enregistrée sous no 2051.  
 
On se limitera dans la suite à reprendre les éléments qui n'apparaissent pas d'emblée irrecevables ou manifestement infondés. 
 
3.2. Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir arbitrairement considéré, en l'absence de toute démonstration scientifique, que les fibres recueillies sur le véhicule auraient été identiques à celles des habits des victimes. Cette autorité n'aurait non plus tenu aucun compte des déclarations du recourant selon lesquelles des personnes viendraient régulièrement s'asseoir sur le capot de sa voiture et de ses explications (le polissage de tout le bloc avant et le nettoyage à l'eau du véhicule ensuite des réparations n'auraient permis de retrouver aucun résidu). La cour cantonale aurait retenu de manière arbitraire que la calandre et la pièce l'entourant n'auraient pas été repeintes dès lors qu'il ressortirait de la pièce no 2077 que les charnières "G capot" et "D capot" auraient été repeintes et l'"aile V D", remplacée à neuf.  
 
Rien n'indique cependant que des fibres textiles auraient été prélevées sur l'aile avant-droite de la voiture du recourant ou sur les charnières du capot, la cour cantonale s'étant référée à la pièce "entourant la calandre" et à l'aile gauche, qui n'avaient été ni remplacées ni repeintes (arrêt entrepris, consid. 2.3.1). La cour cantonale n'a pas plus ignoré les explications du recourant sur le fait que des personnes se seraient assises sur le capot de sa voiture. L'arrêt entrepris renvoie en effet à la motivation du jugement de première " et la complète [...] pour répondre aux critiques [...] qui n'auraient pas déjà été discutées ". Or, le juge de police s'est prononcé sur ce point, en relevant le caractère remarquable de la coïncidence entre les fibres retrouvées sur le véhicule, celles des habits des victimes ainsi que les sites sur lesquels les fibres avaient été recueillies sur le véhicule, ce qui suffisait manifestement à répondre aux allégations par lesquelles le recourant a tenté d'avancer une autre origine à la présence de ces fibres. Il en va de même en ce qui concerne le nettoyage et le polissage du véhicule (jugement de première instance, consid. 3a). 
 
3.3. La cour cantonale n'a pas non plus conclu définitivement à l'identité des fibres retrouvées sur le véhicule du recourant avec celles des vêtements des piétons renversés, mais considéré que même s'il n'était pas établi que celles se trouvant sur le véhicule provenaient effectivement des vêtements des victimes, le type, les couleurs et le positionnement des fibres retrouvées sur le véhicule correspondaient à celles des vêtements et aux déclarations des victimes quant à leurs emplacements respectifs au moment du choc. On comprend ainsi que les autorités cantonales ont vu dans ces coïncidences un élément étayant la version des victimes à l'encontre des explications du recourant. Il s'ensuit, tout d'abord, que soulignant cela, la cour cantonale n'a d'aucune manière fait état d'un doute qui devrait profiter au recourant, mais que ce point l'a, au contraire, confortée dans sa conviction. Par ailleurs, dès lors qu'il s'agissait d'en rester à une simple appréciation de l'apparence (forme et couleur) des fibres sur la base de photographies prises au microscope (dossier cantonal, p. n° 2047 s.), et non d'établir de manière stricte sur la base de connaissances scientifiques qui auraient fait défaut (cf. art. 182 CPP), l'identité de ces fibres, on ne saurait reprocher aux autorités cantonales d'avoir renoncé de manière insoutenable à une expertise. Enfin, le recourant ne tente pas de soutenir que la conclusion sur la similarité des fibres en question serait insoutenable au regard des clichés figurant au dossier. Dans ces conditions, on ne saurait reprocher à la cour cantonale d'avoir conclu arbitrairement, au vu du caractère remarquable de la coïncidence, que cela soutenait la version concordante des victimes à l'encontre des explications résolument fluctuantes du recourant.  
 
3.4. Il résulte de ce qui précède que le recourant ne parvient pas à démontrer que la décision entreprise serait insoutenable en tant qu'elle écarte tout doute sérieux sur le fait qu'il était bien au volant du véhicule immatriculé FR xxx xxx sur le lieu et à l'heure de l'accident survenu le 27 juin 2020, ce qui conduit au rejet du recours dans la mesure où il est recevable.  
 
4.  
Pour le surplus, le recourant ne formule aucune critique, même implicite, quant à la qualification des infractions et la fixation de la peine dans son principe, ses modalités ou sa quotité. Il suffit de renvoyer à la décision cantonale qui n'apparaît entachée d'aucun vice patent relatif à l'application du droit fédéral (cf. ATF 142 I 99 consid. 1.7.1; 140 III 86 consid. 2; 141 II 307 consid. 6.8; en matière pénale: v. p. ex.: arrêt 6B_307/2023 du 13 juillet 2023 consid. 2.1). 
 
5.  
Le recourant succombe. Il supporte les frais de la procédure (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg, Cour d'appel pénal. 
 
 
Lausanne, le 29 août 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
Le Greffier : Vallat