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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6S.435/2005 /svc 
 
Arrêt du 16 février 2006 
Cour de cassation pénale 
 
Composition 
MM. les Juges Schneider, Président, 
Kolly et Karlen. 
Greffière: Mme Paquier-Boinay. 
 
Parties 
A.________, 
recourant, représenté par Me Jean-Pierre Bloch, avocat, 
 
contre 
 
Ministère public du canton de Vaud, 
case postale, 1014 Lausanne. 
 
Objet 
Assassinat (art. 112 CP), fixation de la peine (art. 63 CP), 
 
pourvoi en nullité contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois du 18 avril 2005. 
 
Faits: 
A. 
A.________, citoyen congolais né en 1964, est réfugié en Suisse depuis 1989. En 1991, il a épousé B.________. En 1994 ou 1995, il a appris qu'il avait un fils, C.________, né au Zaïre en 1987, qu'il a alors fait venir en Suisse. En 1997, il s'est séparé de son épouse et a fait venir en Suisse D.________, avec laquelle il aurait conclu un mariage coutumier au Zaïre et dont il avait eu une fille, E.________ née en 1995. Sa demande d'asile ayant été rejetée, D.________ a contracté un mariage de convenance avec F.________ afin d'obtenir un permis B. Dès 1998, A.________ et D.________ ont vécu ensemble. Ils ont eu un second enfant, G.________. En 2000, A.________ a encore noué une relation avec une togolaise vivant à Genève, H.________, dont il a eu un fils, L.________, né en 2001. 
Progressivement, les relations entre A.________ et D.________ se sont détériorées, le premier se montrant jaloux, autoritaire et menaçant et la seconde n'acceptant pas la relation que celui-ci entretenait avec H.________. Lors de vacances au Congo en été 2001, à la suite d'une nouvelle dispute, D.________ a fait part à A.________ de son intention de se séparer de lui. Il est alors reparti seul en Suisse en emportant les passeports et les billets d'avion de D.________ et des enfants et en les abandonnant dans le plus complet dénuement, de sorte qu'ils n'ont pu revenir en Suisse qu'après avoir effectué de longues démarches avec l'aide de leur famille. Le couple a néanmoins repris la vie commune jusqu'à la fin de l'année 2001, période à laquelle A.________ a quitté D.________ pour s'installer chez son épouse, tout en retournant régulièrement voir D.________ et leurs enfants. Comme la situation se dégradait, A.________ se montrant jaloux et violent, D.________ n'a plus voulu qu'il vienne à son domicile, si ce n'est pour exercer son droit de visite. 
Le 8 juillet 2002, une dispute a éclaté, au cours de laquelle A.________ a interrogé D.________ sur son emploi du temps. Devant son refus de répondre, il est devenu furieux, l'a empoignée et lui a asséné un coup sur la tête avant de lui serrer le cou en lui disant "je vais te tuer, tu verras". 
Le 6 octobre 2002, alors que D.________ rentrait de Paris où elle avait passé le week-end, le couple s'est à nouveau disputé à propos notamment de l'incident qui s'était produit en Afrique et des relations que A.________ entretenait avec d'autres femmes. D.________ a répété à A.________ qu'elle ne voulait plus de lui. Elle a ensuite envoyé les enfants se coucher dans leur chambre et la dispute a repris. D.________ a alors dit à A.________ qu'elle avait entretenu des relations sexuelles avec un autre homme et reçu 300 dollars, qu'elle lui a montrés. Enervé par cette déclaration, A.________ a empoigné D.________ par le cou et l'a fait tomber sur le lit de sa chambre à coucher. A califourchon sur elle, il lui a serré le cou. Comme elle appelait au secours, il lui a enfoncé un slip dans la bouche pour la faire taire et a continué à l'étrangler jusqu'à ce qu'elle ne bouge plus. Alors que sa fille E.________, qui avait entendu sa mère crier, venait voir ce qui se passait, A.________ l'a renvoyée dans sa chambre, où il l'a rejointe, après avoir achevé sa victime, pour lui déclarer que tout était fini, qu'il n'y aurait plus de bagarre. 
A un moment qui n'a pas pu être déterminé avec précision mais qui, selon l'expert, se situe vraisemblablement peu après le décès, A.________ a infligé à sa victime des lésions génitales, essentiellement une plaie longue de 12 centimètres. 
A.________ a ensuite traîné le cadavre dans le couloir de l'immeuble en vue de le descendre à la cave. Toutefois, ayant entendu du bruit, il l'a basculé par la fenêtre, d'une hauteur de 7,50 mètres, et l'a récupéré dans la cour de l'immeuble pour le déposer dans le coffre de sa voiture. Après avoir grossièrement nettoyé le corridor pour faire disparaître les traces de sang, il a conduit son véhicule jusque dans l'enceinte de l'entreprise qui l'employait, à K.________, puis il a déchargé le corps, qu'il a abandonné dans la forêt. Il a ensuite détruit un certain nombre d'objets tachés de sang et est retourné chez son épouse pour y passer le reste de la nuit. 
B. 
Le casier judiciaire de A.________ mentionne trois condamnations. La première a été prononcée le 29 septembre 1998 pour lésions corporelles simples qualifiées et voies de fait qualifiées, la peine infligée étant de 30 jours d'emprisonnement et 500 fr. d'amende avec sursis et délai de radiation de 2 ans. La deuxième peine, complémentaire à la précédente, de 15 jours d'emprisonnement avec sursis pendant 3 ans, a été prononcée le 21 janvier 2000 pour escroquerie. Enfin, la troisième peine, prononcée le 10 avril 2001, est de 10 jours d'emprisonnement et sanctionne une infraction à la LSEE. Elle a été subie en 2001 sous forme de travail d'intérêt général. 
 
C. 
Par jugement du 8 octobre 2004, le Tribunal criminel de l'arrondissement de La Broye et du Nord vaudois a notamment reconnu A.________ coupable de meurtre, menaces et atteinte à la paix des morts. Partant, il l'a condamné à 14 ans de réclusion, sous déduction de la détention préventive subie, l'a expulsé du territoire suisse pour une durée de 10 ans, avec sursis pendant 3 ans. Il l'a en outre déchu de l'autorité parentale sur ses enfants et l'a condamné à verser à chacun des deux enfants nés de sa relation avec la victime la somme de 30'000 fr. à titre d'indemnité pour tort moral. 
D. 
Par arrêt du 18 avril 2005, dont la motivation a été notifiée le 13 octobre 2005, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté les recours formés par E.________, G.________ et A.________. En revanche, statuant sur recours formé par le Ministère public, elle a réformé le jugement de première instance en ce sens qu'elle a libéré A.________ des préventions de meurtre, de lésions corporelles graves, de voies de fait et d'ivresse au volant. Elle l'a par contre reconnu coupable d'assassinat, de menaces ainsi que d'atteinte à la paix des morts et l'a condamné à 16 ans de réclusion, sous déduction de la détention préventive subie. Elle a en outre ordonné l'expulsion du territoire suisse pour une durée de 15 ans, assortie du sursis pendant 5 ans. 
Pour qualifier l'homicide d'assassinat, l'autorité cantonale a considéré qu'au moment du passage à l'acte l'accusé ne se trouvait pas dans une situation de souffrance fondée sérieusement sur des motifs objectifs imputables à la victime et que par ailleurs l'acte avait été exécuté dans des circonstances particulièrement odieuses. Elle a en outre pris en considération le comportement de l'accusé après l'homicide et estimé qu'il avait été mû par un mobile odieux, futile et égoïste. 
E. 
A.________ forme un pourvoi en nullité contre cet arrêt. Le recourant soutient que l'autorité cantonale a violé le droit fédéral en qualifiant d'assassinat l'homicide dont il a à répondre et considère comme disproportionnée la peine qui lui a été infligée. Partant, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour qu'elle statue à nouveau. 
Le recourant sollicite en outre l'assistance judiciaire. 
F. 
Se référant aux considérants de son arrêt, l'autorité cantonale a déclaré n'avoir pas d'observations à formuler. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Le recourant conteste que l'homicide qu'il a commis puisse être qualifié d'assassinat. 
1.1 Aux termes de l'art. 112 CP, se rend coupable d'assassinat celui qui tue avec une absence particulière de scrupules, notamment si son mobile, son but ou sa façon d'agir est particulièrement odieux. L'assassinat constitue une forme qualifiée d'homicide intentionnel, qui se distingue du meurtre (art. 111 CP) par le caractère particulièrement répréhensible de l'acte (ATF 118 IV 122 consid. 2b p. 125). L'absence particulière de scrupules suppose une faute spécialement lourde et déduite exclusivement de la commission de l'acte. Pour la caractériser l'art. 112 CP évoque le cas où les mobiles, le but ou la façon d'agir de l'auteur sont hautement répréhensibles, mais cet énoncé n'est pas exhaustif. 
Les mobiles sont particulièrement odieux lorsque l'auteur tue pour obtenir une rémunération ou pour voler sa victime. Son but est particulièrement odieux lorsqu'il agit pour éliminer un témoin gênant ou une personne qui l'entrave dans la commission d'une infraction. Quant à sa façon d'agir, elle est particulièrement odieuse s'il fait preuve de cruauté, prenant plaisir à faire souffrir ou à tuer sa victime. Il ne s'agit toutefois là que d'exemples destinés à illustrer la notion. Il n'est donc pas nécessaire que l'une de ces hypothèses soit réalisée (ATF 118 IV 122 consid. 2b p. 125 s. et les références citées). On ne saurait cependant conclure à l'existence d'un assassinat dès que l'on distingue dans un cas d'espèce l'un ou l'autre élément qui lui confère une gravité particulière. Il faut au contraire procéder à une appréciation d'ensemble pour déterminer si l'acte, examiné sous toutes ses facettes, donne à l'auteur les traits caractéristiques de l'assassin. Tel est notamment le cas s'il ressort des circonstances de l'acte que son auteur a fait preuve du mépris le plus complet pour la vie d'autrui. Alors que le meurtrier agit pour des motifs plus ou moins compréhensibles, généralement dans une grave situation conflictuelle, l'assassin est une personne qui agit de sang froid, sans scrupules, qui démontre un égoïsme primaire et odieux, avec une absence quasi totale de tendances sociales, et qui, dans le but de poursuivre ses propres intérêts, ne tient aucunement compte de la vie d'autrui (ATF 127 IV 10 consid. 1a p. 14; 118 IV 122 consid. 2b p. 126 et les références citées). Chez l'assassin, l'égoïsme l'emporte en général sur toute autre considération. Il est souvent prêt à sacrifier, pour satisfaire des besoins égoïstes, un être humain dont il n'a pas eu à souffrir et fait preuve d'un manque complet de scrupules et d'une grande froideur affective (ATF 118 IV 122 consid. 2b p. 126 et l'arrêt cité). La destruction de la vie d'autrui est toujours d'une gravité extrême, mais, comme le montre la différence de peine, il faut, pour retenir la qualification d'assassinat, que la faute de l'auteur, par son caractère particulièrement odieux, se distingue nettement de celle d'un meurtrier au sens de l'art. 111 CP (ATF 127 IV 10 consid. 1a p. 13; 120 IV 265 consid. 3a p. 274; 118 IV 122 consid. 2b p.125 s.; 117 IV 369 consid. 17 p. 389 ss et les références citées). 
1.2 En l'espèce, il ressort des constatations de fait de l'autorité cantonale, qui lient la Cour de cassation saisie d'un pourvoi en nullité, que le recourant, qui venait de se remettre en ménage avec son épouse et, outre sa relation avec la victime, entretenait une autre relation extraconjugale, se montrait jaloux et possessif envers la mère de ses enfants au point que, trois mois avant les faits, alors qu'il l'avait interrogée en vain sur son emploi du temps, il lui a serré le cou en lui disant qu'il la tuerait. Tant l'autorité de première instance que la cour cantonale ont relevé que le recourant considérait son amie comme sa chose. Alors que lui-même avait plusieurs liaisons, il a préféré supprimer la mère de ses enfants plutôt que de la voir faire sa vie de son côté. Le recourant a donc agi par pur égoïsme, attitude d'autant plus crasse qu'il avait une part prépondérante dans la volonté de son amie de reprendre sa liberté, l'arrêt attaqué mentionnant qu'elle ne supportait plus les relations que le recourant entretenait avec d'autres femmes ni la violence dont il faisait preuve à son encontre. C'est en vain que le recourant tente de justifier son geste par le choc causé par l'idée que celle qu'il avait placée sur un piédestal et considérait comme une idole s'était abaissée au rang de prostituée. En effet, le comportement qu'il adoptait à son égard contraste singulièrement avec la vénération vouée à une idole. 
Par ailleurs, les considérations de l'autorité cantonale sur la manière d'agir du recourant sont parfaitement correctes, de même que la conclusion qu'elle en tire. Dans la mesure où il prétend que ça n'est qu'après le décès de la victime qu'il lui aurait enfoncé un slip dans la gorge, le recourant s'en prend aux constatations de fait de l'autorité cantonale, qui a admis qu'il avait agi ainsi dans le but de l'empêcher de crier, ce qui n'est pas admissible dans le cadre d'un pourvoi en nullité. De même, son argument tiré du fait qu'il n'est pas prouvé que sa fille l'ait vu assassiner sa mère n'est pas déterminant. Même dans ce cas, le fait qu'il ait étranglé la mère de ses enfants alors que ceux-ci se trouvaient dans la chambre voisine et qu'il ne se soit pas interrompu lorsque sa fille est venue voir pourquoi sa mère avait crié, se contentant de la renvoyer dans sa chambre, terminant sa besogne avant de l'y rejoindre pour lui dire qu'il n'y aurait plus de bagarre montre bien la froideur affective dont il a fait preuve. Dès lors, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en qualifiant d'assassinat l'homicide imputé au recourant. 
2. 
Le recourant soutient en outre que la peine de 16 ans de réclusion prononcée à son encontre est manifestement disproportionnée à sa culpabilité réelle. 
2.1 Pour fixer la peine, le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation. Un pourvoi en nullité portant sur la quotité de la peine ne peut donc être admis que si la sanction a été fixée en dehors du cadre légal, si elle est fondée sur des critères étrangers à l'art. 63 CP, si les éléments d'appréciation prévus par cette disposition n'ont pas été pris en compte ou enfin si la peine apparaît exagérément sévère ou clémente au point que l'on doive parler d'un abus du pouvoir d'appréciation (ATF 129 IV 6 consid. 6.1 p. 21; 127 IV 101 consid. 2c p. 104; 124 IV 286 consid. 4a p. 295 et les arrêts cités). 
La gravité de la faute est le critère essentiel à prendre en considération dans la fixation de la peine et le juge doit l'évaluer en fonction de tous les éléments pertinents, notamment ceux qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir le résultat de l'activité illicite, le mode d'exécution, l'intensité de la volonté délictuelle et les mobiles, et ceux qui concernent l'auteur, soit les antécédents, la situation personnelle et le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 129 IV 6 consid. 6.1 p. 20; 127 IV 101 consid. 2a p. 103; 122 IV 241 consid. 1a p. 243; 118 IV 21 consid. 2b p. 24 s.; 117 IV 112 consid. 1; 116 IV 288 consid. 2a). Concernant la situation personnelle de l'auteur, le juge doit prendre en compte sa vulnérabilité face à la peine, soit son état de santé et son âge, ses obligations familiales, sa situation professionnelle, les risques de récidive, etc. (ATF 102 IV 231 consid. 3 p. 233; 96 IV 155 consid. 3 p. 179). 
2.2 Outre l'assassinat, le recourant a également été reconnu coupable de menaces - pour avoir, le 8 juillet 2002, déclaré à sa victime qu'il allait la tuer alors qu'il lui avait asséné un coup sur la tête et était en train de lui serrer le cou - ainsi que d'atteinte à la paix des morts - pour les lésions génitales qu'il lui a infligées après son décès. Sa culpabilité est très lourde. Elle apparaît encore aggravée par le fait qu'il a commis l'assassinat et l'atteinte à la paix des morts alors qu'il faisait l'objet d'une enquête suite à la plainte déposée par la victime pour les menaces dont elle avait fait l'objet. Dès lors, compte tenu des antécédents du recourant, il n'apparaît pas que l'autorité cantonale aurait abusé du large pouvoir d'appréciation dont elle disposait en infligeant au recourant une peine de 16 ans de réclusion, même eu égard aux éléments retenus en sa faveur, savoir une légère diminution de responsabilité, sa collaboration à l'enquête et les regrets exprimés à l'audience ainsi que les bons renseignements fournis par ses anciens employeurs. Le pourvoi doit dès lors être rejeté. 
3. 
Vu l'issue de la procédure, les frais de la cause doivent être mis à la charge du recourant qui succombe (art. 278 al. 1 PPF). 
Comme le pourvoi apparaissait d'emblée dénué de chances de succès, la requête d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 152 al. 1 OJ) et le recourant, qui succombe, en supportera les frais (art. 278 al. 1 PPF), dont le montant sera fixé en tenant compte de sa situation financière. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le pourvoi est rejeté. 
2. 
La requête d'assistance judiciaire est rejetée. 
3. 
Un émolument judiciaire de 800 fr. est mis à la charge du recourant. 
4. Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, à la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal et au Ministère public du canton de Vaud. 
Lausanne, le 16 février 2006 
Au nom de la Cour de cassation pénale 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: