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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
8C_438/2022  
 
 
Arrêt du 26 mai 2023  
 
IVe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Wirthlin, Président, 
Viscione et Abrecht. 
Greffière : Mme Fretz Perrin. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par M e Pierre Seidler, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA), Division juridique, Fluhmattstrasse 1, 6002 Lucerne, 
intimée. 
 
Objet 
Assurance-accidents (rente d'invalidité; état de santé; incapacité de travail; revenu d'invalide), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura du 1er juin 2022 (AA123 / 2019 + AJ 124 / 2019). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________, né en 1965, était employé depuis le 13 janvier 1986 en qualité d'ouvrier auprès de l'entreprise B.________. A ce titre, il était assuré obligatoirement contre les accidents professionnels et non professionnels auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA).  
Le 18 mai 1986, l'assuré a subi un grave accident de la circulation routière, sa voiture ayant embouti un arbre jouxtant la chaussée alors qu'il cherchait à éviter une collision frontale en raison d'un dépassement téméraire d'un véhicule circulant en sens inverse, ce qui a entraîné le décès de son ami passager; il a lui-même subi plusieurs atteintes, notamment des fractures du fémur droit, du pilon tibial et du tibia droits. Il a subi deux interventions chirurgicales. La CNA a pris en charge le cas. 
Après une incapacité totale de travail, l'assuré a repris son activité professionnelle le 24 novembre 1986. Il a annoncé plusieurs cas de rechutes, notamment en raison des ablations du matériel d'ostéosynthèse (AMO). 
 
A.b. Par rapport médical du 24 janvier 2018, le docteur C.________, médecin généraliste à U.________, a fait état d'une rechute de l'accident du 18 mai 1986 survenue le 2 octobre 2017: il a diagnostiqué une épicondylite droite et des gonalgies droites. La CNA a pris en charge ce cas de rechute, sauf en ce qui concerne l'épicondylite.  
L'assuré, qui travaillait entre-temps pour l'entreprise D.________ Sàrl, a été licencié pour la fin du mois d'août 2017. 
L'assuré a été examiné par le docteur E.________, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie et médecin d'arrondissement de la CNA. Dans son rapport du 19 février 2019, celui-ci a considéré que du point de vue somatique, la situation semblait plutôt favorable. Compte tenu des seules suites de l'accident de 1986, une pleine capacité de travail pouvait être reconnue à l'assuré dans une activité parfaitement adaptée, à savoir idéalement réalisée à la guise de l'assuré en position assise ou debout, sans déplacement rapide ou prolongé (max. 15 minutes), ne nécessitant pas l'utilisation répétée d'escaliers, le déplacement prolongé en terrain instable, le port de charges lourdes ni les positions agenouillées ou accroupies. 
Le 5 mars 2019, l'assuré a fait l'objet de radiographies du genou droit et de la cheville droite: au niveau du genou droit, une arthrose fémoro-tibiale interne d'intensité moyenne justifiait un taux d'indemnité pour atteinte à l'intégrité (IPAI) entre 5 % et 10 %. Etant donné la fonction articulaire peu limitée, le médecin d'arrondissement a retenu un taux de 10 %. Au niveau de la cheville droite, il a retenu une arthrose tibio-tarsienne moyenne avec une limitation fonctionnelle considérable qui justifiait de prendre le taux maximal attribuable, soit 15 %. 
 
A.c. Par décision du 28 mai 2019, confirmée sur opposition le 27 septembre 2019, la CNA a octroyé à l'assuré une rente d'invalidité de 13 % ainsi qu'une IPAI fondée sur un taux de 25 %.  
 
B.  
L'assuré a déféré la décision sur opposition à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura. En cours de procédure, il a produit des rapports du docteur F.________ (médecin à la Clinique de la douleur de l'Hôpital G.________), des 11 octobre et 25 novembre 2019, confirmant ses conclusions tendant à la poursuite de la prise en charge de son cas par la CNA, dans la mesure où son état de santé n'était pas stabilisé le 27 septembre 2019. La CNA a produit une appréciation de son médecin-conseil, la doctoresse H.________, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, du 6 janvier 2020, ainsi que sa traduction en français. 
Par arrêt du 1 er juin 2022, la cour cantonale a rejeté le recours.  
 
C.  
A.________ forme un recours en matière de droit public contre cet arrêt, dont il demande principalement la réforme dans le sens du versement des prestations d'assurance. A titre subsidiaire, il conclut au renvoi de la cause à l'instance cantonale, respectivement à l'intimée pour complément d'instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants. Il sollicite en outre le bénéfice de l'assistance judiciaire gratuite. 
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière de droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable. 
 
2.  
 
2.1. Le litige porte sur le point de savoir si la cour cantonale a violé le droit fédéral en confirmant la décision sur opposition du 27 septembre 2019. Selon les conclusions du recours, sont litigieux uniquement la date de stabilisation de l'état de santé du recourant, l'étendue de sa capacité de travail et le taux d'abattement sur son revenu d'invalide.  
 
2.2. Lorsque la décision qui fait l'objet d'un recours concerne l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 3 LTF); le recours peut alors porter sur toute constatation incomplète ou erronée des faits (art. 97 al. 2 LTF).  
 
3.  
L'arrêt entrepris expose correctement les dispositions légales et les principes jurisprudentiels applicables en l'espèce, s'agissant notamment du droit aux prestations de l'assurance-accidents (art. 6 al. 1 LAA; art. 4 LPGA) et à la rente d'invalidité (art. 18 al. 1 LAA), du moment de la naissance du droit à la rente (art. 19 al. 1 LAA) et de l'appréciation des rapports médicaux (ATF 134 V 231 consid. 5.1; 125 V 351 consid. 3). Il suffit par conséquent d'y renvoyer (cf. consid. 4 à 6 de l'arrêt attaqué). 
 
4.  
 
4.1. Dans un premier grief, le recourant fait valoir que son état de santé n'était pas stabilisé le 27 septembre 2019, au moment de la décision sur opposition litigieuse. Il se fonde sur un rapport du docteur F.________, du 11 octobre 2019, lequel évoquerait un traitement chirurgical, voire une arthrodèse, ainsi que sur un rapport de la Clinique orthopédique I.________ de l'Hôpital J.________, du 3 décembre 2020, dont il ressortirait la nécessité d'une intervention chirurgicale au niveau de la cheville droite. Dès lors qu'un traitement - autre que seulement physiothérapeutique et antalgique - était encore envisageable pour améliorer l'état de sa cheville droite et qu'une prothèse avait été posée ultérieurement, le recourant estime que son état de santé n'était pas stabilisé en date du 27 septembre 2019.  
Dans son rapport du 11 octobre 2019, le docteur F.________ a mentionné que l'arthrose de la cheville droite serait imputable à l'accident, son évolution progressive et son pronostic ne pouvant être appréciés qu'avec des contrôles réguliers; l'aggravation de l'arthrose post-traumatique du pied droit nécessitait un traitement intensif de physiothérapie et la poursuite du traitement antalgique. L'hypothèse de la pose d'une prothèse ou d'une arthrodèse a été évoquée mais pas de manière concrète à ce stade. Quant au rapport du 3 décembre 2020, il ne mentionne pas, contrairement à ce que soutient le recourant, la nécessité d'une intervention chirurgicale mais souligne que si le recourant devait souffrir de douleurs malgré le traitement conservateur, une intervention pourrait être envisagée, à savoir une arthrodèse (fixation de l'articulation), laquelle apporterait un soulagement comparable à celui escompté après une infiltration. En tout état de cause, il ne ressort pas des rapports médicaux qui précèdent qu'une arthrodèse au niveau de la cheville droite du recourant apporterait une sensible amélioration de son état de santé, le recourant souffrant par ailleurs de problèmes dégénératifs au niveau de plusieurs de ses articulations selon le rapport de la Clinique orthopédique de l'Hôpital J.________. Vu ce qui précède, les rapports médicaux dont se prévaut le recourant ne permettent pas de remettre en cause la date de stabilisation de son état de santé fixée au 27 septembre 2019. 
 
4.2. Dans un second grief, le recourant conteste l'appréciation du médecin d'arrondissement de la CNA du 19 février 2019, selon lequel il dispose d'une capacité de travail totale dans une activité adaptée. Il soutient que ce rapport ne tiendrait pas compte de ses douleurs d'origine organique et du traitement anti-douleur ainsi que de ses cervicalgies, lesquelles auraient été mises en lien de causalité avec l'accident par l'ordonnance de la doctoresse K.________ du 23 août 2018. Dès lors que les constatations de cette doctoresse jetteraient un doute sur celles du médecin d'arrondissement de la CNA, il se justifierait de renvoyer la cause à l'intimée pour instruction complémentaire et nouvelle décision.  
L'ordonnance de la doctoresse K.________ du 23 (recte: 22) août 2018 se limite à attester que le recourant était en incapacité de travail à 100 % du 1 er au 31 août 2018. On ne voit dès lors pas en quoi cette ordonnance pourrait mettre en doute les conclusions postérieures du médecin d'arrondissement de la CNA, lequel se prononce sur la capacité de travail du recourant compte tenu des seules suites de l'accident de 1986 et atteste une capacité de travail entière à partir de la date de son examen dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles du recourant. Le grief du recourant doit par conséquent être rejeté.  
 
4.3.  
 
4.3.1. Dans un dernier grief, le recourant demande qu'un abattement d'au moins 10 % soit effectué sur son revenu d'invalide dès lors qu'il subirait un désavantage salarial dans la recherche d'un nouvel emploi en raison de ses limitations fonctionnelles, de son âge (54 ans) et du fait qu'avant de perdre son dernier emploi, il avait été six ans au service du même employeur et aurait donc perdu la progression salariale y afférente.  
 
4.3.2. La cour cantonale a constaté que l'intimée avait fixé à 74'150 fr. le revenu sans invalidité à prendre en considération pour le calcul de la rente d'invalidité, montant qui n'était pas contesté par le recourant. Pour ce qui est du revenu d'invalide, la cour cantonale s'est référée aux données statistiques provenant de l'Enquête suisse sur la structure des salaires publiée par l'Office fédéral de la statistique (ESS) en 2016, en prenant pour base le salaire auquel peuvent prétendre les hommes dans des tâches physiques ou manuelles simples (niveau de compétence 1) dans le secteur privé, soit 5'340 fr. par mois pour 40 heures de travail par semaine (tableau TA1_tirage_skill_level). Après adaptation à l'évolution des salaires et à la durée normale dans les entreprises en 2019 (41,7 heures), il en résultait un montant annuel de 67'743 fr. En outre, la cour cantonale a confirmé l'abattement de 5 % retenu par l'intimée pour prendre en compte les limitations fonctionnelles du recourant, ce qui portait le revenu d'invalide à 64'355 fr. 85.  
 
4.3.3. En ce qui concerne l'étendue de l'abattement, on rappellera que la mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux d'occupation). Une déduction globale maximale de 25 % sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 126 V 75 consid. 5b/aa-cc). Le point de savoir s'il y a lieu de procéder à un abattement sur le salaire statistique en raison de circonstances particulières (liées au handicap de la personne ou à d'autres facteurs) est une question de droit qui peut être examinée librement par le Tribunal fédéral; en revanche, l'étendue de l'abattement à opérer sur le salaire statistique dans un cas concret constitue une question relevant du pouvoir d'appréciation, qui est soumise à l'examen du juge de dernière instance uniquement si la juridiction cantonale a exercé son pouvoir d'appréciation de manière contraire au droit, soit si elle a commis un excès positif ("Ermessensüberschreitung") ou négatif ("Ermessensunterschreitung") de son pouvoir d'appréciation ou en a abusé ("Ermessensmissbrauch"), notamment en retenant des critères inappropriés, en ne tenant pas compte de circonstances pertinentes, en ne procédant pas à un examen complet des circonstances pertinentes ou en n'usant pas de critères objectifs (ATF 137 V 71 consid. 5.1; 132 V 393 consid. 3.3).  
 
4.3.4. Le recourant n'expose pas - et on ne voit pas - en quoi ses perspectives salariales seraient concrètement réduites sur un marché du travail équilibré en raison de son âge. En outre, étant âgé de 53 ans au moment de la naissance du droit à la rente, respectivement de 54 ans au moment de la décision sur opposition, le recourant n'avait pas encore atteint l'âge à partir duquel le Tribunal fédéral reconnaît généralement que ce facteur peut être déterminant et nécessite une approche particulière (arrêts 8C_608/2021 du 26 avril 2022 consid. 4.3.2; 8C_175/2020 du 22 septembre 2020 consid. 4.2). Comme les activités adaptées envisagées du niveau de compétence 1 ne requièrent ni formation, ni expérience professionnelle spécifique, les effets pénalisants au niveau salarial induits par l'âge ne peuvent pas être considérés comme suffisamment établis. En outre, il faut rappeler que ces emplois non qualifiés sont, en règle générale, disponibles indépendamment de l'âge de l'intéressé sur un marché du travail équilibré (cf. ATF 146 V 16 consid. 7.2.1; arrêts 8C_661/2018 du 28 octobre 2019 consid. 3.3.4.2; 8C_103/2018 du 25 juillet 2018 consid. 5.2).  
 
4.3.5. En ce qui concerne la prise en compte d'un abattement lié aux années de service, elle n'est pas justifiée dans le cadre du choix du niveau de compétence 1 de l'ESS, l'influence de la durée de service sur le salaire étant peu importante dans cette catégorie d'emplois qui ne nécessitent ni formation ni expérience professionnelle spécifique (voir 8C_103/2018 précité consid. 5.2). Il en irait différemment à partir du niveau de compétence 2, s'agissant d'emplois qualifiés dans lesquels l'expérience professionnelle accumulée auprès d'un même employeur est davantage valorisée.  
 
4.3.6. En conclusion, seules les limitations fonctionnelles de l'assuré - prohibant les déplacements rapides ou prolongés au-delà de 15 minutes, l'utilisation répétée d'escaliers, le déplacement prolongé en terrain instable, le port de lourdes charges ainsi que les positions agenouillées ou accroupies - ont une incidence sur les activités simples et légères qui restent exigibles de sa part. Dès lors que l'intimée avait tenu compte desdites limitations pour réduire le salaire statistique de 5 %, il n'appartient pas au Tribunal fédéral de s'en écarter.  
 
5.  
Au vu de ce qui précède, le recours se révèle mal fondé et doit être rejeté. Ce dernier était manifestement dépourvu de chances de succès, de sorte que l'une des conditions pour l'octroi de l'assistance judiciaire n'est pas remplie (art. 64 al. 1 LTF). Il convient dès lors de rejeter la demande d'assistance judiciaire du recourant. Celui-ci devra supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour des assurances, et à l'Office fédéral de la santé publique. 
 
 
Lucerne, le 26 mai 2023 
 
Au nom de la IVe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Wirthlin 
 
La Greffière : Fretz Perrin