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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
1B_161/2016  
 
1B_163/2016  
   
   
 
 
 
Arrêt du 31 mai 2016  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président, 
Merkli et Chaix. 
Greffière : Mme Kropf. 
 
Participants à la procédure 
1B_161/2016 et 1B_163/2016 
 A.________, représenté par Me Emmanuel Kilchenmann, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Tribunal des mesures de contrainte de l'Etat de Fribourg, place de Notre-Dame 8, 1700 Fribourg, 
Ministère public de l'Etat de Fribourg, case postale 1638, 1701 Fribourg. 
 
Objet 
Procédure pénale; consultation du dossier, 
 
recours contre les arrêts de la Chambre pénale du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg du 24 mars 2016 (1B_161/2016) et du 12 avril 2016 (1B_163/2016). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Dans le cadre de l'enquête relative à un cambriolage perpétré le 23 décembre 2015 en ville de Fribourg, A.________ a été interpellé par la police le 24 décembre 2015 et mis en prévention notamment pour brigandage en bande.  
 
A.b. Par ordonnance du 26 décembre 2015, le Tribunal des mesures de contrainte du canton de Fribourg (Tmc) a ordonné la détention provisoire du prévenu jusqu'au 22 mars 2016. Le Ministère public du canton de Fribourg a requis, le 16 mars 2016, la prolongation de cette mesure. Dans ce cadre, l'avocat-stagiaire du mandataire du recourant s'est rendu le 17 mars 2016 au siège du Tmc afin de consulter le dossier. Sur demande orale du Ministère public au motif d'un risque de collusion, des pièces ont été retirées par le Tmc du dossier mis à disposition de l'avocat-stagiaire. Une demande formelle d'accès à ces documents a été déposée le 18 mars 2016, requête rejetée ce même jour par le Juge du Tmc; ce dernier a précisé que la motivation de ce refus figurerait dans l'ordonnance relative à la prolongation de la détention provisoire.  
Par arrêt du 24 mars 2016, la Chambre pénale du Tribunal cantonal fribourgeois n'est pas entrée en matière sur le recours intenté par A.________ contre cette décision. Elle a considéré que, vu la procédure de prolongation de la détention encore pendante, aucune voie de droit n'était ouverte contre ce prononcé (cause 1B_161/2016). 
 
A.c. Le 22 mars 2016, le Tmc a prolongé la détention provisoire de A.________ jusqu'au 22 juin 2016. Il a également motivé son refus de donner accès à l'entier du dossier en sa possession. A.________ a recouru contre cette ordonnance, concluant au constat de l'illicéité de ce refus et à l'obtention immédiate de l'intégralité du dossier en mains du Tmc.  
La Chambre pénale a déclaré ce recours irrecevable le 12 avril 2016. Elle a constaté en substance que le recours déposé se limitait à la question de l'accès au dossier, sans qu'un lien entre cette problématique et la prolongation de la détention provisoire n'ait été établi. Elle a dès lors estimé qu'il n'existait pas de voie de droit sur ce seul point et que le prévenu n'avait aucun intérêt juridique à l'annulation ou la modification de la décision attaquée (cause 1B_163/2016). 
 
B.   
Le 29 avril 2016, A.________ forme des recours en matière pénale et des recours constitutionnels subsidiaires contre les deux arrêts de la Chambre pénale susmentionnés, concluant à leur annulation. Il demande en substance la constatation de l'illicéité du refus du Tmc de lui donner accès à l'entier du dossier en sa possession (art. 227 al. 3 CPP et 29 al. 2 Cst.) et la mise en oeuvre de ce droit. A titre subsidiaire, il requiert le renvoi de la cause à l'autorité précédente. Il sollicite également l'octroi de l'assistance judiciaire. 
Invités à se déterminer, le Tmc, le Ministère public, ainsi que l'autorité précédente ont renoncé à déposer des observations. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
L'acte de recours vise deux arrêts distincts de la Chambre pénale et, par conséquent, deux dossiers ont été ouverts. Toutefois, dans la mesure où la problématique est identique, ce que démontre le dépôt d'un seul et même mémoire à l'encontre de ces deux décisions, il se justifie de joindre les deux causes et de statuer dans un seul arrêt. 
 
2.   
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement les conditions de recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 140 IV 57 consid. 2 p. 59). 
 
2.1. Les deux décisions attaquées ont été rendues dans une cause de droit pénal par une autorité cantonale de dernière instance (art. 80 LTF). Elles peuvent donc en principe faire l'objet d'un recours en matière pénale (art. 78 ss LTF), moyen qui permet d'invoquer notamment toute violation du droit fédéral, y compris des droits constitutionnels (art. 95 let. a LTF).  
Partant, les recours constitutionnels subsidiaires sont exclus (art. 113 LTF). 
 
2.2. Les recours en matière pénale - formés en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) - sont dirigés contre deux arrêts d'irrecevabilité qui ne mettent pas fin à la procédure pénale et qui revêtent donc un caractère incident. En principe, ces recours ne seraient recevables qu'aux conditions restrictives posées à l'art. 93 LTF. Toutefois, lorsque les recours portent sur le refus de reconnaître l'existence même d'un droit de recourir sur le plan cantonal, ce qui équivaut à un déni de justice formel, le Tribunal fédéral renonce à l'exigence d'un préjudice irréparable (ATF 138 IV 258 consid. 1.1 p. 261).  
Indépendamment de sa qualité pour recourir sur le fond - au demeurant douteuse sous l'angle de l'intérêt juridique (cf. art. 81 al. 1 let. b LTF) et/ou de l'existence d'un préjudice irréparable (cf. art. 93 al. 1 let. a LTF) dès lors que la prolongation de la détention n'est pas contestée -, le recourant a qualité pour contester l'irrecevabilité de ses recours cantonaux (ATF 141 IV 1 consid. 1.1 p. 5; 136 IV 41 consid. 1.4. p. 44). Toutefois, seule cette question peut alors être portée devant le Tribunal fédéral; à ce stade, celui-ci n'a pas à statuer sur le fond, à savoir en l'occurrence sur les griefs en lien avec le refus du Tmc de transmettre certaines pièces du dossier en sa possession (cf. en particulier l'art. 227 al. 3 CPP). Il en résulte que les conclusions principales du recourant sont irrecevables (ATF 138 III 46 consid. 1.2 p. 48). Il y a cependant lieu d'entrer en matière vu la conclusion subsidiaire - qui tend au renvoi de la cause à l'autorité précédente - et l'argumentation développée en lien avec les art. 393 et 382 CPP
 
3.   
Le recourant soutient en substance qu'un recours au sens de l'art. 393 al. 1 let. a CPP serait ouvert par analogie contre les décisions de procédure du Tmc. Le recourant reproche également à l'autorité précédente une violation de l'art. 382 al. 1 CPP en ayant retenu qu'il n'aurait aucun intérêt juridique à obtenir l'accès aux documents retirés du dossier dès lors qu'il n'aurait pas contesté la prolongation de sa détention provisoire. 
 
3.1. Selon l'art. 393 al. 1 CPP, le recours est recevable contre les décisions et les actes de procédure de la police, du ministère public et des autorités pénales compétentes en matière de contraventions (let. a); contre les ordonnances, les décisions et les actes de procédure des tribunaux de première instance, sauf contre ceux de la direction de la procédure (let. b); et contre les décisions du Tmc, dans les cas prévus par le code de procédure pénale (let. c).  
Vu la teneur de cette disposition, le législateur a distingué les décisions sujettes à recours en fonction de l'autorité ayant statué. Il n'a nullement oublié de se prononcer sur les ordonnances rendues par le Tmc, puisqu'il a adopté l'art. 393 al. 1 let. c CPP. Les décisions de cette autorité sont donc susceptibles d'être portées devant l'autorité de recours (cf. art. 20 al. 1 let. c CPP). 
Contrairement à ce qui prévaut par exemple pour les prononcés du ministère public (cf. art. 393 al. 1 let. a CPP), le législateur a toutefois expressément limité cette voie de droit aux cas prévus par la loi (cf. art. 393 al. 1 let. c CPP; pour des exemples, voir notamment les dispositions citées par CAMILLE PERRIER DEPEURSINGE, Code de procédure pénale suisse annoté [CPP], 2015, ad art. 393 al. 1 let. c CPP; voir aussi PATRICK GUIDON, in Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, Art. 196-457 StPO, 2e éd. 2014, n° 14 ad art. 393 CPP; FRANZ RICKLIN, Kommentar StPO, 2e éd. 2014, n° 1 ad art. 393 CPP). Il découle de cette mention qu'à défaut de règle légale ouvrant le recours - tel par exemple l'art. 222 CPP en matière de détention provisoire ou pour des motifs de sûreté -, les autres décisions du Tmc sont définitives sur le plan cantonal (cf. art. 380 CPP; ATF 137 IV 340 consid. 2.2.2 p. 343; Message du Conseil fédéral du 21 décembre 2005 relatif à l'unification de la procédure pénale, FF 2006 1057 spécialement p. 1114 et 1196); le cas échéant, elles peuvent être portées directement devant le Tribunal fédéral (cf. art. 80 al. 2 in fine LTF; ATF 137 IV 340 consid. 2.2 p. 343 [refus du Tmc d'autoriser une mesure de surveillance secrète]; arrêt 1B_120/2014 du 20 juin 2014 consid. 1 [levée des scellés, art. 248 al. 3 let. a CPP]). 
 
3.2. En l'occurrence, le recourant ne soutient pas qu'une disposition spécifique du CPP lui ouvrirait une voie de recours contre le prononcé du 24 mars 2016; il s'agirait cependant, à le suivre, d'une lacune de la loi et il se justifierait dès lors de faire une application par analogie de l'art. 393 al. 1 let. a CPP.  
Au regard des considérations précédentes, il n'y a cependant aucune lacune qui devrait être comblée. En effet, le législateur a expressément déterminé quelles décisions du Tmc pouvaient être portées devant l'autorité de recours. L'une des conséquences de ce choix - qui peut certes déplaire au recourant - est que les autres prononcés sont, pour le moins au niveau cantonal, définitifs; un recours à leur encontre est donc irrecevable. La solution préconisée par le recourant - qui tend à ouvrir plus largement la voie du recours contre les prononcés du Tmc - ne correspond ainsi manifestement pas à la volonté du législateur qui désirait limiter de telles possibilités. 
Au demeurant, le recourant n'était pas dénué de tout moyen de droit pour défendre la violation alléguée de son droit d'être entendu au cours de la procédure devant le Tmc. En effet, celui-ci lui a indiqué que la motivation de son refus interviendrait ultérieurement, à savoir dans la décision relative à la prolongation de la détention. Or, ce prononcé peut être attaqué en vertu de l'art. 222 CPP, ce qu'a d'ailleurs fait - dans une certaine mesure - le recourant. Le défaut d'indication des motifs permet également d'exclure tout recours direct au Tribunal fédéral contre le prononcé du Tmc susmentionné (cf. art. 112 LTF); le recourant ne soutient d'ailleurs pas que son écriture aurait dû lui être transmise comme objet de sa compétence (cf. art. 48 al. 3 LTF). 
Partant, c'est à juste titre que la Chambre pénale n'est pas entrée en matière sur le recours déposé le 22 mars 2016 par le recourant. 
 
3.3. S'agissant ensuite de la décision du 12 avril 2016, la Chambre pénale a considéré que le recours au sens de l'art. 222 CPP ne pouvait concerner le retrait des pièces du dossier que dans l'hypothèse où cette question serait en lien avec la décision de prolongation de la détention; or tel n'était pas le cas dès lors que le prononcé de cette mesure n'avait pas été contesté. Il n'y a pas lieu de déterminer si ce raisonnement - qui tend à exclure la voie du recours lorsque seul un point accessoire est remis en cause - peut être suivi.  
En effet, si une telle voie de droit était ouverte, le recours cantonal devrait être déclaré irrecevable vu l'absence d'intérêt juridiquement protégé au sens de l'art. 382 al. 1 CPP du recourant (cf. art. 382 al. 1 CPP; sur cette disposition, arrêt 6B_1159/2015 du 7 avril 2016 consid. 2.1 et les arrêts cités). Ce dernier ne s'étant pas opposé à la prolongation de sa détention provisoire, il ne peut justifier d'aucun intérêt pratique et actuel à accéder ultérieurement au dossier remis au Tmc dans le cadre du contrôle de sa détention provisoire. Cela vaut d'autant plus que le Tmc n'a pas motivé sa décision relative à la détention en faisant référence aux pièces retirées; il a justifié la prolongation de cette mesure uniquement par l'existence de dangers de fuite et de réitération, soit des raisons différentes de celle invoquée par le Ministère public dans sa requête de retrait (risque de collusion). Ces considérations permettent au demeurant d'exclure toute violation du droit d'être entendu du recourant dans le cadre de la procédure devant le Tmc (cf. art. 29 al. 2 Cst.). 
Le recourant prétend cependant que le refus de lui octroyer un droit d'accès à l'entier du dossier du Tmc pourrait se reproduire; il conviendrait dès lors de faire abstraction de la condition de l'intérêt. Certes, il n'est pas impossible qu'une telle situation se reproduise. Cela étant, si des conséquences devaient en résulter pour le recourant - ce qui n'est pas le cas en l'occurrence vu le défaut d'utilisation des pièces litigieuses pour justifier la prolongation de la détention provisoire -, celui-ci n'est pas dénué de tout moyen pour invoquer, sous réserve des autres conditions de recevabilité, ses éventuels griefs à cet égard (cf. art. 393 al. 1 let. c CPP, respectivement 80 al. 2 in fine LTF). 
Un défaut d'intérêt juridique au sens de l'art. 382 al. 1 CPP découle aussi en l'espèce du fait que le recourant peut demander au Ministère public l'accès à l'entier du dossier pénal le concernant (cf. art. 101 et 107 al. 1 let. a CPP); si le magistrat entend limiter cet accès, il doit alors motiver sa décision (cf. art. 108 al. 1 CPP), prononcé qui est sujet à recours (cf. art. 393 al. 1 let. a CPP; arrêt 1B_329/2014 du 1er décembre 2014 consid. 2.2). 
Par conséquent, la Chambre pénale n'a pas violé le droit fédéral en déclarant irrecevable le recours déposé par le recourant contre la décision du Tmc du 22 mars 2016. 
 
4.   
Il s'ensuit que les recours en matière pénale sont rejetés dans la mesure de leur recevabilité. 
Les conclusions du recourant étaient dénuées de chances de succès et sa demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui succombe, supporte donc les frais judiciaires; vu les circonstances, ceux-ci seront exceptionnellement réduits (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Les causes 1B_161/2016 et 1B_163/2016 sont jointes. 
 
2.   
Les recours constitutionnels subsidiaires sont irrecevables. 
 
3.   
Les recours en matière pénale sont rejetés dans la mesure de leur recevabilité. 
 
4.   
La requête d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
5.   
Les frais, fixés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
6.   
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Tribunal des mesures de contrainte de l'Etat de Fribourg, au Ministère public de l'Etat de Fribourg et à la Chambre pénale du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg. 
 
 
Lausanne, le 31 mai 2016 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Fonjallaz 
 
La Greffière : Kropf