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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
6B_956/2013  
   
   
 
 
 
Arrêt du 5 décembre 2013  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Mathys, Président, 
Jacquemoud-Rossari et Oberholzer. 
Greffier: M. Vallat. 
 
Participants à la procédure 
X.________, représenté par Mes Daniel Brodt et David Freymond, avocats, 
recourant, 
 
contre  
 
1.  Procureur général du canton du Jura, Le Château, 2900 Porrentruy,  
2. Y.________, représentée par Me Martine Lang, avocate, 
intimés. 
 
Objet 
Révision, assassinat, nouveaux faits, fixation de la peine, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour pénale du Tribunal cantonal du canton du Jura du 29 août 2013. 
 
 
Faits:  
 
A.   
Le 20 juin 2008, dans le contexte d'une séparation difficile avec Y.________ (mère de leur enfant A.________), X.________, après s'être introduit par effraction dans la maison de cette dernière, lui a imposé l'acte sexuel, puis a égorgé l'enfant au moyen d'un cutter, avec lequel il s'est lui-même porté un coup à la gorge. Par arrêt du 21 octobre 2010, la Cour criminelle du Tribunal cantonal jurassien a condamné X.________, pour assassinat, viol, lésions corporelles simples et injures ainsi que menaces, injures et utilisation abusive d'une installation de télécommunication, à la privation de liberté à vie. Elle s'est, notamment, référée à l'expertise psychiatrique ordonnée en cours d'instruction (2 avril 2009), soit au rapport du 16 juin 2009, du Dr B.________. Par arrêt du 18 octobre 2011 (6B_36/2011), le Tribunal fédéral a admis partiellement le recours du condamné et renvoyé la cause à l'autorité cantonale afin qu'elle rende une nouvelle décision sur la peine. Par jugement du 30 août 2012, le Tribunal pénal du Tribunal de première instance du canton du Jura a, derechef, condamné X.________ à la privation de liberté à vie. Il ressort de ce jugement que la situation personnelle de l'intéressé a été mise à jour et, à cette fin, diverses preuves administrées, soit notamment l'audition du Dr C.________, psychiatre traitant de X.________. Celui-ci a évoqué, en relation avec les faits du 20 juin 2008, l'explication d'un « suicide élargi » et exposé ne pas avoir constaté le « trouble de la personnalité narcissique » relevé par l'expert B.________; il n'avait pas trouvé que X.________ avait l'impression de punir par son acte, contrairement à une personne narcissique. En relevant quelques traits immatures et une légère tendance dépressive, ce médecin a exposé que, selon lui, l'acte avait été fait dans un état de dissociation lié à un état de panique qui avait conduit à un suicide élargi, analyse fondée également sur le fait que l'intéressé avait voulu se suicider. Il avait agi dans un état de désespoir par rapport à un conflit de relation et ne voulait pas sortir seul de ses soucis. Toutes les actions postérieures à l'acte étaient liées au suicide élargi, respectivement à la peur et à la panique. Les déclarations antérieures du patient relatives à la commission de tels actes devaient être replacées dans un contexte d'isolement psychique et social ayant conduit à une déréalisation (perte de contact avec la réalité). X.________ a appelé de ce jugement par déclaration du 20 novembre 2012. Dans ce cadre, un rapport de D.________, psychologue spécialisée en psychothérapie FSP, du 2 février 2013, a été déposé. Selon cette thérapeute, qui évoque aussi l'hypothèse d'un « suicide élargi », l'absence de signes de psychopathie exclurait, par ailleurs, toute intention meurtrière.  Pendente lite, X.________ a adressé, le 12 mars 2013, une demande de révision de l'arrêt du 21 octobre 2010, à la Cour pénale du Tribunal cantonal jurassien, qui a suspendu l'instruction de l'appel jusqu'à droit connu sur la demande de révision.  
 
B.   
Par arrêt du 29 août 2013, cette dernière autorité a rejeté la demande de révision dans la mesure où elle était recevable. 
 
C.   
X.________ interjette un recours en matière pénale contre cette décision, concluant, avec suite de frais et dépens, à son annulation et au renvoi de la cause à la cour cantonale ou à une autre autorité pour complément d'instruction et nouveau jugement, voire nouveau jugement sans complément d'instruction. Il requiert, par ailleurs, le bénéfice de l'assistance judiciaire. 
 
 
Considérant en droit:  
 
1.   
La demande de révision et la décision attaquée sont postérieures à l'entrée en vigueur du CPP, le 1er janvier 2011. Les règles de compétence et de procédure des art. 410 ss CPP s'appliquent. Les motifs de révision pertinents sont en revanche ceux prévus par le droit applicable au moment où la décision dont la révision est demandée a été rendue. Le motif de révision prévu à l'art. 410 al. 1 let. a CPP correspond toutefois à celui de l'art. 385 CP, en vigueur depuis le 1er janvier 2007, lui-même repris de l'ancien art. 397 CP, en vigueur jusqu'au 31 décembre 2006. 
 
L'art. 410 al. 1 let. a CPP permet à toute personne lésée par un jugement entré en force d'en demander la révision s'il existe des faits ou des moyens de preuve qui étaient inconnus de l'autorité inférieure et qui sont de nature à motiver l'acquittement ou une condamnation sensiblement moins sévère du condamné. Les faits ou moyens de preuve invoqués doivent ainsi être nouveaux et sérieux. Ils sont inconnus lorsque le juge n'en a pas eu connaissance au moment où il s'est prononcé, c'est-à-dire lorsqu'ils ne lui ont pas été soumis sous quelque forme que ce soit (ATF 137 IV 59 consid. 5.1.2 p. 66 s.). Ils sont sérieux lorsqu'ils sont propres à ébranler les constatations de fait sur lesquelles se fonde la condamnation et que l'état de fait ainsi modifié rend possible un jugement sensiblement plus favorable au condamné (ATF 137 IV 59 consid. 5.1.4 p. 68). 
 
2.   
Bien qu'il invoque la violation des art. 366 ss aCPP/JU, respectivement l'application arbitraire de ces normes, le recourant ne tente pas de démontrer que celles-ci lui seraient plus favorables, s'agissant du motif de révision déduit de la découverte de faits ou moyens de preuve nouveaux, que l'art. 385 CP. Il ne remet pas, en particulier, en question l'affirmation de la cour cantonale selon laquelle la notion de fait nouveau de l'ancien art. 366 ch. 3 CPP/JU est identique à celle ancrée aux art. 410 al. 1 let. a CPP et 385 CP. On peut, dès lors, examiner librement (art. 106 al. 1 LTF) les griefs ainsi formulés quant à l'application de ces règles à l'aune des principes jurisprudentiels dégagés de ces deux normes de droit fédéral. L'examen des questions de fait et d'appréciation des preuves demeurant, en revanche, restreint dans les limites fixées par l'art. 105 al. 2 LTF, soit, pour l'essentiel, à l'arbitraire (art. 9 Cst.). 
 
3.   
La demande de révision présentée par le recourant est fondée sur deux moyens de preuve, soit l'avis donné oralement en audience de première instance par son psychiatre traitant ainsi que le rapport du 2 février 2013 de sa psychothérapeute, produit devant la juridiction d'appel. Selon le recourant, ces éléments, qui seraient nouveaux et sérieux, seraient susceptibles de modifier la qualification d'assassinat en meurtre passionnel ou en meurtre. 
 
En résumé, la cour cantonale a jugé qu'aucun fait nouveau n'était invoqué. La problématique du « suicide élargi » évoquée par le Dr C.________, avait déjà été discutée par la Cour criminelle dans son arrêt du 21 octobre 2010. Les avis produits ne constituaient pas non plus un fait sérieux. Le Dr C.________ avait, en effet, déclaré ne pouvoir se prononcer sur l'expertise figurant au dossier. Sa déposition ne permettait pas de mettre en doute ou de contester l'expertise B.________. Aucune erreur de nature à en ébranler le fondement n'était rendue vraisemblable. Quant au rapport de la psychothérapeute, celle-ci s'était exprimée brièvement et avait présenté ce qu'elle estimait « l'hypothèse la plus pertinente ». Elle n'avait toutefois rencontré le recourant que bien après les faits. En niant qu'il ait eu des antécédents impulsifs ou agressifs, elle s'écartait de manière importante des faits établis au dossier. Son avis ne constituait donc pas un fait sérieux, de nature à ébranler les fondements de l'expertise officielle. 
 
3.1. Quant au caractère nouveau des faits, le recourant objecte qu'il ne ressortirait pas du jugement du 21 octobre 2010 que la problématique du suicide élargi aurait été examinée. Elle ne l'aurait été ni du point de vue juridique, ni du point de vue médical.  
 
Contrairement à ce que soutient le recourant, l'hypothèse d'un « suicide élargi » a bien été évoquée devant l'autorité qui a statué le 21 octobre 2010. Elle ressortait, notamment, de lettres produites au dossier dans lesquelles le recourant avait expliqué à des proches avoir eu l'intention de partir dans l'autre monde avec [son fils] (arrêt du 21 octobre 2010, consid. C.1.1.1 p. 26 s.). Entendu en cours d'enquête, le recourant a aussi exposé que « si [son fils] n'était pas venu, il serait parti seul » (arrêt du 21 octobre 2010, consid. C.1.3 p. 32). Il a répété aux débats qu'il « voulait partir et ne pas se séparer de [son fils] » (arrêt du 21 octobre 2010, consid. J.1 p. 62). Ces éléments permettent d'exclure le caractère nouveau des faits allégués par le recourant, résidant dans son intention d'emporter son fils avec lui dans la mort. On ne saurait non plus reprocher à la cour cantonale d'avoir méconnu la notion même de « fait nouveau » au sens de l'art. 410 al. 1 let. a CPP
 
3.2. Quant au caractère sérieux, des moyens de preuve avancés, le recourant soutient que, contrairement à l'opinion de la cour cantonale, l'avis du Dr C.________, conforté par celui de la psychologue, serait de nature à ébranler l'expertise du Dr B.________, s'agissant d'élucider le mobile de l'homicide. Le recourant souligne, dans ce contexte, que le Tribunal pénal a, dans son jugement du 30 août 2012, admis que ce mobile n'avait pu être élucidé en relevant qu'il importait, en définitive, peu pour la qualification de l'assassinat. Il en conclut que les avis en question auraient ébranlé la conviction de cette autorité. Enfin, le mobile résidant dans un suicide élargi exclurait l'assassinat et serait, partant, sérieux sous cet angle également.  
 
3.2.1. Faute de discuter précisément le raisonnement et les motifs de la cour cantonale, l'argumentation du recourant, qui s'épuise dans une appréciation personnelle des moyens de preuve offerts, n'est pas topique. Sa recevabilité est douteuse déjà au regard des exigences de motivation déduites de l'art. 42 al. 1 et 2 LTF. Elle l'est, a fortiori, s'agissant de l'invocation de l'interdiction de l'arbitraire et d'autres droits fondamentaux (art. 106 al. 2 LTF).  
 
3.2.2. Au demeurant, étant rappelé qu'une expertise privée et,  a fortiori un bref avis émanant de personnes en lien thérapeutique avec celui qui le produit, n'a pas la même valeur probante qu'une expertise judiciaire ( ATF 137 II 266consid. 3.2 p. 270 s.; 125 V 351consid. 3b et 3c p. 352 ss), comme l'a relevé à bon escient la cour cantonale, le Dr C.________ a clairement exposé ne pas se prononcer sur l'expertise du Dr B.________. On comprend ainsi que ce médecin n'entendait pas remettre en question les conclusions de l'expert judiciaire, moins encore ses appréciations et sa méthodologie. On rechercherait ainsi en vain, dans ses explications, tout développement susceptible d'étayer la démonstration que l'expertise judiciaire serait entachée d'un grave vice, justifiant de remettre en cause ses conclusions. Le Dr C.________ a certes indiqué que, selon lui, son diagnostic aurait divergé de celui du Dr B.________ en ce sens qu'il n'aurait pas retrouvé de «  trouble de la personnalité narcissique ». Toutefois, l'expert judiciaire n'a pas non plus retenu cette pathologie, mais uniquement l'existence de «  traits de personnalité, en particulier des traits narcissiques et histrioniques » (CIM-10, ch. Z73.1) ne permettant précisément pas de diagnostiquer un «  trouble de la personnalité » (CIM-10, ch. F.60.9; arrêt du 21 octobre 2010, consid. D.1 p. 51 s.). La constatation de ces  traits paraît, de surcroît, trouver écho dans les tests réalisés par la psychologue (Échelle de psychopathie de Hare révisée), qui mettent en évidence deux éléments (loquacité/charme superficiel; surestimation de soi) relevant précisément de la composante « Narcissisme et déficience émotionnelle » (annexe au rapport du 2 février 2013). Comme l'a, en revanche, relevé pertinemment la cour cantonale, ce dernier avis, très bref, en tant qu'il nie l'existence d'antécédents impulsifs ou agressifs, s'écarte singulièrement des faits établis au dossier. Pour le surplus, les deux avis en question, établis sur la base d'entretiens qui ont eu lieu bien après les faits et l'expertise judiciaire, ne discutent pas précisément les considérations qui ont conduit l'expert B.________, sans exclure la volonté suicidaire du recourant, à imputer l'homicide de son fils à une volonté de « reprendre la main » alors qu'il avait perdu la partie qu'il croyait avoir gagnée face à son ex-compagne (v. arrêt du 21 octobre 2010, consid. D.1 p. 55).  
 
Compte tenu de l'origine de ces avis, des conditions dans lesquelles ils ont été forgés ainsi que de leur contenu, la cour cantonale, qui n'a pas méconnu non plus la notion de faits et moyens de preuve sérieux au sens de l'art. 410 al. 1 let. a CPP, pouvait, sans arbitraire, considérer que les preuves produites par le recourant n'étaient pas propres à ébranler, même sous l'angle de la vraisemblance, les constatations de fait sur lesquelles se fonde la condamnation. 
 
3.2.3. Pour les mêmes motifs, la cour cantonale pouvait, par une appréciation anticipée non arbitraire ( ATF 136 I 229consid. 5.3 p. 236; ATF 131 I 153consid. 3 p. 157), renoncer à l'administration d'autres preuves au stade du rescindant, telles que les auditions requises par le recourant de ses deux thérapeutes.  
 
4.   
Cela étant, et pour répondre aux griefs formulés par le recourant en relation avec l'application de l'art. 412 CPP, la cour cantonale pouvait renoncer à ordonner des débats oraux, qui sont facultatifs au stade du rescindant et auxquels le recourant n'a, dans la règle, aucune prétention ( MARC RÉMY, Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2011, art. 412 CPP n° 6; MARIANNE HEER, in Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordung, 2011, art. 412 CPP n° 14; LAURENT MOREILLON/AUDE PAREIN-REYMOND, Code de procédure pénale, Petit commentaire, 2013, art. 412 CPP n° 11; cf., en relation avec l'art. 390 al. 5 CPP: RICHARD CALAME, Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2011, art. 390 CPP n° 12). 
 
5.   
Le recourant succombe. Ses conclusions étaient dépourvues de chances de succès, de sorte que l'assistance judiciaire doit être refusée (art. 64 al. 1 LTF). Il supporte les frais judiciaires, qui seront fixés en tenant compte de sa situation économique peu favorable en raison de sa détention (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:  
 
1.   
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.   
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 1600 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour pénale du Tribunal cantonal du canton du Jura. 
 
 
Lausanne, le 5 décembre 2013 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président: Mathys 
 
Le Greffier: Vallat