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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 1/2} 
5C.60/2004 /frs 
 
Arrêt du 8 avril 2005 
IIe Cour civile 
 
Composition 
MM. et Mmes les Juges Raselli, Président, Nordmann, Escher, Hohl et Marazzi. 
Greffier: M. Abrecht. 
 
Parties 
Union de l'Inde, 
demanderesse et recourante, représentée par Me Eugène Ibig, avocat, 
 
contre 
 
Crédit Agricole Indosuez (Suisse) SA, 
défenderesse et intimée, représentée par Me Vincent Jeanneret, avocat, 
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case postale 3108, 1211 Genève 3. 
 
Objet 
revendication, 
 
recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève du 16 janvier 2004. 
 
Faits: 
 
A. 
Le 13 mai 1997, l'Union de l'Inde a actionné la succursale de Genève du Crédit Agricole Indosuez à Paris, devenue en 1999 le Crédit Agricole Indosuez (Suisse) SA, devant le Tribunal de première instance du canton de Genève. Elle concluait à la restitution de deux pièces d'or anciennes - l'une de 1000 Muhurs, frappée à Agra en 1613, d'un diamètre de 20,3 cm environ et pesant près de 12 kg, et l'autre de 100 Muhurs, frappée à Lahore en 1639, d'un diamètre de 9,7 cm et d'un poids de 1,1 kg - en possession de la banque, en se fondant tant sur l'action possessoire (art. 933 ss CC) que sur l'action pétitoire (art. 641 al. 2 CC). 
 
Les pièces d'or litigieuses avaient été remises en nantissement à la banque en 1988 à titre de sûretés pour un crédit accordé à deux sociétés de Panama et des Îles Vierges Britanniques contrôlées par Mukarram Jah, petit-fils de Mir Osman Ali Khan, lui-même dernier Nizam de l'ancienne principauté indienne d'Hyderabad. En substance, l'Union de l'Inde soutenait être devenue propriétaire desdites pièces d'or en 1950, au moment de l'unification du pays, et contestait l'acquisition d'un droit préférable par la banque, laquelle n'aurait pas été de bonne foi lors de la constitution du gage. 
 
Par jugement du 12 septembre 2002, le Tribunal de première instance a débouté la demanderesse de toutes ses conclusions avec suite de dépens. Par arrêt rendu le 16 janvier 2004 sur appel de la demanderesse, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève a confirmé le jugement de première instance et a condamné la demanderesse aux dépens d'appel. 
 
B. 
L'arrêt de la Cour de justice se fonde en particulier sur les faits suivants : 
B.a De 1877 à 1947, l'entité géographique connue sous le nom de l'Inde était divisée en deux parties, l'Inde britannique et les États indiens. Parmi ces derniers, qui comptaient environ 600 États, se trouvait la Principauté indépendante d'Hyderabad, dont le dernier souverain, appelé Nizam, était depuis 1911 Mir Osman Ali Khan. Celui-ci - qui, en tant que souverain absolu, se confondait avec l'entité qu'il régissait et ne faisait aucune différence entre ses biens privés et les biens de l'État - était considéré comme l'homme le plus riche du monde et était propriétaire des deux pièces d'or de 1000 Muhurs et 100 Muhurs décrites plus haut. 
 
Le 15 août 1947, l'ancienne colonie britannique de l'Inde a été divisée en deux Dominions, l'Inde et le Pakistan. Le 26 novembre 1949, l'Assemblée constituante du Dominion de l'Inde a adopté une Constitution, entrée en vigueur le 26 janvier 1950, qui réalisait entre autres l'intégration de certains États indiens dans le reste du Dominion en vue de créer une République, l'Union de l'Inde. Le 23 novembre 1949, Mir Osman Ali Khan a proclamé un "Farman" par lequel il a choisi de rallier l'Union de l'Inde et d'appliquer la future Constitution indienne sur le territoire de sa principauté. 
 
L'application de la Constitution de l'Inde et l'instauration d'un régime démocratique sur les territoires des anciennes principautés a engendré un bouleversement total. L'État ayant cessé de se confondre avec la personne de chaque souverain, il a fallu séparer les biens privés de chaque monarque des biens de l'État. Ces questions ont été réglées par voie de conventions, qui s'appuyaient sur la nouvelle Constitution indienne. L'article 295 chiffre 1 de celle-ci, applicable en particulier à l'État d'Hyderabad, a instauré le principe que tous les biens et avoirs des anciennes principautés reviennent automatiquement à l'Union de l'Inde, sous réserve d'accords conclus à ce sujet par le Gouvernement de l'Inde avec celui de l'État concerné. Cet article s'applique à tous les biens des anciens souverains, de sorte que tous les biens sont considérés comme biens de l'État, sauf ceux déclarés comme biens privés dans une convention. 
B.b Dans ce contexte, un accord a effectivement été conclu le 25 janvier 1950 entre Mir Osman Ali Khan et l'Union de l'Inde, qui stipule notamment ce qui suit à son article II : 
1) Le Nizam est en droit de disposer, d'utiliser et de jouir sans réserve de la totalité des bijoux, joyaux, ornements, actions, titres et autres biens personnels, tant mobiliers qu'immobiliers (distincts des biens de l'État) qui lui appartiennent à la date de la conclusion de l'accord; 
 
2) Le Nizam a remis au Gouvernement indien la liste de tous les biens mobiliers et immobiliers qu'il détient à titre de biens personnels; 
 
3) Tout litige sur le fait qu'un bien détenu soit ou non la propriété privée du Nizam sera soumis à l'arbitrage d'une personne indépendante que le Gouvernement indien désignera à cet effet, la décision de cette personne étant définitive et contraignante. 
Lors de la signature de cet accord, les listes prévues au chiffre 2 de l'article II n'étaient pas encore définitivement arrêtées. Par lettre du 23 janvier 1950, seules les listes des biens mobiliers ont été approuvées par un représentant de l'Inde. Quant aux listes de biens immobiliers, il a fallu plus de trois ans pour les établir; le 30 novembre 1953, le Ministère des États de l'Union de l'Inde a ainsi adressé au Nizam les listes I et II concernant ses propriétés privées immobilières. Les parties ont admis que, de 1950 au décès en 1967 de Mir Osman Ali Khan - qui, pour faciliter la transition après l'indépendance de l'Union de l'Inde, a exercé la fonction de gouverneur d'Hyderabad avec le titre de "Rajpramukh" de 1950 à 1956 -, tous les biens, en particulier mobiliers, qu'ils soient ou non sa propriété privée, sont restés entre ses mains. 
 
Il a été établi que les deux pièces d'or se trouvaient dans le palais de King Koti à Eden Garden, appartenant au Nizam. Le témoin Bahadur, un de ses petits-fils, né en 1959, a confirmé les y avoir vues vers 1966, tout comme Sahebzada Mir Hussaïn Ali Khan, né en 1961. Le Nizam les montrait à ses petits-enfants, en leur disant que ces pièces étaient leur avenir et qu'ils en bénéficieraient. 
 
Au décès de Mir Osman Ali Khan, un de ses petits-fils, Mukarram Jah, né en 1933, lui a succédé. Le palais dénommé King Koti est alors passé sous la garde de Mukarram Jah, qui a déplacé au milieu des années 1970 les deux pièces d'or au Cherian Palace, lieu de sa résidence. Il n'a pas pu être établi de manière certaine quand et dans quelles circonstances ces pièces d'or sont sorties de l'Inde, mais il doit être retenu qu'elles sont arrivées en Suisse au plus tôt en 1973 et au plus tard en 1987. 
B.c En 1987, David Weinman, ressortissant australien travaillant pour Mukarram Jah, a approché la société Habsburg Feldman SA, à Genève, afin d'organiser la vente aux enchères des deux pièces d'or, au nom de la société panaméenne Crestalor Services SA, dont Mukarram Jah est l'ayant droit économique. Les pièces d'or ont été remises à Habsburg Feldman SA, laquelle a rédigé à leur sujet un catalogue en langue anglaise de 15 pages qui a été diffusé à quelques milliers d'exemplaires, surtout aux clients fortunés et à la presse. La vente aux enchères a été précédée d'une publicité abondante dans la presse tant suisse qu'étrangère, et les pièces d'or ont été exposées à New York et à Genève. 
Le 23 octobre 1987, Me Croisier a écrit à Geza von Habsburg afin de lui confirmer que les deux pièces d'or se trouvaient à Genève, dans un coffre de l'UBS auquel il avait accès, depuis 1973. En outre, Me Charles Adams a rédigé une attestation datée du 9 novembre 1987 dans laquelle il indique qu'il agit en qualité de conseil du vendeur des deux pièces d'or mises aux enchères, que son client a fourni toutes les assurances requises à la maison de vente en ce qui concerne la valeur, la provenance et l'authenticité des pièces dont il lui a été indiqué qu'elles étaient dans la famille de son mandant depuis des générations, qu'il s'est laissé dire que ces ceux pièces sont physiquement en Europe depuis plus de 50 ans et ne se sont en conséquence jamais trouvées dans l'État moderne de l'Inde, ni n'ont été exportées de ce pays. 
 
Le 9 novembre 1987, Habsburg Feldman SA a organisé à l'hôtel Noga Hilton à Genève la vente aux enchères portant uniquement sur les deux pièces d'or. Celles-ci n'ont cependant pas été vendues, le prix de réserve total fixé à 11'500'000 USD n'ayant pas été atteint. 
B.d Par courrier du 9 novembre 1987, l'Ambassade de l'Inde à Berne s'est adressée au Département fédéral des affaires étrangères au nom du Gouvernement de l'Inde afin de lui demander son aide pour empêcher la vente aux enchères des deux pièces, ainsi que pour obtenir davantage de détails quant à leur propriétaire et quant à la date et au mode de leur acquisition. Le même jour, le Consul général de la mission permanente de l'Inde auprès des Nations Unies à Genève a adressé une demande similaire au Chef du protocole du canton de Genève. Ces deux courriers n'évoquent pas la question de la propriété des pièces, mais ont trait à leur exportation illégale du pays. Les autorités sollicitées ont répondu qu'elles ne pouvaient intervenir en l'état. 
 
Le 13 novembre 1987, afin de déterminer si les pièces d'or avaient été exportées de manière illégale, une enquête pénale a été ouverte en Inde sur la base d'un rapport de police indiquant que deux pièces d'or géantes appartenant au Nizam d'Hyderabad avaient été dérobées à son Trust, avaient quitté clandestinement l'Inde grâce à un réseau international et avaient été mises aux enchères en Suisse. Le même jour, Interpol New Delhi a demandé son assistance à Interpol Suisse pour empêcher la vente privée des pièces et en obtenir la restitution, dès lors qu'elles faisaient partie de l'héritage culturel de l'Inde. Dans le cadre de cette enquête, le Central Bureau of Investigation indien a établi en novembre 1997 un rapport complémentaire, dans lequel il est admis à deux reprises que Mukarram Jah a reçu les deux pièces d'or en succession après la mort de son grand-père, le dernier Nizam, Mir Osman Ali Khan. 
B.e Ayant décidé de restructurer totalement sa fortune afin d'obtenir d'importantes liquidités et de créer un portefeuille d'investissement privé de 25'000'000 USD destiné à lui procurer des revenus, Mukarram Jah a mandaté Mes Charles Adams et Roy Ryan en 1988 à Genève pour approcher le Crédit Agricole Indosuez (ci-après : la Banque). Ces avocats ont expliqué à la Banque que leur client avait besoin dans l'immédiat d'un prêt pour rembourser une avance consentie par Habsburg Feldman SA, garantie par la mise en gage des deux pièces d'or, et pour lui procurer de la trésorerie à court terme dans l'attente de la création de son portefeuille. Le prêt serait garanti par la remise en nantissement des deux pièces d'or, Mukarram Jah apportant pour le surplus sa caution personnelle à l'opération. 
 
Me Charles Adams s'est rendu en juin-juillet 1988 à Hyderabad, pour mener une étude préliminaire sur les biens de son client. Selon son appréciation, la fortune de ce dernier était considérable, constituée principalement de biens immobiliers, de bijoux et d'objets apparentés; beaucoup de biens se trouvaient hors de l'Inde, notamment en Australie, en Suisse ou au Royaume-Uni s'agissant d'importants objets de joaillerie et d'art islamique. Il a confirmé cela par courrier du 9 juillet 1988 à la Banque, laquelle s'est aussi renseignée auprès de Habsburg Feldman SA. 
 
Les représentants de la Banque ont confirmé avoir consulté un livre relatant l'histoire de l'Inde, la succession des Nizams et confirmant que celui d'Hyderabad était l'homme le plus riche du monde avant l'unification. Selon leurs dires, la décision finalement prise d'accorder le prêt sollicité s'est fondée sur les discussions avec les responsables de la maison de vente, les informations directes recueillies par la lecture du livre sur l'histoire de l'Inde, les assurances données par Habsburg Feldman SA, par le client et ses conseils genevois. Par ailleurs, selon la déclaration du témoin Hugh Russell, ancien directeur de la Banque, le fait qu'une vente aux enchères publiques des pièces d'or annoncée mondialement ait eu lieu sans aucun problème ne laissait subsister aucun doute sur le propriétaire de ces pièces, dont l'identité était une évidence, et justifiait que la Banque ne se soit pas intéressée à la sortie des pièces d'Inde et à la répartition des biens des Nizams. 
B.f Par contrats du 5 août 1988, la Banque a octroyé un prêt de 4'500'000 USD à Crestalor Services SA, garanti par le nantissement de la pièce d'or de 1000 Muhurs, ainsi qu'un prêt de 1'500'000 USD à la société des Îles Vierges Britanniques Tamarind Corporation, en garantie duquel Crestalor Services SA a remis en gage à la Banque la pièce d'or de 100 Muhurs. Chaque contrat de prêt - auquel était annexé un contrat de nantissement général dûment signé - contenait une clause par laquelle l'emprunteur garantissait que Crestalor Services SA avait les pouvoirs de transmettre valablement et de disposer commercialement de la pleine propriété de la pièce remise en nantissement et que celle-ci était authentique. Le témoin Hugh Russell a précisé lors de son audition que l'existence d'une telle clause dans les contrats de prêt était indispensable, qu'elle constituait une mesure de sécurité supplémentaire pour la Banque et que, sans son acceptation, le prêt n'aurait pas été conclu. 
 
En août 1988, les pièces d'or ont été remises à la Banque, qui les détient dans un coffre depuis lors. Les deux prêts n'ayant pas été remboursés à leur échéance, la Banque a notifié les 22 mars 1989 et 19 avril 1989 à Crestalor Services SA et à Tamarind Corporation qu'elles se trouvaient en défaut et que les prêts étaient devenus immédiatement exigibles; en conséquence de quoi, à défaut de règlement dans le délai d'une semaine, elle se réservait le droit, sans autre notification, de vendre les pièces d'or. Les prêts n'ont néanmoins pas été remboursés et, au 28 mars 1998, la dette de Crestalor Services SA se montait à 13'137'228 USD et celle de Tamarind Corporation à 5'167'529 USD. 
B.g Le 3 janvier 1992, l'Union de l'Inde a déposé une demande d'entraide pénale internationale tendant à la saisie conservatoire des pièces d'or; elle exposait que les deux pièces d'or ayant appartenu à Mir Osman Ali Khan, dernier Nizam de l'État d'Hyderabad, étaient devenues biens nationaux lors du rattachement en 1950 de cet État à l'Union indienne, et qu'elles auraient été détournées ou volées par Mukarram Jah, petit-fils du Nizam qui lui avait succédé à son décès en 1967. Après que la saisie conservatoire sollicitée eut été prononcée, les autorités indiennes ont adressé le 18 janvier 1994 à la Suisse une demande d'entraide complémentaire, tendant à la transmission des deux pièces d'or pour valoir comme moyens de preuve dans le cadre de la procédure contre Mukarram Jah. Cette demande complémentaire a abouti à la saisie pénale probatoire des pièces d'or. Le 30 septembre 1996, l'Union de l'Inde a déposé une troisième demande d'entraide, dans le cadre de laquelle un Juge d'instruction genevois a ordonné la saisie pénale conservatoire des deux pièces d'or. Toutefois, dans sa décision de clôture du 7 avril 1998, le Juge d'instruction a refusé de transmettre les pièces d'or à l'Union de l'Inde et a levé la saisie pénale sur les objets. Le 14 septembre 1998, la Chambre d'accusation genevoise a annulé cette décision comme prématurée et a maintenu en l'état la saisie des pièces d'or jusqu'à droit connu définitivement au fond dans la procédure civile intentée par l'Union de l'Inde. 
B.h L'accord conclu par l'Union de l'Inde avec Mir Osman Ali Khan le 25 janvier 1950 (cf. lettre B.b supra) contient plus de 678 pages et existe sous forme imprimée, répartie en deux volumes, ainsi que sous forme dactylographiée. L'Union de l'Inde a produit en procédure l'ensemble du dossier relatif à cet accord sous sa forme dactylographiée ainsi qu'une partie du dossier imprimé, soit en particulier : 
 
- le premier volume du dossier en sa forme imprimée (124 pages en langue anglaise), contenant une section "Notes", avec ses Annexes I et II, l'Annexe II étant constituée par 27 listes de biens mobiliers, et une section "Correspondence", à la suite de laquelle sont annexées les listes des propriétés immobilières du Nizam. L'accord conclu avec le Nizam le 25 janvier 1950 y figure dans la partie "Correspondence". 
 
- 28 listes de biens mobiliers établies en persan et en anglais, puis traduites en français, dont le contenu est identique à celles reproduites dans le dossier imprimé à l'Annexe II de la section "Notes". Le témoin Sarkar, Directeur général des archives de l'Union de l'Inde, a précisé que ces listes concernaient un seul bâtiment, qu'il s'agissait essentiellement des meubles figurant dans le palais principal de Falaknuma, où vivait le Nizam, et qu'il s'agissait de listes de sélection qui n'étaient pas exhaustives, car cela n'était pas possible. 
 
- un document en anglais de 50 pages dont la couverture indique qu'il s'agit de la liste des propriétés immobilières privées du Nizam, soit environ 1'500 biens-fonds dont plus de 360 palais et notamment ceux de King Koti et de Falaknuma. Le contenu de cette liste correspond à celui des listes annexées à la section "Correspondence" du dossier imprimé. 
 
Il n'est fait expressément mention sur aucune des listes de biens mobiliers et immobiliers des deux pièces d'or litigieuses. Il s'est toutefois avéré au cours des enquêtes que les listes de biens mobiliers n'étaient pas exhaustives et qu'elles portaient surtout sur le palais de Falaknuma. Or, aux dires de la demanderesse, confirmés par des témoins entendus dans la procédure, les pièces d'or se trouvaient jusqu'au décès du Nizam en 1967 dans son palais de King Koti à Eden Garden, dont l'attribution avec son contenu à titre de bien privé est démontrée. 
 
C. 
La motivation en droit de l'arrêt de la Cour de justice, dans ce qu'elle a d'utile à retenir à ce stade, est en substance la suivante : 
C.a En vertu aussi bien de l'art. 100 al. 2 LDIP que de la jurisprudence antérieure à l'entrée en vigueur de cette loi (ATF 109 II 144 consid. 3a, 319 consid. 3a), le contenu et l'exercice de droits réels mobiliers sont régis par le droit du lieu de situation du meuble. En l'espèce, comme les pièces d'or litigieuses se trouvaient au moment de l'ouverture d'action en Suisse, l'action en revendication de même que l'action possessoire intentées contre la défenderesse sont régies par le droit suisse (art. 641 al. 2 et 934 ss CC). Celui-ci détermine notamment les conditions personnelles et matérielles de l'action ainsi que le fardeau de la preuve. 
 
L'acquisition et la perte de droits réels mobiliers sont régies, tant selon l'art. 100 al. 1 LDIP que selon la jurisprudence antérieure à l'entrée en vigueur de cette loi (ATF 94 II 297 consid. 3b et les arrêts cités; 109 II 319 consid. 3a), par le droit du lieu de situation du meuble au moment des faits sur lesquels se fonde l'acquisition ou la perte. Comme, en l'espèce, les pièces d'or litigieuses se trouvaient en Inde au moment où la demanderesse prétend en avoir acquis la propriété, la question de savoir si la demanderesse a établi ce droit de propriété - condition de l'action en revendication selon l'art. 641 al. 2 CC - doit être résolue en appliquant le droit indien. 
C.b L'article 295 de la Constitution indienne dispose que dès son entrée en vigueur, l'Union de l'Inde devient automatiquement propriétaire des biens et avoirs des anciennes principautés, sous réserve d'accord contraire conclu entre le Gouvernement de l'Inde et le chef de la principauté. La Constitution indienne est applicable à la principauté d'Hyderabad, qui a choisi de rallier l'Union de l'Inde en 1949 (cf. lettre B.a supra). Par convention du 25 janvier 1950, le Gouvernement de l'Inde a accepté que certains biens mobiliers et immobiliers, dont des listes ont été établies, restent la propriété privée du Nizam d'Hyderabad (cf. lettre B.b supra). Pour prouver qu'elle est devenue propriétaire des deux pièces d'or litigieuses, la demanderesse devait démontrer que celles-ci ne faisaient pas partie des listes de biens remises par le Nizam et homologuées par le Gouvernement de l'Inde entre 1950 et 1953. 
C.c À la lecture de l'ensemble des listes des biens mobiliers et immobiliers que Mir Osman Ali Khan a souhaité conserver, il ressort que les deux pièces d'or litigieuses n'apparaissent pas nommément. Cette constatation ne suffit cependant pas à démontrer la propriété de la demanderesse. En effet, il découle des déclarations recueillies au cours des enquêtes et d'un examen approfondi de l'ensemble du dossier d'archives relatif à l'accord entre l'Union de l'Inde et le Nizam que les biens mobiliers restés sa propriété n'ont pas tous été répertoriés sur les listes transmises au Gouvernement de l'Inde et que les listes de biens mobiliers, certes toutes produites, n'ont pas un contenu exhaustif. 
 
En effet, le Directeur général des archives de l'Union de l'Inde a admis que les listes de biens mobiliers n'étaient pas exhaustives et portaient essentiellement sur les meubles figurant dans le palais principal du Nizam, soit Falaknuma, ce qui ressort également des pièces produites par la demanderesse elle-même. Par ailleurs, il est établi que le Nizam avait de nombreux palais, lesquels sont restés sa propriété, notamment le Palais de King Koti à Eden Garden. Or c'est précisément à cet endroit que des descendants du Nizam déclarent avoir vu les deux pièces d'or litigieuses avant son décès, pièces que le Nizam promettait de leur laisser. La demanderesse reconnaît de surcroît que les pièces d'or se trouvaient dans ce palais. 
 
Par ailleurs, le fait qu'il n'existe aucune liste des objets mobiliers se trouvant dans ce palais ou dans d'autres revendiqués par le Nizam s'explique à la lecture du dossier d'archives et tend à confirmer le fait que les pièces d'or litigieuses sont restées propriété du Nizam. En effet, lors de l'établissement des listes des biens immobiliers restant au Nizam, il a été décidé que les biens mobiliers situés dans ces palais, dont celui de King Koti, suivraient le sort de ceux-ci et resteraient donc propriété privée du Nizam. Ainsi, on peut lire dans la correspondance échangée avec le chef du Ministère des États du Gouvernement indien qu'en date du 30 juin 1950, l'Union de l'Inde a confirmé que "de notre avis, les meubles et accessoires ["the furniture and fittings"] devraient être tenus comme faisant partie des palais et devraient suivre le sort de tous les autres immeubles du Nizam. Le résultat serait que tous les meubles, etc. ["all the furniture etc."] dans les palais qui sont reconnus par nous comme étant la propriété du Nizam lui reviendront avec les palais". 
 
DE même, PAR COURRIER DU 30 AOûT 1950, IL a ÉTÉ RÉPONDU AU NIZAM APRÈS L'ENVOI DES LISTES DE BIENS immobiliers, parmi lesquels figure le Palais de King Koti, que ceux-ci pouvaient être acceptés comme lui appartenant, étant précisé que l'auteur attirait également l'attention sur le courrier du 30 juin 1950 déjà cité. Ce procédé a été accepté par l'Union de l'Inde notamment pour le palais de King Koti. Ceci explique pourquoi le contenu de ce palais n'a jamais été détaillé de manière exhaustive, alors qu'il contenait les deux pièces d'or. Partant, la production complète du dossier d'archives ne permet pas de prouver que les pièces d'or avaient été exclues des biens revendiqués par le Nizam et que la demanderesse en est devenue propriétaire sur la base de la convention. 
C.d Il faut encore relever que l'Union de l'Inde ne s'est pas comportée en propriétaire des pièces. Elle ne s'est nullement prévalue de cette qualité en 1987, lorsqu'elle a demandé à être renseignée sur l'identité de leur propriétaire et qu'elle s'est contentée d'invoquer une infraction aux règles sur l'exportation des biens culturels. De même, dans une note à Interpol du 13 novembre 1987, la demanderesse précisait que les pièces d'or avaient été volées au trust du Nizam d'Hyderabad, sans prétendre en être devenue propriétaire, et en 1997, elle indiquait que Mukarram Jah les avait reçues en succession après la mort de son grand-père. Par ailleurs, l'Union de l'Inde aurait déjà pu faire valoir son droit en 1987 lors de la mise en vente aux enchères des pièces d'or et avant, lors de leur exposition à New York; or on doit constater qu'elle a attendu plus de cinq ans avant d'agir pour obtenir la saisie pénale des pièces et plus de dix ans pour les revendiquer. De même, avant que les pièces d'or ne quittent l'Inde, elle n'a pas marqué sa propriété au travers de documents ou par quelque autre mesure adéquate, laissant les pièces d'or en possession paisible et non contestée de Mir Osman Ali Khan. Au décès de ce dernier, le pays ne s'est pas davantage inquiété de leur sort, ce qui a permis semble-t-il à Mukarram Jah de les déplacer. 
C.e N'ayant pu démontrer qu'elle était propriétaire des deux pièces d'or, la demanderesse doit être déboutée de son action pour ce motif déjà. À titre subsidiaire et même si elle avait pu établir sa propriété, la demanderesse ne serait pas fondée à exiger la restitution des pièces, dès lors que la défenderesse pourrait lui opposer un droit préférable acquis valablement. La banque défenderesse a en effet reçu les deux pièces d'or en nantissement, et elle était fondée à croire de bonne foi que le constituant du gage avait le pouvoir de disposer de la chose. En outre, ce droit de gage acquis de bonne foi repose sur un contrat de gage valable. Il n'y a en effet pas lieu de retenir, comme le soutient la demanderesse, que le contrat de nantissement, soumis au droit suisse, devrait être considéré comme nul en application de l'art. 19 LDIP ou de l'art. 20 CO pour le motif qu'il porterait sur un objet exporté illicitement selon le droit indien. 
C.f Il reste à examiner si la demanderesse peut fonder ses conclusions sur les actions possessoires à effet offensif, qui sont ouvertes à tout possesseur antérieur de la chose, à savoir l'action mobilière du possesseur dépossédé sans sa volonté (art. 934 CC) et l'action mobilière contre l'acquéreur de mauvaise foi (art. 936 CC). Il appert d'emblée que l'action fondée sur l'art. 934 CC est périmée, dès lors que plus de cinq ans se sont écoulés entre la date de la perte de possession alléguée et l'introduction de l'action. S'agissant de l'action mobilière contre un acquéreur de mauvaise foi (art. 936 CC), laquelle est illimitée dans le temps, le Tribunal de première instance a appliqué le droit suisse à titre supplétif (art. 16 al. 1 LDIP) - vu l'impossibilité d'établir le droit indien malgré l'invitation faite à la demanderesse d'établir le contenu de ce droit - à la question de la qualité de possesseur antérieur de la demanderesse; il a estimé que la demanderesse, n'ayant pas pu prouver qu'elle était devenue propriétaire des pièces, n'a pu en acquérir la possession, même médiate par constitut possessoire. La question de la qualité de possesseur antérieur de la demanderesse et celle du droit applicable à cette question peuvent toutefois rester indécises dans la mesure où il n'a de toute manière pas été démontré que la Banque aurait acquis la possession des pièces d'or de mauvaise foi. L'action possessoire doit donc aussi être rejetée. 
 
D. 
Agissant par la voie du recours en réforme au Tribunal fédéral, la demanderesse conclut principalement à la réforme de cet arrêt dans le sens de l'admission des conclusions de la demande (cf. lettre A supra), et subsidiairement à l'annulation de cet arrêt et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. Elle se plaint d'une part d'une application erronée du droit indien - plus particulièrement des art. 295 et 299 de la Constitution indienne et des principes de droit indien concernant l'interprétation des contrats - en ce qui concerne l'acquisition de la propriété sur les pièces d'or litigieuses. D'autre part, elle invoque la violation du droit fédéral en ce sens que la défenderesse n'aurait pas pu acquérir de bonne foi un droit de gage sur les pièces d'or litigieuses et que le contrat de gage serait de toute manière nul, car ayant pour objet des antiquités exportées illicitement. 
 
La défenderesse conclut à ce que le recours en réforme soit rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
Parallèlement au recours en réforme, la demanderesse a également interjeté contre l'arrêt de la Cour de justice un recours de droit public, dans lequel elle se plaint d'une application arbitraire du droit indien - plus particulièrement des art. 295 et 299 de la Constitution indienne et des principes de droit indien concernant l'interprétation des contrats - en ce qui concerne l'acquisition de la propriété sur les pièces d'or litigieuses. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
 
1. 
1.1 L'arrêt attaqué, qui rejette la demande de revendication de l'Union de l'Inde sur les pièces d'or litigieuses, repose sur une motivation principale et sur une motivation subsidiaire. Les juges cantonaux ont en effet considéré à titre principal que la demanderesse n'avait pas établi sa qualité de propriétaire des pièces d'or litigieuses. À titre subsidiaire, ils ont considéré que même si la demanderesse avait pu établir qu'elle était propriétaire des deux pièces d'or, elle ne serait pas fondée à en exiger la restitution, dès lors que la défenderesse pouvait lui opposer un droit de gage acquis valablement. 
 
1.2 Lorsqu'on est en présence de plusieurs motifs indépendants, la décision attaquée par un recours de droit public ou un recours en réforme n'est annulée ou réformée que si tous les motifs entraînent l'inconstitutionnalité, respectivement la violation du droit fédéral (ATF 117 II 630 consid. 1b et les arrêts cités). Le recourant doit alors attaquer les deux motivations, le cas échéant l'une par la voie du recours de droit public et l'autre par celle du recours en réforme (ATF 111 II 398 consid. 2b; 115 II 300 consid. 2a). 
 
En l'occurrence, la demanderesse, conformément à cette jurisprudence, a attaqué les deux motivations retenues par la cour cantonale. La motivation subsidiaire, relative à l'acquisition par la défenderesse d'un droit préférable sur les pièces d'or litigieuses, est attaquée par la voie du recours en réforme, tandis que la motivation principale, relative à l'établissement d'un droit de propriété de la demanderesse sur les pièces d'or litigieuses, est attaquée principalement dans le recours en réforme, et subsidiairement, pour le cas où cette voie de droit ne serait pas ouverte à cet effet, dans le recours de droit public. 
 
Avant de déterminer dans quel ordre le recours en réforme et le recours de droit public doivent être examinés (consid. 1.5 infra), il convient dès lors d'examiner ci-après (consid. 1.3 infra) laquelle de ces deux voies de droit est ouverte pour se plaindre d'une application erronée respectivement arbitraire du droit indien. 
 
1.3 Dans son mémoire de recours en réforme, la demanderesse soutient que le litige porterait sur un droit de nature non pécuniaire au sens de l'art. 44 OJ et qu'il serait dès lors possible de faire valoir dans un recours en réforme, en vertu de l'art. 43a al. 2 OJ, que l'arrêt attaqué a appliqué de manière erronée le droit étranger. Elle expose que, quand bien même l'action en revendication est habituellement de nature pécuniaire, il siérait de faire une exception lorsqu'une action est intentée par un État non pas pour procurer à celui-ci un avantage de nature pécuniaire, mais pour répondre à un intérêt public (cf. ATF 126 III 198 consid. 1a). Ledit intérêt consisterait en l'espèce à assurer la protection des biens culturels volés et la restitution des biens illicitement exportés : la recourante ne chercherait en effet pas à récupérer les deux pièces d'or litigieuses pour leur valeur pécuniaire, mais pour leur valeur culturelle unique. 
 
Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, sont des contestations de nature non pécuniaire celles qui portent sur des droits qui, en raison de leur nature, ne peuvent être appréciés en argent; il doit s'agir de droits qui ne font pas partie du patrimoine d'une personne et qui sont sans lien juridique étroit avec celui-ci (ATF 108 II 77 consid. 1a et les références citées; cf. Poudret, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, vol. II, 1990, n. 1.2 ad art. 44 OJ). La propriété d'une chose est typiquement un droit de nature pécuniaire (ATF 108 II 77 consid. 1b). 
 
La demanderesse se réfère à un arrêt dans lequel le Tribunal fédéral a admis que, quand bien même les actions en matière de concurrence déloyale étaient généralement de nature pécuniaire, une action intentée par la Confédération en application de l'art. 10 al. 2 let. c LCD n'était pas de nature pécuniaire, dès lors que la Confédération agissait exclusivement pour défendre un but idéal, à savoir la réputation du pays, et qu'elle ne défendait pas son propre patrimoine (ATF 126 III 198 consid. 1a). En l'espèce, toutefois, l'action de la demanderesse tend à la remise des pièces d'or litigieuses sur la base du droit de propriété qu'elle allègue avoir sur celles-ci. La demanderesse ne prétend pas seulement à ce que les pièces d'or litigieuses retournent en Inde d'où elles auraient été illicitement exportées, mais les revendique en alléguant en être propriétaire. Elle défend ainsi son propre patrimoine, puisque son action porte sur un droit de propriété pouvant incontestablement être apprécié en argent, et dont la valeur excède d'ailleurs de très loin la valeur minimum de 8'000 fr. à laquelle est subordonnée la recevabilité du recours en réforme dans les contestations civiles de nature pécuniaire (art. 46 OJ). Le fait que la demanderesse revendique les pièces d'or pour leur valeur culturelle et non pour leur valeur marchande ne change rien au fait que la contestation porte sur un droit de propriété qui peut être estimé en argent, et que cette contestation est donc de nature pécuniaire. 
 
Il résulte de ce qui précède que l'on se trouve en présence d'une contestation civile portant sur un droit de nature pécuniaire au sens de l'art. 46 OJ, si bien que la demanderesse ne peut se plaindre par la voie du recours en réforme d'une application erronée du droit étranger (art. 43a al. 2 OJ), grief qui doit être soulevé dans le cadre du recours de droit public. 
 
1.4 Comme on vient de le voir, l'arrêt attaqué tranche une contestation civile portant sur des droits de nature pécuniaire, dont la valeur excède de très loin la valeur minimale de 8'000 fr. à laquelle est subordonnée la recevabilité du recours en réforme dans les contestations civiles de nature pécuniaire (art. 46 OJ). Formé en temps utile (art. 54 al. 1 OJ) contre une décision finale prise par un tribunal suprême d'un canton et qui ne peut pas être l'objet d'un recours ordinaire de droit cantonal (art. 48 al. 1 OJ), le recours en réforme est donc ouvert à la demanderesse pour se plaindre d'une violation du droit fédéral (art. 43 al. 1 OJ). Il est en revanche irrecevable dans la mesure où la demanderesse y invoque une application erronée du droit étranger (cf. consid. 1.3 supra). 
 
1.5 Aux termes de l'art. 57 al. 5 OJ, il est sursis en règle générale à l'arrêt sur le recours en réforme jusqu'à droit connu sur le recours de droit public. Cette disposition souffre toutefois des exceptions dans des situations particulières, qui justifient l'examen préalable du recours en réforme (ATF 117 II 630 consid. 1a et les arrêts cités). Il doit en aller ainsi lorsque la décision déférée repose sur deux motivations indépendantes et qu'il apparaît que tous les griefs soulevés contre l'une de ces motivations peuvent être traités dans le cadre du recours en réforme et doivent y être rejetés. En effet, si cette motivation indépendante échappe à la critique, le recours en réforme ne peut qu'être rejeté, quelle que soit la pertinence des critiques dirigées contre l'autre motivation (cf. consid. 1.2 supra). 
 
En l'espèce, il se justifie de déroger au principe posé par l'art. 57 al. 5 OJ pour traiter d'abord le recours en réforme, puisque, comme on le verra, la motivation subsidiaire et indépendante de l'arrêt attaqué - par laquelle la cour cantonale a retenu que la défenderesse pourrait de toute manière opposer à l'action en revendication de la demanderesse un droit préférable valablement acquis sur les pièces d'or litigieuses - échappe à la critique. 
 
2. 
2.1 Après avoir rappelé les dispositions légales et les principes dégagés par la jurisprudence et la doctrine au sujet de l'acquisition de bonne foi d'un droit de gage sur une chose dont le constituant du gage n'avait pas le pouvoir de disposer, la cour cantonale a considéré que la demanderesse n'était pas parvenue à renverser la présomption de la bonne foi de la défenderesse en apportant la preuve que celle-ci aurait reconnu l'absence du pouvoir de disposer si elle avait prêté l'attention que les circonstances permettaient d'exiger d'elle. Sur ce point, la motivation de sa décision est en substance la suivante : 
2.1.1 Il ressort du dossier que la Banque est intervenue après la mise aux enchères publiques des pièces d'or, laquelle avait bénéficié d'une large audience et d'une diffusion mondiale (catalogue rédigé par des experts de la branche, expositions des pièces à Genève et à New York) et s'était déroulée normalement sans que les démarches des autorités indiennes auprès des autorités politiques suisses n'aient été rendues publiques. 
2.1.2 La Banque a admis n'être pas habituée à recevoir des oeuvres d'art en nantissement et n'avoir aucune connaissance en matière d'antiquités et que l'opération avait un caractère particulier. Elle s'est néanmoins adressée à la maison de vente, en possession des pièces, et s'est fait remettre les attestations établies par celle-ci ou adressées à celle-ci dans le cadre de la vente aux enchères, qui n'éveillaient pas la méfiance quant à la provenance et à l'authenticité des pièces. De même, le catalogue rédigé pour la vente aux enchères avec la collaboration de nombreux experts, également remis à la Banque, ne pouvait que la conforter sur l'authenticité et la provenance des pièces. 
2.1.3 La Banque a certes su que la maison de vente aux enchères consultée était intéressée à l'octroi du prêt, destiné notamment à rembourser l'avance consentie par elle. Pareille circonstance n'était cependant pas de nature à remettre en cause son indépendance quant aux garanties données sur les pièces d'or et à ses compétences et au sérieux des recherches effectuées en vue de leur vente aux enchères, d'autant que la Banque savait aussi que la maison de vente avait elle-même accepté les pièces comme garantie de l'avance faite au client. 
2.1.4 Aucune des informations en possession de la Banque ne lui permettait à l'époque de douter de l'identité de leur propriétaire et ne justifiait qu'elle entreprît des vérifications à ce sujet. La lecture simultanée des attestations remises par les avocats de Mukarram Jah, établies certes vraisemblablement en vue de la vente aux enchères, indiquant que selon leur client les pièces se trouvaient en Europe depuis une cinquantaine d'années, et de l'attestation de Me Croisier précisant que les pièces d'or étaient déposées depuis 1973 dans un coffre à Genève n'était pas, au vu des éléments en possession de la Banque à l'époque de la constitution du gage, de nature contradictoire ni propre à éveiller de quelconques soupçons. 
2.1.5 En outre, s'étant documentée sur l'histoire des Nizams d'Hyderabad, ancêtres de son futur client, et l'étendue de leur fortune, la Banque a pu légitimement penser de bonne foi qu'un petit-fils du dernier souverain régnant était fondé à disposer d'objets de valeur dont il est prouvé et non contesté qu'ils se sont trouvés dans la famille depuis des générations. Les représentants de la Banque ont d'ailleurs rencontré personnellement Mukarram Jah à son domicile en Australie, sans que le détail de leurs discussions ait été précisément établi; les intéressés ont néanmoins eu plusieurs contacts avec ses avocats à Genève, dont l'un avait voyagé en Inde et décrit l'étendue de sa fortune, notamment constituée de pièces d'or. Il n'y avait ainsi rien de suspect pour la Banque qu'un héritier du dernier Nizam, reconnu comme tel, possède hors d'Inde, entre autres, deux pièces d'or exceptionnelles, appartenant à la famille depuis des générations et qu'il en dispose en les remettant en gage. 
2.1.6 De plus, la Banque a reçu la garantie personnelle du propriétaire économique de la société qui déposait les pièces d'or en gage et qui confirmait avoir le pouvoir d'en disposer valablement. Bien que de telles déclarations ne suffisent pas à elles seules à établir la propriété des objets, l'insertion de la clause dans le contrat de gage ne permet pas d'en déduire que la Banque aurait eu des soupçons quant à l'identité du propriétaire. 
2.1.7 Il ne saurait être exigé d'une banque - même lorsque la jurisprudence récente du Tribunal fédéral relative à l'attention à apporter en matière de commerce d'objets d'art lui est applicable du fait du type d'objet mis en gage - davantage que l'attention requise par exemple d'une maison de vente, en lui imposant de mettre en doute tous les renseignements fournis par son client et ses représentants, alors même que les circonstances n'incitent pas à la méfiance et au risque de mettre en péril ses relations commerciales. 
2.1.8 Sont seules décisives les circonstances qui existaient à l'époque, soit en 1988, à l'exclusion de celles qui se sont révélées après coup. On ne peut donc reprocher à la Banque de ne pas avoir fait des recherches, alors même que la demanderesse jusqu'en 1992 n'a de son côté pas entrepris de démarche judiciaire en Suisse propre à attirer l'attention des tiers, et qu'elle s'est limitée à demander des renseignements sur le propriétaire des pièces d'or, sans prétendre en être elle-même propriétaire et en invoquant une éventuelle infraction à l'exportation d'objets d'art. 
 
2.2 La demanderesse reproche à l'autorité cantonale d'avoir retenu à tort que la défenderesse avait fait preuve de l'attention commandée par les circonstances. Elle fait valoir qu'eu égard au devoir de diligence des banques découlant de l'art. 3 LB et au degré élevé d'attention requis dans le commerce d'antiquités, les circonstances permettaient d'exiger de la défenderesse une attention particulièrement accrue, qu'elle n'aurait pas déployée en l'espèce. En premier lieu, le fait que l'Inde soit devenu un État démocratique et que la grande majorité des biens des anciens princes soient devenus de par la loi la propriété du nouvel État aurait dû éveiller la méfiance de la Banque lorsqu'elle a reçu en gage des pièces d'or d'une valeur historique exceptionnelle qui avaient appartenu au dernier Nizam d'Hyderabad. Ensuite, le manque reconnu de connaissances de la Banque en matière d'antiquités et le caractère particulier de l'opération auraient dû la pousser à prêter une attention toute particulière au pouvoir de disposer du constituant du gage, surtout qu'elle ne pouvait ignorer que de très nombreux pays ont adopté des législations restreignant l'exportation d'antiquités et d'oeuvres d'art et qu'il existe des conventions internationales en la matière. Or selon la demanderesse, les circonstances prises en compte par la cour cantonale n'étaient pas de nature à dissiper les doutes de la Banque, mais auraient au contraire dû l'inciter à être d'autant plus méfiante. 
2.2.1 Tout d'abord, la Banque savait que la maison de vente aux enchères consultée était intéressée à l'octroi du prêt, qui était destiné notamment à rembourser l'avance consentie par elle (cf. consid. 2.1.3 supra). La connaissance de ce fait aurait dû l'amener à se renseigner auprès de spécialistes indépendants n'ayant pas d'intérêt direct dans la conclusion du contrat de nantissement, d'autant plus que les informations obtenues de la part de la maison de vente ainsi que celles qui figuraient dans le catalogue ne concernaient pas la propriété des pièces d'or, mais uniquement leur origine historique et leur authenticité. 
2.2.2 S'agissant ensuite des attestations évoquées par la cour cantonale (cf. consid. 2.1.4 supra), la demanderesse fait valoir que l'attestation de Me Charles Adams, rédigée le 9 novembre 1987 - soit le jour même de la vente aux enchères - manifestement dans le but de rassurer la maison de vente, aurait dû éveiller la méfiance de la Banque, d'autant que son auteur ne faisait qu'indiquer ce qu'il s'était laissé dire par son client (cf. lettre B.c supra); quant à Me Croisier, il confirmait uniquement que les pièces d'or étaient déposées depuis 1973 dans un coffre à Genève, sans donner aucune information sur le propriétaire des pièces (cf. lettre B.c supra). 
2.2.3 La cour cantonale aurait enfin considéré à tort que le fait de prévoir une clause selon laquelle le constituant du gage garantissait le pouvoir de transmettre valablement et de disposer de la pleine propriété des pièces d'or serait de nature à établir la propriété des objets. Or il s'agit là uniquement de clauses usuelles, qui n'ont pas d'influence sur le titre de propriété et permettent tout au plus à la banque de se retourner plus facilement contre son débiteur dans l'hypothèse où ce dernier n'aurait pas le pouvoir de disposition sur la chose mise en gage. 
2.2.4 En conclusion, selon la demanderesse, la Banque n'aurait pas fait preuve de la diligence requise par les circonstances et ne pourrait se prévaloir de sa bonne foi. Cette conclusion se justifierait en outre par des considérations de droit international : en effet, selon l'Institut de Droit international (art. 4 § 2 de la résolution concernant la vente internationale d'objets d'art sous l'angle de la protection du patrimoine, reproduite in IPRax 1991 p. 432), lorsque des objets d'art appartenant au patrimoine culturel d'un pays ont été exportés du pays d'origine en violation de la législation de ce pays en matière d'exportations de biens culturels, le possesseur ne peut invoquer la présomption de la bonne foi. 
2.3 
2.3.1 Aux termes de l'art. 884 al. 2 CC, celui qui, de bonne foi, reçoit une chose en nantissement y acquiert un droit de gage, même si l'auteur du nantissement n'avait pas qualité d'en disposer. La bonne foi, qui s'apprécie selon les critères de l'art. 3 CC, est présumée (art. 3 al. 1 CC), mais le propriétaire de la chose donnée en nantissement peut renverser cette présomption en apportant la preuve que le créancier gagiste savait que le constituant n'avait pas le pouvoir de disposer de la chose (Zobl, Berner Kommentar, vol. IV/2/5/1, 1982, n. 817 ad art. 884 CC et les références citées). Cette preuve vise un fait interne qui ne peut être établi qu'à partir de circonstances extérieures, par exemple une communication faite à l'intéressé; touchant au fait, elle ressortit exclusivement au recours de droit public (arrêt 5C.50/2003 du 13 août 2003, consid. 3.3; Poudret, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, vol. II, 1990, n. 4.3.2 et 4.6.2 ad art. 63 OJ et les arrêts cités). 
 
Alors même que le créancier gagiste est de bonne foi, le propriétaire de la chose donnée en nantissement peut faire valoir que celui-ci est déchu du droit d'invoquer la protection légale attachée à la bonne foi parce qu'il n'a pas fait preuve de l'attention que les circonstances permettaient d'exiger de lui (art. 3 al. 2 CC; Zobl, op. cit., n. 818 ad art. 884 CC et les références citées). Dans ce cas, le débat ne se place plus sur le terrain de la preuve et du fait, mais sur celui du droit à la protection de la bonne foi; cette question peut donc être revue dans un recours en réforme (arrêt 5C.50/2003 du 13 août 2003, consid. 3.4.1; arrêt 5C.245/2002 du 24 décembre 2002, publ. in SJ 2003 I 444, consid. 3.2). 
En l'espèce, la seule question litigieuse est celle de savoir si la défenderesse, qui était de bonne foi, est déchue du droit d'invoquer la protection légale attachée à cette bonne foi parce qu'elle n'aurait pas fait preuve de l'attention que les circonstances permettaient d'exiger d'elle. Relevant du droit, cette question peut être examinée librement par le Tribunal fédéral en instance de réforme. 
2.3.2 La mesure de l'attention exigée par les circonstances, au sens de l'art. 3 al. 2 CC, est largement une question d'appréciation (art. 4 CC; ATF 122 III 1 consid. 2a/aa). Elle doit être déterminée d'après un critère objectif, c'est-à-dire indépendamment des connaissances et des aptitudes particulières de la partie (Zobl, op. cit., n. 822 ad art. 884 CC et les références citées; Bauer, Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch II, 2e éd. 2003, n. 133 ad art. 884 CC). 
 
Selon une jurisprudence constante, approuvée par la doctrine, il n'existe pas de devoir général de l'acquéreur d'une chose (respectivement du créancier qui se fait remettre la chose en nantissement) de se renseigner sur le pouvoir de disposition de l'aliénateur (respectivement du constituant du gage); ce n'est que s'il existe des motifs concrets propres à soulever le doute sur ce point que l'acquéreur (respectivement le créancier gagiste) est tenu de se renseigner (ATF 122 III 1 consid. 2a/aa et les arrêts cités; Zobl, op. cit., n. 823 ad art. 884 CC; Bauer, op. cit., n. 134 ad art. 884 CC; Stark, Berner Kommentar, vol. IV/3/1, 2001, n. 50 ad art. 933 CC; Jäggi, Berner Kommentar, Einleitung, 1962, n. 128 ad art. 3 CC). 
 
Un devoir d'attention accru existe cependant dans toutes les branches d'activité exposées plus particulièrement à l'offre de marchandises de provenance douteuse, comme le commerce d'antiquités; ces exigences élevées ne s'imposent pas seulement aux commerçants, le critère décisif étant la connaissance de la branche par l'acquéreur (ATF 122 III 1 consid. 2a/bb et les arrêts cités). Même si cette jurisprudence n'impose pas un devoir général de se renseigner dans de tels cas, l'obligation de vérifier si l'aliénateur (respectivement le constituant du gage) a le pouvoir de disposer de la chose existe non seulement en cas de doutes concrets sur l'existence d'un vice juridique, mais déjà lorsqu'il y a lieu de se méfier au vu des circonstances (ATF 122 III 1 consid. 2a/aa in fine). 
2.3.3 En ce qui concerne la remise en gage de papiers-valeurs, métaux précieux, monnaies anciennes etc. à une banque, il est admis en jurisprudence et en doctrine qu'une banque peut tenir pour honorable même un cocontractant inconnu et qu'elle n'est en principe pas tenue d'effectuer des recherches sur la provenance des biens de valeur qui lui sont remis en gage et sur le pouvoir d'en disposer, mais peut se fonder sur la présomption légale liée à la possession (art. 930 CC), sauf circonstances particulières justifiant des doutes ou de la méfiance (ATF 100 II 8 consid. 4a et les arrêts cités; Bauer, op. cit., n. 139 ad art. 884 CC; Zobl, op. cit., n. 825 ad art. 884 CC; Oftinger/Bär, Zürcher Kommentar, vol. IV/2, 1981, n. 356 ad art. 884 CC; Stark, op. cit., n. 50 ad art. 933 CC; cf. Jäggi, op. cit., n. 128 ad art. 3 CC). 
 
Le degré de diligence requis de la banque est élevé et se concrétise dans l'obligation de diligence propre à l'activité bancaire (Bauer, op. cit., n. 139 ad art. 884 CC; Emch/Renz/Bösch, Das Schweizerische Bankgeschäft, 5e éd. 1998, p. 284; Guggenheim, Les contrats de la pratique bancaire suisse, 4e éd. 2000, p. 301; cf. Thalmann, Die Sorgfaltspflicht der Bank im Privatrecht insbesondere im Anlagegeschäft, in RDS 1994 II 115 ss, spéc. p. 146 ss). Si la banque, lors de l'ouverture d'un compte et de l'acceptation des sûretés, respecte les exigences de la Convention relative à l'obligation de diligence des banques (dont la dernière version, du 17 janvier 2003, est publiée in Bulletin CFB 44/2003, Fascicule spécial: Lutte contre le blanchiment d'argent, p. 261 ss), qui l'oblige à identifier ses clients, ainsi que celles de l'Ordonnance de la Commission fédérale des banques en matière de lutte contre le blanchiment d'argent (dont la dernière version, du 18 décembre 2002, est publiée in Bulletin CFB 44/2003 p. 35 ss), elle est autorisée à se prévaloir de sa bonne foi (Bauer, op. cit., n. 139 ad art. 884 CC). 
2.3.4 Lorsque des circonstances particulières justifiaient des doutes ou de la méfiance sur le pouvoir de disposer du constituant du gage, l'étendue des recherches auxquelles aurait dû procéder la banque se détermine d'après les circonstances de l'espèce (Thalmann, op. cit., note 84 in fine p. 148). En tous les cas, on ne peut retenir que le créancier gagiste n'a pas fait preuve de l'attention requise par les circonstances (art. 3 al. 2 CC) que si les démarches qu'on lui reproche de n'avoir pas entreprises lui auraient permis de découvrir l'absence du pouvoir de disposer du constituant du gage (ATF 100 II 8 consid. 4b; 122 III 1 consid. 2a in fine; Bauer, op. cit., n. 133 ad art. 884 CC; Stark, op. cit., n. 51 ad art. 933 CC). 
 
2.4 En l'espèce, il n'est pas contestable qu'au regard du caractère véritablement exceptionnel des pièces d'or géantes anciennes qui devaient être remises en nantissement à la défenderesse, celle-ci ne pouvait pas simplement se fonder sur la présomption légale liée à la possession (art. 930 CC). Le degré d'attention accru que requéraient les circonstances particulières de l'espèce, de même que l'obligation de diligence propre à l'activité bancaire, lui imposaient au contraire de se renseigner sur la provenance des pièces d'or afin de vérifier que le constituant du gage avait bien le pouvoir d'en disposer. Toute la question est de savoir si la défenderesse a fait preuve de l'attention exigée par les circonstances en admettant l'existence de ce pouvoir de disposer sur la base des renseignements qu'elle a obtenus. 
2.4.1 La défenderesse a été approchée en 1988 par Mes Charles Adams et Roy Ryan, qui étaient mandatés par Mukarram Jah en vue d'obtenir un prêt garanti par la remise en nantissement des deux pièces d'or litigieuses, Mukarram Jah apportant pour le surplus sa caution personnelle à l'opération. 
 
La défenderesse est intervenue après la mise aux enchères publiques des pièces d'or, laquelle avait bénéficié d'une large audience et d'une diffusion mondiale (catalogue rédigé par des experts de la branche, expositions des pièces à Genève et à New York) et s'était déroulée normalement le 9 novembre 1987, sans que les démarches des autorités indiennes auprès des autorités politiques suisses n'aient été rendues publiques. 
 
La défenderesse s'est renseignée auprès de la maison de vente aux enchères, en possession des pièces, et s'est fait remettre des attestations établies par celle-ci ou adressées à celle-ci dans le cadre de la vente aux enchères. Elle s'est ainsi notamment vu remettre une attestation datée du 9 novembre 1987 de Me Charles Adams, dans laquelle celui-ci indique qu'il agit en qualité de conseil du vendeur des deux pièces d'or mises aux enchères, que son client a fourni toutes les assurances requises à la maison de vente en ce qui concerne la valeur, la provenance et l'authenticité des pièces dont il lui a été indiqué qu'elles étaient dans la famille de son mandant depuis des générations, qu'il s'est laissé dire que ces deux pièces sont physiquement en Europe depuis plus de 50 ans et ne se sont en conséquence jamais trouvées dans l'État moderne de l'Inde, ni n'ont été exportées de ce pays. La défenderesse s'est également vu remettre une attestation établie le 23 octobre 1987 par Me Croisier, dans laquelle celui-ci confirmait que les deux pièces d'or se trouvaient à Genève, dans un coffre de l'UBS auquel il avait accès, depuis 1973. 
Par ailleurs, Me Charles Adams a confirmé, dans un courrier du 9 juillet 1988 à la demanderesse, qu'il s'était rendu en juin-juillet 1988 à Hyderabad, pour mener une étude préliminaire sur les biens de son client; selon son appréciation, la fortune de ce dernier était considérable, constituée principalement de biens immobiliers, de bijoux et d'objets apparentés; beaucoup de biens se trouvaient hors de l'Inde, notamment en Australie, en Suisse ou au Royaume-Uni s'agissant d'importants objets de joaillerie et d'art islamique. 
Contrairement à ce que soutient la demanderesse (cf. consid. 2.2.2 supra), on ne discerne pas en quoi l'attestation de Me Charles Adams datée du 9 novembre 1987 aurait dû éveiller la méfiance de la Banque, d'autant que celle-ci était également en possession d'un courrier du 9 juillet 1988 de ce même avocat, dans lequel celui-ci confirmait les constatations qu'il avait faites personnellement lors de son déplacement à Hyderabad. Quant à l'attestation de Me Croisier, elle ne faisait certes que confirmer que les pièces d'or étaient déposées depuis 1973 dans un coffre à Genève, sans donner aucune information sur leur propriétaire. Si cette attestation n'était ainsi pas propre à conforter la défenderesse sur la provenance des pièces, on ne voit en revanche pas non plus qu'elle aurait été de nature à susciter la méfiance. 
 
De même, le fait que la Banque a su que la maison de vente aux enchères consultée était intéressée à l'octroi du prêt, destiné notamment à rembourser l'avance consentie par elle (cf. consid. 2.2.1 supra), n'était pas de nature à remettre en cause son indépendance quant aux garanties données sur les pièces d'or et au sérieux des recherches effectuées en vue de leur vente aux enchères. Comme l'ont relevé à juste titre les juges cantonaux, la Banque pouvait être d'autant plus confortée sur le sérieux des informations reçues de la maison de vente qu'elle savait que cette dernière avait elle-même accepté les pièces comme garantie de l'avance faite au client. 
2.4.2 Force est de constater avec la demanderesse (cf. consid. 2.2.1 supra) que le catalogue rédigé pour la vente aux enchères avec la collaboration de nombreux experts ne pouvait pas conforter la défenderesse sur la provenance des pièces, puisque, comme cela résulte des constatations de fait de l'arrêt attaqué, les informations qui figuraient dans ce catalogue ne concernaient pas la propriété des pièces d'or mais uniquement leur origine historique ainsi que leur authenticité. En revanche, le fait qu'une mise aux enchères publiques des pièces d'or, qui avait bénéficié d'une large audience et d'une diffusion mondiale, s'était déroulée normalement le 9 novembre 1987, sans que - même dans l'intervalle qui avait séparé cette vente aux enchères et la remise des pièces à la Banque en août 1988 - de quelconques revendications aient été formulées auprès de la maison de vente, constituaient autant d'éléments au regard desquels la défenderesse n'avait pas à mettre en doute le fait que Mukarram Jah était bien le légitime propriétaire des pièces d'or et que sa société Crestalor Services SA avait bien le pouvoir d'en disposer. 
 
Par ailleurs, les représentants de la Banque ont rencontré personnellement Mukarram Jah à son domicile en Australie et ont eu plusieurs contacts avec ses avocats à Genève, dont l'un avait voyagé en Inde et décrit l'étendue de sa fortune, notamment constituée de pièces d'or. La Banque s'est en outre documentée sur l'histoire des Nizams d'Hyderabad, ancêtres de son futur client, et l'étendue de leur fortune. Dans ces circonstances, la Banque n'avait pas de raisons de douter qu'un petit-fils et héritier reconnu du dernier souverain régnant était fondé à disposer d'objets de valeur dont il est prouvé et non contesté qu'ils se sont trouvés dans la famille depuis des générations. Comme l'ont relevé à juste titre les juges cantonaux, il n'y avait rien de suspect qu'un héritier du dernier Nizam, reconnu comme tel, possède hors d'Inde, entre autres, deux pièces d'or exceptionnelles, appartenant à la famille depuis des générations et qu'il en dispose en les remettant en gage. 
 
Il convient encore de souligner ici que, contrairement aux affirmations de la demanderesse (cf. consid. 2.2.3 supra), la cour cantonale n'a nullement considéré que le fait de prévoir une clause selon laquelle le constituant du gage garantissait le pouvoir de transmettre valablement et de disposer de la pleine propriété des pièces d'or serait de nature à établir la propriété des objets; elle a seulement estimé - avec raison - que l'insertion de telles clauses usuelles, si elle ne pouvait pas avoir d'influence sur le titre de propriété, ne permettait à l'inverse pas non plus de déduire que la Banque aurait dû avoir des soupçons quant à l'identité du propriétaire. 
2.4.3 Sur le vu de ce qui précède, il ne saurait être retenu que la défenderesse a failli à son devoir de se renseigner sur la provenance des pièces d'or qu'elle a acceptées en nantissement. Les démarches qu'elle a effectuées ne lui imposaient pas de mettre en doute le fait que Mukarram Jah était bien le propriétaire de ces pièces. Au demeurant, il est constant qu'il ne s'agissait effectivement en aucune manière de biens volés ou de provenance douteuse, puisqu'il est prouvé et non contesté que les biens en question se sont trouvés dans la propriété des Nizams d'Hyderabad depuis des générations et que Mukarram Jah est l'héritier reconnu du dernier Nizam. 
Au surplus, on ne discerne pas quelle preuve supplémentaire la Banque aurait pu demander à l'époque à son client quant à la propriété des pièces d'or, qui avaient été transmises de génération en génération jusqu'au dernier Nizam, Mir Osman Ali Khan, dont Mukarram Jah était l'héritier reconnu. Contrairement à ce que soutient la demanderesse (cf. consid. 2.2 supra), on ne voit pas comment la défenderesse aurait dû imaginer que les pièces d'or litigieuses seraient devenues de par la loi la propriété de la nouvelle Union de l'Inde, alors qu'il est constant qu'entre l'intégration de l'ancienne principauté d'Hyderabad dans l'Union de l'Inde et la conclusion du contrat de nantissement - soit pendant quelque quarante ans - ces pièces étaient restées en la possession immédiate et paisible d'abord de Mir Osman Ali Khan, puis de son héritier Mukarram Jah. 
 
Il sied par ailleurs de ne pas perdre de vue le fait qu'avant 1992, la demanderesse elle-même n'avait jamais prétendu être propriétaire des pièces litigieuses, s'étant limitée à demander des renseignements sur leur propriétaire en invoquant une éventuelle infraction à l'exportation d'objets d'art. Dans ces conditions, on ne distingue pas quelles démarches aurait encore pu entreprendre la défenderesse à l'époque qui lui auraient permis de découvrir la supposée absence du pouvoir de disposer du constituant du gage (cf. consid. 2.3.4 supra). Ainsi, non seulement la défenderesse ne peut-elle se voir reprocher aucun manquement causal à cet égard, mais encore la demanderesse est-elle d'autant plus mal placée pour reprocher à la Banque d'avoir considéré Mukarram Jah comme le légitime propriétaire des pièces d'or qu'elle-même n'en a jamais revendiqué la propriété avant 1992. 
 
Enfin, comme le souligne non sans raison la défenderesse, même les autorités judiciaires genevoises de première instance et d'appel sont arrivées à la conclusion, après quelque six ans de procédure et avec des moyens d'investigation qui n'ont aucune commune mesure avec ceux dont disposait la Banque à l'époque, que Mukarram Jah était bien le propriétaire des pièces d'or géantes. 
2.4.4 Étant ainsi acquis que la Banque n'a pas failli à son devoir de se renseigner sur le fait que son client était bien le propriétaire des pièces d'or remises en nantissement, il reste à examiner si l'on peut lui reprocher de ne pas avoir entrepris de démarches spécifiques pour vérifier que ces pièces d'or n'avaient pas été illicitement exportées. 
2.4.4.1 L'autorité cantonale a constaté qu'en 1972, l'Union de l'Inde a adopté une loi sur les antiquités et les trésors artistiques ("Antiquities and Art Treasures Act"), en remplacement de la loi sur le contrôle des antiquités de 1947, laquelle interdisait à toute personne d'exporter des antiquités sans l'autorisation du Gouvernement, et qui était applicable à la Principauté d'Hyderabad en vertu du "Union Territories Act" de 1950. L'interdiction d'exporter invoquée par la demanderesse découle ainsi du droit public indien, qui ne saurait trouver application hors du territoire de l'Union de l'Inde. On peut se référer à cet égard à un célèbre arrêt Attorney General of New Zealand v. Ortiz and others, dans lequel la Cour d'appel anglaise, et à sa suite la Chambre des Lords, avait en 1982 rejeté une demande en revendication de la Nouvelle-Zélande sur des figures maories exportées en violation du New Zealand Historic Articles Act, en constatant qu'une telle loi de droit public ne pouvait se voir reconnaître une application extraterritoriale (cf. Hanisch, Internationalprivatrechtliche Fragen im Kunsthandel, in Festschrift für Wolfram Müller-Freienfels, Baden-Baden 1986, p. 193 ss, 204 s.). Il n'en va pas différemment en Suisse, car aucun État n'est tenu, sous réserve d'accords internationaux, d'appliquer des règles de droit public étrangères à l'intérieur de ses frontières (Siehr, Das Sachenrecht der Kulturgüter, Kulturgütertransfergesetz und das schweizerische Sachenrecht, in Aktuelle Aspekte des Schuld- und Sachenrechts, Festschrift für Heinz Rey zum 60. Geburtstag, 2003, p. 127 ss, 137; Weber, Bundesgesetz über den internationalen Kulturgütertransfer, in RDS 2004 I 495 ss, 503). 
 
Par ailleurs, lors de la remise en nantissement des pièces d'or litigieuses en août 1988, aucune convention internationale visant à interdire l'importation et l'exportation illicites de biens culturels ainsi que le transfert de propriété de biens culturels illicitement exportés n'était en vigueur pour la Suisse, qui ne connaissait pas non plus de loi nationale réglant l'importation et l'exportation des biens culturels (cf. consid. 3.2.2 infra). 
2.4.4.2 De toute manière, il convient de souligner qu'en droit suisse, la bonne foi permettant au créancier gagiste d'acquérir un droit de gage sur la chose donnée en nantissement, même si l'auteur du nantissement n'avait pas qualité d'en disposer (art. 884 al. 2 CC), se rapporte exclusivement au pouvoir de disposition du constituant du gage (cf. consid. 2.3 supra). Ce pouvoir de disposer de la chose, au sens des droits réels, découle du droit de propriété - le propriétaire d'une chose ayant le pouvoir d'en disposer librement (art. 641 al. 1 CC) et donc de la grever (Zobl, op. cit., n. 730 ad art. 884 CC et les références citées) - et est indépendant du point de savoir si la chose a été exportée d'un pays étranger en violation de la législation de droit public de ce pays en matière d'exportation de biens culturels. 
La demanderesse ne peut rien tirer à cet égard de l'art. 4 § 2 de la résolution de l'Institut de Droit international concernant la vente internationale d'objets d'art sous l'angle de la protection du patrimoine (publiée in IPRax 1991 p. 432), qui prévoit que lorsque des objets d'art appartenant au patrimoine culturel d'un pays ont été exportés du pays d'origine en violation de la législation de ce pays en matière d'exportation de biens culturels, le possesseur ne peut invoquer la présomption de la bonne foi. En effet, cette résolution, adoptée par une association scientifique privée, ne constitue - comme cela ressort d'ailleurs de son préambule - qu'une proposition faite aux États pour le développement de leur droit interne, y compris les règles de droit international privé. Or le principe énoncé à son art. 4 § 2 - qui prévoit au demeurant que le pays d'origine devrait accorder une indemnité équitable au possesseur qui aura prouvé sa bonne foi - n'a pas à ce jour trouvé d'écho en droit positif suisse. Au surplus, la résolution en question a été adoptée le 3 septembre 1991 et, comme souligné dans son préambule et à son art. 1er § 3, elle ne saurait affecter une situation antérieure à son adoption. 
2.4.5 Il résulte de ce qui précède que la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en considérant que la défenderesse pouvait se prévaloir de la protection de sa bonne foi lors de l'acquisition du droit de gage sur les pièces litigieuses. 
 
3. 
3.1 La cour cantonale a encore examiné, dans l'hypothèse toujours où la demanderesse aurait établi sa propriété sur les pièces, la bonne foi de la Banque devant être protégée et l'absence du pouvoir de disposer étant guérie de ce fait, si l'existence du droit préférable - soit le droit de gage acquis de bonne foi - reposait sur un titre d'acquisition valable suivi d'une opération d'acquisition. Elle s'est ainsi posé la question de la validité - contestée par la demanderesse - du contrat de gage conclu le 5 août 1988 entre la Banque et Crestalor Services SA. La motivation de sa décision sur ce point peut être résumée comme suit : 
3.1.1 Le droit applicable au contrat de gage est le droit suisse. En effet, en droit international privé suisse, le droit applicable à la constitution d'un droit de gage sur une chose mobilière située en Suisse est le droit suisse. D'ailleurs, les cocontractants ont expressément soumis les contrats de prêt du 5 août 1988 au droit suisse, et le contrat général de nantissement signé par Crestalor Services SA en faveur de la Banque, portant expressément sur les deux pièces d'or remises en garantie des prêts accordés, renvoie aux conditions générales de la Banque qui soumettent le contrat au droit suisse. C'est donc le droit suisse qui s'applique au contrat de gage quant à sa validité. 
3.1.2 La demanderesse conteste toutefois la validité de ce contrat de gage au motif qu'il porterait sur un objet exporté illicitement selon le droit indien, lequel devrait être pris en considération par le juge suisse en application de l'art. 19 LDIP ou en vertu de l'ordre public universel, ce qui rendrait le contrat nul de plein droit. Cette opinion ne saurait être partagée. 
 
Selon l'art. 19 al. 1 LDIP, lorsque des intérêts légitimes et manifestement prépondérants au regard de la conception suisse du droit l'exigent, une disposition impérative d'un droit autre que celui désigné par la LDIP peut être prise en considération, si la situation visée présente un lien étroit avec ce droit. Toutefois, l'application de l'art. 19 LDIP doit rester exceptionnelle de par sa ratio legis et ne vise que les personnes privées. Selon la doctrine, le problème de la restitution à l'État d'origine d'oeuvres illicitement exportées et appartenant à son patrimoine culturel relève davantage du droit public et des conventions internationales que du droit international privé. Ainsi, dans le cas d'espèce, l'application de l'art. 19 LDIP apparaît exclue. De toute manière, elle ne serait d'aucune aide à la demanderesse, dès lors que même si la loi indienne contre les exportations illicites d'antiquités pouvait être considérée comme une loi d'application immédiate, elle n'impose pas d'elle-même le principe de la nullité du contrat portant sur de tels objets. 
3.1.3 Il convient enfin d'examiner si le contrat de gage pourrait être considéré comme nul pour immoralité au sens de l'art. 20 CO dans la mesure où il se heurterait à l'ordre public international en matière de protection des biens culturels. 
 
La demanderesse estime que cet ordre public international trouverait son expression dans deux conventions internationales, à savoir la convention de l'UNESCO du 14 novembre 1970 concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l'importation, l'exportation et le transfert de propriété illicites de biens culturels et la convention d'Unidroit du 24 juin 1995 sur les biens culturels volés ou illicitement exportés. Toutefois, la convention de l'UNESCO, approuvée par l'Assemblée fédérale le 12 juin 2003, n'est pas encore entrée en vigueur pour la Suisse [réd.: elle est entre-temps entrée en vigueur, le 3 janvier 2004 (RO 2004 p. 2881)] et n'a pas d'application rétroactive, tandis que la convention d'Unidroit, signée par la Suisse le 26 juin 1996, n'a pas été ratifiée. 
 
Si l'on peut admettre, au vu des nombreuses conventions internationales signées en la matière, que le principe de la protection des biens culturels volés et celui d'un droit pour l'État d'origine de biens culturels exportés illicitement à leur restitution constitue l'expression d'un ordre public international en vigueur ou en formation (ATF 123 II 134), ce droit n'est en tout cas pas illimité et inconditionnel et n'est pour l'instant pas applicable en Suisse. De plus, de tels principes n'impliquent pas encore la nullité absolue d'un contrat soumis au droit suisse qui contreviendrait à une règle de droit public étranger telle que la loi indienne sur l'interdiction des exportations illicites d'antiquités. Enfin, il n'a pas été établi par la procédure pénale indienne que les pièces d'or auraient été illégalement transportées en Suisse. 
 
Partant, le seul droit applicable à la validité du contrat de gage conclu entre la défenderesse et Crestalor Services SA est le droit suisse et a été respecté. 
 
3.2 Reprenant l'argumentation déjà développée devant la Cour de justice, la demanderesse conteste la validité du contrat de gage au motif qu'il porterait sur un objet exporté illicitement selon le droit indien, lequel devrait être pris en considération par le juge suisse en application de l'art. 19 LDIP ou en vertu de l'ordre public universel, ce qui rendrait le contrat nul de plein droit. 
3.2.1 La demanderesse se plaint d'une violation du droit indien en ce qui concerne la validité des contrats portant sur un objet illicitement exporté, ainsi que du fait que la Cour de justice aurait mal appliqué le droit indien en laissant entendre que selon ce droit, les pièces n'avaient pas été illicitement exportées de l'Union de l'Inde. Ces griefs sont irrecevables en instance de réforme. En effet, la motivation par laquelle l'autorité cantonale a retenu que la loi indienne contre les exportations illicites d'antiquités n'impose pas d'elle-même le principe de la nullité du contrat portant sur de tels objets relève de l'application du droit étranger, qui ne peut être revue dans le cadre du présent recours en réforme (art. 43a al. 2 OJ a contrario); la demanderesse n'a d'ailleurs pas soulevé de grief sur ce point dans son recours de droit public connexe. De même, la constatation de la cour cantonale selon laquelle il n'a pas été établi par la procédure pénale indienne que les pièces d'or auraient été illégalement transportées en Suisse lie le Tribunal fédéral en instance de réforme (art. 63 al. 2 OJ); elle n'a au demeurant pas non plus été critiquée par la demanderesse dans son recours de droit public connexe. 
Or du moment qu'il n'est pas établi que les pièces d'or auraient été illégalement transportées en Suisse et qu'au surplus, la loi indienne n'impose pas la nullité d'un contrat de gage portant sur des antiquités exportées illicitement, même l'application du droit indien par le biais de l'art. 19 LDIP ne saurait conduire à retenir la nullité du contrat de gage portant sur les pièces d'or litigieuses. Cela étant, la cour cantonale pouvait à bon droit retenir que le contrat de gage conclu entre la défenderesse et Crestalor Services SA, soumis au droit suisse, n'est frappé de nullité ni au regard du droit suisse, qui lui est en principe seul applicable, ni au regard de dispositions impératives du droit indien qui pourraient être prises en considération en vertu de l'art. 19 LDIP
 
Au surplus, on ne voit pas que des intérêts légitimes et manifestement prépondérants au regard de la conception suisse du droit exigent de prendre en considération, au sens de l'art. 19 al. 1 LDIP, la loi indienne contre les exportations illicites d'antiquités. Ainsi qu'il a été dit plus haut (cf. consid. 2.4.4.1 supra), la Suisse n'est pas tenue, sous réserve d'accords internationaux, d'appliquer des règles de droit public étrangères à l'intérieur de ses frontières. On verra ci-après (cf. consid. 3.2.2 infra) que, depuis la ratification de la convention de l'UNESCO de 1970 sur l'importation, l'exportation et le transfert de propriété illicites de biens culturels, convention mise en oeuvre en droit interne par la loi fédérale du 20 juin 2003 sur le transfert international des biens culturels, les règles d'un pays étranger sur l'exportation des biens culturels peuvent être prises en considération dans le cadre d'une action en retour intentée par l'État d'origine, qui fait ainsi valoir des prétentions de droit public (cf. Siehr, op. cit., p. 139). Il n'y a en revanche pas lieu de prendre en considération de telles dispositions de droit public d'un pays étranger dans le cadre d'une action en revendication de droit privé, ainsi qu'on le verra plus loin (cf. consid. 3.2.3 infra). 
3.2.2 La demanderesse soutient que selon la doctrine, le juge suisse doit prendre en compte la législation par laquelle un pays étranger protège ses biens culturels en vertu de l'ordre public universel, dont l'expression peut être trouvée dans les deux conventions de l'UNESCO et d'Unidroit. Par conséquent, un contrat de nantissement ayant pour objet des biens culturels volés ou à tout le moins exportés illicitement devrait être considéré comme nul selon l'ordre juridique suisse et plus particulièrement selon les art. 19 et 20 CO. Il s'ensuivrait, selon la demanderesse, que la Banque n'aurait pu, même de bonne foi, acquérir de droit de gage sur les deux pièces d'or litigieuses et devrait les restituer à l'Union de l'Inde. Cette argumentation ne saurait être suivie, pour les raisons suivantes : 
Il est incontesté que la convention d'Unidroit du 24 juin 1995 sur les biens culturels volés ou illicitement exportés, signée par la Suisse le 26 juin 1996, n'a pas été ratifiée et qu'au demeurant, son art. 10 exclut toute rétroactivité (Lalive, La Convention d'UNIDROIT sur les biens culturels volés ou illicitement exportés, in RSDIE 1997 p. 13 ss, 47; cf. le texte de cette convention in RSDIE 1997 p. 57 ss). Quant à la convention de l'UNESCO du 14 novembre 1970 concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l'importation, l'exportation et le transfert de propriété illicites de biens culturels, elle a été approuvée par l'Assemblée fédérale le 12 juin 2003 et est entrée en vigueur pour la Suisse le 3 janvier 2004; son art. 7 exclut toute rétroactivité (RO 2004 p. 2879 ss; RS 0.444.1). Au surplus, cette convention n'est pas self-executing et ne crée ni droits ni obligations directement applicables pour les individus; l'adoption d'une législation nationale d'application est indispensable pour donner effet aux droits et obligations qu'elle contient (Geisinger-Mariéthoz, Le projet de ratification par la Suisse de la Convention de l'UNESCO de 1970 sur l'importation, l'exportation et le transfert de propriété illicites des biens culturels, in RDS 2000 p. 273 ss, 285 et 288). En Suisse, l'Assemblée fédérale a ainsi adopté le 20 juin 2003 la loi fédérale sur le transfert international des biens culturels (LTBC; FF 2003 p. 4019 ss; RO 2005 p. 1869 ss; RS 444.1), dont le Conseil fédéral a fixé l'entrée en vigueur au 1er juin 2005 (RO 2005 p. 1881). Toutefois, l'art. 33 de cette loi exclut lui aussi expressément toute rétroactivité. 
Il s'avère ainsi qu'aucune des conventions invoquées par la demanderesse n'est applicable ratione temporis aux faits qui sont à la base du présent litige, les principes qu'elles contiennent étant seulement sur le point, plus de quinze ans après la remise en nantissement des pièces d'or litigieuses à la défenderesse, d'être formellement intégrés à l'ordre juridique suisse. Le Tribunal fédéral a certes admis, dans le cadre d'une requête d'entraide internationale en matière pénale, que les normes de la convention de l'UNESCO et de la convention d'Unidroit, qui relèvent d'une commune inspiration, constituent l'expression d'un ordre public international en vigueur ou en formation; il a toutefois relevé dans le même temps que ces normes préservaient les intérêts légitimes du possesseur de bonne foi (ATF 123 II 134 consid. 7c). 
Quant à la doctrine, dont la demanderesse fait grand cas, les commentateurs de l'art. 100 LDIP soulignent que le problème de la restitution à l'État d'origine des biens culturels illicitement exportés relève du droit public et des conventions internationales plutôt que du droit international privé. Ils envisagent certes l'hypothèse que le possesseur devenu propriétaire selon le droit déclaré applicable voie son droit s'incliner devant le droit de l'État dépossédé, en vertu d'un ordre public international (Dutoit, Commentaire de la loi fédérale du 18 décembre 1987, 3e éd. 2001, n. 10 ad art. 100 LDIP; Heini, Zürcher Kommentar zum IPRG, 2e éd. 2004, n. 29 ss ad art. 100 LDIP; Fisch, Basler Kommentar, Internationales Privatrecht, 1996, n. 59 ad art. 100 LDIP), mais cela ne saurait en aucun cas conduire à faire fi des droits réels acquis de bonne foi par le possesseur du bien illicitement exporté (cf. Heini, op. cit., n. 31 ad art. 100 LDIP et les références citées). 
3.2.3 La manière dont la convention de l'UNESCO de 1970 sur l'importation, l'exportation et le transfert de propriété illicites de biens culturels a entre-temps été mise en oeuvre, par la loi fédérale du 20 juin 2003 sur le transfert international des biens culturels, confirme que la question de l'exportation illicite de biens culturels ne doit pas être appréhendée à travers les mécanismes du droit international privé, mais à travers la reconnaissance de prétentions de droit public reposant sur la conclusion de conventions internationales. 
 
En effet, la Suisse a mis en oeuvre ses obligations découlant de l'art. 7 de la convention de l'UNESCO en prévoyant dans la loi sur le transfert international des biens culturels un mécanisme d'actions en retour de biens culturels illicitement exportés. Selon l'art. 9 al. 1 LTBC, quiconque possède un bien culturel qui a été importé illicitement en Suisse (au sens de l'art. 2 al. 5 LTBC) peut faire l'objet d'une action en retour de l'État d'où ce bien a été illicitement exporté. Le système de l'action en retour repose sur la conclusion, avec des États parties à la convention de l'UNESCO, d'accords portant sur l'importation et le retour des biens culturels, aux conditions strictes de l'art. 7 LTBC (Siehr, op. cit., p. 137; Fischer/Birrer, Grundzüge des Kulturgütertransfergesetzes, in L'expert comptable suisse 2005 p. 287 ss, 289). Ainsi, la Suisse satisfait à ses obligations découlant de l'art. 7 de la convention de l'UNESCO en s'engageant, par des accords bilatéraux, à accorder le retour de biens culturels importants pour le patrimoine culturel de l'État concerné qui ont été exportés illicitement (Siehr, op. cit., p. 137). Ce droit au retour a une incidence sur la position juridique de l'acquéreur du bien culturel exporté illicitement : même s'il est devenu propriétaire du bien en question selon la lex rei sitae applicable - l'ayant acquis de son propriétaire ou l'ayant acquis de bonne foi d'une personne qui n'avait pas qualité d'en disposer -, il doit restituer le bien à l'État d'origine (Siehr, op. cit., p. 137). Toutefois, celui qui doit restituer un bien culturel qu'il avait acquis de bonne foi - la question étant ici de savoir si l'acquéreur savait ou aurait dû raisonnablement savoir que le bien culturel avait été illicitement exporté (cf. art. 6 al. 1 et 2 de la convention d'Unidroit) - a droit au versement d'une indemnité équitable (art. 9 al. 5 LTBC). 
 
Par le système qui vient d'être décrit, la Suisse satisfait à ses obligations internationales en matière de lutte contre l'exportation illicite de biens culturels en reconnaissant, à des conditions précises, la prétention de droit public d'un État étranger au retour sur son territoire d'un bien culturel illicitement exporté. C'est dans ce seul cadre que l'application des règles de droit public d'un État étranger sur l'exportation des biens culturels peut conduire à la restitution, à l'État d'origine, d'un bien culturel illicitement exporté dont la propriété a été valablement transférée - ou qui a été valablement grevé d'un droit de gage - au regard des normes de droit privé applicables. L'exportation illicite d'un bien culturel selon le droit public de l'État d'origine ne saurait en revanche affecter la validité, sur le plan du droit privé, du transfert de la propriété du bien en question ou de la constitution d'un droit de gage sur ce bien. C'est d'ailleurs précisément pour cela qu'il a fallu mettre en place, sur la base de la convention de l'UNESCO, un système d'actions en retour permettant de faire droit aux prétentions de droit public de l'État d'origine en dehors des mécanismes du droit international privé. 
 
3.3 Il résulte de ce qui précède que l'arrêt attaqué est conforme au droit fédéral en tant qu'il retient que l'acquisition de bonne foi, par la défenderesse, d'un droit de gage sur les pièces d'or litigieuses repose sur un titre d'acquisition valable, de sorte que la Banque peut s'opposer à l'action en revendication de la demanderesse en invoquant un droit préférable. 
 
4. 
En définitive, il s'avère que la motivation subsidiaire de l'arrêt attaqué, selon laquelle même la reconnaissance du droit de propriété de la demanderesse sur les pièces en question ne pourrait conduire à l'admission de son action en revendication, dès lors que la défenderesse peut lui opposer un droit préférable acquis valablement, résiste à l'examen. L'arrêt attaqué ne viole ainsi pas le droit fédéral dans son résultat, si bien que le recours en réforme doit être rejeté, dans la mesure où il est recevable (cf. consid. 1.3 supra), indépendamment des griefs soulevés dans le recours de droit public. 
 
La demanderesse, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 156 al. 1 OJ), ainsi que les frais occasionnés à la défenderesse par la procédure de recours en réforme devant le Tribunal fédéral (art. 159 al. 1 et 2 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2. 
Sont mis à la charge de la demanderesse : 
 
2.1 un émolument judiciaire de 10'000 fr.; 
 
2.2 une indemnité de 12'500 fr. à verser à la défenderesse à titre de dépens. 
 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
Lausanne, le 8 avril 2005 
Au nom de la IIe Cour civile 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: