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[AZA 0/2] 
 
1A.30/2001 
 
Ie COUR DE DROIT PUBLIC 
********************************************** 
 
2 avril 2001 
 
Composition de la Cour: MM. les Juges Aemisegger, Président, 
Vice-président du Tribunal fédéral, Féraud et Mme le Juge suppléant Pont Veuthey. Greffier: M. Zimmermann. 
 
__________ 
 
Statuant sur le recours de droit administratif 
formé par 
K.________, représenté par Me François Roger Micheli, avocat à Genève, 
 
contre 
la décision d'extradition prise le 10 janvier 2001 par l'Office fédéral de la justice; 
(extradition au Royaume d'Espagne; art. 2 et 12 CEExtr. ; art. 2 et 35 EIMP; double incrimination; défauts graves de la procédure) 
 
 
Vu les pièces du dossier d'où ressortent 
les faits suivants: 
 
A.- Le 8 mai 2000, le bureau d'Interpol à Madrid a diffusé une demande d'arrestation en vue d'extradition visant le ressortissant néerlandais K.________, inculpé de soustraction de mineurs au sens des art. 223 et 226 du Code pénal espagnol (CPE), selon le mandat d'arrêt international décerné le 2 mai 2000 par le Juge d'instruction de Torremolinos. 
 
Le 21 septembre 2000, l'Office fédéral de la justice (ci-après: l'Office fédéral) a ordonné l'arrestation immédiate de K.________, intercepté le matin même à la douane de Bardonnex. 
 
Entendu le 21 septembre 2000 par le Juge d'instruction du canton de Genève, K.________ a reconnu être la personne recherchée; il s'est opposé à son extradition. 
 
Le 22 septembre 2000, l'Office fédéral a décerné un mandat d'arrêt extraditionnel contre K.________, placé en détention à la prison de Champ-Dollon. Ce mandat a été notifié le 26 septembre 2000 à K.________, qui a confirmé son refus d'être extradé. 
 
Le 20 octobre 2000, l'Ambassade du Royaume d'Espagne à Berne a présenté au Département fédéral de justice et police une demande formelle d'extradition fondée sur la Convention européenne d'extradition, conclue à Paris le 13 décembre 1957, entrée en vigueur le 20 mars 1967 pour la Suisse et le 5 août 1982 pour l'Espagne (CEExtr. ; RS 0.353. 1). Cette demande était présentée pour les besoins de la procédure ouverte par le Juge d'instruction de Torremolinos contre K.________, inculpé de contrainte et d'enlèvement de mineurs, infractions réprimées par les art. 172 et 223 CPE. Etaient joints à la demande une requête adressée par le Juge d'instruction au Ministère des affaires étrangères de l'Etat requérant; un mandat ("requisitoria") du 25 septembre 2000; la copie d'une ordonnance sur mesures provisionnelles rendue le 26 novembre 1998; la décision ("auto") du 25 septembre 2000, par laquelle le Juge d'instruction espagnol a ordonné l'arrestation de K.________; la copie de la requête adressée le 25 septembre 2000 par le Juge d'instruction au Bureau d'Interpol à Madrid, en vue de l'extradition de K.________; la traduction française des art. 172 et 223 CPE. Selon le mandat ("requisitoria") du 25 septembre 2000, K.________ avait vécu maritalement avec la ressortissante espagnole R.________. De cette relation étaient nées J.________, le 13 février 1994, et E.________, le 22 juin 1996. Le 21 août 1998, K.________ avait quitté le domicile de R.________ avec ses deux filles, pour ne pas reparaître. 
 
Par note verbale du 26 octobre 2000, l'Ambassade d'Espagne a remis à l'Office fédéral, à sa demande, une copie du mandat d'arrêt du 2 mai 2000. 
 
Le 8 novembre 2000, elle a remis à l'Office fédéral, à sa requête, une copie des dispositions espagnoles relatives à la prescription, ainsi qu'une traduction du mandat d'arrêt du 2 mai 2000. 
 
Par arrêt du 5 décembre 2000, la Chambre d'accusation du Tribunal fédéral a admis le recours formé par K.________ contre le rejet par l'Office fédéral de sa demande de libération provisoire. Elle a ordonné celle-ci moyennant le versement d'une caution de 1'000'000 de francs, le dépôt par K.________ de ses papiers d'identité et l'obligation pour lui de se soumettre à un contrôle de présence (procédure 8G.66/2000). 
 
Le 10 janvier 2001, l'Office fédéral a accordé l'extradition de K.________ à l'Espagne. Il a considéré, en bref, que l'exposé des faits joint à la demande serait complet et la condition de la double incrimination remplie. Les faits ne seraient pas prescrits en Espagne. La procédure dans l'Etat requérant serait conforme aux normes de la CEDH et ne présenterait pas, pour le surplus, de défauts graves. 
 
B.- Agissant par la voie du recours de droit administratif, K.________ demande principalement au Tribunal fédéral d'annuler la décision du 10 janvier 2001, subsidiairement de renvoyer la cause à l'Office fédéral pour nouvelle décision précisant les faits et dispositions pour lesquels l'extradition serait accordée. Il allègue que la condition de la double incrimination ne serait pas respectée et que la procédure dans l'Etat requérant présenterait des défauts graves au sens de l'art. 2 let. a et d de la loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale, du 20 mars 1981 (EIMP; RS 351. 1). 
 
L'Office fédéral conclut au rejet du recours, dans la mesure où il serait recevable. 
 
Invité à répliquer, le recourant a maintenu ses conclusions. 
 
C.- Le 29 mars 2001, le recourant a averti son mandataire qu'il avait décidé de quitter la Suisse. Il ne s'est pas présenté à la police de Gstaad pour le contrôle hebdomadaire de son séjour en Suisse. 
 
Considérant en droit : 
 
1.- Le fait que le recourant ait profité de sa libération provisoire pour se soustraire à la procédure d'extradition ne signifie pas pour autant que celle-ci aurait perdu son objet. En effet, l'Etat requérant n'a pas retiré sa demande et il existe un intérêt public à ce que soit tranché le point de savoir si, comme le soutient le recourant, des motifs s'opposent à son extradition (cf. consid. 1 non publié de l'ATF 109 Ib 317). 
 
2.- a) L'extradition entre la Suisse et l'Espagne est régie par la CEExtr. L'EIMP et son ordonnance d'exécution restent applicables aux questions qui ne sont réglées ni explicitement ni implicitement par la Convention, ou lorsque le droit autonome pose des conditions plus favorables pour l'octroi de l'extradition (ATF 122 II 140 consid. 2, 373 consid. 1a p. 375; 120 Ib 120 consid. 1a p. 122/123, 189 consid. 2b p. 191/192 et les arrêts cités), sous réserve des droits fondamentaux (ATF 123 II 595 consid. 7c p. 617). 
 
 
b) La décision de l'Office fédéral accordant l'extradition peut faire l'objet d'un recours de droit administratif au Tribunal fédéral en vertu de l'art. 55 al. 3 EIMP mis en relation avec l'art. 25 de la même loi (ATF 122 II 373 consid. 1b p. 375). Le recourant qui peut manifestement se prévaloir d'un intérêt digne de protection à obtenir l'annulation ou la modification de la décision attaquée a qualité pour agir au sens de l'art. 21 al. 3 EIMP (ATF 122 II 373 consid. 1b p. 375; 118 Ib 269 consid. 2d p. 275 et les arrêts cités). 
 
c) Les conclusions qui vont au-delà de l'annulation de la décision attaquée sont recevables (art. 25 al. 6 EIMP; art. 114 OJ; ATF 122 II 373 consid. 1c p. 375; 118 Ib 269 consid. 2e p. 275; 117 Ib 51 consid. 1b p. 56, et les arrêts cités). Le Tribunal fédéral examine librement dans quelle mesure la coopération internationale doit être prêtée; il statue avec une cognition pleine sur les griefs soulevés sans être cependant tenu, comme le serait une autorité de surveillance, de vérifier d'office la conformité de la décision attaquée à l'ensemble des dispositions applicables en la matière (ATF 123 II 134 consid. 1d p. 136/137; 199 Ib 56 consid. 1d p. 59). C'est en outre au juge du fond, et non au juge de l'extradition, qu'il appartient de se prononcer sur la culpabilité de la personne visée par la demande d'extradition (ATF 122 II 373 consid. 1c p. 375; 112 Ib 215 consid. 5b p. 220; 109 Ib 60 consid. 5a p. 63, et les arrêts cités). 
 
 
Il y a lieu d'entrer en matière. 
 
3.- Le recourant voit un défaut grave de procédure, au sens de l'art. 2 let. d EIMP, dans le fait que la demande ne respecterait pas, selon lui, les exigences de forme de l'art. 12 al. 2 let. a CEExtr. C'est sous l'angle de cette disposition que doit être examiné le grief. 
 
a) Lorsque, comme en l'espèce, la demande est présentée pour les besoins de l'instruction d'une cause pénale avant le jugement, la demande doit être accompagnée de l'original ou de l'expédition authentique d'un mandat d'arrêt ou de tout autre acte ayant la même force, délivré selon les formes prescrites par le droit de l'Etat requérant (art. 12 al. 2 let. a CEExtr. et 41 EIMP). Il n'y a cependant pas lieu d'être trop exigeant quant aux conditions formelles de la demande, les indications fournies à ce titre devant simplement suffire pour vérifier que la demande n'est pas d'emblée inadmissible (ATF 116 Ib 96 consid. 3a p. 101; 115 Ib 68 consid. 3b/aa p. 77). 
 
 
b) La communication diffusée par le truchement d'Interpol le 8 mai 2000 se réfère à un mandat d'arrêt décerné le 2 mai 2000 par le Juge d'instruction de Torremolinos. 
Cette pièce ne figurant pas parmi les annexes à la demande formelle du 20 octobre 2000, l'Etat requérant en a remis une copie le 26 octobre 2000, à la requête de l'Office fédéral. 
Le 8 novembre 2000, il en a remis une traduction. Ce document résume les faits reprochés au recourant, indique les dispositions applicables et la peine encourue. Il ne constitue cependant pas un mandat d'arrêt, mais uniquement une fiche de renseignements en vue d'extradition, ce qui n'était pas suffisant au regard de l'art. 12 al. 2 let. a CEExtr
 
Ce défaut a été réparé dans le cours ultérieur de la procédure. A la demande formelle du 20 octobre 2000 était joint un mandat ("requisitoria") du 25 septembre 2000. Cette pièce constitue un mandat d'arrêt, au sens de l'art. 512 du Code de procédure pénale espagnol ("Ley de enjuiciamiento criminal" - CPPE), disposition à laquelle elle se réfère. En droit espagnol, la détention préventive ("prision provisional") est régie par les art. 502 ss CPPE. Lorsque la personne recherchée est introuvable, un mandat ("requisitoria") est notifié aux juges d'instruction dans la juridiction desquels elle pourrait résider (art. 512 CPPE). Il s'agit là indubitablement d'un mandat au sens de l'art. 12 al. 2 let. a CEExtr
 
c) La même solution s'impose au regard de la décision ("auto") du 25 septembre 2000, jointe à la demande. 
Après un bref rappel des faits, le Juge d'instruction a considéré qu'il existerait des "indices raisonnables" que le recourant ait commis les infractions reprochées, de sorte qu'il convenait d'ordonner son arrestation pour les besoins de la procédure d'extradition. Cette décision doit être tenue au moins pour un acte équivalent à un mandat d'arrêt, au sens de l'art. 12 al. 2 let. a CEExtr. Sur le vu de cette pièce, il ne fait en effet guère de doute que le recourant, s'il avait pu être repéré sur le territoire espagnol avant de le quitter ou s'il y était retourné ultérieurement, aurait pu être placé en détention préventive ou en garde à vue. Pour la Suisse comme Etat requis, cela suffit pour admettre que la demande n'est pas abusive. 
 
Le recourant objecte à cela que la décision du 25 novembre 2000 ne serait pas conforme aux prescriptions du droit espagnol régissant le mandat d'arrêt. 
 
Les art. 824 ss CPPE régissent la procédure à suivre pour la présentation d'une demande d'extradition. Selon l'art. 825 CPPE, pour que l'extradition en vue de jugement puisse être demandée, une décision de mise en détention ("auto motivado de prision") est nécessaire. Le recourant soutient qu'à cet égard la décision du 25 novembre 2000 ne respecterait pas les conditions de forme posées par l'art. 504bis n° 2 CPPE pour la décision de mise en détention, faute de l'audience contradictoire préalable qu'exige cette norme. 
 
 
Selon l'art. 503 CPPE, la détention préventive peut notamment être ordonnée si un délit a été commis et s'il existe des éléments suffisants pour imputer celui-ci à la personne contre laquelle la détention préventive est prononcée. 
L'art. 504 al. 1 CPPE prévoit la possibilité d'ordonner la détention préventive lorsque ces conditions visées à l'art. 503 CPPE sont remplies et que, sans motif légitime, l'inculpé n'a pas répondu à la citation à comparaître devant le juge. Or, tel était le cas en l'espèce, le recourant ayant abandonné le territoire de l'Etat requérant avant son inculpation. 
Quant à l'art. 504bis n° 2 CPPE, invoqué par le recourant, il régit un stade ultérieur de la procédure. Il prévoit en effet qu'après que la personne détenue lui a été présentée et à l'issue de l'audience contradictoire, le juge décide de la levée de la détention provisoire ou de la prolongation de celle-ci. Cette disposition n'était pas applicable en l'espèce, puisque le recourant n'a jamais pu être déféré au juge. La décision du 25 novembre 2000 pouvait ainsi constituer le titre de détention auquel se réfère l'art. 825 CPPE. Au demeurant, la solution préconisée par le recourant aboutirait au résultat absurde qu'en l'absence de l'inculpé, le juge espagnol ne pourrait jamais émettre le mandat d'arrêt ou l'acte assimilé nécessaire à la procédure d'extradition régie par la CEExtr. 
 
4.- Selon le recourant, la condition de la double incrimination ne serait pas réalisée, tant au regard du droit espagnol que du droit suisse. 
 
a) Donnent lieu à extradition les faits réprimés selon le droit de l'Etat requis et de l'Etat requérant, frappés d'une peine privative de liberté d'un an au moins (art. 2 al. 1 CEExtr. et 35 al. 1 let. a EIMP). Pour que la condition de la double incrimination soit remplie sous cet aspect, il faut que l'état de fait exposé dans la demande corresponde aux éléments constitutifs objectifs d'une infraction réprimée par le droit suisse, à l'exclusion des conditions particulières en matière de culpabilité et de répression (ATF 124 II 184 consid. 4b p. 186-188; 122 II 422 consid. 2a p. 424; 118 Ib 448 consid. 3a p. 451; 117 Ib 64 consid. 5c p. 90; 116 Ib 89 consid. 3c/bb p. 94/95; 112 Ib 576 consid. 11 b/bb p. 594/ 595). Il n'est ainsi pas nécessaire que les faits incriminés revêtent, dans les deux législations concernées, la même qualification juridique, qu'ils soient soumis aux mêmes conditions de punissabilité ou passibles de peines équivalentes; il suffit qu'ils soient réprimés dans les deux Etats comme des délits donnant lieu ordinairement à la coopération internationale (ATF 124 II 184 consid. 4b/cc p. 188; 117 Ib 337 consid. 4a p. 342; 112 Ib 225 consid. 3c p. 230 et les arrêts cités). 
 
 
b) Il ressort clairement de la demande que le recourant est poursuivi en Espagne pour avoir emmené avec lui à l'étranger ses filles sans l'accord de leur mère, d'une part, et de ne pas les avoir restituées à celle-ci après que la garde lui en eut été confiée, d'autre part. De ce fait, le recourant serait passible des peines prévues par les art. 172 et 223ss CPE, ce qu'il conteste. 
 
aa) A teneur de l'art. 172 CPE réprimant la contrainte, celui qui, sans droit et en usant de violence, empêche une autre personne d'agir dans un sens que la loi n'interdit pas, ou le contraint à commettre des actes légaux ou illégaux dont elle ne veut pas, sera puni d'une peine de prison allant de six mois à trois ans ou d'une amende correspondante de six mois à deux ans, selon la gravité de la contrainte ou des moyens employés. Lorsque le but de la contrainte est d'empêcher l'exercice d'un droit fondamental, la peine la plus lourde sera prononcée, sauf si les mêmes faits sont punis plus sévèrement par une autre disposition de ce code. 
 
Se référant aux avis émis par l'Institut suisse de droit comparé et par José Manuel Gomez Benitez, Professeur de droit pénal à l'Université Carlos III de Madrid, le recourant soutient que les conditions d'application de l'art. 172 CPE ne seraient pas remplies. Il fait valoir, en bref, qu'il n'aurait pas fait usage de la force pour emmener ses filles avec lui et que l'art. 172 CPE ne serait pas, selon la jurisprudence espagnole, applicable au parent cotitulaire du droit de garde, ce qui exclurait, partant, le caractère illicite de l'acte reproché. 
 
Que le recourant ait agi sans violence à l'égard de ses filles n'est pas prouvé et n'a pas à l'être à ce stade de la procédure, car il s'agit d'une question relevant du fond. 
En outre, il ne ressort pas, de manière évidente, de l'art. 172 CPE que cette norme ne serait pas applicable à un parent empêchant ses enfants de voir l'autre parent, ou empêchant l'autre parent de voir leurs enfants, ou refusant de se soumettre à l'ordre de restituer les enfants à l'autre parent. 
La jurisprudence espagnole (du moins celle citée par le recourant) semble l'exclure, mais cette conclusion ne s'impose impérieusement au regard du texte légal. L'avis de l'Institut suisse de droit comparé, du 30 janvier 2001, plus nuancé que ce qu'en dit le recourant, parle à ce propos d'une "incertitude juridique". De toute manière, ce point de droit ressortit à la compétence du juge du fond et non du juge de l'extradition. 
 
Savoir si le recourant - qui n'est pas marié avec leur mère - est titulaire d'un droit de garde sur ses filles, selon le droit espagnol, n'est pas acquis, contrairement à ce que prétend le recourant et admet l'Office fédéral. Sans doute l'ordonnance du 26 novembre 1998, tranchant ce point en faveur de la mère est-elle postérieure aux faits commis le 21 août 1998. Le recourant ne peut cependant pas en déduire, comme il le fait, qu'il était cotitulaire du droit de garde sur ses filles à l'époque de leur enlèvement, ou qu'il était libre de les soustraire à leur mère en les emmenant à l'étranger. Quoi qu'il en soit, même si l'on admettait que les faits litigieux pourraient ne pas tomber pas sous le coup de l'art. 172 CPE, la condition de la double incrimination serait de toute manière remplie sous un autre aspect. 
 
bb) Aux termes de l'art. 223 CPE, celui qui a la charge d'un enfant mineur ou d'un incapable, et qui, sans justification, ne le présente pas à ses parents ou curateurs, qui le réclament, sera puni de six mois à deux ans d'emprisonnement, sous réserve que les faits constituent un délit plus grave. 
 
Le recourant soutient qu'un parent ne pourrait être l'auteur de cette infraction et que ferait défaut la mise en demeure requise par l'art. 223 CPE. Il se réfère à cet égard spécialement à l'avis du Professeur Gomez Benitez, du 31 janvier 2001. Le libellé de l'art. 223 CPE n'exclut pas, de manière évidente, que le parent puisse être assimilé à la personne qui à la charge de l'enfant, au sens de cette disposition. 
Si, comme le dit l'Institut suisse de droit comparé dans son avis du 30 janvier 2001, l'art. 223 CPE n'est pas clair sur ce point, on doit admettre que son application au parent n'est pas d'emblée exclue. Le recourant sera pour le surplus libre de faire valoir devant le juge du fond son argumentation tirée de la jurisprudence relative à l'art. 223 CPE, que l'autorité suisse n'est pas à même d'examiner en détail. 
 
c) Pour l'Office fédéral, les faits, transposés en droit suisse, pourraient tomber sous le coup de l'art. 220 CP. La condition de la double incrimination serait remplie sous cet aspect, ce que conteste le recourant. 
 
Celui qui aura soustrait ou refusé de remettre un mineur à la personne qui exerce l'autorité parentale ou la tutelle sera, sur plainte, puni de l'emprisonnement ou de l'amende (art. 220 CP). 
 
L'art. 220 CP protège le détenteur de l'autorité parentale (ATF 125 IV 14 consid. 2a p. 15; 118 IV 61 consid. 2a p. 63, et les arrêts cités). Pour que le délit soit réalisé, il faut un acte ou une omission qui empêche le détenteur de l'autorité parentale ou le tuteur de décider du sort du mineur, soit de son lieu de résidence, de son éducation et de ses conditions de vie (ATF 101 IV 303 consid. 2 p. 304). La volonté ou le désir du mineur n'est en principe pas déterminant, le bien protégé étant l'exercice de l'autorité parentale et non la liberté du mineur (ATF 101 IV 303 consid. 3 p. 305). Commet ce délit non seulement le conjoint qui emmène avec lui les enfants dont la garde a été confiée à l'autre conjoint (ATF 125 IV 14; 110 IV 35 consid. 1c p. 37; 98 IV 35), mais aussi celui des parents qui détient l'autorité parentale (ATF 95 IV 67). L'arrêt Haffner, invoqué par le recourant, n'a pas la portée que celui-ci lui prête. Si cet arrêt réserve au seul titulaire de l'autorité parentale ou tutélaire le droit de déposer plainte pour enlèvement de mineur au sens de l'art. 220 CP, c'est uniquement pour exclure la possibilité que la plainte soit déposée par une autorité administrative. Pour le surplus, l'arrêt confirme expressément que les parents sont habilités à déposer plainte en se fondant sur l'art. 220 CP (ATF 108 IV 22, 25). Lorsque le parent ne ramène pas à l'autre parent qui détient l'autorité parentale les enfants après des vacances passées à l'étranger, le délit est réputé commis en Suisse, où le résultat s'est produit (art. 7 al. 1 CP; ATF 125 IV 14). 
 
 
Sur le vu de cette jurisprudence, le parent qui aurait quitté la Suisse pour l'étranger, en emmenant ses enfants sans l'accord de son conjoint et en refusant de les lui remettre, pourrait s'exposer aux sanctions prévues par l'art. 220 CP. Il serait indifférent, à cet égard, que le parent enlevant les enfants détienne l'autorité parentale, conjointement avec l'autre parent avec lequel il est marié (cf. art. 297 al. 1 CC) ou non marié (cf. art. 298a CC), ou que l'autorité parentale soit attribuée au parent auquel les enfants ont été enlevés, notamment lorsque, comme en l'espèce, les parents ne sont pas mariés (cf. art. 298 al. 1 CC). 
 
La condition de la double incrimination étant réalisée au regard de l'art. 220 CP, il est superflu d'examiner ce qu'il en est sous l'angle des art. 181 et 183 ch. 2 CP, ou de clarifier sur quels faits et dispositions s'appuie la demande à ce propos. 
 
5.- De l'avis du recourant, la procédure ouverte en Espagne serait affectée d'un défaut grave au sens de l'art. 2 let. a EIMP, aux termes duquel la demande de coopération en matière pénale est irrecevable s'il y a lieu d'admettre que la procédure à l'étranger n'est pas conforme aux principes de procédure fixés par la CEDH ou par le Pacte ONU II. Le recourant, comme personne dont l'extradition est demandée, a qualité pour soulever ce grief (ATF 125 II 356 consid. 8b p. 365). 
 
 
a) L'art. 2 EIMP a pour but d'éviter que la Suisse ne prête son concours, par le biais de l'entraide judiciaire ou de l'extradition, à des procédures qui ne garantiraient pas à la personne poursuivie un standard de protection minimal correspondant à celui offert par le droit des Etats démocratiques, défini en particulier par la CEDH ou le Pacte ONU II, ou qui heurteraient des normes reconnues comme appartenant à l'ordre public international (ATF 126 II 324 consid. 4a p. 326; 125 II 356 consid. 8a p. 364; 123 II 161 consid. 6a p. 166/167, 511 consid. 5a p. 517, 595 consid. 5c p. 608; 122 II 140 consid. 5a p. 142). Dans le domaine de l'extradition régie par la CEExtr. , la jurisprudence a établi le principe que les garanties de procédure offertes par la CEDH et le Pacte ONU II appartiennent à l'ordre public international et que la Suisse contreviendrait elle-même à ses obligations internationales en extradant une personne à un Etat où il existe de sérieux motifs de penser qu'un risque de traitement contraire à la CEDH ou au Pacte ONU II menace la personne poursuivie (ATF 125 II 356 consid. 8a p. 364; 123 II 161 consid. 6a p. 166/167, 511 consid. 5a p. 517, et les arrêts cités). 
 
 
 
L'examen des conditions posées par l'art. 2 EIMP implique un jugement de valeur sur les affaires internes de l'Etat requérant, en particulier sur son régime politique, sur ses institutions, sur sa conception des droits fondamentaux et leur respect effectif, et sur l'indépendance et l'impartialité du pouvoir judiciaire (ATF 126 II 334 consid. 4a p. 326; 125 II 356 consid. 8a p. 364; 123 II 161 consid. 6b p. 167, 511 consid. 5b p. 517, et les arrêts cités). Le juge de la coopération doit faire preuve à cet égard d'une prudence particulière. 
Il ne suffit pas que la personne accusée dans le procès pénal ouvert dans l'Etat requérant se prétende menacée du fait d'une situation politico-juridique spéciale; il lui appartient de rendre vraisemblable l'existence d'un risque sérieux et objectif d'une grave violation des droits de l'homme dans l'Etat requérant, susceptible de la toucher de manière concrète (ATF 126 II 324 consid. 4a p. 326; 125 II 356 consid. 8a p. 364; 123 II 161 consid. 6b p. 167, 511 consid. 5b p. 517; 122 II 373 consid. 2a p. 377, et les arrêts cités). 
 
b) Sous l'angle de l'art. 2 let. a EIMP, le recourant expose que la procédure en Espagne ne respecterait pas le droit d'être jugé dans un délai raisonnable, qui constitue un aspect du procès équitable garanti par l'art. 6 par. 1 CEDH. La procédure espagnole ne serait pas davantage conforme à l'art. 5 al. 1 let. b, c et f CEDH. Dans sa réplique du 16 mars 2001, le recourant a précisé son grief, limité à l'art. 6 par. 1 CEDH, en faisant valoir que le système judiciaire espagnol serait excessivement lent, formaliste, bureaucratique, coûteux, complexe et inefficace. Il se réfère sur ce point notamment à des extraits du rapport spécial du Tribunal supérieur de justice pour l'Andalousie (dont dépend Torremolinos), Ceuta et Melila, au Livre blanc sur la justice, ainsi qu'à une intervention du Ministre de la justice devant une commission parlementaire. Ces documents mettent en lumière les difficultés du système judiciaire espagnol, liées notamment à la lenteur des procédures. Il s'agit là toutefois de constats globaux, qui soulignent aussi la nécessité de mettre en oeuvre des réformes, structurelles et organisationnelles, que le Gouvernement et le Parlement sont décidés à réaliser. 
Pour le surplus, le recourant ne prétend pas - à raison - que ces textes officiels seraient de nature à démontrer concrètement que la procédure ouverte contre lui dans l'Etat requérant ne respecterait pas les exigences de la CEDH. A cela s'ajoute que - à l'instar de ce qui prévaut entre les Etats parties simultanément à la CEEJ et à la CEDH (ATF 126 II 324 consid. 4e p. 328) - le respect de cette Convention par les Etats parties, comme en l'espèce, à la CEExtr. , doit être présumé. Hormis des allégations très générales, le recourant n'apporte pas d'éléments propres à renverser cette présomption. 
 
 
6.- Le recours doit ainsi être rejeté. Les frais en sont mis à la charge du recourant (art. 156 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 159 OJ). 
 
Par ces motifs, 
 
le Tribunal fédéral : 
 
1. Rejette le recours. 
 
2. Met un émolument judiciaire de 5000 fr. à la charge du recourant. 
 
3. Dit qu'il n'est pas alloué de dépens. 
 
4. Communique le présent arrêt en copie au mandataire du recourant et à l'Office fédéral de la justice (B 116561/01). 
___________ 
Lausanne, le 2 avril 2001 ZIR/col 
 
Au nom de la Ie Cour de droit public 
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE: 
Le Président, Le Greffier,