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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_157/2023  
 
 
Arrêt du 4 mai 2023  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, Denys et Muschietti. 
Greffier: M. Fragnière. 
 
Participants à la procédure 
A._________, 
représenté par Me Pascal Pétroz, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
1. Ministère public de la République et canton de Genève, 
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, 
2. Commission fédérale des maisons de jeu, 
Eigerplatz 1, 3003 Berne, 
intimés. 
 
Objet 
Infractions à l'art. 56 al. 1 let. c aLMJ, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision, du 1er décembre 2022 (P/25725/2019 AARP/375/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Par jugement du 28 octobre 2020, le Tribunal de police de la République et canton de Genève a reconnu A._________ coupable d'infractions à l'art. 130 al. 1 let. a de la loi fédérale du 29 septembre 2017 sur les jeux d'argent (LJAr; RS 935.51) et l'a condamné à une peine pécuniaire de 150 jours-amende, à 30 fr., avec sursis durant 2 ans, complémentaire à celle prononcée le 21 novembre 2019 par le Ministère public de la République et canton de Genève. Il l'a également condamné à une amende de 900 francs.  
 
A.b. Statuant par arrêt du 11 mars 2021 (AARP/87/2021), la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice de la République et canton de Genève a rejeté l'appel formé par A._________ contre le jugement du 28 octobre 2020, qu'elle a confirmé.  
 
A.c. Par arrêt du 5 octobre 2022 (6B_548/2021), le Tribunal fédéral a admis le recours formé par A._________ contre l'arrêt du 11 mars 2021, a annulé celui-ci et a renvoyé la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.  
Le Tribunal fédéral est entré en matière uniquement sur l'application, à titre de lex mitior, de l'art. 130 al. 1 let. a LJar. Il a été considéré à cet égard que, selon le raisonnement développé aux ATF 147 IV 471, cette disposition n'avait pas vocation à s'appliquer rétroactivement, en lieu et place de l'art. 56 al. 1 let. c de la loi fédérale du 18 décembre 1998 sur les jeux de hasard et les maisons de jeu (aLMJ; RS 935.52). La cause a dès lors été renvoyée à la cour cantonale afin que celle-ci soit examinée à l'aune de l'ancien droit.  
 
B.  
Statuant par arrêt du 1er décembre 2022, suite à l'arrêt de renvoi du 5 octobre 2022, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice genevoise a partiellement admis l'appel formé par A._________ contre le jugement 28 octobre 2020. Elle l'a réformé en ce sens que ce dernier était condamné pour infractions à l'art. 56 al. 1 let. c aLMJ à une amende de 4'000 francs. 
 
En substance, la cour cantonale a retenu les faits suivants. 
À Genève, dans trois établissements distincts et durant différentes périodes de 2014 à 2017, A._________ a installé et mis à disposition divers jeux de casino sous forme d'appareils électroniques, permettant ainsi à différents clients, en dehors d'une maison de jeu, de miser des sommes d'argent et de percevoir des gains en espèces, sous forme de boissons ou de lots matériels. Il s'est régulièrement rendu dans les établissements, où il avait installé ses machines à sous, pour percevoir son bénéfice basé sur une clé de répartition qu'il avait lui-même fixée. 
 
C.  
A._________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 1er décembre 2022. Il conclut, avec suite de frais et dépens, principalement à son acquittement et à la restitution de différents objets confisqués, ainsi qu'à la levée des séquestres pour un montant total de 1'219 francs. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recourant conteste sa condamnation pour infraction à l'art. 56 al. 1 let. c aLMJ. Il se prévaut à cet égard d'une erreur sur l'illicéité selon l'art. 21 1re phrase CP. 
 
1.1.  
 
1.1.1. Aux termes de l'art. 56 al. 1 let. c aLMJ, celui qui aura installé, en vue de les exploiter, des systèmes de jeux ou des appareils à sous servant au jeu de hasard qui n'ont pas fait l'objet d'un examen, d'une évaluation de la conformité ou d'une homologation sera puni des arrêts ou d'une amende de 500'000 fr. au plus.  
La loi fédérale du 22 mars 1974 sur le droit pénal administratif (DPA; RS 313.0) est applicable (art. 57 al. 1 aLMJ). Les dispositions générales du code pénal suisse sont applicables aux actes réprimés par la législation administrative fédérale, à moins que la présente loi ou une loi administrative spéciale n'en dispose autrement (art. 2 DPA). 
 
1.1.2. L'art. 61 al. 1 de l'ordonnance du 24 septembre 2004 sur les jeux de hasard et les maisons de jeu (aOLMJ; RS 935.521) pose l'obligation à toute personne qui entend mettre en circulation un appareil à sous servant à des jeux d'adresse ou de hasard (appareil à sous) de le présenter à la commission, avant sa mise en exploitation. La commission décide ensuite, sur la base des documents produits, si l'appareil à sous présenté sert à des jeux d'adresse ou à des jeux de hasard (art. 64 al. 1 aOLMJ). Elle communique ses décisions aux cantons et les publie dans la feuille fédérale (art. 64 al. 3 aOLMJ).  
Même en l'absence d'une décision de la commission qualifiant un appareil à sous de jeu de hasard, les éléments constitutifs de l'infraction à l'art. 56 al. 1 let. c aLMJ peuvent être réalisés (ATF 138 IV 106 consid. 5.3.2). 
 
1.2.  
 
1.2.1. Conformément à l'art. 21 CP, quiconque ne sait ni ne peut savoir au moment d'agir que son comportement est illicite n'agit pas de manière coupable. Le juge atténue la peine si l'erreur était évitable.  
L'erreur sur l'illicéité vise le cas où l'auteur agit en ayant connaissance de tous les éléments constitutifs de l'infraction, et donc avec intention, mais en croyant par erreur agir de façon licite (ATF 129 IV 238 consid. 3.1; cf. ATF 141 IV 336 consid. 2.4.3 et les réf. citées). Les conséquences pénales d'une erreur sur l'illicéité dépendent de son caractère évitable ou inévitable. L'auteur qui commet une erreur inévitable est non coupable et doit être acquitté (art. 21 1re phrase CP). Tel est le cas s'il a des raisons suffisantes de se croire en droit d'agir (ATF 128 IV 201 consid. 2). Une raison de se croire en droit d'agir est "suffisante" lorsqu'aucun reproche ne peut être adressé à l'auteur du fait de son erreur, parce qu'elle provient de circonstances qui auraient pu induire en erreur toute personne consciencieuse (ATF 128 IV 201 consid. 2; 98 IV 293 consid. 4a). En revanche, celui dont l'erreur sur l'illicéité est évitable commet une faute, mais sa culpabilité est diminuée. Il restera punissable, mais verra sa peine obligatoirement atténuée (art. 21 2e phrase CP). L'erreur sera notamment considérée comme évitable lorsque l'auteur avait ou aurait dû avoir des doutes quant à l'illicéité de son comportement (ATF 121 IV 109 consid. 5) ou s'il a négligé de s'informer suffisamment alors qu'il savait qu'une réglementation juridique existait (ATF 120 IV 208 consid. 5b). Savoir si une erreur était évitable ou non est une question de droit (cf. ATF 75 IV 150 consid. 3; arrêt 6B_428/2021 du 18 novembre 2021 consid. 2.1 et les réf. citées). La réglementation relative à l'erreur sur l'illicéité repose sur l'idée que le justiciable doit faire tout son possible pour connaître la loi et que son ignorance ne le protège que dans des cas exceptionnels (ATF 129 IV 238 consid. 3.1). 
 
1.2.2. Déterminer ce qu'une personne a su, voulu, envisagé ou accepté relève du contenu de la pensée, à savoir de faits "internes", qui, en tant que faits, lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'ils n'aient été retenus de manière arbitraire (ATF 141 IV 369 consid. 6; cf. ATF 142 IV 137 consid. 12).  
 
1.3. Le recourant soutient qu'il ne pouvait pas avoir conscience du caractère illicite de son comportement, lors même que la décision de la Commission fédérale des maisons de jeu (ci-après: "CFMJ") qualifiant l'appareil à sous "Stacker" de jeu de hasard n'a été rendue que le 14 octobre 2016, soit après le séquestre des machines litigieuses et l'ouverture de la procédure pénale. En outre, il indique avoir effectué toutes les vérifications qui s'imposaient, en consultant la loi et la liste des jeux de hasard disponible sur le site de la Confédération au moment de l'installation des machines. N'étant pas juriste, il avait alors constaté que les appareils en question ne figuraient pas sur la "liste des jeux qualifiés d'illicites" et qu'aucune décision de la CFMJ ne les qualifiait ainsi, de sorte qu'il était convaincu que les jeux proposés n'étaient pas interdits. N'ayant pas eu connaissance du caractère illicite de son comportement, il n'avait dès lors pas agi de manière coupable.  
 
1.4. D'emblée, il doit être relevé que le recourant ne conteste pas que les éléments objectifs de l'infraction à l'art. 56 al. 1 let. c aLMJ sont réalisés en l'espèce.  
En exploitant les appareils litigieux, qui n'avaient pas fait l'objet d'un examen, d'une évaluation de la conformité ou d'une homologation, son comportement réalise effectivement les conditions objectives de l'infraction à l'art. 56 al. 1 let. c aLMJ. Peu importe à cet égard que la décision de la CFMJ quant à la qualification de l'un des appareils à jeux ("Stacker") n'ait été rendue qu'après le prononcé des séquestres et l'ouverture de la procédure pénale (cf. supra consid. 1.1.2).  
 
1.5.  
 
1.5.1. Cela étant, sur la base des faits ressortant de l'arrêt attaqué, qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), le raisonnement de la cour cantonale ne prête pas le flanc à la critique.  
Il ressort en effet de l'arrêt attaqué, qui renvoie à celui du 11 mars 2021, que le recourant bénéficiait de solides connaissances et d'une importante expérience dans le domaine des appareils à jeux. De ses propres aveux, il savait que des appareils qu'il avait installés auprès de différents établissements n'étaient pas autorisés. Aussi, il avait dissimulé l'existence de jeux de casino aux personnes non initiées, en configurant certaines machines de manière à ce qu'il fallût cliquer sur "Music box" pour accéder aux jeux d'argent. Il avait persisté à installer des machines non autorisées dans un établissement qui faisait l'objet d'une procédure pénale ouverte en raison de la présence d'appareils installés par lui-même. À aucun moment, il n'avait entrepris des démarches auprès de la CFMJ (cf. arrêt attaqué, consid. 1.2.2 p. 6 s.). 
À l'instar du procédé mis en place pour dissimuler l'existence de jeux de casino, les aveux du recourant excluent toute erreur sur l'illicéité. Ce dernier savait que les machines qu'il avait installées n'étaient pas autorisées, respectivement qu'elles constituaient des appareils à sous servant à des jeux de hasard. 
Soutenir, dans ce contexte, que ses aveux n'impliquaient pas qu'il avait conscience du caractère illicite de son comportement relève d'une certaine témérité. Le recourant s'écarte ainsi de manière inadmissible de l'arrêt attaqué en alléguant qu'après avoir consulté une liste sur le site internet de la Confédération, il était convaincu que les appareils litigieux n'étaient pas interdits, sans toutefois critiquer la constatation cantonale selon laquelle il savait que certains jeux installés n'étaient pas autorisés. Son grief s'avère à cet égard irrecevable (art. 42 al. 2 LTF). 
 
1.5.2. Pour le reste, le raisonnement du recourant ne saurait être suivi.  
Disposant de bonnes connaissances et d'une riche expérience dans ce domaine, le recourant ne pouvait pas se limiter à la consultation d'une liste des jeux interdits publiée sur internet et inférer de l'absence de mention de certains jeux sur cette liste qu'ils n'étaient pas interdits. Ayant consulté la loi, il savait que l'exploitation des appareils à sous litigieux n'était autorisée qu'après leur examen, d'une évaluation de leur conformité ou de leur homologation (cf. art. 56 al. 1 let. c aLMJ). Il n'ignorait pas que la loi posait l'obligation à toute personne qui entendait mettre en circulation un appareil à sous servant à des jeux d'adresse ou de hasard de le présenter à la CFMJ avant sa mise en exploitation (cf. art. 61 al. 1 aOLMJ). Dans ce contexte, il devait à tout le moins s'enquérir auprès de la CFMJ de la qualification des appareils à sous qu'il envisageait d'exploiter. Faute de l'avoir fait, le recourant ne peut se prévaloir d'une erreur sur l'illicéité selon l'art. 21 1re phrase CP. 
Mal fondé, son grief doit être rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. 
 
1.6. En tant qu'il se prévaut au surplus de l'absence d'intention, le recourant ne développe aucun grief topique spécifiquement destiné à établir en quoi la motivation cantonale violerait le droit sur ce point, en particulier en ce qui concerne l'application de l'art. 12 CP.  
 
1.7. En définitive, il apparaît qu'à différentes périodes de 2014 à 2017, à Genève, le recourant a installé dans trois établissements distincts, en vue de les exploiter, des appareils à sous servant à des jeux de hasard qui n'avaient pas fait l'objet d'un examen, d'une évaluation de la conformité ou d'une homologation. Conforme au droit fédéral, sa condamnation pour infraction à l'art. 56 al. 1 let. c aLMJ doit dès lors être confirmée.  
 
2.  
Le recourant ne consacre enfin aucune critique quant à la peine qui lui a été infligée. 
 
3.  
S'agissant des conclusions tendant à la restitution des objets confisqués et à la levée des séquestres, le recourant n'indique pas en quoi la cour cantonale aurait violé le droit. La cause ne sera pas revue sous cet angle (art. 42 al. 2 LTF). 
 
4.  
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recourant, qui succombe, supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision. 
 
 
Lausanne, le 4 mai 2023 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
Le Greffier : Fragnière