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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_557/2021  
 
 
Arrêt du 7 juin 2022  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales 
Hohl, Présidente, Niquille et May Canellas. 
Greffière: Mme Raetz. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me David Parisod, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
B.________, 
représentée par Me Patrick Spinedi, avocat, 
intimée, 
 
Caisse cantonale de chômage, 
Division juridique, rue Caroline 9bis, 1003 Lausanne. 
 
Objet 
contrat de travail; indemnité de départ, 
 
recours contre l'arrêt rendu le 23 septembre 2021 par la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud (PT16.056827-210006 (210417); 460). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. B.________ a notamment employé A.________, née en 1966, par sa succursale H.________. L'employée a débuté son activité en 1994 comme xxx. Dès 1997, elle a occupé des fonctions-clé. Tout au long de son activité, elle a oeuvré dans le cadre de la U.________.  
 
A.b. Les relations de travail des parties ont été soumises dès 1995 à la Convention collective de travail régissant les conditions de travail du personnel de B.________. Elle a ensuite été remplacée par trois autres conventions collectives (ci-après: CCT 2004, CCT 2009, CCT 2013). La CCT 2013 constitue la dernière version de la convention applicable au litige.  
L'art. 55 CCT 2013, intitulé " indemnité de départ ", prévoit ce qui suit: 
 
" 55.1 Le droit à l'indemnité de départ en cas de licenciement commence à 40 ans. Le montant de l'indemnité de départ correspond à 6 mois de salaire pour 10 ans de service ininterrompus. S'y ajoute un mois de salaire pour chaque année de service en plus; l'indemnité totale ne peut excéder 12 mois de salaire. 
 
55.4 Si le licenciement est imputable à une faute grave de la personne ou s'il est prononcé avec effet immédiat, l'indemnité de départ n'est pas due. " 
 
L'indemnité de départ était précédemment réglementée de la manière suivante dans la CCT 2004: " si le licenciement est principalement imputable à la personne concernée ou s'il est prononcé avec effet immédiat, l'indemnité de départ n'est pas due (...) ". Lors de la négociation de la CCT 2009, les parties signataires ont estimé nécessaire de préciser la notion de " principalement imputable ": il y avait désormais une gradation entre la faute grave et le licenciement immédiat pour justes motifs, les deux motifs ne donnant pas droit à l'indemnité de départ. La CCT 2009 a ainsi été modifiée à cet égard, ce qui a été repris tel quel à l'art. 55.4 CCT 2013 précité. 
 
A.c. C.________ est entrée au service de l'employeuse en 1985. Durant de nombreuses années, elle a été louée pour ses talents d'xxx et son sens de l'humour. A la suite du décès de son fils, elle s'est renfermée sur elle-même. Dès 2013, elle a dû en outre lutter contre un cancer. Sa maladie n'était initialement pas connue de ses collègues.  
 
A.d. Le climat de travail au sein de l'employeuse s'est dégradé en 2014. Il y avait des craintes parmi l'équipe que la U.________ ne ferme. Des restructurations ont provoqué des difficultés ayant contribué à générer une forme d'anxiété. Le climat de travail s'est également dégradé en raison de tensions entre les membres de l'équipe. Les dissensions ont aussi été causées par la personnalité de C.________, sa souffrance, ses absences, sa distanciation de l'équipe et son habitude de ne jamais dire bonjour.  
 
A.e. En 2014, C.________ a accusé de mobbing deux employés, D.________ et E.________. Pour faire suite à la plainte déposée, l'employeuse a confié à F.________, consultante juridique indépendante, le soin de mener une enquête externe.  
F.________ a procédé à l'audition de la totalité des collaborateurs d'U.________, soit 16 personnes. Dans son rapport du 18 juillet 2014, elle a déclaré que si la souffrance de la plaignante était bien réelle, les actes de D.________ et E.________ à son égard n'étaient pas pour autant constitutifs de mobbing. A.________ n'a fait l'objet d'aucune accusation dans le cadre de cette enquête. 
 
A.f. A la suite de nouveaux événements dont s'est plainte C.________, l'employeuse a imparti un délai de 48 heures aux collaborateurs pour se dénoncer de leur plein gré. Ils ont été informés qu'à l'issue de ce délai et en l'absence de démarche, une enquête serait diligentée, avec pour objectif de découvrir le (s) auteur (es) de ces malveillances. Des sanctions seraient prononcées à leur égard.  
Personne ne s'étant annoncé dans le délai imparti, un enquêteur externe, G.________, ancien magistrat judiciaire vaudois, a été mandaté par l'employeuse. Il était chargé d'établir les faits s'étant déroulés du 1er septembre 2014 au 27 mai 2015 et d'en découvrir le ou les auteurs. L'enquête a consisté presque exclusivement en l'audition de tous les collaborateurs d'U.________. 
Dans son rapport du 22 octobre 2015, G.________ a relevé que A.________, par ses gestes ou ses remarques méprisants et répétés directement ou indirectement à l'endroit de C.________ avait " non seulement contribué sérieusement à déstabiliser cette dernière, voire en incitant ", de manière que l'on pouvait qualifier de sournoise, d'autres collaborateurs à en faire de même. Bien qu'elle le contestait formellement, A.________ avait éteint ou modifié à plusieurs reprises l'ordinateur lorsque C.________ la suivait.... On ne pouvait exclure en outre qu'elle ait participé au dépôt sur le bureau de C.________, sinon de vaisselle sale, du moins des affichettes relatives à la médiation, voire qu'elle ait encouragé cette pratique. En conclusion, les deux personnes principalement impliquées dans les actes de mobbing étaient A.________ et D.________. 
 
A.g. L'employeuse a pris connaissance de ce rapport le 26 octobre 2015. Elle a fait valoir qu'elle avait pris la décision de licencier avec effet immédiat A.________ et D.________, et de prononcer un avertissement à l'égard de quatre autres collaborateurs; elle avait également décidé de les convoquer individuellement dans la matinée du 28 octobre 2015.  
A.________ a travaillé le 26 octobre 2015 selon l'horaire prévu et a été en incapacité de travail à 100 % dès le lendemain. 
Le 27 octobre 2015, au moment de préparer les convocations, l'employeuse a été informée de l'arrêt de travail de A.________. Sa convocation pour le lendemain n'a pas été possible. 
Par courrier recommandé du 28 octobre 2015, adressé par porteur à A.________, l'employeuse l'a licenciée avec effet immédiat, en motivant cette décision par les actes de mobbing commis à l'encontre de C.________, tels que mis en évidence par l'enquêteur. 
 
A.h. Le 3 novembre 2015, C.________ a repris le travail à 80 %, après plus de cinq mois d'incapacité de travail. Si les malveillances ont pris fin, elle se sentait toujours très angoissée.  
 
B.  
 
B.a. Par demande déposée le 22 décembre 2016 auprès de la Chambre patrimoniale cantonale vaudoise, A.________ a conclu en substance, au dernier état de ses conclusions, à ce que l'employeuse lui doive immédiat paiement, avec intérêts, de la somme brute de 188'653 fr. 20 (comprenant le montant de 113'040 fr. 60 à titre d'indemnité de départ; art. 105 al. 2 LTF), sous déduction des charges sociales usuelles, ainsi que de la somme nette de 56'520 fr. 30.  
Le 27 juillet 2017, la Caisse cantonale de chômage a introduit une demande auprès de la même autorité en vue d'obtenir le paiement d'un montant correspondant aux indemnités de chômage versées à A.________ pour la période du 29 octobre 2015 au 31 octobre 2016. 
Par jugement du 16 septembre 2020, la Chambre patrimoniale cantonale a, en substance, condamné l'employeuse à verser à A.________ les sommes suivantes, avec intérêts: 26'747 fr. 45 à titre de salaire durant le délai de congé, sous déduction des charges sociales; 8'821 fr. 70 à titre de 13ème salaire pour les années 2015 et 2016, sous déduction des charges sociales; 28'260 fr. 15 à titre d'indemnité pour résiliation immédiate injustifiée; 113'040 fr. 60 à titre d'indemnité brute de départ (ch. I). Elle a encore condamné l'employeuse à payer à la Caisse cantonale de chômage la somme de 31'760 fr. 15 avec intérêts (ch. II). Elle a aussi condamné l'employeuse à verser à A.________ la somme de 26'460 fr. à titre de dépens (ch. VII). Elle a considéré, d'une part, que le licenciement immédiat était injustifié, et d'autre part, que A.________ avait droit à l'indemnité de départ prévue par la CCT. 
 
B.b. Par arrêt du 23 septembre 2021, la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal vaudois a partiellement admis l'appel formé par l'employeuse, et a rejeté l'appel joint déposé par A.________. Elle a réformé le jugement entrepris, notamment en ce sens que le point concernant le paiement d'une indemnité de départ, ainsi que celui ayant trait au paiement de dépens, étaient supprimés (ch. III § I et VII). La cour cantonale a retenu que A.________ avait commis une faute grave, ce qui excluait le paiement de l'indemnité de départ.  
 
C.  
A.________ (ci-après: la recourante) a exercé un recours en matière civile au Tribunal fédéral à l'encontre de cet arrêt. Elle a conclu, en substance, à sa réforme en ce sens que l'appel principal soit rejeté et le ch. III du dispositif supprimé. A titre subsidiaire, elle a conclu à sa réforme en ce sens que le ch. III contienne, au point VII, la condamnation de l'employeuse à lui verser la somme de 20'000 fr. à titre de dépens. 
L'employeuse (ci-après: l'intimée) a conclu au rejet du recours, tandis que la Caisse cantonale de chômage a renoncé à se déterminer. 
La cour cantonale s'est référée aux considérants de son arrêt. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont réalisées sur le principe, notamment celles afférentes à la valeur litigieuse minimale de 15'000 fr. (art. 74 al. 1 let. a LTF) et au délai de recours (art. 45 al. 1 et 100 al. 1 LTF). 
 
2.  
 
2.1. Le recours peut être formé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Eu égard, toutefois, à l'exigence de motivation qu'impose l'art. 42 al. 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), il n'examine que les griefs invoqués, sauf en cas d'erreurs juridiques manifestes (ATF 140 III 115 consid. 2).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut rectifier ou compléter les constatations de l'autorité précédente que si elles sont manifestement inexactes ou découlent d'une violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). " Manifestement inexactes " signifie ici " arbitraires " (ATF 140 III 115 consid. 2; 135 III 397 consid. 1.5). Encore faut-il que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi les conditions précitées seraient réalisées. Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). 
En matière d'appréciation des preuves, il y a arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables. L'arbitraire ne résulte pas du seul fait qu'une autre solution serait envisageable, voire préférable (ATF 136 III 552 consid. 4.2). 
 
3.  
Déjà au stade de l'appel, il n'était plus contesté que le licenciement immédiat n'était pas justifié. 
En revanche, demeure litigieuse la question de l'indemnité de départ. La recourante conteste également la répartition des dépens en première instance. 
 
4.  
La recourante dénonce une interprétation, puis une application erronée de l'art. 55 CCT 2013, ayant trait à l'indemnité de départ. Elle soutient qu'une telle indemnité lui est due. 
 
4.1. Sauf disposition contraire de la convention collective de travail, les clauses relatives à la conclusion, au contenu et à l'extinction des contrats individuels de travail ont, pour la durée de la convention, un effet direct et impératif envers les employeurs et travailleurs qu'elles lient (art. 357 al. 1 CO). Elles sont appelées clauses normatives. Elles doivent être interprétées de la même manière qu'une loi (ATF 136 III 283 consid. 2.3.1 et les références citées).  
D'après la jurisprudence, la loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). On peut cependant s'écarter de cette interprétation s'il y a des raisons sérieuses de penser que le texte de la loi ne reflète pas la volonté réelle du législateur; de tels motifs peuvent découler des travaux préparatoires, du but et du sens de la disposition, ainsi que de la systématique de la loi. Lorsque plusieurs interprétations sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires, du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose ou encore de sa relation avec d'autres dispositions; le Tribunal fédéral ne privilégie aucune méthode d'interprétation, mais s'inspire d'un pluralisme pragmatique. Dans le domaine de l'interprétation des dispositions normatives d'une convention collective, il ne faut pas exagérer la distinction entre les règles sur l'interprétation des lois et les règles sur l'interprétation des contrats; la volonté des cocontractants et ce que l'on peut comprendre selon le principe de la bonne foi constituent également des moyens d'interprétation (ATF 136 III 283 consid. 2.3.1 et les références citées). 
 
4.2. L'intimée fait valoir que la recourante n'a pas invoqué de violation du droit fédéral. Toutefois, comme on vient de le voir, les clauses normatives d'une CCT doivent être interprétées de la même manière qu'une loi, dont l'interprétation est régie par l'art. 1 CC, respectivement par les éléments développés à cet égard par la doctrine et la jurisprudence (arrêt 4A_68/2018 du 13 novembre 2018 consid. 2). Ainsi, dans la mesure où une partie se plaint d'une interprétation erronée de dispositions normatives d'une CCT (indépendamment d'une déclaration d'extension du champ d'application de la CCT), elle se plaint de l'application de l'art. 1 CC et, partant, du droit fédéral au sens de l'art. 95 let. a LTF (arrêt 4A_68/2018 précité consid. 2). Tel étant le cas en l'espèce, il y a lieu d'entrer en matière sur ce grief.  
 
4.3. La cour cantonale a retenu que l'art. 47.4 CCT 2004 prévoyait que l'indemnité de départ n'était pas due en cas de licenciement " principalement imputable " à l'employé ou prononcé avec effet immédiat. Lors de l'adoption de la CCT 2009, le texte avait été modifié en ce sens que le licenciement ne devait pas être " imputable à une faute grave " de la personne congédiée [ou prononcé avec effet immédiat]. Il avait été maintenu ainsi dans la version de 2013. Ainsi, il était évident que l'art. 55.4 CCT 2013 distinguait le licenciement prononcé pour faute grave du congé immédiat. Il en découlait une gradation entre la faute grave et le juste motif de licenciement immédiat. Ainsi, un motif ne justifiant certes pas un licenciement immédiat pouvait néanmoins apparaître suffisamment grave pour écarter tout droit à une indemnité de départ. La cour cantonale a ensuite interprété la notion de faute grave. Elle s'est référée à la distinction entre faute grave, moyenne et légère, pertinente au regard de l'étendue de la réparation du préjudice en cas de violation de la diligence incombant au travailleur au sens de l'art. 321e al. 2 CO. Elle a ajouté qu'il découlait du devoir de diligence et de fidélité inscrit à l'art. 321a CO que l'employeur pouvait légitimement s'attendre à ce que ses employés adoptent un comportement correct envers leurs collègues et qu'ils respectent leur personnalité.  
La cour cantonale a ensuite retenu qu'en l'espèce, le licenciement immédiat n'était pas justifié, de sorte qu'il y avait lieu de se demander si le comportement de l'employée ayant fondé le licenciement était constitutif d'une faute grave. Elle a relevé que l'employée avait eu un comportement hautain et dédaigneux à l'endroit de l'équipe en général et avait tenu des propos désobligeants et vexatoires à l'égard de C.________ en particulier. Alors qu'une première enquête avait été diligentée en 2014 dans le cadre de dissensions entre C.________ et deux autres collègues, l'employée ne s'était pas privée, par la suite, de faire des remarques déplacées et des insinuations malveillantes, démontrant une absence totale de volonté de rétablir un climat sain et serein au sein de l'équipe, mais au contraire, d'entretenir le conflit et l'état d'esprit antérieur. Or, on pouvait attendre d'une collaboratrice avec autant d'ancienneté au sein de l'entreprise et qui occupait une position importante, voire dominante, qu'elle adopte un comportement exemplaire. Pareille attitude était d'autant moins compréhensible que l'employée avait bénéficié des mesures mises en place à la suite de l'enquête de 2014 et que les règles collectives du travail avaient été rappelées à tous à cette occasion. L'employée, qui avait bel et bien saisi le sens et le but de l'enquête précitée, avait fait fi du rappel à l'ordre adressé à l'équipe à cette occasion et s'était même moquée des mesures prises par différentes insinuations. Ainsi, en tenant de manière intentionnelle des propos désobligeants et vexatoires, en faisant des remarques dénigrantes et cyniques ou encore des gestes suggestifs de dégoût à l'endroit de C.________, même si ce n'était qu'en rapport avec l'odeur de tabac, alors que son employeuse avait marqué sa volonté d'apaiser les choses et de rétablir une ambiance saine et respectueuse au sein de l'équipe, l'employée avait gravement violé son devoir de diligence. Elle devait comprendre que son comportement n'était pas tolérable. Son attitude était objectivement et subjectivement inexcusable et relevait d'une faute grave, excluant le paiement d'une indemnité de départ au sens de l'art. 55.4 CCT 2013. Il convenait également de tenir compte du but visé par le paiement d'une telle indemnité, à savoir compenser les conséquences de la perte d'un emploi, ce qui ne se justifiait plus lorsque le comportement de l'employé était à l'origine de son licenciement. 
 
5.  
 
5.1. La recourante s'en prend d'abord à l'interprétation de l'art. 55 CCT opérée par les juges cantonaux.  
Elle allègue qu'en optant pour le changement de formulation qui figure à l'art. 55.4 CCT 2009 et 2013, les signataires de la CCT ont voulu limiter les cas dans lesquels un employé ne pouvait bénéficier de son indemnité de départ. C'était ainsi uniquement dans des cas clairement graves, soit exceptionnels, qu'une indemnité n'était pas due. Selon la recourante, l'interprétation de cette clause doit conduire à retenir que la notion de faute grave se confond en très grande partie avec les justes motifs pouvant entraîner un licenciement immédiat prévus à l'art. 337 CO. En outre, elle critique l'analogie avec l'art. 321e CO s'agissant des notions de faute grave, moyenne et légère. Elle fait encore valoir que le texte de l'art. 55.4 CCT 2013 ne renvoie en rien à une éventuelle violation du devoir de diligence et de fidélité prévu à l'art. 321a CO, ce d'autant plus que toute violation du devoir précité n'implique pas forcément une faute grave de l'employé. Enfin, elle soutient que l'analyse de la cour cantonale est lacunaire s'agissant du but de cette indemnité. 
 
5.2. Force est de constater que la recourante se limite à opposer sa propre interprétation de l'art. 55.4 CCT 2013 à celle de la cour cantonale, sans démontrer que l'interprétation de cette dernière violerait le droit fédéral. En particulier, l'instance précédente était fondée à retenir, en se basant sur la modification du texte de la CCT, que l'art. 55.4 CCT 2013 distinguait clairement le licenciement pour faute grave du licenciement immédiat, et opérait une gradation entre ces deux motifs. On ne voit pas pour quelle raison la notion de " faute grave " aurait été introduite si elle devait se confondre avec celle des " justes motifs " justifiant un licenciement immédiat (cf. art. 337 CO).  
Pour le reste, la recourante ne parvient pas à faire apparaître la distinction entre faute grave, moyenne et légère, expliquée par la cour cantonale, comme critiquable. Ensuite, même si le texte de la CCT ne renvoie pas expressément au devoir de diligence et de fidélité de l'employé prévu à l'art. 321a CO, on ne saurait reprocher à la cour cantonale de s'y être référée, puisqu'il constitue l'un des devoirs centraux de tout employé. La recourante ne peut en aucun cas être suivie lorsqu'elle soutient que la violation de ce devoir ne justifie pas à elle seule l'application de l'art. 55.4 CCT 2013. Par ailleurs, toute violation du devoir de diligence n'implique effectivement pas forcément une faute grave de l'employé. Toutefois, selon la première hypothèse de l'art. 55.4 CCT 2013, seules les fautes graves sont sanctionnées. 
Enfin, si cette indemnité a certes pour condition l'accomplissement de dix années de services ininterrompus et l'atteinte de l'âge de 40 ans (art. 55.1 CCT 2013), les juges cantonaux n'ont pas erré en considérant qu'elle avait pour but de compenser la perte d'un emploi pour les employés remplissant ces conditions. Même si l'on devait admettre qu'elle a également pour objectif de valoriser la fidélité d'un employé, il n'en demeure pas moins que ce dernier n'y a pas droit lorsqu'il a commis une faute grave. Ainsi, dès lors que la cour cantonale a retenu une telle faute, les faits reprochés à la recourante, même s'ils n'ont duré que " quelques mois " selon ses propos, pouvaient la priver de cette indemnité alors même qu'elle avait travaillé plus de vingt ans pour l'employeuse. 
 
6.  
 
6.1. Ensuite, la recourante allègue que les juges cantonaux ont considéré de manière erronée et contradictoire qu'elle aurait adopté une attitude relevant d'une faute grave au sens de l'art. 55.4 CCT 2013.  
A cet égard, elle soutient qu'ils ont retenu à tort, notamment, qu'elle aurait démontré une volonté d'entretenir le conflit malgré la prétendue volonté de l'employeuse de rétablir une ambiance saine. Elle leur fait grief de lui avoir reproché d'avoir commis des faits qu'ils avaient écartés précédemment. 
La recourante se prévaut encore du licenciement immédiat injustifié prononcé par l'intimée. Cette dernière ne lui avait pas non plus donné l'occasion de s'exprimer sur le rapport de l'enquêteur. Si la recourante avait pu se déterminer à cet égard, il n'était pas exclu que l'intimée aurait prononcé seulement un avertissement. Dans ces circonstances, on ne pouvait considérer qu'elle avait violé son devoir de diligence. 
 
6.2. Dans la première partie de son argumentation, la recourante critique dans une large mesure les faits constatés par la cour cantonale. Or, le Tribunal fédéral ne peut les revoir que s'ils se révèlent arbitraires. La recourante n'invoque toutefois pas le grief de l'arbitraire, et ne parvient d'ailleurs pas à démontrer un quelconque arbitraire dans les constatations opérées par la cour cantonale. En particulier, son argument selon lequel il aurait été établi qu'elle " n'était en rien responsable " du climat de travail globalement délétère au sein de l'intimée est purement appellatoire. A cet égard, même s'il a été établi que le climat de travail s'était dégradé en 2014 pour différentes raisons, la cour cantonale a observé, sans arbitraire, que l'employée avait démontré une volonté d'entretenir le conflit et l'état d'esprit antérieur.  
Dans la seconde partie de son argumentation, la recourante revient sur son licenciement immédiat injustifié. Or, ce point a déjà été pris en compte en lien avec les conséquences d'un tel licenciement. En particulier, une indemnité pour licenciement immédiat injustifié lui a été allouée. De plus, pour déterminer la quotité de cette indemnité, les juges précédents ont pris en considération le fait que l'employeuse n'avait pas entendu l'employée avant de prononcer la résiliation et ne lui avait pas donné l'opportunité de se déterminer sur les conclusions du rapport d'enquête de 2015. Lorsque la recourante allègue qu'un simple avertissement aurait pu être prononcé, elle perd de vue que les juges précédents ont retenu que son comportement aurait pu fonder un congé ordinaire, ce que la recourante ne conteste pas de manière suffisante. En outre, la recourante fonde son argumentation sur des hypothèses, parfois contradictoires. En particulier, elle soutient qu'elle aurait manifestement pris en considération cet avertissement, avant de relever qu'il était impossible de déterminer quelle aurait été sa propre position dans le cas d'un avertissement. Quoi qu'il en soit, la cour cantonale a retenu sans arbitraire que les règles collectives du travail avaient été rappelées à toute l'équipe à l'issue de la première enquête, que la recourante avait bel et bien saisi le sens et le but de cette enquête, mais qu'elle avait fait fi du rappel à l'ordre adressé à l'équipe et s'était même moquée ouvertement des mesures prises par l'employeuse. 
Ainsi, il ressort des faits précités retenus par la cour cantonale que le comportement de la recourante est inexcusable et choquant, ce d'autant plus au vu des démarches conséquentes entreprises par l'employeuse pour rétablir une ambiance saine - soit la mise en oeuvre de la première enquête - et de la position dominante occupée par la recourante au sein de l'entreprise. Dès lors, en retenant que le comportement de la recourante relevait d'une faute grave au sens de l'art. 55.4 CCT 2013, excluant donc l'indemnité prévue, l'appréciation de la cour cantonale n'apparaît pas critiquable. 
 
7.  
Enfin, la recourante dénonce une violation de l'art. 106 al. 1 et 2 CPC, dans la mesure où les juges cantonaux ont décidé de compenser les dépens qui lui ont été alloués en première instance. Elle fait valoir qu'elle a eu gain de cause sur le principe de la contestation de son licenciement immédiat et sur les conséquences qui y étaient rattachées. 
 
7.1. Selon l'art. 106 al. 1, première phrase, CPC, les frais sont mis à la charge de la partie succombante. L'art. 106 al. 2 CPC prévoit que lorsqu'aucune des parties n'obtient entièrement gain de cause, les frais sont répartis selon le sort de la cause.  
Il résulte des termes " sort de la cause " utilisés à l'art. 106 al. 2 CPC que, pour la répartition des frais et dépens, le juge peut notamment prendre en considération l'importance de chaque conclusion dans le litige (arrêt 4A_207/2015 du 2 septembre 2015 consid. 3.1). 
 
7.2. S'il apparaît certes que la recourante a eu gain de cause s'agissant du licenciement immédiat et de ses conséquences, tel n'est pas le cas concernant la question de l'indemnité de départ. Or, au vu de la valeur litigieuse des différents postes invoqués en première instance, notamment du montant important de 113'040 fr. 60 au titre de cette indemnité de départ, il n'apparaît pas que la cour cantonale, en compensant les dépens de la procédure de première instance, ait abusé de son large pouvoir d'appréciation en la matière (ATF 139 III 358 consid. 3).  
 
8.  
En définitive, le recours doit être rejeté. 
La recourante, qui succombe, prendra en charge les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Elle versera en outre une indemnité de dépens à l'intimée (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 6'000 fr. à titre de dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Caisse cantonale de chômage et à la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 7 juin 2022 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Hohl 
 
La Greffière : Raetz