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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
2P.172/2001 
 
Arrêt du 16 avril 2002 
IIe Cour de droit public 
 
Les juges fédéraux Betschart, juge présidant, 
Hungerbühler, Müller, Yersin et Merkli, 
greffière Dupraz. 
 
V.________, F.________, et P.________, recourants, 
tous les trois représentés par Me Philippe Conod, avocat, Galerie Saint-François A, case postale 3473, 
1002 Lausanne, 
 
contre 
 
Conseil d'Etat du canton de Vaud, Château cantonal, 
1014 Lausanne. 
 
art. 27 Cst.: règlement sur la lutte contre l'alcoolisme 
 
(recours de droit public contre le règlement du Conseil d'Etat du canton de Vaud du 14 mai 2001) 
 
Faits: 
A. 
Se fondant sur différentes dispositions de la loi vaudoise du 29 mai 1985 sur la santé publique (ci-après: la loi sur la santé publique), le Conseil d'Etat du canton de Vaud (ci-après: le Conseil d'Etat) a édicté, le 20 août 1986, un règlement sur la lutte contre l'alcoolisme (ci-après: le Règlement). Le 14 mai 2001, le Conseil d'Etat a édicté un règlement modifiant le Règlement (ci-après: la Novelle). 
L'article premier de la Novelle dispose: 
Le règlement du 20 août 1986 sur la lutte contre l'alcoolisme est modifié comme il suit: 
Organisation Article premier. - Le Département de la santé et de l'action sociale (ci- après: le département) est chargé de l'application des dispositions de la loi du 29 mai 1985 sur la santé publique (LSP) relatives à la lutte contre l'alcoolisme. 
Il exerce ses attributions par l'intermédiaire, d'une part, de l'Unité de médecine du trafic (UMT) de l'Institut universitaire de médecine légale et, d'autre part, de l'Unité socio-éducative (USE) du Centre de traitement en alcoologie. 
Ces deux unités font partie du Département universitaire de médecine et santé communautaire (DUMSC) des Hospices cantonaux. 
Mission générale Art. 2. - L'UMT et l'USE sont chargées de l'application des mesures administratives et judiciaires prévues par la loi envers les personnes commettant des abus d'alcool. 
 
Elles interviennent sur mandat du Service des automobiles et de la navigation (SAN), pour des expertises et des suivis médico-sociaux ordonnés par ce service conformément à la législation sur la circulation routière. 
 
Elles peuvent également intervenir sur mandat d'autres autorités administratives ou judiciaires. 
 
Cas échéant, elles peuvent saisir l'autorité compétente en vue de la mise en oeuvre de mesures relevant de leurs missions. 
Missions Art. 3. - L'UMT est chargée des expertises destinées à évaluer l'apti- 
particulières tude à conduire les véhicules à moteur. 
a) UMT 
 
Ces expertises sont ordonnées dans les cas, notamment, de consommation abusive d'alcool, d'échecs répétés aux examens de conduite, de déficiences d'ordre caractériel, de consommation de drogues ou de médicaments, de déficiences au niveau des performances physiques ou psychiques, notamment chez les personnes âgées, et de troubles de la conscience. Les expertises sont faites sous supervision médicale selon les prescriptions émises par les autorités compétentes. 
 
Les coûts des expertises de l'UMT sont auto-financés par la facturation des expertises aux services demandeurs ou aux personnes concernées. 
b) USE Art. 4. - L'USE est responsable du suivi et de l'orientation des personnes dénoncées pour consommation abusive d'alcool par le SAN ou par d'autres autorités administratives ou judiciaires. 
 
Elle agit dans une perspective éducative et préventive en utilisant les ressources médico-éducatives ambulatoires et résidentielles du réseau en place. 
 
A ce titre, elle transmet, dans chaque cas, à l'UMT un rapport qui est pris en compte dans le préavis que cette dernière élabore à l'intention de l'autorité. 
Art. 5 et 6. - Abrogés. 
Entrée en vigueur Art. 12. - (............) 
La Novelle a été publiée dans la Feuille des avis officiels du canton de Vaud des 25 et 29 mai 2001. 
B. 
Agissant par la voie du recours de droit public, V.________, F.________ et P.________ demandent au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, principalement, d'annuler la Novelle et, subsidiairement, d'annuler ses art. 2, 3 et 4. Les recourants invoquent les art. 29 (en réalité 9) et 27 Cst., ainsi que 2, 3 et 5 de la loi fédérale du 6 octobre 1995 sur le marché intérieur (LMI; RS 943.02). Ils se plaignent d'arbitraire et de violation de la liberté économique. Ils font valoir en particulier le manque de base légale de la Novelle, le défaut d'intérêt public permettant de déroger à la liberté économique et la violation du principe de la proportionnalité. 
Le Conseil d'Etat conclut, sous suite de frais, au rejet du recours dans la mesure où il est recevable. 
Un deuxième échange d'écritures ayant été ordonné, les parties ont maintenu leurs conclusions. 
C. 
Par ordonnance du 22 août 2001, la demande d'effet suspensif présentée par les recourants a été rejetée. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 127 I 92 consid. 1 p. 93). 
1.1 Le recours de droit public est recevable lorsqu'il est formé, comme en l'espèce, contre un arrêté cantonal de portée générale pour violation des droits constitutionnels des citoyens (art. 84 al. 1 lettre a OJ). 
1.2 Le recours de droit public dirigé contre un arrêté de portée générale est soumis à l'exigence de l'épuisement des voies de droit cantonales (art. 86 al. 1 OJ; ATF 124 I 11 consid. 1a p. 13, 159 consid. 1b p. 161 et la jurisprudence citée). Le droit vaudois ne prévoyant aucun contrôle direct de la constitutionnalité des arrêtés de portée générale édictés par le Conseil d'Etat (cf. l'art. 4 al. 2 de la loi vaudoise du 18 décembre 1989 sur la juridiction et la procédure administratives), la voie du recours de droit public au Tribunal fédéral est ouverte en l'espèce. 
1.3 Le délai de trente jours prévu à l'art. 89 al. 1 OJ pour déposer un recours de droit public contre un arrêté de portée générale a commencé à courir dès la publication de la Novelle dans la Feuille des avis officiels du canton de Vaud, soit le 29 mai 2001 (cf. ATF 125 II 440 consid. 1b p. 442; 124 I 145 consid. 1b p. 148). Posté le 25 juin 2001, le présent recours a été formé en temps utile. 
1.4 Lorsque le recours est dirigé, comme en l'espèce, contre un arrêté de portée générale, la qualité pour recourir, au sens de l'art. 88 OJ, est reconnue à toute personne dont les intérêts juridiquement protégés sont effectivement touchés par l'acte attaqué ou pourront l'être un jour (ATF 125 I 173 consid. 1b p. 174; 125 II 440 consid. 1c p. 442 et la jurisprudence citée). 
Les recourants, qui travaillent dans le canton de Vaud respectivement en tant que psychiatre et psychologue et qui procèdent en particulier à des expertises pour déterminer l'aptitude à conduire un véhicule, se plaignent d'une atteinte à leur liberté économique. Les recourants n'ont pas un droit à être mandatés comme experts par l'Etat de Vaud. En revanche, ils ont le droit d'exercer leur activité dans un marché qui ne soit pas monopolisé par la collectivité publique et, le cas échéant, sur la demande des personnes concernées. On peut dès lors admettre qu'ils ont la qualité pour recourir en invoquant leur liberté économique. 
1.5 Selon l'art. 90 al. 1 lettre b OJ, l'acte de recours doit - sous peine d'irrecevabilité - contenir « un exposé des faits essentiels et un exposé succinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques violés, précisant en quoi consiste la violation ». Lorsqu'il est saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'a donc pas à vérifier, de lui-même, si l'acte attaqué est en tout point conforme au droit et à l'équité; il n'examine que les moyens de nature constitutionnelle, invoqués et suffisamment motivés dans l'acte de recours (ATF 125 I 71 consid. 1c p. 76). En outre, dans un recours pour arbitraire fondé sur l'art. 9 Cst. (cf. l'art. 4 aCst.), le recourant ne peut pas se contenter de critiquer la décision entreprise comme il le ferait dans une procédure d'appel où l'autorité de recours peut revoir librement l'application du droit (ATF 107 Ia 186). Il doit préciser en quoi la décision attaquée serait arbitraire, ne reposant sur aucun motif sérieux et objectif, apparaissant insoutenable ou heurtant gravement le sens de la justice (ATF 110 Ia 1 consid. 2a p. 3/4). 
Les recourants se plaignent d'arbitraire et de violation de l'art. 2 LMI, mais ils ne développent pas de motivation propre à ces griefs. Leur argumentation sur ces points se confond, en effet, avec celle qu'ils soutiennent à propos de la violation de l'art. 27 Cst. En outre, ils font valoir une violation des art. 3 et 5 LMI sans toutefois avancer d'arguments à ce sujet. Dès lors, leur recours est irrecevable, en vertu de l'art. 90 al. 1 lettre b OJ, dans la mesure où ils se plaignent de violations de l'art. 9 Cst. et de la loi fédérale sur le marché intérieur. 
2. 
Les recourants invoquent la liberté économique consacrée à l'art. 27 Cst. En substance, ils reprochent à la Novelle de manquer de base légale, d'être dépourvue d'intérêt public et de créer un monopole en faveur des deux unités qu'elle institue. 
2.1 Selon l'art. 27 al. 1 Cst., la liberté économique est garantie. Elle comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à une activité économique lucrative privée et son libre exercice (art. 27 al. 2 Cst.). Cette liberté protège toute activité économique privée, exercée à titre professionnel et tendant à la production d'un gain ou d'un revenu (cf. le message du Conseil fédéral du 20 novembre 1996 relatif à une nouvelle Constitution fédérale, in FF 1997 I 1 ss, p. 176). 
 
Aux termes de l'art. 36 al. 1 Cst., toute restriction d'un droit fondamental doit être fondée sur une base légale; les restrictions graves doivent être prévues par une loi; les cas de danger sérieux, direct et imminent sont réservés. Toute restriction d'un droit fondamental doit être justifiée par un intérêt public ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui (art. 36 al. 2 Cst.) et proportionnée au but visé (art. 36 al. 3 Cst.). L'essence des droits fondamentaux est inviolable (art. 36 al. 4 Cst.). 
2.2 Il ressort de l'article premier de la Novelle, en particulier des modifications qu'elle apporte aux art. 3 et 4 du Règlement, que l'Unité de médecine du trafic (UMT) et l'Unité socio-éducative (USE) sont chargées de certaines missions, mais rien n'indique qu'elles soient les seules à pouvoir les accomplir. Le texte critiqué ne leur accorde pas d'exclusivité pour effectuer ces tâches. Il s'agit d'une simple réforme structurelle qui n'est pas restrictive par rapport à l'organisation antérieure. D'ailleurs, dans sa version initiale, le Règlement, qui attribuait à l'Office cantonal antialcoolique du canton de Vaud les missions désormais dévolues à l'UMT et à l'USE, utilisait, pour définir sa mission générale, une formulation analogue à celle qui figure dans le nouvel art. 2 al.1 du Règlement. Cela n'a toutefois pas empêché le Service vaudois des automobiles et de la navigation (ci-après: le Service) de collaborer, par l'attribution de mandats d'expertises, en particulier, avec le Bureau X.________ en vertu d'une convention signée le 3 décembre 1999 - notamment par V.________, au nom du Bureau X.__________ - et qui est encore en vigueur. En outre, la Novelle a prévu que les modifications apportées au Règlement entraient immédiatement en vigueur, c'est-à-dire avant même que l'UMT et l'USE ne soient mises en place. Cela impliquait forcément le recours à d'autres collaborations jusqu'à ce que ces deux unités soient opérationnelles. C'est aussi un signe que l'UMT et l'USE ne bénéficient pas d'une exclusivité. En réalité, comme le Conseil d'Etat le relève dans ses déterminations, la Novelle n'interdit pas au Service de collaborer avec des organismes privés. On ne saurait donc suivre les recourants lorsqu'ils prétendent que les dispositions susmentionnées instaurent un monopole en faveur de l'UMT et de l'USE. Cela ne saurait cependant préjuger de l'application qui sera faite de la Novelle. Si les recourants estiment que cette application porte atteinte à leurs droits fondamentaux, ils auront encore la possibilité de demander le contrôle concret de décisions prises en application de la Novelle. 
2.3 Au demeurant, même si la Novelle apportait des restrictions à la liberté économique, ces restrictions satisferaient aux exigences de l'art. 36 al. 1 et 2 Cst. 
 
Le Règlement se réfère en préambule à plusieurs articles de la loi sur la santé publique. Les recourants en déduisent que seules ces dispositions peuvent servir de base légale à la Novelle. On ne saurait être aussi restrictif. Ce qui compte, c'est que la Novelle repose effectivement sur une base légale et non pas qu'elle-même ou le Règlement la mentionnent expressément. Or, une telle base existe. Elle résulte d'une part de la loi sur la santé publique, notamment de celles de ses dispositions qui figurent dans le préambule du Règlement, et d'autre part de la législation en matière de circulation routière, en particulier des art. 9 et 13 de l'ordonnance du 27 octobre 1976 réglant l'admission des personnes et des véhicules à la circulation routière (OAC; RS 741.51) ainsi que de l'art. 3 de la loi vaudoise du 25 novembre 1974 sur la circulation routière. 
 
De plus, la Novelle est justifiée par l'intérêt public à la sécurité du trafic routier. Le Service doit pouvoir disposer en toutes circonstances d'une unité de pointe capable de détecter, le cas échéant, des pathologies peu fréquentes et de faire face à de nombreuses demandes d'examens. 
 
Compte tenu du fait que la Novelle n'institue pas un monopole en faveur des deux unités qu'elle crée et qui répondent à un intérêt public, elle respecte aussi le principe de la proportionnalité. 
2.4 Dès lors, le moyen tiré d'une prétendue violation de la liberté économique - et, par conséquent, de l'art. 27 Cst. - n'est pas fondé. 
3. 
Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté dans le mesure où il est recevable. 
 
Succombant, les recourants doivent supporter les frais judiciaires (art. 156, 153 et 153a OJ) et n'ont pas droit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
2. 
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge des recourants solidairement entre eux. 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire des recourants et au Conseil d'Etat du canton de Vaud. 
Lausanne, le 16 avril 2002 
DAC/elo 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le juge présidant: La greffière: