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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_904/2023  
 
 
Arrêt du 18 janvier 2024  
 
Ire Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, 
Muschietti et van de Graaf. 
Greffier : M. Vallat. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Fabien Mingard, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD, 
intimé. 
 
Objet 
Empêchement d'accomplir un acte officiel; indemnité, frais; arbitraire, déni de justice (infraction à la loi cantonale sur les contraventions), 
 
recours contre le jugement de la Cour d'appel 
pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud, 
du 16 mars 2023 (n° 129 PE20.022371/STL). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 18 novembre 2022, statuant sur opposition à une ordonnance pénale, le Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne a constaté que A.________ s'était rendu coupable d'empêchement d'accomplir un acte officiel et d'infraction à la loi cantonale sur les contraventions (l), l'a condamné à une peine pécuniaire de 10 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 30 fr., avec sursis pendant 2 ans (Il), l'a condamné à une amende de 100 fr., convertible en un jour de peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif dans le délai qui sera imparti (III), a refusé de lui allouer une indemnité au sens de l'art. 429 CPP (IV), a ordonné le maintien au dossier à titre de pièce à conviction du DVD-R inventorié sous fiche n° xxxxx (V), et a mis une partie des frais de la procédure, arrêtés à 1'466 fr. 65, à sa charge (VI). 
 
B.  
Saisie par le condamné, par jugement du 16 mars 2023, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté l'appel et confirmé le jugement du 18 novembre 2022, avec suite de frais. En bref, cette décision, à laquelle on renvoie pour le surplus, repose sur l'état de fait pertinent suivant. 
A U.________, rue de V.________, à hauteur de l'arrêt de bus W.________, le 14 juin 2020, vers 00h45, A.________, né en 1989, s'est approché d'un contrôle de police d'une conductrice en état d'ivresse qualifiée. Il a sorti son téléphone portable et a filmé la scène à une distance d'un à deux mètres. Il s'est ensuite opposé aux injonctions des agents de police de s'éloigner de la zone de contrôle et d'arrêter de filmer. Il s'est débattu lorsque les policiers ont tenté de le fouiller. Il a dû être maîtrisé et menotté. A l'issue du contrôle de police, il s'est finalement montré raisonnable et a été laissé aller. Du fait de son comportement, il a toutefois fortement perturbé le bon déroulement du contrôle effectué par la police. 
 
C.  
Par acte du 3 juillet 2023, A.________ recourt en matière pénale au Tribunal fédéral contre ce jugement sur appel. Il conclut avec suite de frais et dépens des instances cantonales et fédérale, principalement, à la réforme de cette décision en ce sens qu'il soit acquitté et qu'une indemnité de 7'000 fr. (subsidiairement 2'300 fr.) TVA et débours compris lui soit allouée au titre de ses frais de défense de première instance, respectivement de 3'000 fr. pour ceux afférents à la procédure d'appel. A titre subsidiaire, il demande l'annulation de la décision querellée et le renvoi de la cause à la cour cantonale pour qu'elle examine le grief déduit de l'art. 429 al. 1 let. a CPP soulevé devant elle. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Invoquant la violation des art. 286 CP et 29 du Règlement général de Police de la Commune de U.________ du 27 novembre 2001 (RGP), appliqué en corrélation avec la Loi cantonale vaudoise du 19 mai 2009 sur les contraventions (LContr/VD; RS/VD 312.11), le recourant se plaint d'une appréciation arbitraire des preuves. A titre préliminaire, il reproche à la cour cantonale d'avoir indûment restreint son pouvoir d'examen en se bornant à relever que " le raisonnement et les conclusions des premiers juges ne prêtent pas le flanc à la critique ". La cour cantonale aurait conclu de manière insoutenable que le document vidéo figurant au dossier (soit les prises de vues effectuées par le recourant au moyen de son téléphone) montrait clairement qu'il avait interféré avec le contrôle de police, alors qu'il se serait borné à filmer " discrètement " la scène. Elle aurait aussi retenu de manière arbitraire qu'il lui avait été demandé d'arrêter de filmer du fait qu'il détournait vite sa caméra à chaque regard de la police, comme s'il avait été pris en faute. Il serait insoutenable d'avoir préféré le rapport de police établi 15 jours après les faits aux dépositions relevées des mois plus tard. Le recourant objecte que les agents étaient alors entendus comme témoins (cf. art. 307 CP) et que le policier C.________ avait précisé se rappeler " assez bien " des événements parce qu'il s'agissait d'une " intervention particulière ". Enfin, la cour cantonale se serait écartée des déclarations à décharge des témoins en observant que " le fait que les témoins n'[auraient] pas vu le recourant se débattre [ne] changeait rien ". Il objecte encore qu'il ressortirait du rapport de police qu'il avait adopté une " attitude menaçante " alors que lors de son audition du 29 septembre 2021, l'appointé B.________ avait déclaré que son attitude n'était pas menaçante en elle-même, mais que le recourant se trouvait proche de son collègue en train de filmer et qu'il avait ensuite " ergoté ". Selon l'audition de cet appointé, c'est lui-même qui avait " poussé gentiment " le recourant de la main, lequel avait parlé fort et ergoté en réaction à ce geste alors qu'il aurait été calme jusque là, soit " tout à fait normal et correct ". Le recourant aurait " filmé discrètement " jusqu'à 0h46 sur la vidéo mais avait été appréhendé à 0h45. L'agent C.________ n'aurait pas dit non plus que le recourant s'était débattu mais avait parlé d'" échauffourée " et de " prise de contrôle pour maîtriser l'individu ". Il avait aussi déclaré que le recourant était venu à leur contact " au milieu de la route et pas sur le trottoir ", qu'il avait " énervé les passagers " en filmant et que l'appointé lui avait demandé de se légitimer " pour qu'il puisse l'identifier possiblement afin de préserver les droits des passagers en cas de diffusion de la vidéo sans leur consentement ", toutes déclarations contredites par les autres éléments du dossier. Le témoin D.________ avait déclaré que le recourant ne s'était pas débattu alors que les policiers n'avaient pas été corrects et s'étaient montrés agressifs. 
 
1.1. Si le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), la violation du droit cantonal ne constituant pas un motif pouvant être invoqué dans le recours en matière pénale (art. 95 LTF), il n'en examine l'application que sous l'angle de l'arbitraire (art. 9 Cst.), ce qui suppose, comme pour tout grief relevant de la violation des droits fondamentaux, que le moyen soit expressément soulevé et exposé de manière claire et détaillée (art. 106 al. 2 LTF; ATF 148 IV 356 consid. 2.1, 409 consid. 2.2).  
En l'espèce, le recourant ne tente pas de démontrer que la décision entreprise procéderait d'une application arbitraire du RGP et de la LContr/VD. Il n'y a donc pas lieu d'examiner la cause sous cet angle. 
 
1.2. En ce qui concerne la critique relative au pouvoir d'examen de la cour cantonale, l'usage de l'expression " prêter le flanc à la critique ", parfaitement adéquat dans ce contexte, ne suggère tout d'abord pas que la cour cantonale se serait bornée à un examen sous le seul angle de l'arbitraire des moyens soulevés par le recourant. Ce dernier perd ensuite de vue que l'autorité cantonale d'appel peut renvoyer aux motifs du jugement de première instance (art. 82 al. 4 CPP). Il en va ainsi notamment si elle est entièrement du même avis que l'autorité précédente et pour autant que l'on comprenne sur quel état de fait repose le jugement d'appel. Elle peut alors confirmer l'état de fait retenu globalement (ATF 141 IV 244 consid. 1.2.3 et consid. 1.3.1) et c'est précisément ce qu'a fait la cour cantonale en l'espèce, après avoir répondu de manière circonstanciée aux moyens développés devant elle (jugement sur appel, consid. 3.3 p. 12 s.). Pour le surplus, le recourant ne se plaint pas d'avoir vainement requis l'administration de preuves en seconde instance cantonale, singulièrement que des témoins soient entendus. Il n'y a pas lieu d'examiner la cause sous cet angle.  
 
1.3. Saisi d'un recours en matière pénale, le Tribunal fédéral est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), sous les réserves découlant des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de l'arbitraire dans la constatation des faits (sur cette notion, v. ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2). Il en va en particulier ainsi du contenu de la pensée, à savoir de faits "internes" (ATF 148 IV 234 consid. 3.4). Le Tribunal fédéral n'examine de tels griefs que pour autant que les exigences de motivation accrues rappelées ci-dessus soient respectées (art. 106 al. 2 LTF; v. supra consid. 1.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 148 IV 356 consid. 2.1, 409 consid. 2.2).  
 
1.3.1. Les développements de l'écriture de recours, qui consistent à rediscuter la plupart des preuves en en fournissant une lecture différente de celle des autorités cantonales est typiquement de nature appellatoire. Ils sont irrecevables dans le recours en matière pénale. Il suffit de relever ce qui suit.  
 
1.3.2. On ne perçoit tout d'abord pas ce que le recourant pourrait déduire en sa faveur, sous l'angle de l'arbitraire, de minimes imprécisions telles que celles relatives à l'heure de son appréhension, dès lors qu'il n'est pas contesté qu'il a été appréhendé et qu'il avait alors, de toute évidence, cessé de filmer. Il en va de même des distinguos qu'il tente d'opérer entre le fait de se débattre et la description d'une " échauffourée ", puisqu'il est constant que le recourant a bien été maîtrisé par l'un des agents et que des renforts ont été appelés, même si l'intéressé s'était calmé à leur arrivée. Que le recourant ait vainement tenté de demeurer discret pendant qu'il filmait, alors qu'il n'est pas contesté que sa présence a été remarquée par les agents ne rend pas insoutenable la constatation qu'il a interféré avec le contrôle en cours. Par ailleurs, le recourant a lui-même expliqué que les policiers lui avaient demandé pourquoi il filmait et qu'il leur avait rétorqué connaître ses droits et être un citoyen; cette justification n'a de sens qu'en réponse à une demande de s'éloigner, respectivement de cesser de filmer, fût-elle implicite. Quoi qu'il en soit, il n'y a, de toute manière, rien d'insoutenable à retenir que la présence importune d'un badaud filmant une intervention de police à très faible distance des agents est de nature à troubler une opération lors de laquelle deux policiers se trouvent déjà confrontés à plusieurs personnes alcoolisées. Quant aux témoignages, il n'y a rien non plus d'insoutenable à préférer les explications contenues dans un rapport établi par des agents assermentés peu de temps après les faits à leurs explications données comme témoin (même invités à dire la vérité sous menace des peines prévues par l'art. 307 CP) des mois plus tard et moins encore à celles de personnes interpellées précisément en raison de leur alcoolémie.  
Supposé recevable, le moyen devrait être rejeté. 
 
2.  
Le recourant se plaint pour terminer d'une violation de l'art. 429 al. 1 let. a CPP et d'un déni de justice (art. 29 Cst.; art. 6 CEDH), respectivement d'une violation de son droit d'être entendu. 
 
2.1. Dans la mesure où il déduit son droit à une pleine indemnité pour ses frais de défense en première instance des moyens qui viennent d'être examinés, on peut se limiter à renvoyer aux consid. précédents.  
 
2.2. A titre subsidiaire, il soutient qu'il avait invoqué dans sa déclaration d'appel avoir droit à une indemnité réduite pour ses frais de défense au motif que le tribunal de première instance n'avait mis que deux tiers des frais à sa charge et que cette décision aurait préjugé celle de son droit à une juste indemnité pour ses frais de défense. Une somme de 2'300 fr. aurait dès lors dû lui être allouée à ce titre. La cour cantonale ne se serait pas prononcée sur ce moyen.  
 
2.3. Selon l'art. 429 al. 1 CPP, si le prévenu est acquitté totalement ou en partie ou s'il bénéficie d'une ordonnance de classement, il a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure (let. a), à une indemnité pour le dommage économique subi au titre de sa participation obligatoire à la procédure pénale (let. b) et à une réparation du tort moral subi en raison d'une atteinte particulièrement grave à sa personnalité, notamment en cas de privation de liberté (let. c).  
Par ailleurs, une autorité commet un déni de justice formel et viole l'art. 29 al. 1 Cst. lorsqu'elle n'entre pas en matière dans une cause qui lui est soumise dans les formes et délais prescrits, alors qu'elle devrait s'en saisir (ATF 142 II 154 consid. 4.2; 135 I 6 consid. 2.1; 134 I 229 consid. 2.3). Elle viole en revanche le droit d'être entendu découlant de l'art. 29 al. 2 Cst. lorsqu'elle ne respecte pas son obligation de motiver ses décisions afin que le justiciable puisse les comprendre et exercer ses droits de recours à bon escient. Pour satisfaire à cette exigence, il suffit que l'autorité mentionne au moins brièvement les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision. Elle n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à ceux qui, sans arbitraire, peuvent être tenus pour pertinents (ATF 147 IV 249 consid. 2.4; cf. aussi ATF 146 II 335 consid. 5.1; 143 IV 40 consid. 4.3.4; 142 II 154 consid. 4.2; 138 I 232 consid. 5.1). La motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1). Elle se rend enfin coupable d'une violation du droit d'être entendu si elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1; 133 III 235 consid. 5.2; arrêt 6B_1113/2022 du 12 septembre 2023 consid. 1.1). 
 
2.4. En l'espèce, il n'est question ni d'acquittement ni de classement de la procédure, ce qui exclut déjà, en principe, le droit du recourant à l'indemnité à laquelle il prétend. Il est vrai que, selon la jurisprudence, la décision sur les frais préjuge en principe celle sur l'indemnisation (cf. ATF 147 IV 47 consid. 4.1; 145 IV 268 consid. 1.2; 144 IV 207 consid. 1.8.2; 137 IV 352 consid. 2.4.2). Toutefois, cette règle n'est pas absolue et l'autorité peut, en particulier, s'en écarter lorsqu'elle réduit les frais mis à la charge de la partie pour un autre motif qu'un classement ou un acquittement partiel (cf. p. ex.: arrêt 7B_56/2022 du 20 septembre 2023 consid. 5.2).  
Le tribunal de première instance a jugé équitable de réduire les frais mis à la charge du recourant eu égard à la diminution du nombre de jours-amende et du montant de chaque jour-amende obtenue ensuite de l'opposition à l'ordonnance pénale. Ce motif ne l'obligeait pas à allouer une indemnité pour frais de défense dans la proportion correspondante. Pour le surplus, la cour cantonale a indiqué " Vu le sort de l'appel, il ne sera alloué aucune indemnité [au recourant] " (jugement sur appel, consid. 5). Cette motivation, même très succincte et partiellement implicite, permet aisément de comprendre que la confirmation de la condamnation du recourant emportait celle du rejet de sa prétention accessoire à une indemnité pour ses frais de défense. Il n'y a là ni déni de justice ni violation du droit d'être entendu. 
 
3.  
Le recourant succombe. Il supporte les frais de la procédure (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 18 janvier 2024 
 
Au nom de la Ire Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
Le Greffier : Vallat