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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_313/2023  
 
 
Arrêt du 23 octobre 2023  
 
Ire Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, 
Denys, Muschietti, van de Graaf et Koch. 
Greffière : Mme Musy. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Pascal Junod, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
1. Ministère public de la Confédération, Guisanplatz 1, 3003 Berne, 
2. B.________, 
représenté par Mes Hikmat Maleh et Paul Michel, avocats, 
intimés. 
 
Objet 
Injure; lieu de commission de l'acte, etc.; arbitraire, 
droit d'être entendu, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal pénal fédéral, 
Cour d'appel, du 7 octobre 2022 (CA.2022.20). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 10 mai 2022, la Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral a reconnu A.________ coupable d'injure à l'encontre de B.________ en lien avec plusieurs messages adressés à C.________ les 13 février 2020, 9 mai 2020 et 11 mai 2020, et l'a condamné à une peine pécuniaire de 20 jours-amende à 150 fr., avec sursis et délai d'épreuve de deux ans, ainsi qu'à une amende de 600 francs, et a statué sur les frais et indemnités. 
 
B.  
Statuant sur appel de A.________ et appel joint de B.________, la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral a, par arrêt du 7 octobre 2022, réformé le jugement entrepris en ce sens, notamment, que A.________ a été condamné à une peine pécuniaire de 9 jours-amende à 190 fr. avec sursis pendant deux ans. 
En bref, il en ressort les éléments suivants. 
A.________ a adressé plusieurs messages à C.________, les 13 février, 9 mai et 11 mai 2020, par le biais de l'application WhatsApp. Dans ces messages étaient contenues notamment les expressions suivantes, lesquelles sont retranscrites telles qu'elles ont été envoyées: 
 
- Message du 13 février 2020: "Comme je te l ai deja dit: j'apprecierai que tu sois plus discrète sur ta relation avec dickhead, il m est difficile d entendre les moqueries journalieres sur le directeur qui depuis un bon moment baise son assistante aux ressources humaines (la mere de mon fils!)...". 
- Message du 9 mai 2020: "Je ne veux pas que D.________ soit en presence de dickhead. Si ce sale fils de pute veux venir te baiser il attend D.________ que soit avec moi, j ai aucun probleme a I avoir 1 nuit de plus chez moi. Ce vieux batard ne represente et ne sera JAMAIS rien qu une grosse merde pour mon fils [Emojis "Doigt d'honneur"]". 
- Message du 11 mai 2020: "Malgre tes provocations verbales d hier soir, je reitere mon opposition a ce que tu fasses venir 1 etranger qui regulierement ne respecte pas le confinement COV19 ainsi que la frontiere et met en danger la sante de mon fils ! De plus tu fais coucher D.________ dans les mêmes draps ou tu as baise avec dickhead le matin meme... Je veux que le bien etre et la sante de mon fils passe avant le plaisir sexuel de I autre vieux fils de pute [Emojis "Doigt d'honneur"]". 
C.________ a reçu les messages des 9 et 11 mai 2020 et en a pris connaissance alors qu'elle se trouvait en France. Elle en a relayé le contenu à son ami intime, B.________, qui était en Suisse, lieu où il est domicilié et où il travaille. 
 
C.  
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Il conclut principalement, avec suite de frais et dépens, à la réforme de l'arrêt du 7 octobre 2022 de la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral en ce sens qu'il est constaté que les autorités suisses n'étaient pas compétentes pour le poursuivre du chef d'injure relativement aux messages des 9 et 11 mai 2020, qu'il s'était uniquement rendu coupable du chef d'injure relativement au message du 17 [recte: 13] février 2020 et, cela fait, qu'une atténuation de peine lui est accordée. A titre subsidiaire, A.________ conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
 
D.  
Invités à se déterminer sur le recours, la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral y a renoncé et s'est référée aux considérants de l'arrêt attaqué, tandis que le Ministère public de la Confédération a conclu à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement son rejet. Enfin, B.________ a déposé des observations, concluant au rejet du recours. A.________ a répliqué. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Invoquant une violation de son droit d'être entendu, le recourant reproche à la Cour d'appel de ne pas avoir suffisamment motivé sa décision et pris en considération les arguments qu'il avait développés, dans le cadre de son appel, sur la question du défaut de compétence des autorités pénales suisses. 
 
1.1. Le droit d'être entendu, au sens invoqué par le recourant, impose à l'autorité le devoir de motiver sa décision afin que le justiciable puisse en saisir la portée et, le cas échéant, l'attaquer en connaissance de cause. Pour satisfaire à cette exigence, il suffit que le juge mentionne au moins brièvement les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision (ATF 147 IV 409 consid. 5.3.4; 141 IV 249 consid. 1.3.1). Il n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à ceux qui, sans arbitraire, peuvent être tenus pour pertinents (ATF 147 IV 249 consid. 2.4; 142 II 154 consid. 4.2).  
 
1.2. La Cour d'appel a relevé les arguments présentés par le recourant, à savoir que l'intimé n'était ni co-destinataire, ni destinataire direct ou prévisible des propos tenus, de sorte que son éventuelle présence en Suisse au moment où il en a pris connaissance ne créait pas de for concernant l'action pénale relative à l'injure poursuivie. Après avoir rappelé la jurisprudence relative à la notion de résultat de l'infraction au sens de l'art. 7 aCP (actuel art. 8 CP), elle a considéré qu'il était manifeste, au regard de la teneur des messages litigieux, que même s'ils avaient été envoyés à C.________, le recourant entendait s'adresser à B.________, à tout le moins indirectement. Pour le surplus, elle a fait sien le raisonnement des premiers juges, comme l'art. 82 al. 4 CPP l'y autorisait, pour conclure que la présence en Suisse de l'intimé, destinataire des propos injurieux, au moment où il a pris connaissance des messages incriminés créait un rattachement suffisant au sens de l'art. 8 CP (arrêt entrepris, consid. 4.5-4.7 p. 13).  
Il apparaît que les arguments du recourant ont été traités et que, dans cette mesure, la décision entreprise est suffisamment motivée au regard des exigences déduites de la garantie du droit d'être entendu. Le grief est infondé. 
 
2.  
Le recourant soutient que les autorités suisses n'étaient pas compétentes pour le poursuivre à raison des messages qu'il avait envoyés à C.________ les 9 et 11 mai 2020. Il fait tout d'abord grief à l'autorité précédente d'avoir violé le droit fédéral en fondant "en partie" la compétence des autorités suisses sur l'art. 7 CP et la jurisprudence y relative, alors que cette disposition n'est pas applicable au cas d'espèce. 
L'autorité précédente a évoqué la jurisprudence rendue à l'aune de l'art. 7 CP (cf. ATF 128 IV 145) dans sa teneur avant la révision de la partie générale du CP entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 3459; FF 1999 1787). Or la définition du lieu de commission de l'infraction, précédemment régie par l'art. 7 aCP, est restée globalement inchangée sous l'actuel art. 8 CP. Il est dès lors manifeste que la référence à l'art. 7 CP résulte d'une erreur de plume, la Cour d'appel ayant omis d'actualiser le numéro de la disposition légale par rapport à l'arrêt de référence. La Cour d'appel a de toute évidence appliqué la disposition légale topique, soit l'art. 8 CP, et s'est fondée sur la jurisprudence pertinente concernant la détermination du lieu de commission de l'infraction. Le grief du recourant est infondé. 
 
3.  
Le recourant reproche à l'autorité précédente d'avoir arbitrairement établi les faits en ce qu'elle retient que l'intimé se trouvait en Suisse lors de l'envoi des messages litigieux des 9 et 11 mai 2020. 
 
3.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, à savoir, pour l'essentiel, de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son résultat (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1; sur la notion d'arbitraire v. ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 143 IV 241 consid. 2.3.1). Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation de droits fondamentaux, dont l'interdiction de l'arbitraire, que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF; ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 143 IV 500 consid. 1.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 146 IV 114 consid. 2.1; 146 IV 88 consid. 1.3.1). Lorsque l'appréciation des preuves et la constatation des faits sont critiquées en référence à la présomption d'innocence (art. 14 par. 2 Pacte ONU II, 6 par. 2 CEDH, 32 al. 1 Cst. et 10 CPP), le principe in dubio pro reo n'a pas de portée plus large que l'interdiction de l'arbitraire (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1).  
Lorsque l'autorité cantonale a forgé sa conviction sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents, il ne suffit pas que l'un ou l'autre de ceux-ci ou même chacun d'eux pris isolément soit à lui seul insuffisant. L'appréciation des preuves doit être examinée dans son ensemble. Il n'y a pas d'arbitraire si l'état de fait retenu pouvait être déduit de manière soutenable du rapprochement de divers éléments ou indices. De même, il n'y a pas d'arbitraire du seul fait qu'un ou plusieurs arguments corroboratifs sont fragiles, si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (arrêts 6B_239/2023 du 10 août 2023 consid. 2.2; 6B_688/2022 du 14 juin 2023 consid. 1.1; 6B_988/2022 du 8 juin 2023 consid. 1.1). 
 
3.2. A teneur du jugement de la Cour des affaires pénales, auquel l'autorité précédente renvoie, l'intimé a déclaré se souvenir d'un échange houleux entre le recourant et C.________ ainsi que du message du 9 mai 2020 qui s'en était suivi. Il a indiqué s'être trouvé à U.________ le samedi et avoir parlé, le jour même, avec C.________, préoccupée par le ton des propos tenus par le recourant. L'intimé a précisé que C.________ lui avait lu le message, avant de le lui envoyer. Quant au message du lundi 11 mai 2020, reçu la veille du dépôt de sa plainte, l'intimé a affirmé qu'il l'avait reçu à U.________. A la question de savoir quels étaient, parmi les huit messages, ceux qu'il était certain d'avoir vus ou reçus, pour la première fois, alors qu'il se trouvait en Suisse, l'intimé avait mentionné les messages du 13 février ainsi que des 9 et 11 mai 2020. S'agissant de ces deux derniers messages, la Cour des affaires pénales a estimé qu'il n'existait aucune raison de remettre en cause les déclarations de l'intimé. Contrairement à ce qu'il en était du message du 21 mars 2020, dont il ne se souvenait plus s'il en avait pris connaissance en Suisse ou en France, pour ce qui avait trait aux deux messages de mai 2020, l'intimé avait affirmé à deux reprises être certain d'en avoir pris connaissance alors qu'il se trouvait en Suisse. De plus, l'intimé se souvenait d'avoir déposé plainte le lendemain du second message (jugement de la Cour des affaires pénales, consid. 1.2.10 p. 13 s.).  
L'autorité précédente a encore constaté, au regard des documents produits par l'intimé, que, d'une part, le prénommé et C.________ se trouvaient dans deux endroits différents les 9 et 11 mai 2020 et, d'autre part, que le premier cité était en Suisse à ces dates-là, dès lors qu'il ressortait de ses transactions bancaires qu'il avait effectué des achats au supermarché E.________ les 9 et 11 mai 2020. Elle en a déduit que la présence de l'intimé en Suisse lors de l'envoi des messages litigieux les 9 et 11 mai 2020 était démontrée (arrêt entrepris, consid. 4.6 p.13). 
 
3.3. Le recourant expose que, entre l'achat de l'intimé en Suisse à 15h le 9 mai 2020 et le début de ses échanges avec C.________ peu avant minuit, il était fort probable que l'intimé se soit rendu en France au domicile de celle-ci, comme à son habitude. Il était donc probable qu'il ait pris connaissance du message envoyé par le recourant à 19h51 alors qu'il se trouvait au domicile de C.________. Le 10 mai 2020, le dernier échange Whatsapp entre C.________ et l'intimé avait été envoyé à 7h56 du matin, tandis que la dernière communication entre les deux protagonistes résultait d'un courriel envoyé à 21h15. Dans ce dernier, C.________ faisait référence aux messages litigieux qu'elle avait rassemblés afin que l'intimé les imprime, preuve qu'il en connaissait le contenu avant cet envoi. Il existait ainsi une fenêtre de 13h reliant les deux échanges entre ces protagonistes. Enfin, en ce qui concernait le message du 11 mai 2020 envoyé à 18h14, il avait été produit une capture d'écran d'un échange Whatsapp de C.________ demandant à appeler l'intimé. Là encore, rien ne permettait d'établir que leurs échanges portaient sur le message envoyé ce moment-là.  
 
3.4. L'argumentation du recourant consiste essentiellement à opposer sa propre lecture du dossier à celle de la cour cantonale, dans une démarche largement appellatoire. Au demeurant, l'appréciation de la Cour d'appel est fondée sur un faisceau d'éléments convergents, à savoir les échanges électroniques entre C.________ et l'intimé des 9 et 11 mai 2020 qui tendent à établir qu'ils ne se trouvaient pas au même endroit, ainsi que les achats documentés de l'intimé en Suisse aux dates pertinentes. En outre, l'intimé n'a pas manqué de faire part de ses doutes quant à sa présence en Suisse lors de la prise de connaissance de certains messages (pour lesquels un for de l'action pénale en Suisse a par conséquent été exclu; cf. consid. 1.2.8 à 1.2.9 du jugement de la Cour des affaires pénales), tandis qu'il s'était montré affirmatif à ce sujet s'agissant de ceux envoyés les 9 et 11 mai 2020. Ses déclarations mesurées renforçaient ainsi la crédibilité de ses propos.  
L'état de fait cantonal apparaît, sous cet angle, dénué d'arbitraire, de sorte que le grief du recourant est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
4.  
Le recourant se plaint également d'une violation de l'art. 8 CP en lien avec la commission de l'infraction d'injure. 
 
4.1.  
 
4.1.1. Se rend coupable d'injure au sens de l'art. 177 CP, celui qui, de toute autre manière, aura, par la parole, l'écriture, l'image, le geste ou par des voies de fait, attaqué autrui dans son honneur. Dans le cas de l'injure, l'auteur peut s'adresser à la personne visée directement ou à un tiers en parlant d'elle (ATF 145 IV 462 consid. 4.2.4; Andreas Donatsch, Strafrecht III, Delikte gegen den Einzelnen, 2018, p. 413).  
Sur le plan subjectif, l'injure suppose l'intention. L'auteur doit vouloir ou accepter que son message soit attentatoire à l'honneur et qu'il soit communiqué à la personne lésée ou à un tiers (Rieben/Mazou, Commentaire romand, Code pénal II, 1ère éd. 2017, n° 15 art. 177 CP; Bernard Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. II, Berne 2010, n° 25 ad art. 177 CP et les références citées).  
Les délits contre l'honneur sont des délits de mise en danger abstrait. Ils sont consommés dès qu'un tiers prend connaissance de la déclaration portant atteinte à l'honneur (ATF 125 IV 177 consid. 3a, 103 IV 22 consid. 7; plus récemment: arrêts 6B_69/2016 du 29 septembre 2016 consid. 2.3.1; 6B_491/2013 du 4 février 2014 consid. 5.2.1; 6B_106/2012 du 26 septembre 2012 consid. 4). La réception ou la perception du contenu en question caractérisent par conséquent le résultat typique inhérent à la consommation de l'infraction de communication (Alexandre Dyens, Territorialité et ubiquité en droit pénal international suisse, Étude critique des art. 3 et 8 CPS - Enjeux théoriques et pratiques, en particulier en matière de criminalité économique et financière, thèse, Lausanne 2014, n° 686 p. 212). 
 
4.1.2. Aux termes de l'art. 3 al. 1 CP, le CP est applicable à quiconque commet un crime ou un délit en Suisse. Cette disposition consacre le principe de territorialité. Il s'agit du principe de base applicable en droit pénal international, selon lequel la compétence pour connaître d'une infraction ressortit à l'État sur le territoire duquel cette dernière a été commise (ATF 121 IV 145 consid. 2b/bb; 108 IV 145 consid. 3). Il s'impose pour des motifs d'équité d'une part et d'économie de procédure d'autre part, car c'est au lieu de commission de l'infraction que l'administration des preuves est susceptible de fournir les résultats les plus probants (ATF 144 IV 265 consid. 2.3.1).  
Selon l'art. 8 al. 1 CP, un crime ou un délit est réputé commis tant au lieu où l'auteur a agi ou aurait dû agir qu'au lieu où le résultat s'est produit. Cette norme constitue un complément indispensable à l'art. 3 CP puisqu'elle définit selon quels critères une infraction est réputée commise en Suisse (ATF 144 IV 265 consid. 2.3.1). 
La notion de résultat a évolué au fil de la jurisprudence. A l'origine, le Tribunal fédéral a défini le résultat comme "le dommage à cause duquel le législateur a rendu un acte punissable" (ATF 97 IV 205 consid. 2). Il a ensuite admis que seul le résultat au sens technique, qui caractérise les délits matériels ( Erfolgsdelikte), était propre à déterminer le lieu de commission d'une infraction (ATF 105 IV 326 consid. 3 c à g). Cette définition stricte a toutefois été tempérée dans différents arrêts subséquents (cf. ATF 141 IV 336 consid. 1.1 et 1.2 en matière de falsification de timbres officiels de valeur; 124 IV 241 consid. 4c et d en matière d'abus de confiance; 125 IV 177 consid. 2 et 3 en matière d'infraction contre l'honneur; sur l'entier de la question voir également: ATF 128 IV 145 consid. 2e; arrêts 6B_268/2018 du 17 décembre 2018 consid. 6.2.2 et 6B_659/2014 du 22 décembre 2017 consid. 6.1.2). Dans l'ATF 125 IV 177, qui concernait l'envoi depuis l'Allemagne de courriers au contenu diffamatoire à l'ensemble des membres d'une association, dont deux résidaient en Suisse, le Tribunal fédéral a admis la compétence des autorités suisses au motif que les écrits attentatoires avaient été adressés de façon ciblée, directe et individuellement déterminée à au moins deux personnes qui en avaient pris connaissance en Suisse (ATF précité consid. 3b). Dans ce contexte, la prise de connaissance des propos en Suisse constituait un point de rattachement suffisant pour admettre un résultat au sens de l'art. 7 al. 1er aCP et ainsi reconnaître la compétence des autorités suisses (ATF 125 IV 177 consid. 3, cité in : ATF 128 IV 145 consid. 2e ; dans le même sens: ATF 102 IV 35 consid. 2b ; cf. aussi à ce sujet Cass. GE du 26 novembre 2004, SJ 2005 I 461; plus récemment: arrêt 6B_268/2018 du 17 décembre 2018 consid. 6.2.2). Le Tribunal fédéral a encore précisé qu'il n'y avait "aucun motif matériel" de nier la compétence territoriale suisse en pareille situation, tout en soulignant qu'il n'en allait pas nécessairement de même lorsque les propos diffamatoires étaient tenus dans les mass-médias étrangers (ATF 125 IV 177 consid. 3b).  
Au regard de la jurisprudence qui précède, la doctrine constate que, tant que le contenu est diffusé de façon ciblée et individuelle, par exemple par l'entremise d'un courriel adressé à une ou plusieurs personnes déterminées, la reconnaissance d'un rattachement territorial fondé sur le lieu de survenance du résultat ne suscite guère d'objection (Dupuis et al., Code pénal, Petit commentaire, 2e éd. 2017, n° 19 ad art. 8 CP et les références citées; Alexandre Dyens, op. cit., n° 687 p. 212 s.).  
 
4.1.3. Déterminer le contenu d'un message relève de l'établissement des faits. Dans le recours en matière pénale, le Tribunal fédéral est lié par de telles constatations de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), sous les réserves découlant des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de l'arbitraire dans la constatation des faits (sur cette notion, v. ATF 145 IV 154 consid. 1.1). L'interprétation du message ressortit, en revanche, à l'application du droit fédéral, que le Tribunal fédéral revoit librement dans le recours en matière pénale. Il s'agit de rechercher le sens qu'un destinataire non prévenu doit conférer aux expressions utilisées, compte tenu de l'ensemble des circonstances pertinentes, soit, notamment, la personne dont émane le message et celles qui sont visées (ATF 148 IV 113 consid. 3; 145 IV 462 consid. 4.2.3; 143 IV 193 consid. 1).  
 
4.2. En l'espèce, il n'est pas contesté que le recourant, domicilié en France, a envoyé les messages litigieux à C.________, par le biais de l'application WhatsApp, et que celle-ci en a pris connaissance en France. Il est également admis que C.________ a ensuite porté ces messages à la connaissance de la personne visée par les injures qu'ils contenaient, soit B.________. Est litigieuse la question de savoir si cette prise de connaissance par le prénommé, alors qu'il se trouvait en Suisse, peut constituer un point de rattachement territorial fondé sur le résultat au sens de l'art. 8 CP.  
 
4.3. La Cour d'appel a retenu, faisant siennes les considérations de la Cour des affaires pénales sur ce point, qu'en matière de délits contre l'honneur, il y avait lieu de rechercher non pas qui l'auteur des propos entendait viser, mais quels étaient les destinataires possibles au vu des propos formulés dans le cas concret, en analysant non seulement les expressions utilisées, mais le sens qui se dégageait du texte dans son ensemble. A ce titre, il n'était pas nécessaire que la personne visée soit nommément désignée, il suffit qu'elle soit reconnaissable. Il était également manifeste - de par leur contenu ainsi que le lien entre les deux destinataires - que les messages visés, certes adressés à C.________, seraient évidemment remis ou transférés à B.________ et que le recourant entendait s'adresser à B.________, à tout le moins indirectement (arrêt entrepris, consid. 4.5).  
 
4.4. Le recourant soutient que les messages incriminés étaient adressés uniquement à C.________, de sorte que l'infraction était consommée dès la prise de connaissance par celle-ci des propos litigieux, peu importe qu'elle ait ultérieurement transmis les messages à l'intimé. Ce dernier n'était pas le destinataire direct ou dérivé des propos tenus, mais tout au plus la personne visée et lésée par la teneur de ceux-ci. Partant, il est sans importance que l'intimé se soit trouvé en Suisse au moment où il a pris connaissance des propos qui le visait. Dans la mesure où il n'est pas contesté que la destinataire directe de ces messages se trouvait, pour sa part, en France lorsqu'elle a reçu les messages litigieux, l'autorité précédente avait violé l'art. 8 CP en confirmant la compétence des autorités pénales suisses pour le poursuivre et le condamner des faits des 9 et 11 mai 2020.  
 
4.5.  
 
4.5.1. Il ressort de la jurisprudence relative au lieu de commission des infractions d'atteinte à l'honneur que la notion de résultat, au sens de l'art. 8 CP, est étroitement fondée sur la consommation de l'infraction, soit, dans le cas de l'injure, la prise de connaissance, par un tiers ou par la personne lésée elle-même, du contenu attentatoire à l'honneur (consid. 4.1 supra). En l'espèce, l'infraction d'injure a été consommée dès que le tiers auquel le recourant s'est adressé, soit C.________, a pris connaissance des propos litigieux. C.________ a, dans un second temps, relayé ces messages à l'intimé. Dans cette mesure, la communication faite à ce dernier ne résulte pas directement du comportement typique de l'auteur (soit l'émission et l'expédition du contenu illicite), mais a supposé l'intervention d'une tierce partie.  
 
4.5.2. La Cour d'appel a considéré qu'au regard de leur contenu et du lien entre les deux destinataires, les messages visés seraient évidemment remis ou transférés à B.________ et que le recourant entendait s'adresser à l'intimé, du moins indirectement. La Cour des affaires pénales - dont le jugement a été intégralement repris par la Cour d'appel sur ce point -, avait pour sa part retenu que le recourant "[...] savait que celle-ci était l'amie intime de B.________ et qu'en cette qualité, au vu de la violence des propos tenus, C.________ allait probablement les relayer à B.________. Du moins, il ne pouvait ne pas le prévoir" (jugement du 10 mai 2022 cf. consid. 1.2.10 p. 14). Comme on le comprend de ces développements, les autorités précédentes ont considéré que l'intimé était "destinataire" des propos dans le sens où le recourant savait qu'il en serait - probablement - informé. En revanche, il n'a pas été constaté que le recourant aurait utilisé le compte WhatsApp de C.________ comme simple vecteur pour atteindre l'intimé, par exemple parce qu'il ne disposait pas du numéro de portable de ce dernier et escomptait que les propos injurieux lui seraient transmis par l'intermédiaire de la prénommée. Rien de tel ne peut, du reste, être déduit du contenu des messages pour lesquels le recourant a été poursuivi; selon leur teneur, le recourant s'adressait exclusivement à C.________ (ainsi: "j'apprecierai que tu sois plus discrete sur ta relation avec dickhead" [...]; "Malgre tes provocations verbales d hier soir, je reitere mon opposition a ce que tu fasses venir 1 etranger [...]"), et ne lui demandait nullement de transmettre ses propos à l'intimé. Il sied encore de préciser que le message du 27 février 2020 auquel l'intimé fait référence dans ses observations (p. 3) ne fait pas partie des échanges incriminés.  
Au regard de ce qui précède, la prise de connaissance du contenu illicite par l'intimé n'est pas la conséquence directe et immédiate du comportement typique de l'auteur. L'infraction d'injure a été consommée lorsque la destinataire des messages envoyés par le recourant en a pris connaissance et le fait que l'intimé ait été subséquemment informé de leur contenu n'entraîne pas une perpétuation de la consommation de l'infraction. L'intimé n'est donc pas un destinataire direct, individuel et ciblé des écrits litigieux, au sens de la jurisprudence rendue à l'aune de l'art. 8 CP (art. 7 aCP). 
 
4.5.3. Il est encore précisé, au surplus, que la notion de résultat ne s'appréhende pas en fonction du titulaire du bien juridique atteint. Partant, et contrairement à ce que la Cour d'appel semble avoir considéré, il n'était pas déterminant, dans l'examen de l'art. 8 CP, que l'intimé puisse, à teneur des messages litigieux, être identifié comme la personne visée par les injures. Du reste, la question du caractère reconnaissable de la personne visée relève uniquement des éléments constitutifs de l'infraction (cf. arrêt 6B_491/2013 du 4 février 2014 consid. 5.2.1 et les références citées).  
 
4.5.4. En définitive, comme le recourant le relève de manière pertinente, il serait contraire au principe d'ubiquité relative consacré par l'art. 8 CP d'admettre un élément de rattachement fondé sur le résultat non seulement au lieu de la prise de connaissance, par le tiers, des messages qui lui ont été directement et individuellement envoyés, mais également au (x) lieu (x) de prise de connaissance par la/les personne (s) visée (s) par les propos, que le tiers aurait subséquemment informée (s) du contenu illicite. Dans le cas d'espèce, il faut retenir qu'en l'absence de communication des propos ciblée, directe et individuellement déterminée à une personne qui en a pris connaissance en Suisse, il n'existe, en l'espèce, pas de rattachement territorial fondé sur le résultat au sens de l'art. 8 al. 1 CP. Partant, la Cour d'appel a violé le droit fédéral en admettant la compétence des autorités pénales suisses pour poursuivre le recourant en lien avec les messages envoyés les 9 et 11 mai 2020 à C.________.  
 
5.  
Au vu de ce qui précède, le recours doit être admis, l'arrêt attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité précédente afin qu'elle rende une nouvelle décision dans le sens des considérants. 
Une partie des frais judiciaires est mise à la charge de l'intimé, qui succombe (art. 66 al. 1 et 4 LTF). 
Le recourant, qui obtient gain de cause, ne supporte pas de frais et peut prétendre à des dépens, à la charge pour moitié chacun, d'une part, de la Confédération (Ministère public de la Confédération) et, d'autre part, de l'intimé (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis, le jugement attaqué annulé et la cause renvoyée au Tribunal pénal fédéral pour nouvelle décision. 
 
2.  
Une partie des frais judiciaires, arrêtée à 1'500 fr., est mise à la charge de l'intimé. 
 
3.  
Une indemnité de 3'000 fr., à verser au recourant à titre de dépens, est mise pour moitié à la charge de la Confédération (Ministère public de la Confédération) et pour moitié à la charge de l'intimé. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal pénal fédéral, Cour d'appel. 
 
 
Lausanne, le 23 octobre 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
La Greffière : Musy