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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1B_362/2021  
 
 
Arrêt du 6 septembre 2021  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix et Merz. 
Greffière : Mme Nasel. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Valentin Marmillod, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public du canton de Vaud, 
Le procureur cantonal Strada, 
chemin de Couvaloup 6, 1014 Lausanne. 
 
Objet 
procédure pénale; décision de suspension et de renvoi de la procédure, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale, du 18 mai 2021 (448 PE19.004026). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le 30 novembre 2020, le Ministère public du canton de Vaud (Ministère public) a engagé l'accusation devant le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne (Tribunal correctionnel) contre A.________ pour notamment remise à des enfants de substances pouvant mettre en danger leur santé, vol, escroquerie, utilisation frauduleuse d'un ordinateur, actes d'ordre sexuel avec des enfants, actes d'ordre sexuel avec des personnes dépendantes, faux dans les titres, infraction et contravention à la LStup (RS 812.121). 
 
B.  
Le 10 mars 2021, avant le début de l'audience de jugement, la plaignante B.B.________ a produit une clé USB et un DVD, contenant plusieurs photos et des vidéos réalisées notamment dans le cadre des soirées organisées par le prévenu à U.________; ces fichiers mettent, entre autres, en scène des mineures en contact avec des stupéfiants. B.B.________ a déclaré posséder encore plusieurs dizaines de fichiers de ce type ainsi que diverses conversations concernant ces soirées. 
 
Après le visionnement de ces images et vidéos par les parties et l'interrogatoire du prévenu à leur sujet, la Procureure a requis la suspension des débats et l'autorisation de compléter l'instruction et l'accusation au vu de ces nouvelles preuves conformément à l'art. 333 al. 2 CPP; elle a précisé qu'elle s'engageait à observer strictement le principe de célérité. 
 
Une fois cet incident plaidé par les parties, le Tribunal correctionnel a ordonné la suspension et le renvoi de la procédure au Ministère public cantonal Strada. 
 
C.  
Par arrêt du 18 mai 2021, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud (Tribunal cantonal) a déclaré irrecevable le recours formé par A.________ contre la décision incidente rendue le 10 mars 2021 par le Tribunal correctionnel. 
 
D.  
Par acte du 23 juin 2021, A.________ forme un recours par lequel il demande principalement au Tribunal fédéral de réformer l'arrêt entrepris en ce sens que la décision du 10 mars 2021 du Tribunal correctionnel est annulée; de prononcer la reprise de la cause et de l'audience de jugement par le Tribunal correctionnel et de constater la nullité des actes d'instruction entrepris ultérieurement au 10 mars 2021, à 11 heures 45; de retrancher ces actes du dossier de la cause; et de prononcer la nullité des ordonnances des 12 mars 2021 et 3 juin 2021 rendues par le Tribunal des mesures de contrainte. Subsidiairement, il requiert que l'arrêt entrepris soit annulé et la cause renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il sollicite également l'assistance judiciaire. 
 
Invités à se déterminer sur le recours, le Tribunal cantonal se réfère à ses considérants tandis que le Ministère public conclut à l'irrecevabilité, respectivement au rejet du recours. Le recourant maintient ses conclusions. 
 
E.  
Par ordonnance du 7 juillet 2021, le Président de la Ire Cour de droit public du Tribunal fédéral a rejeté la requête d'effet suspensif et de mesures provisionnelles présentée par A.________. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office (art. 29 al. 1 LTF) et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 145 I 239 consid. 2). 
 
1.1.  
Le recours est dirigé contre une décision d'irrecevabilité prise en dernière instance cantonale (art. 80 al. 1 LTF) dans le cadre d'une procédure pénale. Le recours en matière pénale, au sens de l'art. 78 al. 1 LTF, est donc en principe ouvert. 
 
1.2. Indépendamment de la nature de la décision du Tribunal de première instance, l'auteur d'un recours déclaré irrecevable en instance cantonale a qualité, au sens de l'art. 81 LTF, pour contester ce prononcé. Lorsqu'un recours porte sur la question de l'existence même d'un recours cantonal, ce qui est le cas en l'espèce, le recours auprès du Tribunal fédéral est en principe recevable indépendamment de l'exigence d'un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF (ATF 143 I 344 consid. 1.2; 138 IV 258 consid. 1.1; arrêt 1B_396/2020 du 19 janvier 2021 consid. 2.2). Seule la question de la recevabilité du recours peut cependant être portée devant le Tribunal fédéral, ce qui exclut l'examen des griefs développés en lien avec le fond.  
Il s'ensuit notamment que seule la conclusion subsidiaire du recourant est recevable, dans la mesure où l'on comprend du recours qu'elle tend à ce que le Tribunal de céans annule l'arrêt attaqué, déclare le recours recevable et renvoie la cause à l'autorité précédente pour qu'elle se prononce sur le fond du litige. Dès lors, il n'y a pas lieu d'examiner les arguments soulevés au fond (cf. p. 14 ss du recours). 
 
1.3. Pour le surplus, le recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision rendue par une autorité statuant en tant que dernière instance cantonale (art. 80 al. 1 LTF). Partant, il y a lieu d'entrer en matière dans la mesure précitée.  
 
2.  
Le recourant produit diverses pièces à l'appui de son écriture, sans indiquer, pour certaines d'entre elles, si elles sont nouvelles, respectivement sans démontrer que les conditions de l'art. 99 al. 1 LTF sont réalisées. S'agissant en particulier de la pièce 3, postérieure à l'arrêt entrepris, elle est irrecevable (cf. ATF 143 V 19 consid. 1.2). Ces documents n'ont de toute façon aucune incidence sur l'issue du litige. 
 
3.  
En lien avec l'existence d'un préjudice irréparable (art. 93 LTF), le recourant se prévaut d'un retard injustifié à statuer sur le fond et d'une violation grave du principe de célérité (art. 29 al. 1 Cst.). 
 
3.1.  
La décision litigieuse est une décision relative à la conduite de la procédure prise au cours des débats; celle-ci ne peut faire l'objet d'un recours au sens de l'art. 393 al. 1 let. b CPP que si elle peut causer un préjudice irréparable (cf. ATF 143 IV 175 consid. 2.4; arrêt 1B_63/2018 du 13 mars 2018 consid. 3; cf. Bernhard Sträuli, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, n° 28 ss ad art. 393 CPP). Cette notion est la même que celle qui prévaut en application de l'art. 93 al. 1 let. a LTF: il doit s'agir d'un préjudice de nature juridique qui ne puisse pas être réparé ultérieurement par un jugement final ou une autre décision favorable au recourant (cf. ATF 143 IV 175 consid. 2.3). 
Les décisions cantonales portant sur la suspension de la procédure et le renvoi en instruction ordonné par un tribunal de première instance ne causent en principe pas de préjudice irréparable. Tel peut néanmoins être le cas lorsque la partie recourante se plaint d'un risque de prescription de l'action pénale ou d'un retard injustifié à statuer sur le fond constitutif d'un déni de justice formel (ATF 143 IV 175 consid. 2.3; 138 IV 258 consid. 1.1; 134 IV 43 consid. 2.2-2.4; arrêts 1B_63/2018 du 13 mars 2018 consid. 3; 6B_1463/2017 du 29 mai 2018 consid. 3.3). Il faut à cet égard que le grief fasse apparaître un risque sérieux de violation du principe de célérité (ATF 143 IV 175 consid. 2.3; 138 III 190 consid. 6). Ainsi, lorsque la suspension critiquée intervient à un stade de la procédure où il apparaît évident que le principe de célérité n'est pas violé, ou lorsque le recourant ne démontre pas qu'un tel risque apparaîtra nécessairement à terme, la jurisprudence s'en tient aux exigences de l'art. 93 al. 1 let. a LTF (ATF 143 IV 175 consid. 2.3; 134 IV 43 consid. 2.5). 
 
3.2.  
 
3.2.1. Le recourant soutient en particulier que la décision ouvrirait la voie à un report indéterminé du jugement, car elle ne serait pas limitée dans le temps et ne préciserait pas la teneur et l'étendue des actes d'enquête à entreprendre. Toutefois, il se contente ici de répéter des arguments déjà présentés devant l'instance précédente sans se prononcer sur les considérations de celle-ci à leur encontre, ni apporter d'éléments concrets démontrant ce qu'il avance. En l'occurrence, l'autorité précédente a exposé, à juste titre, que les dispositions topiques du CPP n'imposent pas au tribunal de première instance de fixer un délai au Ministère public pour procéder aux actes d'instructions nécessaires. En effet, l'absence de délai fixé par une décision de suspension et de renvoi au Ministère public ne saurait être qualifiée abstraitement et dans tous les cas de retard injustifié à statuer sur le fond constitutif d'un déni de justice formel; il convient, au contraire, d'examiner la question concrètement dans chaque cas particulier. C'est précisément ce à quoi a procédé la cour cantonale puisqu'elle a relevé que, depuis la décision du tribunal de première instance, plusieurs actes d'instruction avaient été menés dont les auditions d'une dizaine de personnes appelées à donner des renseignements ou témoins par la Procureure en charge de l'affaire ou la police. Or, le recourant ne remet pas en cause ces éléments. En tout état, si les craintes hypothétiques du recourant devaient s'avérer fondées, il pourrait intenter un recours pour déni de justice ou retard injustifié en tout temps conformément à l'art. 396 al. 2 CPP.  
 
3.2.2. Le recourant fait ensuite valoir, en substance, que la décision attaquée serait infondée, car elle reposerait sur des preuves apportées tardivement par la partie plaignante et déjà connues de l'autorité d'instruction. Toutefois, ces éléments, que le recourant pourra faire valoir devant l'autorité compétente sur le fond du litige, ne sont pas à même de démontrer l'existence d'un préjudice irréparable, soit d'un retard injustifié à statuer sur le fond constitutif d'un déni de justice formel. Le recourant ne démontre en particulier pas que la suspension litigieuse risque réellement de différer le jugement final au-delà de ce qui est raisonnable. De plus, la connaissance ou non des preuves par le Ministère public avant l'audience du 10 mars 2021 est un fait qui ne ressort pas de la décision attaquée et le recourant n'allègue ni a fortiori ne démontre l'arbitraire de cette absence de mention (cf. art. 97 al. 1 et 105 LTF).  
 
3.2.3. Le recourant prétend encore que la décision litigieuse violerait gravement le principe de célérité; elle aurait notamment pour conséquence de le renvoyer en détention provisoire et de prolonger de façon indéterminée celle-ci, ce qui créerait un préjudice irréparable.  
Le recourant perd de vue qu'une violation grave du principe de célérité ne peut être qualifiée de préjudice irréparable au sens de l'art. 93 LTF que lorsqu'elle est constitutive d'un déni de justice formel (cf. supra consid. 3.1). Toutefois, comme cela a été exposé (cf. supra consid. 3.2.1), le Ministère public a fait preuve de célérité dès le prononcé du tribunal de première instance. Par ailleurs, comme l'a relevé la cour cantonale, lorsque le recourant se plaint de la prolongation de sa détention provisoire, il se plaint de la prolongation de la procédure: la première n'est qu'une conséquence indirecte de la seconde, qui est elle-même la conséquence logique d'une décision de suspension et de renvoi au Ministère public pour instruction. Or, la simple prolongation de la procédure n'est pas à même de causer un dommage de nature juridique selon la jurisprudence du Tribunal de céans (cf. ATF 143 IV 175 consid. 2.4; arrêt 6B_1463/2017 du 29 mai 2018 consid. 3.5) : il en va ainsi de même des conséquences indirectes de celle-ci. En effet, malgré ce que soutient le recourant, le fait qu'il fasse l'objet d'une mesure privative de liberté qui est prolongée du fait de la décision litigieuse ne change rien (cf. arrêt 6B_1463/2017 du 29 mai 2018 consid. 3.5 concernant la suspension de la procédure de libération conditionnelle dans l'attente de la réalisation d'une expertise psychiatrique). Au demeurant, s'il souhaite élever des critiques contre sa détention provisoire, il doit le faire dans le cadre de la procédure y relative. Or, l'autorité précédente a constaté à cet égard qu'il n'avait pas contesté la décision du Tribunal des mesures de contrainte du 12 mars 2021 ordonnant sa détention provisoire et fixant sa durée maximale à trois mois. Le recourant ne prétend pas davantage avoir remis en cause la prolongation de sa détention provisoire jusqu'au 10 septembre 2021 (cf. ordonnance du 3 juin 2021 du Tribunal des mesures de contrainte). Il ne saurait dès lors se plaindre d'une prolongation de sa détention provisoire dans le cadre de la présente procédure. 
 
3.3. Au vu de ce qui précède, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral ou constitutionnel en déclarant irrecevable le recours formé par le recourant.  
 
4.  
Il s'ensuit que le recours est rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. 
 
Comme les conclusions étaient vouées à l'échec, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui succombe, supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. 
 
2.  
La requête d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public du canton de Vaud, Le Procureur cantonal Strada, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale, et, pour information à C.B.________ et B.B.________, ainsi qu'au mandataire de D.B.________. 
 
 
Lausanne, le 6 septembre 2021 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
La Greffière : Nasel