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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6S.394/2003 /rod 
 
Séance du 18 mars 2004 
Cour de cassation pénale 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Schneider, Président, Wiprächtiger, Kolly, Karlen et Brahier Franchetti, 
Juge suppléante. 
Greffière: Mme Angéloz. 
 
Parties 
A.________, actuellement détenu .... 
recourant, représenté par Me Yanis Callandret, avocat, 
 
contre 
 
Ministère public du canton de Neuchâtel, rue du Pommier 3, case postale 2672, 2001 Neuchâtel 1. 
 
Objet 
Mise en danger de la vie d'autrui (art. 129 CP), 
 
pourvoi en nullité contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel 
du 1er octobre 2003. 
 
Faits: 
A. 
Par jugement du 3 septembre 2002, la Cour d'assises du canton de Neuchâtel a condamné A.________, ressortissant marocain né en 1971, pour meurtre (art. 111 CP), assassinat (art. 112 CP), mise en danger de la vie d'autrui (art. 129 CP), recel par métier (art. 160 ch. 1 et 2 CP), infractions aux art. 19 ch. 1 et 19a LStup et à l'art. 23 LSEE, à la réclusion à vie, prononçant en outre son expulsion pour 15 ans, sans sursis. 
 
Statuant sur le pourvoi en cassation interjeté par le condamné contre ce jugement, la Cour de cassation pénale du Tribunal neuchâtelois l'a écarté par arrêt du 1er octobre 2003. 
B. 
S'agissant des faits pertinents pour le jugement de la présente cause, cet arrêt retient, en résumé, ce qui suit. 
B.a Dans la nuit du 29 au 30 mars 2001, A.________ s'est rendu au domicile de B.________, avec laquelle il entretenait une relation intime intermittente qui se dégradait depuis le début de l'année 2000. Il est arrivé sur les lieux suite à un téléphone houleux avec celle-ci, probablement pour la convaincre de ne pas lui causer d'ennuis avec la police des étrangers. B.________ s'est d'emblée montrée agressive envers A.________. En colère, ce dernier s'est emparé d'un couteau à viande qu'il avait vu par hasard, avec lequel il a frappé B.________ à au moins dix reprises, notamment au thorax et dans le dos, la blessant ainsi mortellement. 
B.b Peu auparavant, C.________ était intervenue brièvement dans la discussion, à la demande de A.________, qui l'avait appelée pour calmer son amie. Elle s'était toutefois rangée du côté de cette dernière, avant de quitter le salon, où elle est cependant revenue lorsque B.________ est tombée sur le sol. Ayant vu le corps, elle est repartie sans mot dire en direction de la chambre où se trouvaient les deux enfants D.________ et E.________. A.________, voulant éliminer un témoin gênant, a alors également frappé C.________ avec le couteau, lui assénant au moins vingt coups, notamment au thorax et dans le dos, et causant ainsi sa mort. 
B.c Après avoir frappé mortellement les deux femmes, A.________ a quitté l'appartement, peu après 2 heures du matin, en fermant la porte à clef, alors qu'il savait que s'y trouvaient les deux enfants D.________ et E.________, âgés respectivement de 8 mois et 4 mois. Ceux-ci n'ont été découverts par la police que le samedi 31 mars 2001 vers 17 heures, soit environ 39 heures après les homicides, pendant lesquelles ils sont ainsi restés sans manger ni boire. Selon les rapports médicaux, ils présentaient une déshydratation modérée à leur arrivée à l'hôpital. 
 
Il a été retenu que les deux enfants avaient été découverts par la police suite à un appel téléphonique de la concierge de l'immeuble, alertée par des amies de B.________, qui s'étaient inquiétées de son sort, et qu'ils auraient fort bien pu n'être retrouvés que de nombreuses heures, voire plusieurs jours, plus tard. Il a également été retenu que A.________, en abandonnant les deux nourrissons livrés à eux-mêmes, de surcroît, après avoir fermé à clef la porte de l'appartement, ne pouvait être que conscient du risque qu'il leur faisait courir, et que, contrairement à ce qu'il alléguait, il n'avait rien entrepris pour sauvegarder leur vie, mais les avait abandonnés au péril résultant pour eux de la mise à mort de leurs mères. 
B.d Les faits décrits sous lettre B.a ci-dessus ont été considérés comme constitutifs de meurtre au sens de l'art. 111 CP et ceux décrits sous let. B.b comme constitutifs d'assassinat au sens de l'art. 112 CP. Quant aux faits décrits sous lettre B.c, ils ont été qualifiés de mise en danger de la vie d'autrui au sens de l'art. 129 CP
C. 
A.________ se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Contestant sa condamnation pour mise en danger de la vie d'autrui, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué, en sollicitant l'assistance judiciaire. 
 
L'autorité cantonale relève que l'argumentation du recourant selon laquelle une personne peut rester de plusieurs jours à plusieurs semaines sans boire est valable pour des adultes, de sorte qu'elle est sans pertinence pour des enfants de huit et quatre mois. Pour le surplus, elle ne formule pas d'observations. 
 
Le Ministère public a renoncé à se déterminer. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Saisie d'un pourvoi en nullité, la Cour de cassation contrôle l'application du droit fédéral (art. 269 PPF) sur la base d'un état de fait définitivement arrêté par l'autorité cantonale (cf. art. 277bis et 273 al. 1 let. b PPF). Elle ne peut donc pas revoir les faits retenus dans la décision attaquée ni la manière dont ils ont été établis, de sorte que ces points, sous peine d'irrecevabilité, ne peuvent être remis en cause dans le pourvoi (ATF 126 IV 65 consid. 1 p. 66/67; 124 IV 53 consid. 1 p. 55, 81 consid. 2a p. 83 et les arrêts cités). 
2. 
Le recourant se plaint d'une violation de l'art. 129 CP. Il fait valoir qu'on ne peut lui reprocher d'avoir créé un danger, mais seulement d'avoir omis de remédier à celui qui pouvait survenir, de sorte que son comportement pourrait tout au plus tomber sous le coup de l'art. 128 al. 1 CP. Il soutient en outre qu'on ne peut parler d'un danger de mort imminent, au vu du laps de temps pendant lequel les enfants sont restés dans l'appartement et, surtout, des constatations médicales selon lesquelles ils présentaient une déshydratation modérée. Il conteste au demeurant avoir été conscient de mettre la vie des enfants en danger de mort imminent et avoir voulu le faire. Enfin, alléguant avoir entrepris des démarches pour que les enfants puissent être découverts, il conteste avoir agi sans scrupules. 
2.1 L'art. 129 CP réprime le comportement de celui qui, sans scrupules, aura mis autrui en danger de mort imminent. 
 
Sur le plan objectif, cette infraction suppose que l'auteur ait causé un danger de mort imminent pour autrui, c'est-à-dire qu'il ait adopté un comportement propre à provoquer un tel effet. Le comportement incriminé, qui n'est pas décrit par la loi, se caractérise par ses effets. Il s'agit de tout comportement propre à mettre autrui en danger de mort imminent (Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. I, Berne 2002, p. 183 n° 6; Stratenwerth,Schweizerisches Strafrecht, Partie spéciale I, 5ème édition, Berne 1995, § 4 n° 7; Rehberg/Schmid/Donatsch, Strafrecht III, 8ème éd., Zurich/Bâle/Genève 2003, p. 56; Schubarth, Kommentar zum schweizerischen Strafrecht, vol. I, Berne 1982, art. 129 CP n° 11; Peter Aebersold, Basler Kommentar, Strafgesetzbuch II, art. 129 CP n° 7). 
 
 
La notion de danger de mort imminent implique d'abord un danger concret, c'est-à-dire la probabilité sérieuse que, dans le cours ordinaire des choses, le bien juridique protégé soit lésé, donc que le danger de mort se réalise, au point qu'il faut être dénué de scrupules pour négliger sciemment d'en tenir compte. Il faut en outre que ce danger ait été imminent, c'est-à-dire qu'il ait présenté un caractère d'immédiateté non pas tant en raison de l'enchaînement chronologique des circonstances que du lien de connexité direct unissant ce danger et le comportement de l'auteur (ATF 121 IV 67 consid. 2b/aa p. 70 et la jurisprudence citée). La notion de mise en danger de mort imminent de l'art. 129 CP doit être interprétée de manière plus large que celle qui qualifie le degré le plus grave du brigandage (art. 139 ch. 3 aCP; art. 140 ch. 4 CP), notamment parce qu'il ne s'agit pas seulement d'un élément aggravant mais d'un élément constitutif de l'infraction réprimée par cette disposition et parce que la peine menace prévue est moins lourde que celle sanctionnant le degré le plus grave du brigandage (ATF 121 IV 67 consid. 2b/bb et cc, 2c et 2d, p. 71 s.). 
 
Du point de vue subjectif, il faut que l'acte ait été commis sans scrupules et que l'auteur ait agi intentionnellement. Un acte est commis sans scrupules au sens de l'art. 129 CP lorsque, compte tenu des moyens utilisés, des mobiles de l'auteur et des autres circonstances, il apparaît comme contraire aux principes généralement admis des bonnes moeurs et de la morale. Il suffit que l'auteur ait connu les circonstances en raison desquelles son comportement apparaît comme dénué de scrupules; sa conception personnelle des valeurs éthiques importe peu (ATF 114 IV 103 consid. 2a p. 108 et les références citées). Il y a également lieu de tenir compte de l'ampleur du danger créé. Plus le danger connu de l'auteur est grand et moins ses mobiles méritent attention, plus l'absence de scrupules apparaît comme évidente (ATF 107 IV 163 consid. 3 p. 164 et la jurisprudence citée). Pour le surplus, l'infraction est réalisée sur le plan subjectif, lorsque l'auteur est conscient de mettre autrui en danger de mort imminent et le fait sciemment (ATF 121 IV 67 consid. 2d p. 75 in fine; 114 IV 103 consid. 2d et e p. 110). 
2.2 A ce jour le Tribunal fédéral n'a pas été amené à trancher la question de savoir si le comportement réprimé par l'art. 129 CP peut consister en une omission. 
 
Plusieurs auteurs de doctrine ne se prononcent pas sur cette question précise (cf. Rehberg/Schmid/Donatsch, op. cit., p. 55 ss; Stratenwerth, op. cit., § 4 n° 3 ss; Trechsel, Kurzkommentar, 2ème éd., Zurich 1997, art. 129 CP n° 1 ss), que d'autres abordent en revanche brièvement. Ainsi, alors qu'Aebersold doute que l'infraction en cause puisse être réalisée par omission (Aebersold, op. cit., art. 129 CP n° 39), Schubarth est d'avis que le comportement réprimé par l'art. 129 CP ne peut en principe pas consister en une omission, dont il ne voit pas qu'elle soit compatible avec une absence de scrupules (Schubarth, op. cit., art. 129 CP n° 17). De son côté, Corboz relève que, si le comportement de l'auteur est purement passif, on doit plutôt imaginer qu'il ne crée pas de danger mais qu'il omet d'y remédier. Selon lui, il paraît alors logique de retenir la disposition qui envisage précisément ce cas de figure, à savoir l'art. 128 al. 1 CP (Corboz, op. cit., p. 183 s. n° 7). 
 
Ainsi, les trois auteurs de doctrine qui se sont exprimés sur la question tendent plutôt à admettre que le comportement réprimé par l'art. 129 CP ne peut en principe pas consister en une omission, le second auteur cité semblant même clairement être de cette opinion et le troisième suggérant qu'en cas d'omission c'est logiquement l'art. 128 CP qui devrait trouver application. En l'espèce, pour les motifs exposés ci-après, la question peut cependant rester indécise. 
2.3 Selon la jurisprudence, une omission, sauf si elle est réprimée comme telle par la loi, ne peut être reprochée à l'auteur que si ce dernier avait un devoir juridique d'agir découlant d'une position de garant (cf. ATF 129 IV 119 consid. 2.2 p. 121 s.; 122 IV 17 consid. 2b/aa p. 20, 61 consid. 2a/aa p. 63, 145 consid. 2 p. 146; 121 IV 10 consid. 2b p. 14; 117 IV 130 consid. 2a p. 132). Or, contrairement, par exemple, à l'art. 128 al. 1 CP, l'art. 129 CP ne réprime pas comme tel le défaut d'accomplissement d'un acte. Par conséquent, une mise en danger de la vie d'autrui par omission, à supposer qu'elle entre en considération, ne pourrait être reprochée à son auteur que s'il avait un devoir juridique d'agir découlant d'une position de garant. 
 
Le devoir juridique d'agir fondant la position de garant d'une personne peut notamment découler de la loi ou d'un contrat, voire d'une situation de fait, mais aussi du principe de l'intervention (Ingerenzprinzip), selon lequel celui qui crée une situation dangereuse pour autrui doit prendre toutes les mesures de protection commandées par les circonstances pour éviter la survenance d'un dommage (ATF 127 IV 27 consid. 2b p. 32; 120 IV 98 consid. 2c p. 106; 106 IV 278; cf. également Stratenwerth, Schweizerisches Strafrecht, Partie générale I, 2ème édition, Berne 1996, § 14 n° 11 ss, notamment n° 18, et les références citées). 
 
Il est très généralement admis que le principe de l'intervention doit recevoir une application restrictive et que le caractère causal d'un comportement antérieur ne peut donc suffire à fonder la position de garant découlant de ce principe (Claus Roxin, Ingerenz und objektive Zurechnung, in Strafrecht, Strafprozessrecht und Menschenrechte, Festschrift für Stefan Trechsel zum 65. Geburtstag, Zurich 2002, p. 556; Stratenwerth, Schweizerisches Strafrecht, Partie générale I, 2ème édition, Berne 1996, § 14 n° 19; Jeschek/Weigend, Lehrbuch des Strafrechts, Allgemeiner Teil, 5ème éd., Berlin 1996, p. 625; Graven, L'infraction pénale punissable, 2ème éd., Berne 1995, p. 83 let. e). La manière de limiter la portée de ce principe est en revanche controversée (Claus Roxin, op. cit., p. 556). Plusieurs auteurs estiment notamment que, sous peine d'étendre à l'excès la position de garant résultant du principe de l'intervention, la responsabilité de celui qui a créé un danger doit au moins être limitée aux dangers que son comportement antérieur était adéquat à provoquer, c'est-à-dire à ceux que, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience générale de la vie, ce comportement était propre à entraîner (Stratenwerth, Strafrecht, Partie générale I, 2ème édition, Berne 1996, § 14 n° 19 et § 9 n° 24; Trechsel/Noll, Schweizerisches Strafrecht, Allgemeiner Teil I, 4ème éd., Zurich 1994, p. 226; Jeschek/Weigend, op. cit., loc. cit.; Schönke/Schröder/Stree, Strafgesetzbuch, 26ème éd., Münich 2001, § 13 n° 34). D'aucuns sont d'avis qu'une position de garant est, entre autres, exclue lorsque la norme sanctionnant le comportement antérieur vise à empêcher une atteinte à un bien juridique qui ne se recouvre pas avec celle que tend à empêcher la norme protégeant le bien menacé et que la position de garant suppose donc la réalisation du risque que la norme sanctionnant le comportement antérieur vise à prévenir. Ainsi, lorsque le propriétaire d'une maison, qui est réveillé durant la nuit par le bruit occasionné par un cambrioleur et se lance à la poursuite de ce dernier dans l'escalier, chute et se brise une jambe, le cambrioleur ne saurait être condamné pour lésions corporelles par négligence. Celui-ci a certes créé le risque qui s'est réalisé, mais la norme sanctionnant le vol vise à empêcher une atteinte au patrimoine, non pas à l'intégrité corporelle. Par conséquent, le cambrioleur ne revêt pas une position de garant à l'égard du propriétaire en tant que ce dernier a subi des lésions corporelles (Claus Roxin, op. cit., p. 561/562; Jeschek/Weigend, op. cit., loc. cit.; Schönke/Schröder/Stree, op. cit., § 13 n° 35a). 
2.4 L'arrêt attaqué reproche au recourant d'avoir abandonné les deux enfants dans l'appartement après avoir tué leurs mères, les livrant ainsi à eux-mêmes, et de n'avoir rien entrepris pour qu'ils puissent être découverts rapidement. C'est ainsi clairement et exclusivement une omission qui a été reprochée au recourant, auquel il n'a pas été fait grief d'avoir adopté un comportement actif mettant les enfants en danger de mort imminent, mais d'avoir omis d'accomplir un acte par lequel il eût pu éviter qu'ils ne soient mis en danger de mort imminent. En effet, le comportement ayant consisté à abandonner les enfants est constitutif d'une omission, non pas d'une action (cf. ATF 125 IV 64 consid. 1a p. 69), et il en va manifestement de même de celui qui a consisté à ne rien entreprendre pour qu'ils soient découverts rapidement. Que le recourant ait fermé la porte à clef, plutôt que de la laisser ouverte, ne suffit pas à transformer son omission en une action (cf. ATF 129 IV 119 consid. 2.2 p. 122). 
 
Le raisonnement de l'arrêt attaqué, selon lequel le recourant doit cependant se voir reprocher une action, et non une omission, parce qu'il a créé un danger imminent pour la vie des enfants en tuant leurs mères ne peut être suivi. L'homicide des mères a certes joué un rôle causal, dans la mesure où, sans cet homicide, les enfants ne se seraient pas retrouvés en danger de mort imminent. Il n'est toutefois pas la cause directe et immédiate de cette mise en danger et, à lui seul, n'aurait pas suffi à la provoquer si le recourant n'avait ensuite abandonné les enfants à leur sort et quitté les lieux sans entreprendre quoique ce soit pour qu'ils puissent être découverts et secourus rapidement. C'est donc le comportement postérieur du recourant, ayant consisté, après les homicides, à abandonner les enfants et à ne rien entreprendre pour qu'ils soient découverts rapidement, qui a été la cause directe et immédiate de cette mise en danger. Or, ce comportement est manifestement constitutif d'une omission, non pas d'une action. 
2.5 Comme seule une omission peut être reprochée au recourant, une mise en danger de la vie d'autrui, autant qu'elle puisse être commise par omission, ne pourrait lui être reprochée que s'il avait un devoir juridique d'agir découlant d'une position de garant. 
2.5.1 En l'occurrence, un tel devoir ne découle pas de la loi ou d'un contrat. Il ne peut non plus être déduit d'une situation de fait, dès lors que rien n'indique qu'il existait entre le recourant et les enfants une relation particulière qui puisse fonder un devoir de celui-ci de veiller sur eux ou de les protéger. Reste à examiner s'il peut être déduit du principe de l'intervention. 
2.5.2 Même s'il n'est pas la cause immédiate et directe de la mise en danger de la vie des enfants, l'homicide des mères a créé une situation dangereuse pour ces derniers, qui, du fait de cet homicide, se trouvaient exposés, s'ils étaient laissés seuls et sans soins, à un danger pour leur vie. Dans cette mesure, le comportement antérieur du recourant ayant consisté à tuer les mères a donc joué un rôle causal, ce qui, selon la doctrine très largement majoritaire si ce n'est unanime, ne suffit cependant pas à fonder une position de garant (cf. supra, consid. 2.3). 
 
D'après le cours ordinaire des choses et l'expérience générale de la vie, l'homicide d'une mère n'est pas en soi et à lui seul propre à entraîner une mise en danger de la vie de son enfant. En particulier, ce danger ne se réalisera normalement pas si l'auteur de l'homicide prend ensuite des mesures pour écarter ce danger, par exemple en avisant, fût-ce de manière anonyme, des tiers susceptibles d'intervenir rapidement pour secourir l'enfant. Bien qu'il puisse être causal de la mise en danger de l'enfant, l'homicide de sa mère n'en est donc pas la cause adéquate. 
 
Au demeurant, les art. 111 et 112 CP - soit les normes sanctionnant le comportement antérieur du recourant ayant consisté dans le meurtre, respectivement l'assassinat, des mères - répriment la destruction de la vie d'autrui, alors que la mise en danger de celle-ci est réprimée par l'art. 129 CP. Même si le bien juridique protégé, soit la vie d'autrui, est le même, l'atteinte à ce bien juridique que les art. 111 et 112 CP visent à empêcher ne se recouvre donc pas avec l'atteinte que l'art. 129 CP tend à prévenir. 
 
Dans ces conditions, quand bien même le comportement antérieur du recourant, soit l'homicide des mères, a joué un rôle causal, il ne suffit pas à fonder une position de garant du recourant envers les enfants à raison de la mise en danger de la vie de ces derniers. 
2.6 Dès lors que seule une omission peut être retenue et que le recourant n'avait pas un devoir juridique d'agir découlant d'une position de garant, son comportement ne peut tomber sous le coup de l'art. 129 CP. Par conséquent, l'arrêt attaqué viole le droit fédéral en tant qu'il condamne le recourant pour mise en danger de la vie d'autrui. 
3. 
Qu'une mise en danger de la vie d'autrui ne puisse être retenue à la charge du recourant ne signifie cependant pas qu'il puisse échapper à toute sanction à raison du comportement qu'il a eu envers les deux enfants, autant que ce comportement réalise les conditions d'une autre infraction et que sa condamnation, le cas échéant, pour cette infraction n'aboutisse pas à une aggravation de sa culpabilité. En particulier, au vu des faits retenus, il y a lieu de rechercher si le comportement du recourant envers les deux enfants réalise les conditions d'une omission de prêter secours au sens de l'art. 128 al. 1 CP, qui constitue un délit, punissable de l'emprisonnement ou de l'amende, alors que l'infraction réprimée par l'art. 129 CP est un crime, passible de la réclusion pour cinq ans au plus ou de l'emprisonnement. 
3.1 L'art. 128 al. 1 CP sanctionne le comportement de celui qui n'aura pas prêté secours à une personne qu'il a blessée ou à une personne en danger de mort imminent, alors que l'on pouvait raisonnablement l'exiger de lui, étant donné les circonstances. 
 
Cette disposition réprime une mise en danger abstraite par omission. Elle met à la charge de toute personne qui est en mesure de le faire l'obligation générale de porter secours à autrui en cas d'urgence, sans créer une position de garant. Le secours qui doit être prêté se limite aux actes possibles, que l'on peut raisonnablement exiger de l'auteur et qui peuvent être utiles. Il s'agit de prendre les mesures commandées par les circonstances et un résultat n'est pas exigé (ATF 121 IV 18 consid. 2a p. 20 et les références citées). 
 
 
Dans la deuxième hypothèse prévue à l'art. 128 al. 1 CP, l'obligation de prêter secours suppose que la personne qui en a besoin se trouve en danger de mort imminent, quelle que soit la cause de ce danger. La notion de danger de mort imminent de l'art. 128 al. 1 CP correspond à celle de l'art. 129 CP. Il faut donc qu'il existe la probabilité sérieuse d'une mort prochaine et que ce risque soit en rapport de connexité direct avec le comportement de l'auteur (ATF 121 IV 18 consid. 2a p. 21; cf. également supra, consid. 2.1). La réalisation de cette condition a notamment été admise dans un cas où l'auteur avait abandonné une personne prise d'un malaise à la suite d'une consommation excessive de stupéfiants (ATF 121 IV 18 consid. 2a p. 21 et les références citées). 
 
 
Sur le plan subjectif, l'infraction est intentionnelle. Elle suppose une conscience du danger de mort imminent ainsi que, plus généralement, des conditions qui fondent l'obligation de porter secours, notamment de sa propre capacité de le faire (ATF 121 IV 18 consid. 2a p. 21 et les références citées). Le dol éventuel suffit (cf. ATF 121 IV 18 consid. 2b/bb p. 22/23; voir également Corboz, op. cit., p. 174 n° 54; Schubarth, op. cit., art. 128 CP n° 20; Laurent Moreillon, Omission de porter secours, in RPS 1994 p. 233 ss, p. 248). A cet égard, il doit être rappelé que la détermination, à la suite d'une appréciation des preuves, des représentations subjectives d'une personne relève des constatations de fait, qui lient la Cour de cassation saisie d'un pourvoi en nullité et ne peuvent donc être remises en cause dans le cadre de cette voie de droit (ATF 121 IV 18 consid. 2b/bb p. 23; cf. également ATF 125 IV 49 consid. 2d p. 56 et les arrêts cités; art. 277bis PPF). 
3.2 Des faits retenus, il résulte que le recourant, après avoir tué les mères des enfants, s'est retrouvé seul dans l'appartement avec ces derniers, alors âgés respectivement de 8 et 4 mois, qu'il a quitté les lieux en fermant la porte à clef, abandonnant ainsi les enfants à eux-mêmes, et qu'il n'a rien entrepris pour que ceux-ci soient découverts rapidement, ne signalant notamment à quiconque que des enfants en bas âge se trouvaient seuls dans l'appartement. Il en résulte également que les deux enfants n'ont été découverts que 39 heures plus tard par la police, à la suite d'un appel téléphonique de la concierge de l'immeuble, alertée par des amies de l'une des mères, qui s'étaient inquiétées de son sort, et que, selon les rapports médicaux, ils présentaient une déshydratation modérée lors de leur arrivée à l'hôpital. 
 
Ces constatations relèvent du fait et lient donc la Cour de cassation saisie d'un pourvoi en nullité, de sorte que le recourant n'est pas recevable à les remettre en cause en rediscutant l'appréciation des preuves sur laquelle elles reposent (cf. supra, consid. 1). Toute son argumentation visant à contester qu'il n'a rien entrepris pour secourir les enfants, notamment pour faire en sorte que ceux-ci soient découverts rapidement, est par conséquent irrecevable. 
 
Au vu des faits retenus, il n'est pas contestable que le recourant a omis de prêter secours aux enfants. 
3.3 Comme le relève l'arrêt attaqué, des nourrissons n'ont aucune possibilité de survie par leurs propres moyens s'ils sont livrés à eux-mêmes, sans soins, notamment sans alimentation régulière. Le cas échéant, il existe la probabilité sérieuse que, dans le cours ordinaire des choses, le risque qu'ils ne survivent pas se réalise dans un laps de temps relativement court. La réalisation de ce risque peut notamment résulter d'une déshydratation, qui, s'agissant de nourrissons, peut devenir rapidement fatale, mais aussi d'autres circonstances, telles qu'un étouffement, une chute, etc. 
 
Par ailleurs, lorsque comme en l'espèce, l'auteur, après avoir tué leurs mères, prend la fuite en abandonnant à eux-mêmes des bébés de quelques mois, sans entreprendre quoi que ce soit pour qu'ils puissent être découverts rapidement, plus est en fermant à clef la porte de l'appartement où ils sont laissés seuls, il existe un rapport de connexité direct entre son comportement et le risque que, totalement livrés à eux-mêmes, les nourrissons ne survivent pas au-delà d'un certain laps de temps. 
 
La condition que les victimes se soient trouvées en danger de mort imminent est par conséquent réalisée en l'espèce. Que, dans le cas particulier, les enfants aient finalement été découverts après 39 heures dans un état de déshydratation modéré, n'est en définitive dû qu'à un heureux concours de circonstances indépendant de la volonté du recourant et n'infirme pas la réalisation de la condition d'un danger de mort imminent. 
3.4 Le secours commandé par les circonstances consistait en l'espèce à faire à tout le moins en sorte que les enfants puissent être découverts rapidement. Pour cela, un simple appel téléphonique, fût-ce anonyme depuis une cabine téléphonique, par exemple à des proches, à un organisme officiel ou à un hôpital, suffisait et était de nature à remédier utilement à la situation. 
 
Cette mesure pouvait au demeurant être raisonnablement exigée du recourant compte tenu des circonstances. Cela ne saurait être nié au motif que le recourant, après le double homicide des mères, était en fuite. Si l'on voulait admettre le contraire, l'infraction réprimée par l'art. 128 al. 1 CP ne pourrait plus être retenue à l'encontre de celui qui, pour échapper aux conséquences de son acte, omet de secourir une personne qu'il a lui-même mise en danger de mort imminent, ce qui reviendrait à le privilégier par rapport à celui qui omet de secourir une personne qu'il n'a pas lui-même mise en danger de mort imminent et qui porte donc une responsabilité moins lourde. Un tel résultat serait d'ailleurs contraire à la volonté du législateur. En effet, comme le relève le message du 26 juin 1985 concernant la modification du code pénal relative aux infractions contre la vie et l'intégrité corporelle, celui auquel la détresse de la victime est imputable à faute porte une double responsabilité, qui dépasse l'obligation générale de porter secours et qui fait que, dans de tels cas, ce secours pourra en principe être raisonnablement exigé de lui (FF 1985 II 1021 ss, 1048). 
3.5 L'arrêt attaqué retient que le recourant était conscient du risque mortel qu'il faisait courir aux enfants en les abandonnant livrés à eux-mêmes. Cette constatation relève du fait, de sorte que le recourant est irrecevable à la contester dans son pourvoi (cf. supra, consid. 1 et 3.1 in fine). Au reste, celui-ci ne pouvait manifestement ignorer qu'il lui incombait d'éviter la réalisation du risque de mort des enfants et qu'il lui était possible de le faire. Or, il a quitté les lieux sans aucunement se soucier des enfants, de surcroît en fermant à clef la porte de l'appartement, ce qui réduisait encore les chances que ceux-ci soient découverts spontanément. Il a donc agi intentionnellement, à tout le moins par dol éventuel. 
3.6 Le comportement du recourant réalise ainsi les éléments constitutifs d'une omission de prêter secours au sens de l'art. 128 al. 1 CP
4. 
Au vu de ce qui précède, le pourvoi doit être admis dans la mesure où il est recevable, l'arrêt attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. Celle-ci devra statuer à nouveau sur le comportement du recourant envers les deux enfants, conformément aux considérants du présent arrêt et, par voie de conséquence, sur la peine. S'agissant de ce dernier point, il appartiendra à l'autorité cantonale de faire usage de son pouvoir d'appréciation. On peut toutefois observer que la modification du verdict en ce qui concerne le comportement du recourant envers les deux enfants ne peut diminuer que faiblement sa lourde culpabilité résultant de l'ensemble des infractions commises, notamment du meurtre et de l'assassinat des mères ainsi que de la gravité du cas d'omission de prêter secours, et ne pourra donc avoir qu'une incidence réduite sur la quotité de la peine. 
5. 
Vu l'issue du pourvoi, il ne sera pas perçu de frais (art. 278 al. 2 PPF) et une indemnité sera allouée au mandataire du recourant (art. 278 al. 3 PPF). La requête d'assistance judiciaire devient ainsi sans objet. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le pourvoi est admis dans la mesure où il est recevable, l'arrêt attaqué est annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. 
2. 
Il n'est pas perçu de frais. 
3. 
La Caisse du Tribunal fédéral versera une indemnité de 3000 francs au mandataire du recourant. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Ministère public du canton de Neuchâtel et à la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel. 
Lausanne, le 18 mars 2004 
Au nom de la Cour de cassation pénale 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: