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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6S.260/2002 /rod 
 
Arrêt du 26 novembre 2002 
Cour de cassation pénale 
 
Les juges fédéraux Schubarth, président de la Cour, 
Schneider, Kolly, 
greffière Angéloz. 
 
Ministère public du canton de Vaud, 1014 Lausanne, 
recourant, 
 
contre 
 
X.________, représenté par Me Charles Munoz, avocat, rue du Casino 1, case postale 553, 1401 Yverdon, 
Y.________, représenté par Me Eric Stauffacher, avocat, av. du Théâtre 7, 1002 Lausanne, 
Z.________, représenté par Me Jean Lob, avocat, rue du Lion d'Or 2, case postale 3133, 1002 Lausanne, 
intimés. 
 
prise d'otage qualifiée (art. 185 ch. 2 CP), 
 
pourvoi en nullité contre l'arrêt du Tribunal cantonal vaudois, Cour de cassation pénale, du 20 décembre 2001. 
 
Faits: 
A. 
Par jugement du 27 mars 2001, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne a notamment condamné Y.________, X.________ et Z.________, pour enlèvement et séquestration (art. 183 ch. 1 CP), extorsion qualifiée (art. 156 ch. 3 CP) et prise d'otage (art. 185 ch. 1 CP) ainsi que, chacun d'eux, pour diverses autres infractions, à des peines respectives de 7 ans, 6 ans et 5 ans de réclusion, prononçant en outre leur expulsion. Il a par ailleurs condamné plusieurs coaccusés. 
 
Saisie d'un recours en réforme de chacun des trois condamnés, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois, par arrêt du 20 décembre 2001, a écarté ceux de Y.________ et de X.________ et admis celui de Z.________ en ce sens que l'expulsion prononcée à son encontre a été assortie du sursis avec délai d'épreuve de 5 ans. Par le même arrêt, elle a rejeté les recours formés par le Ministère public à l'encontre des trois accusés. 
B. 
S'agissant des faits pertinents pour le jugement de la présente cause, l'arrêt attaqué retient, en substance, ce qui suit. 
B.a Dans le courant de l'année 1998, B.________ a eu l'idée d'enlever le fils d'amis de ses parents, en vue d'obtenir de la famille de celui-ci une rançon de 5 millions de francs. A cette fin, il a imaginé un plan d'exécution et décidé de recourir à des hommes de main. A la mi-décembre 1998, une première équipe d'hommes de main a tenté à cinq reprises mais sans succès d'enlever la victime. Une seconde équipe a alors été recrutée. Constituée dès le 16 décembre 1998, cette équipe, dont faisaient notamment partie Y.________, X.________ et Z.________, n'a pas été informée immédiatement des réelles intentions criminelles de B.________ et, en particulier, du fait que le rapt avait pour but d'exiger une rançon de la famille de la victime. Dans un premier temps, il lui a en effet été expliqué que la victime était "un type malhonnête", qui devait une importante somme d'argent à B.________, et que le rapt visait à permettre à B.________ de recouvrer sa créance envers celle-ci, qui devait être contrainte de remettre ses cartes bancaires et de crédit afin de pouvoir en disposer. 
 
Après plusieurs tentatives infructueuses entre le soir du 19 décembre et l'après-midi du 21 décembre 1998, la nouvelle équipe est parvenue à ses fins. C'est ainsi que, le 21 décembre 1998, vers 19 heures, la victime a été assaillie près de son véhicule, à la rue de Genève, à Lausanne, par Y.________, X.________ et Z.________, tous trois étant cagoulés et deux d'entre-eux brandissant une arme à feu chargée. Elle a ensuite été jetée sur la banquette arrière d'un véhicule, conduit par un quatrième homme, C.________, puis cagoulée et menottée, avant d'être emmenée dans une grange abandonnée au lieu-dit La Rasse, dans la région d'Evionnaz, en Valais. Sur place, elle a été contrainte, sous menaces de mort, de remettre à ses ravisseurs ses cartes bancaires, postale et de crédit, puis de révéler les numéros de code correspondants. Y.________ et Z.________ ont alors quitté les lieux, munis des cartes et codes, pour aller les remettre à B.________ et toucher l'avance qui leur avait été promise sur la rémunération convenue, tandis que X.________ et C.________ restaient sur place pour garder la victime. 
 
Après avoir reçu, le soir du 21 décembre 1998, l'avance de 10.000 francs promise sur la rémunération convenue, dont le montant avait été porté dans l'intervalle de 30.000 à 120.000 francs, Y.________ a accepté, à la demande de B.________, de garder encore la victime séquestrée pendant 24 heures. Le lendemain 22 décembre 1998, lors d'une rencontre en début d'après-midi, B.________, qui n'était toujours pas parvenu à atteindre les parents de la victime pour exiger la rançon, a proposé à Y.________ de lui verser 240.000 francs, soit le double de la rémunération prévue, s'il acceptait de garder la victime durant 24 heures supplémentaires. Y.________ a accepté, moyennant que la somme promise lui soit versée avant 18 heures. Il a été retenu que dès ce moment-là, soit le 22 décembre en début d'après-midi, Y.________ a su qu'il participait à un rapt qui visait en réalité à obtenir une rançon de la famille de la victime, que Z.________ en a été informé peu après par Y.________, qui l'a rejoint au terme de sa rencontre avec B.________, et que X.________ en a été informé le soir du même jour, lorsque Y.________ l'a rejoint sur les lieux de détention de l'otage. 
 
Le 23 décembre 1998 en fin de matinée, après avoir reçu les 240.000 francs convenus, Y.________, qui était accompagné de Z.________, a accepté derechef, à la demande de B.________, de prolonger la détention de la victime jusque vers 18 heures, moyennant le versement de 30.000 francs supplémentaires; X.________ en a été informé lorsque ses comparses l'ont rejoint en début d'après midi sur les lieux de détention de l'otage. Vers 16 heures, Y.________, Z.________ et X.________, après lui avoir ôté ses menottes, ont fait monter l'otage dans une voiture et se sont mis en route en vue de le relâcher dans un endroit retiré. Lors de ce déplacement, la voiture a été interceptée par la police, qui a libéré l'otage vers 16 heures 20 à Aclens. 
 
La victime a ainsi été séquestrée durant 45 heures, pendant lesquelles la mère de celle-ci a été contactée à plusieurs reprises par B.________, agissant par l'intermédiaire de deux comparses, afin qu'une rançon de 5 millions de francs soit versée en échange de la libération de l'otage; ces revendications ont été assorties de menaces de tuer ou de mutiler la victime. La famille de cette dernière s'est exécutée en versant une somme de 500.000 francs, exigée à titre de premier acompte. 
B.b Y.________ Z.________ et X.________ ont été reconnus coupables d'enlèvement et de séquestration au sens de l'art. 183 ch. 1 CP dans la mesure où ils ignoraient, pour les deux premiers jusqu'au 22 décembre en début d'après-midi et pour le troisième jusqu'au soir du même jour, que le rapt visait à obtenir une rançon de la famille de la victime et de prise d'otage au sens de l'art. 185 ch. 1 CP dans la mesure où, après l'avoir appris, ils avaient gardé la victime prisonnière. S'agissant de cette dernière infraction, la circonstance aggravante de l'art. 185 ch. 2 CP a été écartée en constatant qu'il n'était pas établi que les trois accusés, dès le moment où ils avaient su que le rapt avait pour but d'obtenir une rançon, aient exercé sur l'otage des violences dépassant celles qu'implique l'infraction de base ou l'aient menacé de le tuer, de lui causer des lésions corporelles graves ou de le traiter avec cruauté ni qu'ils aient su que les demandes de rançon adressées à la famille de l'otage étaient assorties de menaces de tuer ou de mutiler ce dernier. Quant à l'infraction d'extorsion qualifiée au sens de l'art. 156 ch. 3 CP, elle a été retenue à l'encontre des trois accusés du fait qu'ils avaient obtenu de la victime qu'elle remette ses cartes bancaires et de crédit et révèle les numéros de code correspondants alors qu'elle se trouvait sous le coup de la violence du rapt et en la menaçant de mort. 
C. 
Le Ministère public se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Soutenant que les trois intimés auraient dû être reconnus coupables de prise d'otage qualifiée au sens de l'art. 185 ch. 2 CP, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué. 
 
La cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt. 
 
Les intimés concluent tous trois au rejet du pourvoi, en sollicitant l'assistance judiciaire. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Saisie d'un pourvoi en nullité, qui ne peut être formé que pour violation du droit fédéral (art. 269 PPF), la Cour de cassation contrôle l'application de ce droit sur la base d'un état de fait définitivement arrêté par l'autorité cantonale (cf. art. 277bis et 273 al. 1 let. b PPF), par lequel elle est donc liée et dont le recourant ne peut s'écarter (ATF 124 IV 53 consid. 1 p. 55, 81 consid. 2a p. 83 et les arrêts cités). 
2. 
Le recourant invoque une violation de l'art. 185 ch. 2 CP, soutenant que le comportement des intimés réalise les conditions de cette disposition. 
2.1 L'art. 185 ch. 1 CP punit de la réclusion celui qui aura séquestré, enlevé une personne ou de toute autre manière s'en sera rendu maître, pour contraindre un tiers à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte ou celui qui, aux mêmes fins, aura profité d'une prise d'otage commise par autrui. Le chiffre 2 de cette disposition sanctionne un cas aggravé de prise d'otage, en prévoyant que la peine sera la réclusion pour trois ans au moins, si l'auteur a menacé de tuer la victime, de lui causer des lésions corporelles graves ou de la traiter avec cruauté. 
 
Ainsi qu'il résulte du Message du Conseil fédéral concernant la modification des dispositions du code pénal et du code pénal militaire relatives aux actes de violence criminels (FF 1980 I 1216 ss), l'art. 185 ch. 2 CP vise les cas où l'auteur assortit ses revendications des menaces énumérées par cette disposition (FF 1980 I 1237). Dès lors, même si le texte légal n'exige pas que les menaces soient adressées exclusivement au tiers que l'auteur veut contraindre et n'exclut donc pas qu'elles soient adressées directement à l'otage, il faut, dans la seconde comme dans la première hypothèse, qu'elles aient été formulées pour déterminer le tiers, par une pression accrue, à satisfaire les revendications de l'auteur, que cette pression soit, à cette fin, exercée sur la victime elle-même ou sur le tiers. 
2.2 Rappelant que la victime a été enlevée par la violence, que ses cartes de crédit et les codes correspondants ont été obtenus d'elle sous le coup de cette violence et en la menaçant de mort et que, par la suite et durant toute sa détention, elle est restée cagoulée, menottée et angoissée par les menaces dont elle avait fait l'objet, le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir nié que le comportement des intimés tombe sous le coup de l'art. 185 ch. 2 CP
 
Ce raisonnement ne peut être suivi. Il est établi en fait que les intimés n'ont su que le 22 décembre 1998, pour deux d'entre eux en début d'après-midi et pour le troisième le soir, que le rapt avait pour but réel de contraindre des tiers à un certain comportement, en l'occurrence de contraindre la famille de la victime à verser une rançon. Seul le comportement qu'ils ont adopté depuis ce moment-là entre donc en considération pour l'application de l'art. 185 CP et, en particulier, du chiffre 2 de cette disposition. Les comportements antérieurs des intimés, pour lesquels ils ont déjà été condamnés en application des art. 183 ch. 1 et 156 ch. 3 CP, ne sauraient leur être imputés une nouvelle fois sous l'angle de l'art. 185 CP. Or, selon les constatations de fait cantonales, qui lient la Cour de céans saisie d'un pourvoi en nullité (cf. supra, consid. 1), depuis le moment où ils ont su que le rapt visait en réalité à obtenir une rançon de la famille de la victime, les intimés n'ont pas menacé cette dernière de la tuer, ni de lui causer des lésions corporelles graves ou de la traiter avec cruauté au sens de l'art. 185 ch. 2 CP. Certes, ils l'ont laissée cagoulée et menottée, mais ce comportement ne visait pas à exercer une pression accrue pour obtenir le versement de la rançon; il n'est en effet pas établi en fait, et le recourant ne le prétend du reste pas, que la famille ait su que la victime était maintenue dans cette situation. En maintenant la victime cagoulée et menottée, les intimés n'ont donc pas agi pour contraindre la famille à verser une rançon. Quant aux menaces que B.________, par l'intermédiaire de comparses, a adressées à la famille de la victime de tuer ou de mutiler cette dernière au cas où la rançon ne serait pas versée, il est établi en fait et, au demeurant, incontesté, que les intimés n'en ont pas eu connaissance. 
 
Dans ces conditions, le refus de la cour cantonale de condamner les intimés pour prise d'otage qualifiée au sens de l'art. 185 ch. 2 CP ne viole pas le droit fédéral. L'unique moyen soulevé et, partant, le pourvoi, doit dès lors être rejeté. 
3. 
Vu le rejet du pourvoi de l'accusateur public, il ne sera pas perçu de frais (art. 278 al. 2 PPF) et une indemnité sera allouée au mandataire de chacun des intimés (art. 278 al. 3 PPF), dont les requêtes d'assistance judiciaire deviennent ainsi sans objet. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le pourvoi est rejeté. 
2. 
Il n'est pas perçu de frais. 
3. 
La Caisse du Tribunal fédéral versera au mandataire de chacun des intimés une indemnité de 2500 francs. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au Ministère public du canton de Vaud, aux mandataires des intimés et au Tribunal cantonal vaudois, Cour de cassation pénale. 
Lausanne, le 26 novembre 2002 
Au nom de la Cour de cassation pénale 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le président: La greffière: