Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
Grössere Schrift
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1B_233/2010 
 
Arrêt du 4 août 2010 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Aemisegger, Juge présidant, Reeb et Eusebio. 
Greffière: Mme Tornay Schaller. 
 
Participants à la procédure 
A.________, représenté par Me Jean-Pierre Garbade, avocat, 
recourant, 
 
contre 
 
B.________, représenté par Me Vincent Spira, avocat, 
intimé, 
 
Ministère public du canton de Genève, case postale 3565, 1204 Genève. 
 
Objet 
Refus de mise en liberté, 
 
recours contre l'ordonnance de la Chambre d'accusation de la Cour de justice du canton de Genève du 9 juillet 2010. 
 
Faits: 
 
A. 
Un mandat d'arrêt a été délivré à l'encontre de A.________, ressortissant marocain, le 3 mars 2010, date à laquelle le Juge d'instruction du canton de Genève l'a inculpé de tentative de meurtre (art. 111 et 22 al. 1 CP), subsidiairement de lésions corporelles graves (art. 122 CP), de menaces (art. 180 CP) et de possession de stupéfiants (art. 19a LStup). Il est notamment reproché au prénommé d'avoir, dans la nuit du 26 au 27 février 2010, vers 1h05, avec un groupe de sept ou huit personnes armées de couteaux et de pierres, porté plusieurs coups de couteau à B.________ ou d'avoir accepté pleinement - ou sans réserve - que ses comparses le fassent. La victime, qui tentait de fuir, aurait reçu au minimum six coups de couteaux, dont au moins un à la hauteur des omoplates et dont un aurait tranché son nerf sciatique provoquant une paralysie de sa jambe gauche. 
La détention préventive du prénommé a été prolongée par ordonnances de la Chambre d'accusation de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: la Chambre d'accusation) des 9 mars et 8 juin 2010, en raison des risques de réitération et de collusion. La procédure a été communiquée au Ministère public du canton de Genève le 30 juin 2010. 
 
B. 
Le 28 janvier 2008, A.________ avait déjà été condamné par la Chambre pénale du canton de Genève pour lésions corporelles simples et infraction à la LStup, à une peine de 18 mois de privation de liberté avec sursis, le délai d'épreuve étant fixé à 5 ans. 
 
C. 
Le 5 juillet 2010, A.________ a formé une demande de mise en liberté provisoire. Par ordonnance du 9 juillet 2010, la Chambre d'accusation a rejeté cette demande, en raison du risque de récidive. 
 
D. 
Agissant par la voie du recours en matière pénale, A.________ demande principalement au Tribunal fédéral d'annuler cette ordonnance et d'ordonner sa mise en liberté immédiate. Il conclut subsidiairement au renvoi de la cause à l'instance précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il requiert en outre l'assistance judiciaire. 
Invité à se déterminer, B.________ conclut au rejet du recours. La Chambre d'accusation fait de même en se référant aux considérants de l'ordonnance attaquée. Le Ministère public du canton de Genève conclut aussi au rejet du recours, en raison des risques de fuite et de récidive. Le recourant a répliqué. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
Le recours en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF) est ouvert contre une décision relative au maintien en détention préventive. Formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision prise en dernière instance cantonale (art. 80 LTF) et qui touche le recourant dans ses intérêts juridiquement protégés (art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF), le recours en matière pénale est recevable. 
 
2. 
Une mesure de détention préventive n'est compatible avec la liberté personnelle, garantie par les art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH, que si elle repose sur une base légale (art. 31 al. 1 et 36 al. 1 Cst.), soit en l'espèce l'art. 34 du code de procédure pénale du canton de Genève du 29 septembre 1977 (CPP/GE; RSG E 4 20). Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 2 et 3 Cst.; ATF 123 I 268 consid. 2c p. 270). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiée par les besoins de l'instruction, un risque de fuite ou un danger de collusion et de réitération (cf. art. 34 let. a à c CPP/GE). La gravité de l'infraction et l'importance de la peine encourue ne sont, à elles seules, pas suffisantes (ATF 125 I 60 consid. 3a p. 62; 117 Ia 69 consid. 4a p. 70). Préalablement à ces conditions, il doit exister à l'égard de l'intéressé des charges suffisantes (art. 5 par. 1 let. c CEDH; ATF 116 Ia 144 consid. 3; art. 34 in initio CPP/GE). S'agissant d'une restriction grave à la liberté personnelle, le Tribunal fédéral examine librement ces questions, sous réserve toutefois de l'appréciation des preuves, revue sous l'angle de l'arbitraire (ATF 123 I 268 consid. 2d p. 271). 
 
3. 
Le recourant relève d'abord un certain nombre d'éléments qui ressortiraient du dossier et qui n'auraient pas été retenus dans l'ordonnance attaquée. Il soutient que ces faits seraient des indices concrets de son absence de culpabilité. A cet égard, il se plaint d'une constatation arbitraire des faits (97 LTF) et d'une violation de sa liberté personnelle (art. 5 ch. a let. c CEDH). 
 
3.1 En principe, le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Toutefois, selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recourant peut critiquer les constatations de faits à la double condition que ceux-ci aient été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF et que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause, ce qu'il doit rendre vraisemblable par une argumentation répondant aux exigences de l'art. 42 al. 2 LTF, respectivement de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3 p. 254 s.). 
Selon la jurisprudence, l'arbitraire, prohibé par l'art. 9 Cst., ne résulte pas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu'elle serait préférable; le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'instance précédente que si elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté ou si elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice ou de l'équité. Il ne suffit pas que la motivation de la décision soit insoutenable; encore faut-il qu'elle soit arbitraire dans son résultat (ATF 135 V 2 consid. 1.3 p. 4; 134 I 263 consid. 3.1 p. 265 s. et les arrêts cités). Il appartient au recourant de démontrer l'arbitraire de la décision attaquée, conformément aux exigences de motivation déduites de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 134 I 263 consid. 3.1 p. 265; 133 I 149 consid. 3.1 p. 153 et les références). 
 
3.2 Pour qu'une personne soit placée en détention préventive, il doit exister à son égard des charges suffisantes ou des indices sérieux de culpabilité, c'est-à-dire des raisons plausibles de la soupçonner d'avoir commis une infraction. L'intensité des charges propres à motiver un maintien en détention préventive n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître vraisemblable après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables (ATF 116 Ia 143 consid. 3c p. 146; Gérard Piquerez, Traité de procédure pénale suisse, 2e éd., 2006, p. 540 et les références). 
Appelé à se prononcer sur la constitutionnalité d'une décision de maintien en détention, le Tribunal fédéral n'a pas à procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge, ni à apprécier la crédibilité des éléments de preuve mettant en cause le condamné. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure, c'est-à-dire des raisons plausibles de soupçonner l'accusé d'avoir commis une infraction (ATF 116 Ia 143 consid. 3c p. 146; art. 34 in initio CPP/GE). 
 
3.3 En l'espèce, le recourant soulève d'abord des constatations de fait qui ne sont pas susceptibles d'avoir une influence déterminante sur l'issue de la procédure. Il en va ainsi du fait que C.________, amie de la victime, aurait déclaré à la police avoir appris la participation du prévenu à l'agression par l'intermédiaire de B.________, alors que devant le Juge d'instruction, elle aurait précisé le tenir de D.________. Tel est également le cas du fait que la tentative de A.________ d'appeler la prénommée n'aurait duré que 5 secondes et que celle-ci l'aurait rappelé et lui aurait parlé pendant 52 secondes, selon l'analyse des rétroactifs téléphoniques. De même, le reproche du recourant quant au fait que l'ordonnance attaquée aurait dû se contenter de retenir que le nerf sciatique de la jambe de la victime avait été sectionné, sans mentionner que celle-ci avait perdu l'usage d'une jambe, est vain. Vu le raisonnement qui suit, un éventuel complément de l'état de fait litigieux ne permettrait pas de trancher différemment la question de la mise en liberté du recourant. 
 
3.4 Le recourant soutient ensuite que l'instruction n'aurait pas permis d'étayer le soupçon qu'il se soit trouvé sur place au lieu de l'agression comme le prétendent la victime et son ami D.________. Les quatre co-inculpés du recourant E.________, F.________ et G.________ auraient déclaré de façon concordante que l'intéressé ne se trouvait pas sur les lieux de l'agression. F.________ et E.________, qui se trouvaient au domicile du recourant une heure avant l'agression, auraient nié que A.________ leur aurait demandé d'agresser la victime. C.________, dont les déclarations auraient varié au cours de l'instruction, n'aurait d'ailleurs pas confirmé au Juge d'instruction avoir vu A.________ donner un coup de couteau. Il ressortirait aussi de l'analyse des rétroactifs téléphoniques que deux co-inculpés auraient appelé le recourant dans les minutes précédant l'agression sur son téléphone portable, lequel se trouvait à ce moment-là à son domicile à plus d'un kilomètre du lieu de l'agression. Enfin, les charges ne seraient pas non plus suffisamment précises et concrètes pour conclure à la vraisemblance de la culpabilité du recourant en tant que complice ou instigateur. 
Partant, le recourant perd de vue qu'il n'appartient pas au juge de la détention provisoire d'examiner en détail ces considérations de fait, pas plus que d'apprécier la crédibilité des témoignages; il lui incombe uniquement de vérifier, sous l'angle de la vraisemblance, que le maintien en détention avant jugement repose sur des indices de culpabilité suffisants. Or, les déclarations de la victime et de C.________ - selon lesquelles le prévenu aurait participé à l'agression - constituent des indices parmi d'autres et elles peuvent être prises en compte dans la mesure où elles n'apparaissent pas d'emblée invraisemblables, compte tenu notamment des antécédents du recourant. Ce d'autant plus que l'intéressé se voit reprocher un délit de violence grave, soit des lésions corporelles graves perpétrées en groupe et avec des couteaux. C'est donc en vain qu'il discute minutieusement le déroulement des faits, car c'est au juge du fond qu'il appartiendra d'apprécier les éléments à charge et à décharge et de déterminer dans quelle mesure le recourant est impliqué dans les actes qui ont fait l'objet de l'instruction. En l'état, on peut donc admettre, à l'instar de la Chambre d'accusation, que même si la présence du prévenu sur les lieux de l'agression n'était pas retenue, il existe des charges suffisantes à son encontre pour justifier un maintien en détention. 
 
4. 
Le recourant conteste également l'existence d'un risque de récidive retenu par le Tribunal cantonal pour motiver son maintien en détention. 
 
4.1 Selon la jurisprudence, le maintien en détention se justifie s'il y a lieu de présumer, avec une certaine vraisemblance, qu'il existe un danger de récidive. Il convient de faire preuve de retenue dans l'appréciation d'un tel risque: le maintien en détention ne peut se justifier pour ce motif que si le pronostic est très défavorable et que les délits dont l'autorité redoute la réitération sont graves (ATF 125 I 60 consid. 3a p. 62, 361 consid. 5 p. 367; 124 I 208 consid. 5 p. 213; 123 I 268 consid. 2c p. 270 et les arrêts cités). La jurisprudence se montre toutefois moins stricte dans l'exigence de vraisemblance lorsqu'il s'agit de délits de violence graves ou de délits sexuels, car le risque à faire courir aux victimes potentielles est alors considéré comme trop important; en pareil cas, il convient de tenir compte de l'état psychique du prévenu, de son imprévisibilité ou de son agressivité (ATF 123 I 268 consid. 2e p. 271). 
 
4.2 En l'occurrence, les actes reprochés au recourant apparaissent d'une violence grave, de nombreux coups ayant été portés en groupe et à l'aide de couteaux. Il ressort en outre du rapport établi par le Centre romand de médecine légale des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) que la victime a été grièvement blessée et qu'elle souffre d'un traumatisme crânien, d'une plaie thoracique gauche, d'une plaie lombaire ainsi que de plusieurs plaies de la région fessière gauche avec perte motrice et sensitive sur le territoire du nerf sciatique. De plus, en décembre 2008, l'intéressé avait déjà fait l'objet d'une condamnation pour lésions corporelles simples et infraction à la LStup, à une peine de 18 mois de privation de liberté avec sursis, le délai d'épreuve étant fixé à 5 ans. Il a donc non seulement récidivé durant le délai d'épreuve, mais a commis une infraction de même nature, plus grave. S'ajoute à cela le fait que certains des participants ne semblaient même pas connaître la victime et encore moins les motifs à l'origine de ces actes de violence. Par conséquent, en l'état, le risque de récidive apparaît suffisamment plausible pour justifier le maintien en détention. 
 
4.3 L'affirmation d'un risque de récidive dispense d'examiner le risque de fuite, lequel n'a d'ailleurs pas été mentionné par la Chambre d'accusation dans l'ordonnance attaquée. 
 
5. 
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté. Dès lors que le recourant est dans le besoin et que ses conclusions ne paraissaient pas d'emblée vouées à l'échec, l'assistance judiciaire doit lui être accordée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant requiert la désignation de Me Jean-Pierre Garbade en qualité d'avocat d'office. Il y a lieu de faire droit à cette requête et de fixer d'office les honoraires de l'avocat, qui seront supportés par la caisse du Tribunal fédéral (art. 64 al. 2 LTF). Le recourant est en outre dispensé des frais judiciaires (art. 64 al. 1 LTF). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté. 
 
2. 
La demande d'assistance judiciaire est admise. Me Jean-Pierre Garbade est désigné comme défenseur d'office du recourant et ses honoraires, supportés par la caisse du Tribunal fédéral, sont fixés à 1'500 francs. 
 
3. 
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
4. 
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties ainsi qu'au Ministère public et à la Chambre d'accusation de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
Lausanne, le 4 août 2010 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Juge présidant: La Greffière: 
 
Aemisegger Tornay Schaller