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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4A_632/2009 
 
Arrêt du 5 janvier 2010 
Ire Cour de droit civil 
 
Composition 
Mme et MM. les Juges Klett, présidente, Corboz et Kolly. 
Greffière: Mme Cornaz. 
 
Parties 
X.________, représenté par Me Joël Vuilleumier, 
recourant, 
 
contre 
 
Y.________, représenté par Me Charles Poupon, 
intimé. 
 
Objet 
bail à loyer; expulsion, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour civile du Tribunal cantonal jurassien du 30 octobre 2009. 
 
Faits: 
 
A. 
Le 23 janvier 2008, un contrat de bail avec effet dès le 1er juin 2008 portant sur l'hôtel-restaurant et discothèque de "U.________" à ... a été signé entre X.________ et A.________, lequel agissait au nom de la propriétaire de l'immeuble, la société B.________ SA. Le 16 mai 2008, cette dernière a été dissoute et sa liquidation selon les dispositions applicables à la faillite ordonnée. Y.________ a acquis l'immeuble concerné dans le cadre de la vente aux enchères publiques du 28 mai 2009. Le procès-verbal d'adjudication établi par l'office des faillites précise qu'aucun contrat de bail ne grève l'immeuble. 
 
B. 
Le 23 juillet 2009, Y.________ a introduit contre X.________ une "requête à fin de mesures préliminaires et à fin de mesures provisoires" devant le Juge civil du Tribunal de première instance jurassien; il concluait principalement au déguerpissement immédiat de X.________ de l'établissement "U.________". Par ordonnance du 17 août 2009, le magistrat susmentionné a rejeté la requête. 
 
Statuant sur appel de Y.________ par arrêt du 30 octobre 2009, la Cour civile du Tribunal cantonal jurassien a modifié l'ordonnance attaquée et ordonné l'évacuation de X.________ des locaux qu'il occupait; en résumé, elle a admis que Y.________ avait agi sans tarder et rendu vraisemblable un besoin rapide de protection par la voie sommaire, tandis par contre que X.________ n'avait nullement rendu vraisemblable ni établi d'aucune manière l'existence d'un contrat de bail. 
 
C. 
X.________ (le recourant) interjette un recours en matière civile au Tribunal fédéral; il conclut principalement au rejet de la requête de mesures provisoires de son adverse partie, subsidiairement au renvoi de la cause à l'autorité précédente; il demande également sa mise au bénéfice de l'assistance judiciaire et la désignation de son conseil comme avocat d'office. Y.________ (l'intimé) n'a pas été invité à se déterminer sur le recours. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
L'arrêt attaqué statue sur une requête de mesures provisoires. Selon le droit de procédure jurassien applicable, de telles mesures peuvent être ordonnées notamment pour rentrer en possession d'une chose indûment retenue (art. 327 al. 1 ch. 2 du code de procédure civile [de la République et Canton du Jura] du 9 novembre 1978 [CPC/JU; RSJU 271.1]). Elles ne liquident pas définitivement le litige, mais accordent une protection provisoire; il s'agit de mesures provisionnelles au sens de l'art. 98 LTF (cf. ATF 133 III 638 consid. 2). 
 
Dans le cas des recours formés contre des décisions portant sur des mesures provisionnelles, seule peut être invoquée la violation des droits constitutionnels (art. 98 LTF); en l'espèce, le recourant se plaint uniquement d'une violation de tels droits, et ce à deux égards. 
 
2. 
Dans un premier grief, le recourant se plaint d'arbitraire parce que l'autorité cantonale ne s'est pas penchée sur la question de la prescription de la prétention selon l'art. 929 al. 2 CC. Il soutient que dès lors qu'il occupait les locaux depuis le 1er juin 2008, l'action possessoire soumise à un délai de prescription d'une année était prescrite au moment où la Cour civile a statué. 
 
2.1 L'arrêt entrepris est fondé sur le droit cantonal, à savoir l'art. 327 al. 1 ch. 2 CPC/JU, et non pas sur les art. 927 ss CC relatifs à l'action possessoire qui, au demeurant, n'est, selon la doctrine, pas ouverte à l'acquéreur d'un immeuble qui n'en a jamais eu la possession (cf. Stark/Wolfgang, in Basler Kommentar, 3e éd. 2007, n° 3 in fine ad art. 927 CC). Le grief est d'emblée infondé. 
 
2.2 Au demeurant, la critique serait aussi dénuée de fondement si l'art. 929 al. 2 CC était applicable. 
 
A teneur de cette disposition, l'action en raison du trouble de la possession se prescrit ("verjährt" et "si prescrive" dans les versions allemande et italienne du texte) par un an; ce délai court dès le jour de l'usurpation ou du trouble, même si le possesseur n'a connu que plus tard l'atteinte subie et l'auteur de celle-ci. 
La nature du délai est controversée en doctrine. Certains auteurs, se fondant sur le texte légal, y voient un délai de prescription, tandis que d'autres, se basant sur la nature de l'action possessoire, y voient un délai de péremption (cf. Steinauer, Les droits réels, tome I, 4e éd. 2007, n° 351 s.; Stark, Berner Kommentar, 3e éd. 2001, n° 8 ad art. 929 CC). La question n'ayant à ce jour pas été tranchée par le Tribunal fédéral, il n'y a pas arbitraire à préférer une opinion plutôt que l'autre. 
 
Si l'on retient que le délai est un délai de prescription, le grief du recourant apparait infondé. En effet, le juge ne peut suppléer d'office le moyen résultant de la prescription (art. 142 CO et art. 7 CC). Or, il ne ressort pas des faits constatés dans l'arrêt querellé, qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), que le recourant aurait invoqué la prescription en instance cantonale; il ne le prétend d'ailleurs même pas dans son recours. 
 
Si l'on retient que le délai est un délai de péremption, le grief du recourant paraît également dénué de fondement. En effet, il est admis par la doctrine qu'en cas de changement de possesseur, un nouveau délai de péremption commence à courir (Stark, op. cit., n° 13 in fine ad art. 929 CC). Le nouveau délai d'un an, courant dès l'achat de l'immeuble le 28 mai 2009, n'aurait ainsi pas été échu au moment où la Cour civile a rendu l'arrêt attaqué. 
 
3. 
Dans son second moyen, le recourant se plaint en même temps d'une application arbitraire de l'art. 327 CPC/JU, de constatations arbitraires de faits et de violation du droit d'être entendu par le refus d'administrer des preuves. 
 
3.1 Le Tribunal fédéral n'examine que les griefs constitutionnels expressément invoqués et motivés (art. 106 al. 2 LTF). L'acte de recours doit, sous peine d'irrecevabilité, contenir un exposé succinct des droits ou principes constitutionnels violés; le recourant doit discuter les attendus de la décision attaquée et exposer de manière claire et circonstanciée en quoi consiste la violation du droit constitutionnel (cf. ATF 134 II 244 consid. 2.2; 134 V 138 consid. 2.1). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que si le juge n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, si, sur la base des éléments recueillis, il a fait des déductions insoutenables, ou encore s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision attaquée (ATF 129 I 8 consid. 2.1). Lorsqu'il s'agit d'interprétation et d'application du droit cantonal, arbitraire et violation de la loi ne doivent pas être confondus; une violation de la loi doit être manifeste et reconnue d'emblée pour être considérée comme arbitraire. Le Tribunal fédéral n'a pas à examiner quelle est l'interprétation correcte que l'autorité cantonale aurait dû donner des dispositions applicables; il doit uniquement se prononcer sur le caractère défendable de l'application ou de l'interprétation du droit cantonal qui a été faite. Il n'y a pas arbitraire du fait qu'une autre solution paraît également concevable, voire même préférable (ATF 133 III 462 consid. 4.4.1). 
 
Le grief présentement soumis au Tribunal fédéral ne satisfait pas à ces exigences; truffer un exposé appellatoire du mot "arbitraire" ne suffit pas. Le recourant, mélangeant les critiques relatives à différents droits constitutionnels, se limite en réalité à exposer son point de vue. Il ne peut en particulier pas se borner à soutenir que le droit cantonal a été appliqué faussement et que des preuves n'ont pas été appréciées correctement; il faut démontrer qu'ils l'ont été de manière insoutenable. 
 
3.2 A supposer que le moyen soit recevable, il ne pourrait au demeurant qu'être rejeté en l'état. 
 
La requête de mesures provisoires visait à entrer en possession d'une chose indûment retenue. Il est admis que l'intimé est propriétaire de l'immeuble. Le recourant prétend toutefois avoir un meilleur droit à la possession de l'immeuble en raison d'un contrat de bail et donc ne pas le retenir indûment. La Cour civile a admis que le recourant supportait le fardeau de la preuve de l'existence du contrat de bail et qu'au stade de mesures provisionnelles, une preuve stricte n'était pas nécessaire, une certaine vraisemblance suffisant pour faire échec à une requête provisoire d'expulsion. On ne discerne pas en quoi elle aurait ainsi interprété l'art. 327 CPC/JU de manière insoutenable, dès lors que celui qui soutient avoir un meilleur droit à la possession que le propriétaire supporte en principe le fardeau de la preuve de ce meilleur droit (cf. Steinauer, op. cit., n° 1022; Meier-Hayoz, Berner Kommentar, 5e éd. 1981, n° 63 ss ad art. 641 CC). Le recourant n'en dit mot et se limite à affirmer qu'il appartenait au contraire à l'intimé de rendre hautement vraisemblable qu'il n'existait pas de contrat de bail. 
 
La Cour civile a retenu en fait que le recourant n'avait nullement rendu vraisemblable l'existence d'un contrat de bail. Cette appréciation est notamment fondée sur les faits suivants: A.________, qui a signé le contrat de bail au nom de l'ancienne propriétaire, a déclaré qu'il s'agissait d'un contrat simulé; l'administrateur de l'ancienne propriétaire ignorait tout de ce contrat; celle-ci n'a jamais encaissé de loyer. Le recourant ne conteste pas les propos de A.________; il relève simplement qu'on voit mal les raisons pour lesquelles celui-ci lui aurait néanmoins remis les clés de l'immeuble. Il soutient en outre que des loyers ont été versés et critique, sans autre démonstration, le fait qu'un témoin présent lors d'un prétendu premier versement en espèces n'a pas été entendu malgré sa requête. Cela ne suffit évidemment pas à démontrer une appréciation arbitraire des déclarations de A.________, ni une violation du droit d'être entendu. 
 
4. 
Le recours est manifestement infondé. Un échange d'écritures n'est dès lors pas nécessaire (cf. art. 102 al. 1 LTF) avant de rendre l'arrêt au fond. Cela permet d'éviter des frais et d'accélérer la procédure. 
 
5. 
Le recourant a demandé sa mise au bénéfice de l'assistance judiciaire et la désignation de son conseil comme avocat d'office pour la présente procédure de recours. 
 
Toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert (art. 29 al. 3 Cst.). 
 
Un procès est dépourvu de chances de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre et qu'elles ne peuvent donc pas être considérées comme sérieuses, de sorte qu'une personne raisonnable et de condition aisée renoncerait à s'y engager en raison des frais qu'elle s'exposerait à devoir supporter; il ne l'est pas, en revanche, lorsque les chances de succès et les risques d'échec s'équilibrent à peu près, ou que les premières ne sont que légèrement inférieures aux secondes. La situation doit être appréciée à la date du dépôt de la requête et sur la base d'un examen sommaire (ATF 133 III 614 consid. 5). 
 
En l'occurrence, le recours apparaissant d'emblée sans chances de succès, la demande d'assistance judiciaire ne peut qu'être rejetée. Le recourant supporte en conséquence les frais judiciaires de la présente procédure (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est en revanche pas alloué de dépens à l'intimé, qui n'a pas été invité à se déterminer sur le recours. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2. 
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4. 
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Cour civile du Tribunal cantonal jurassien. 
 
Lausanne, le 5 janvier 2010 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
La Présidente: La Greffière: 
 
Klett Cornaz