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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1B_139/2023  
 
 
Arrêt du 5 avril 2023  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Merz et Kölz. 
Greffière : Mme Nasel. 
 
Participants à la procédure 
A.________, représenté par Me Daniel Hirschi-Duckert, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Neuchâtel, passage de la Bonne-Fontaine 41, 2300 La Chaux-de-Fonds. 
 
Objet 
Détention pour des motifs de sûreté, 
 
recours contre la décision de la Cour pénale du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel du 9 février 2023 (CPEN.2022.30/ca). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 21 mars 2022, le Tribunal criminel des Montagnes et du Val-de-Ruz (Tribunal) a condamné A.________ à une peine privative de liberté de 44 mois pour menaces, tentative de contrainte sexuelle, viol et lésions corporelles simples sur la personne de B.________ (son amie jusqu'en juillet 2020), menaces sur la personne C.________ (son amie jusqu'en 2015 et mère de leur fille commune née en 2015) et infractions à la LStup (RS 812.121) et à la LCR (RS 741.01). Le Tribunal a également ordonné son expulsion de Suisse pour cinq ans ainsi que sa mise en détention pour des motifs de sûreté. A.________ faisait déjà l'objet de quatre condamnations en 2013 (brigandage, contrainte, violation de la LStup) et 2019 (infractions à la LCR, contrainte et violation de la LStup, violation grave de la LCR et consommation de stupéfiants). 
Statuant le 9 février 2023 sur l'appel du prévenu et l'appel joint du Ministère public de la République et canton de Neuchâtel (Ministère public), la Cour pénale du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel (Cour pénale) a modifié le jugement de première instance en ce sens que A.________ a été condamné à une peine privative de liberté de 40 mois, dont à déduire la détention provisoire ou à titre de mesures de sûreté; l'expulsion du prénommé a été confirmée pour une durée de cinq ans. Selon une décision distincte du même jour, la Cour pénale a en outre ordonné le maintien en détention du prénommé à titre de sûreté, considérant qu'il existait des risques de fuite et de récidive. 
 
B.  
Par acte du 13 mars 2023, A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre cette dernière décision, par lequel il conclut à ce que sa libération immédiate soit ordonnée, subsidiairement moyennant les mesures de substitution suivantes: 
 
- obligation de rechercher ou de maintenir une activité professionnelle ou occupationnelle régulière; 
- obligation de s'abstenir de produits stupéfiants et excitants avec obligation de se soumettre à des prises d'urine, 
- obligation de suivre le groupe de parole du service d'aide aux auteurs de violence conjugale (SAVC); 
- obligation de se soumettre à une assistance de probation. 
Plus subsidiairement encore, A.________ demande le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Il sollicite par ailleurs l'assistance judiciaire. 
Le Ministère public a renoncé à déposer une réponse, tandis que la Cour pénale a fait part de ses observations, constatant que le recourant ne discutait pas le risque de fuite retenu. Le recourant s'est déterminé le 29 mars 2023. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours en matière pénale est ouvert contre une décision relative à la détention pour des motifs de sûreté au sens des art. 212 ss CPP (ATF 137 IV 22 consid. 1). Selon l'art. 81 al. 1 let. a et let. b ch. 1 LTF, l'accusé, condamné en première et deuxième instances et détenu, a qualité pour recourir. Pour le surplus, le recours a été formé en temps utile contre une décision rendue en dernière instance cantonale et les conclusions présentées sont recevables au regard de l'art. 107 al. 2 LTF. Partant, il y a lieu d'entrer en matière. 
 
2.  
Le recourant conteste l'existence de soupçons suffisants de la commission d'infractions (cf. art. 221 al. 1 CPP) et fait valoir une violation de la maxime de l'instruction (art. 6 CPP) ainsi qu'une appréciation arbitraire des preuves. Il reproche à l'autorité précédente de ne pas avoir tenu compte du retrait de plainte de B.________, respectivement de ses rétractations lors de l'audience d'appel du 9 février 2023 en lien avec les infractions de viol et de tentative de contrainte sexuelle pour lesquelles il a été condamné. 
 
2.1. Une mesure de détention provisoire ou pour des motifs de sûreté n'est compatible avec la liberté personnelle (art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH) que si elle repose sur une base légale (art. 31 al. 1 et 36 al. 1 Cst.), soit en l'espèce l'art. 221 CPP. Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 2 et 3 Cst.; art. 212 al. 3 et 237 al. 1 CPP). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiée par un risque de fuite ou par un danger de collusion ou de réitération (cf. art. 221 al. 1 let. a, b et c CPP). Préalablement à ces conditions, il doit exister des charges suffisantes, soit de sérieux soupçons de culpabilité, à l'égard de l'intéressé (art. 221 al. 1 CPP), c'est-à-dire des raisons plausibles de le soupçonner d'avoir commis une infraction.  
En principe, la mise en accusation au sens de l'art. 324 ss CPP fonde de forts soupçons de la commission d'un crime ou d'un délit - il en va a fortiori de même d'une condamnation en première instance, confirmée en appel - à moins que le prévenu soit en mesure de démontrer le caractère insoutenable d'une telle suspicion (cf. arrêts 1B_9/2023 du 26 janvier 2023 consid. 3; 1B_195/2022 du 3 mai 2022 consid. 2.1.1; 1B_474/2021 du 22 septembre 2021 consid. 2.2.1; 1B_262/2021 du 11 juin 2021 consid. 3.2; 1B_273/2018 du 17 août 2018 consid. 4.3.4). 
 
2.2. Le recourant perd de vue qu'il n'appartient pas au juge de la détention d'examiner en détail l'ensemble des considérations de fait, pas plus que de procéder à une appréciation complète des éléments à charge et à décharge; il lui incombe uniquement de vérifier, sous l'angle de la vraisemblance, que le maintien en détention repose sur des indices de culpabilité suffisants (cf. ATF 143 IV 330 consid. 2.1; 143 IV 316 consid. 3.1).  
Or, tel est le cas en l'espèce. D'une part, la décision attaquée mentionne expressément l'audience du 9 février 2023, au cours de laquelle B.________ a été entendue. Malgré les rétractations de cette dernière à cette occasion, la Cour pénale a condamné le recourant le même jour pour viol et tentative de contrainte sexuelle. C'est donc qu'elle a considéré que les déclarations de B.________ ne permettaient pas d'infirmer ses accusations initialement formulées. D'autre part, les nouvelles allégations de B.________ sont intervenues alors qu'elle et le recourant ont repris, selon les dires de ce dernier, une vie de couple entre sa libération le 23 octobre 2020 et sa mise en détention pour des motifs de sûreté le 21 mars 2022. Il n'est dès lors pas exclu que le recourant ait pu exercer des pressions sur la prénommée. Dans ces circonstances, étant encore rappelé que les faits en cause sont poursuivis d'office, le retrait de plainte de B.________, respectivement ses rétractations lors de l'audience d'appel du 9 février 2023 ne sont pas de nature à mettre en doute l'existence de charges suffisantes à l'encontre du recourant, lesquelles reposent sur un jugement de première instance, confirmé en appel. Le grief doit dès lors être rejeté. 
 
3.  
Le recourant conteste ensuite l'existence d'un risque de récidive et propose diverses mesures de substitution pour l'écarter. 
 
3.1.  
 
3.1.1. En vertu de l'art. 221 al. 1 CPP, la détention pour des motifs de sûreté peut être ordonnée lorsqu'il y a sérieusement lieu de craindre que le prévenu se soustraie à la procédure pénale ou à la sanction prévisible en prenant la fuite (let. a) ou compromette sérieusement la sécurité d'autrui par des crimes ou des délits graves après avoir déjà commis des infractions du même genre (let. c). Un seul de ces deux motifs suffit pour maintenir la détention pour des motifs de sûreté.  
Pour admettre un risque de récidive au sens de l'art. 221 al. 1 let. c CPP, les infractions redoutées, tout comme les antécédents, doivent être des crimes ou des délits graves, en premier lieu les délits contre l'intégrité corporelle et sexuelle. En outre, il doit exister un pronostic défavorable reposant sur la fréquence et l'intensité des infractions poursuivies ainsi que sur les caractéristiques personnelles du prévenu (ATF 146 IV 326 consid. 3.1). Le risque de récidive peut se fonder sur les infractions faisant l'objet de la procédure pénale en cours, si le prévenu est fortement soupçonné de les avoir commises (ATF 143 IV 9 consid. 2.3.1). 
 
3.1.2. Conformément au principe de la proportionnalité ancré à l'art. 36 al. 3 Cst., il convient d'examiner les possibilités de mettre en oeuvre d'autres solutions moins dommageables que la détention (règle de la nécessité). Cette exigence est concrétisée par l'art. 237 al. 1 CPP, qui prévoit que le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures moins sévères en lieu et place de la détention si ces mesures permettent d'atteindre le même but que la détention.  
 
3.2. En l'espèce, pour confirmer le maintien en détention pour des motifs de sûreté du recourant, la Cour pénale a considéré qu'il existait non seulement un risque de récidive mais également un risque de fuite, qu'aucune mesure de substitution n'était apte à prévenir. L'autorité s'est ainsi fondée sur une double motivation. Or, lorsque la décision attaquée comporte ainsi plusieurs motivations indépendantes dont chacune suffit à sceller le sort de la cause, il appartient à la partie recourante, sous peine d'irrecevabilité, de s'attaquer conformément aux art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF à chacune d'entre elles et, pour obtenir gain de cause, de démontrer que ces deux motivations sont contraires au droit (parmi plusieurs: ATF 142 III 364 consid. 2.4). En l'occurrence, le recourant ne soulève aucune argumentation tendant à démontrer que la seconde motivation développée par l'instance précédente en lien avec le risque de fuite serait erronée. Faute de discuter les deux pans de la décision cantonale, son moyen est irrecevable. A supposer même qu'il ait été recevable, il n'aurait pu être qu'écarté pour les motifs qui suivent.  
En effet, le recourant a été condamné pour avoir frappé B.________ à de multiples reprises à coups de poing et de pied, entre début 2019 et juillet 2020 (ce qu'il a admis), et de l'avoir menacée et violée le 31 juillet 2020 (ce qu'il conteste). Ces comportements, établis par les débats devant les juges du fond et désormais constatés dans le jugement de première instance et confirmés en appel, sont suffisamment graves pour permettre de retenir un risque de réitération. La Cour pénale s'est fondée à cet égard sur l'expertise psychiatrique du 13 novembre 2020 qui estime que les comportements de violences conjugales sont fortement à craindre tant auprès de B.________ qu'avec de nouvelles relations intimes et qu'en l'absence de contrôle des différents facteurs de risque, soit la consommation d'alcool et de stupéfiants, ce risque de récidive est de probabilité très élevée. 
Comme l'a retenu la cour cantonale, rien ne permet à ce stade de supposer que, depuis la date de l'expertise du 13 novembre 2020, respectivement l'arrêt rendu le 20 mai 2022 par le Tribunal fédéral dans cette même affaire confirmant la détention du recourant pour des motifs de sûreté ordonnée le 21 mars 2022 (1B_228/2022), le risque de récidive serait écarté. Ainsi que cela ressort de la décision entreprise, le Centre neuchâtelois de psychiatrie a confirmé le 20 mai 2021 l'échec de la tentative d'initier un suivi régulier du prévenu au Service pour les auteur-e-s de violence conjugale (SAVC), précisant qu'un échec risquait de se reproduire pour toute injonction de soin relative à une prise en charge thérapeutique reposant sur la communication verbale. Quant au rapport de situation du 21 mai 2021 de l'Office d'exécution des sanctions et de probation, il en ressort que le recourant n'a pas évolué quant à son positionnement au sujet des faits. 
Le recourant ne dit toujours rien sur le traitement actuel de ses addictions, alors qu'il avait déjà été condamné par le passé pour des faits de violence en lien avec des infractions à la LStup (cf. arrêt 1B_228/2022 du 20 mai 2022 consid. 4.2). Contrairement à ce qu'il soutient, la reprise de la vie de couple avec la victime dès la fin de sa première période de détention et le fait qu'ils conçoivent actuellement des projets de mariage ne viennent pas amoindrir le risque de réitération mais le renforcer. En effet, l'expertise précitée relève sur ce point que la persistance des sentiments amoureux à l'égard de B.________ est "plutôt aggravante". 
 
3.3. Quant aux mesures de substitution proposées par le recourant, elles ne sont manifestement pas suffisantes pour pallier le risque de fuite retenu. Elles ne permettraient pas non plus d'exclure, en l'état, tout risque de récidive. En effet, comme déjà évoqué, le recourant n'indique rien sur le traitement actuel de ses addictions. On ignore dès lors le réel niveau d'adhésion et de réceptivité de ce dernier à une mesure sous la forme d'une obligation d'abstinence contrôlée. On sait en revanche que le recourant n'a pas souscrit au suivi du groupe de parole du SAVC, puisque le Centre neuchâtelois de psychiatrie a confirmé l'échec de la tentative d'initier un tel suivi. La future mise en place de ces mesures de substitution proposées par le recourant, même combinées à une assistance de probation et au simple engagement de ce dernier de rechercher et maintenir une activité professionnelle, ne saurait ainsi conduire à sa libération immédiate.  
Enfin, du point de vue temporel, compte tenu des infractions reprochées, de la peine prononcée en deuxième instance et de la durée de la détention déjà subie, le principe de la proportionnalité demeure également respecté (art. 212 al. 3 CPP), étant relevé que lorsque le détenu a déjà été jugé en première instance - et a fortiori en appel - ces prononcés constituent un indice important quant à la peine susceptible de devoir être finalement exécutée (cf. ATF 143 IV 168 consid. 5.1; arrêt 1B_34/2023 du 13 février 2023 consid. 4.1). 
 
4.  
Sur le vu de ce qui précède, le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. Le recours étant dénué de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire doit également être rejetée (art. 64 al. 1 LTF). Toutefois, pour tenir compte de la situation financière du recourant, il peut être renoncé à la perception de frais judiciaires (art. 66 al. 1 in fine LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.  
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public de la République et canton de Neuchâtel et au Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel, Cour pénale. 
 
 
Lausanne, le 5 avril 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
La Greffière : Nasel