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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1A.6/2003 /col 
 
Arrêt du 6 mars 2003 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du Tribunal fédéral, Reeb et Catenazzi. 
Greffier: M. Zimmermann. 
 
Parties 
la société H.________, 
recourante, représentée par Me Olivier Péclard, avocat, rue St-Victor 12, case postale 473, 1211 Genève 12, 
 
contre 
 
Juge d'instruction du canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, case postale 3344, 1211 Genève 3, 
Cour de justice du canton de Genève, Chambre d'accusation, place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, 1211 Genève 3. 
 
Objet 
Entraide judiciaire internationale en matière pénale avec la République de Slovaquie 
 
recours de droit administratif contre l'ordonnance 
de la Chambre d'accusation du canton de Genève 
du 6 décembre 2002. 
 
Faits: 
A. 
Le 27 avril 2000, le Procureur général de la République slovaque a présenté à l'Office fédéral de la police une demande d'entraide établie le 21 février 2000 par le Ministère public de Bratislava. Cette demande rédigée en slovaque, accompagnée d'une traduction allemande et française, se fondait sur la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale, conclue à Strasbourg le 20 avril 1959, entrée en vigueur le 20 mars 1967 pour la Suisse et le 1er janvier 1993 pour la Slovaquie (CEEJ; RS 0.351.1). Elle était présentée pour les besoins de l'enquête ouverte pour une escroquerie au sens de l'art. 250 du Code pénal slovaque, commise entre le 19 novembre et le 8 décembre 1997. La société slovaque N.________ avait acquis, le 19 novembre 1997, d'une société panaméenne la société H.________, les droits relatifs à une société irlandaise B.________, actionnaire unique de la société russe K.________ Management, laquelle détenait elle-même 66% du capital-actions de la société K.________. Le prix convenu était de 1'210'895'000 SKK, montant correspondant à 35'000'000 USD. N.________ a payé ce prix le 9 décembre 1997. Or, il était apparu que le capital-actions de B.________ ne dépassait pas 100 GBP, que K.________ Management avait été créée à Moscou le 11 novembre 1997 par un dénommé V.________, détenteur d'un passeport volé et que K.________ Management ne détenait pas de part du capital-actions de K.________. N.________ avait perdu tout le montant investi. La demande tendait à la vérification de l'existence à Genève de la société H.________; à l'audition comme témoin de M.________, qui avait passé l'acte de vente pour la société H.________, ainsi que de l'avocat genevois T.________; à l'identification du détenteur du compte n°xxx ouvert auprès de la Banque d'investissements privés à Genève, ainsi que la remise de la documentation relative aux mouvements opérés sur ce compte entre le 19 novembre 1997 et le 31 décembre 1998. Les autorités slovaques demandaient en outre que soient éclaircies les circonstances de la création de la société N.________ Services à Genève, ainsi que l'audition du représentant d'une société C.________ à Genève, sur ses liens avec la société H.________. 
 
Le 12 mai 2000, l'Office fédéral de la police a transmis la demande pour exécution au Juge d'instruction du canton de Genève. 
 
Le 2 août 2000, celui-ci a rendu une décision d'entrée en matière et ordonné la saisie de la documentation relative au compte n°xxx. 
 
Le 15 août 2000, la Compagnie bancaire Genève (ci-après: la CBG), qui avait repris dans l'intervalle la Banque d'investissements privés, a remis au Juge d'instruction la documentation relative au compte n°xxx, dont la société H.________ est la titulaire et M.________, de nationalité israélienne, l'ayant droit. 
 
Le 24 août 2000, la CBG a communiqué au Juge d'instruction une prise de position écrite de M.________, ainsi qu'un dossier de pièces se rapportant à la transaction litigieuse. 
 
Le 15 septembre 2000, le Juge d'instruction a entendu R.________, dirigeant de C.________. Il a entendu M.________ le 12 octobre 2000. 
 
Le 14 février 2002, le Juge d'instruction a rendu une décision de clôture ordonnant la transmission à l'Etat requérant des documents d'ouverture du compte n°xxx, des relevés et justificatifs pour les opérations effectuées entre le 30 septembre 1997 et le 12 août 1998, ainsi que des documents fournis par la CBG le 14 (recte: 24) août 2000. Il a ordonné en outre la remise des procès-verbaux des auditions des 15 septembre et 12 octobre 2000. Il a réservé le principe de la spécialité. 
 
Le 6 décembre 2002, la Chambre d'accusation du canton de Genève a rejeté le recours formé par la société H.________ contre cette décision. 
B. 
Agissant par la voie du recours de droit administratif, la société H.________ demande principalement au Tribunal fédéral d'annuler les décisions des 6 décembre et 14 février 2002 et de constater que la demande est irrecevable. Subsidiairement, elle conclut à ce que l'Etat requérant soit invité à compléter la demande et que soit précisée la portée du principe de la spécialité. Elle se plaint du caractère lacunaire de la demande et invoque le principe de la proportionnalité. 
 
La Chambre d'accusation se réfère à sa décision. Le Juge d'instruction conclut au rejet du recours. L'Office fédéral de la justice (qui a repris, dans l'intervalle, les tâches de l'Office fédéral de la police en matière d'entraide judiciaire) a renoncé à se déterminer. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
1.1 La CEEJ s'applique. Les dispositions de ce traité l'emportent sur le droit autonome qui régit la matière, soit la loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale, du 20 mars 1981 (EIMP; RS 351.1) et son ordonnance d'exécution (OEIMP; RS 351.11), qui règlent les questions non réglées, explicitement ou implicitement, par le droit conventionnel, et lorsque cette loi est plus favorable à l'entraide que la Convention (ATF 123 II 134 consid. 1a p. 136; 122 II 140 consid. 2 p. 142, et les arrêts cités). Est réservé le respect des droits fondamentaux (ATF 123 II 595 consid. 7c p. 617). 
1.2 La voie du recours de droit administratif est ouverte contre la décision confirmant la transmission de la documentation bancaire et de procès-verbaux relatant l'audition de témoins (cf. art. 25 al. 1 EIMP). Elle est aussi ouverte, simultanément avec le recours dirigé contre la décision de clôture (art. 80d EIMP), contre les décisions incidentes antérieures (art. 80e EIMP). 
1.3 La recourante a qualité pour recourir au sens de l'art. 80h let. b EIMP, mis en relation avec l'art. 9a let. a OEIMP, contre la transmission de la documentation relative au compte n°xxx dont elle est titulaire (ATF 127 II 198 consid 2d p. 205; 126 II 258 consid. 2d/aa p. 260; 125 II 356 consid. 3b/bb p. 362, et les arrêts cités). 
1.4 Les conclusions qui vont au-delà de l'annulation de la décision sont recevables (art. 25 al. 6 EIMP; art. 114 OJ; ATF 122 II 373 consid. 1c p. 375; 118 Ib 269 consid. 2e p. 275; 117 Ib 51 consid. 1b p. 56, et les arrêts cités). Le Tribunal fédéral examine librement si les conditions pour accorder l'entraide sont remplies et dans quelle mesure la coopération internationale doit être prêtée (ATF 123 II 134 consid. 1d p. 136/137; 118 Ib 269 consid. 2e p. 275). Il statue avec une cognition libre sur les griefs soulevés sans être toutefois tenu, comme le serait une autorité de surveillance, de vérifier d'office la conformité de la décision attaquée à l'ensemble des dispositions applicables en la matière (ATF 123 II 134 consid. 1d p. 136/137; 119 Ib 56 consid. 1d p. 59). L'autorité suisse saisie d'une requête d'entraide en matière pénale n'a pas à se prononcer sur la réalité des faits évoqués dans la demande; elle ne peut que déterminer si, tels qu'ils sont présentés, ils constituent une infraction. Cette autorité ne peut s'écarter des faits décrits par l'Etat requérant qu'en cas d'erreurs, lacunes ou contradictions évidentes et immédiatement établies (ATF 126 II 495 consid. 5e/aa p. 501; 118 Ib 111 consid. 5b p. 121/122; 117 Ib 64 consid. 5c p. 88, et les arrêts cités). Lorsque, comme en l'espèce, la décision attaquée émane d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés dans la décision, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis au mépris des règles essentielles de la procédure (art. 105 al. 2 OJ; ATF 123 II 134 consid. 1e p. 137; 113 Ib 257 consid. 3d p. 266; 112 Ib 576 consid. 3 p. 585). 
2. 
Selon la recourante, la demande présenterait un caractère contradictoire, lacunaire et abusif. 
2.1 La demande d'entraide doit indiquer l'organe dont elle émane et le cas échéant, l'autorité pénale compétente (art. 14 al. 1 let. a CEEJ et 28 al. 2 let. a EIMP); son objet et ses motifs (art. 14 al. 1 let. b CEEJ et 28 al. 2 let. b EIMP); la qualification juridique des faits (art. 14 al. 2 CEEJ et 28 al. 2 let. c EIMP); la désignation aussi précise et complète que possible de la personne poursuivie (art. 14 al. 1 let. c CEEJ et 28 al. 2 let. d EIMP). Les indications fournies à ce titre doivent simplement suffire pour vérifier que la demande n'est pas d'emblée inadmissible (ATF 116 Ib 96 consid. 3a p. 101; 115 Ib 68 consid. 3b/aa p. 77). 
2.2 La demande, telle que traduite, ne brille pas par sa clarté. Elle expose toutefois de manière suffisamment évidente les faits à l'origine de l'enquête pénale ouverte dans l'Etat requérant: la société H.________ aurait vendu les droits relatifs à K.________ à N.________, par la cession de B.________ qui détenait K.________ Management, qui contrôlait elle-même deux tiers du capital de K.________. Il était apparu qu'en réalité, B.________ et K.________ Management n'étaient que des coquilles vides, et que le prix payé ne correspondait à rien. La recourante conteste cette présentation des faits. Elle expose de nombreux éléments à décharge, censés accréditer sa thèse, selon laquelle la transaction aurait été effective. Il s'agit là toutefois de considérations qui concernent le juge du fond, et non celui de l'entraide. Pour le surplus, l'exposé des faits joint à la demande était suffisant et il n'y avait pas lieu pour le Juge d'instruction de le faire compléter. 
3. 
La recourante se plaint d'une violation du principe de la proportionnalité. 
3.1 Ne sont admissibles, au regard des art. 3 CEEJ et 64 EIMP, que les mesures de contrainte conformes au principe de la proportionnalité. L'entraide ne peut être accordée que dans la mesure nécessaire à la découverte de la vérité recherchée par les autorités pénales de l'Etat requérant. La question de savoir si les renseignements demandés sont nécessaires ou simplement utiles à la procédure pénale instruite dans l'Etat requérant est en principe laissée à l'appréciation des autorités de poursuite. L'Etat requis ne disposant généralement pas des moyens lui permettant de se prononcer sur l'opportunité de l'administration des preuves déterminées au cours de l'instruction menée à l'étranger, il ne saurait sur ce point substituer sa propre appréciation à celle du magistrat chargé de l'instruction. La coopération internationale ne peut être refusée que si les actes requis sont sans rapport avec l'infraction poursuivie et manifestement impropres à faire progresser l'enquête, de sorte que la demande apparaît comme le prétexte à une recherche indéterminée de moyens de preuve (ATF 122 II 367 consid. 2c p. 371; 121 II 241 consid. 3a p. 242/243; 120 Ib 251 consid. 5c p. 255). Le principe de la proportionnalité empêche aussi l'autorité suisse d'aller au-delà des requêtes qui lui sont adressées et d'accorder à l'Etat requérant plus qu'il n'a demandé (ATF 121 II 241 consid. 3a p. 243; 118 Ib 111 consid. 6 p. 125; 117 Ib 64 consid. 5c p. 68, et les arrêts cités). Au besoin, il lui appartient d'interpréter la demande selon le sens que l'on peut raisonnablement lui donner; rien ne s'oppose à une interprétation large de la requête s'il est établi que toutes les conditions à l'octroi de l'entraide sont remplies; ce mode de procéder évite aussi une éventuelle demande complémentaire (ATF 121 II 241 consid. 3a p. 243). Il incombe à la personne touchée de démontrer, de manière claire et précise, en quoi les documents et informations à transmettre excéderaient le cadre de la demande ou ne présenteraient aucun intérêt pour la procédure étrangère (ATF 126 II 258 consid. 9b/aa p. 260; 122 II 367 consid. 2c p. 371/372). 
3.2 La recourante ne conteste pas que le montant de la transaction litigieuse a été versé sur le compte n°xxx. Il se justifie dès lors de transmettre aux autorités de l'Etat requérant non seulement tous les documents relatifs à ce versement, mais aussi toutes les indications nécessaires sur l'utilisation ultérieure de ces fonds. Le Juge d'instruction a procédé à un tri des pièces et ordonné la remise de la documentation à décharge produite par la CBG. Dès lors que l'argument principal de la recourante (selon laquelle aucune escroquerie n'aurait été commise) tombe à faux, toutes les considérations faites en relation avec le principe de la proportionnalité sont hors de propos. Il est de surcroît inutile de faire préciser la portée du principe de la spécialité. 
4. 
Le recours doit être rejeté. Les frais en sont mis à la charge de la recourante (art. 156 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 159 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté. 
2. 
Un émolument judiciaire de 5000 fr. est mis à la charge de la recourante. 
3. 
Il n'est pas alloué de dépens. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la recourante, au Juge d'instruction et à la Chambre d'accusation du canton de Genève, ainsi qu'à l'Office fédéral de la justice (B 120729). 
Lausanne, le 6 mars 2003 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: