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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6B_165/2010 
 
Arrêt du 6 avril 2010 
Cour de droit pénal 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Favre, Président, 
Schneider et Jacquemoud-Rossari. 
Greffière: Mme Angéloz. 
 
Participants à la procédure 
X.________, représentée par Me Sandrine Osojnak, avocate, 
recourante, 
 
contre 
 
1. Ministère public du canton de Vaud, rue de l'Université 24, 1014 Lausanne, 
2. Y.________, représentée par Me Stefan Disch, avocat, 
intimés. 
 
Objet 
Usure (art. 157 CP), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pénale, 
du 11 novembre 2009. 
 
Faits: 
 
A. 
Par jugement du 10 septembre 2009, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne a condamné X.________, pour usure, à 14 mois de privation de liberté, avec sursis pendant 4 ans. Il l'a par ailleurs astreinte à verser à Y.________, à titre de réparation du dommage causé par les infractions, une somme de 52'472 fr., avec intérêts à 5 % l'an dès le 1er juillet 2006. 
 
Saisie d'un recours de la condamnée, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois l'a rejeté par arrêt du 11 novembre 2009. 
 
B. 
Cet arrêt retient, en résumé, ce qui suit. 
B.a Née en 1962 au Portugal, X.________ est arrivée en Suisse au début des années 1980. Mère de deux enfants issus de précédents mariages, elle a contracté une nouvelle union en 2000, dont sont issus deux autres enfants. Dès 1994-1995, elle a commencé à exercer, par téléphone, une activité de médium. Sa ligne de services payants lui rapportait 60 % du coût de la communication, tarifée à 2,50 fr. la minute. 
 
La plaignante, Y.________, née en 1946, est arrivée d'Italie en Suisse en 1974. Hospitalisée en institution psychiatrique à plusieurs reprises, elle suit un traitement psychiatrique ambulatoire. Elle perçoit une rente AI entière. Antérieurement, elle disposait de ressources significatives issues d'une assurance-vie et d'un héritage. A dire d'expert, elle présente une personnalité "borderline", une intelligence limite et un syndrome de dépendance à l'alcool. Elle a été placée sous curatelle. Depuis le 29 juillet 2006, elle est sous tutelle volontaire. 
B.b Par ordonnance du 17 octobre 2008, X.________ a été renvoyée en jugement. Il lui était reproché d'avoir, au début de l'année 1999, remis à Y.________, contre la somme de 2000 fr., un saucisson enroulé de tissu et ficelé, sensé chasser le mauvais sort (cas n° 1). Il lui était en outre fait grief d'avoir, de mai 2005 environ jusqu'en juin 2006, obtenu de Y.________ d'importantes sommes d'argent, à raison de quatre fois par mois en moyenne, d'un montant total de 80'000 fr., en échange de produits prétendument miraculeux (cas n° 2). Elle était encore mise en cause du fait d'avoir, durant la même période, été appelée à de très nombreuses reprises par la plaignante sur son numéro payant, en échange de conseils aussi longs que futiles, pour un montant total estimé à 15'000 fr. (cas n° 3). Il était précisé que l'état psychique de Y.________ l'empêchait d'apprécier la portée de ses actes et de gérer ses affaires sans les compromettre et qu'elle se trouvait sous l'emprise psychologique de l'accusée. 
B.c X.________ a contesté l'essentiel des faits qui lui étaient reprochés. Au terme d'une appréciation des preuves, le Tribunal correctionnel a toutefois acquis la conviction qu'elle avait, en toute connaissance de cause et dans un dessein de lucre, non seulement exploité, mais entretenu et développé l'état de faiblesse dans lequel se trouvait la victime. Il a retenu que cette dernière avait remis à l'accusée au moins 52'472 fr. en espèces, sans contrepartie notable. S'agissant des frais des appels téléphoniques facturés par l'opérateur à la plaignante, il a considéré que le montant de 15'000 fr. mentionné dans l'ordonnance de renvoi ressortait d'une approximation et, se fondant sur les pièces du dossier, l'a arrêté à 10'000 fr. 
 
Sur le plan civil, le tribunal a alloué à la plaignante 52'472 fr. en capital, soit 2000 fr. pour le cas n° 1 et 50'472 fr. pour le cas n° 2. 
B.d La cour cantonale a écarté aussi bien les moyens de nullité que les moyens de réforme soulevés par l'accusée. Elle a notamment considéré que l'infraction d'usure était, dans chacun des trois cas, réalisée, que la peine infligée était adéquate et que le montant de la réparation civile en capital devait être confirmé. 
 
C. 
X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Elle conclut à son acquittement, avec suite de frais et dépens et quant aux conclusions civiles. Subsidiairement, elle demande qu'il soit donné acte à l'intimée de ses réserves civiles, que les frais de première instance soient réduits "dans la mesure que Justice dira" et que ceux de seconde instance soient laissés à la charge de l'Etat. Plus subsidiairement, elle requiert l'annulation de l'arrêt attaqué et le renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. 
 
Des déterminations n'ont pas été recueillies. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
Dans un premier grief, la recourante se plaint d'une violation du principe in dubio pro reo découlant de la présomption d'innocence. 
 
1.1 A l'appui, elle formule de multiples critiques à l'encontre du jugement de première instance, qui, sur de nombreux points, violerait le principe qu'elle invoque, respectivement l'interdiction de l'arbitraire. Seul l'arrêt attaqué peut toutefois faire l'objet du présent recours (cf. art. 80 al. 1 LTF). Or, à la cour cantonale, la recourante reproche en réalité, non pas d'avoir violé ce principe, mais de n'avoir pas examiné les critiques qu'elle adressait aux premiers juges. 
 
1.2 Le grief ainsi soulevé revient à invoquer un déni de justice formel. Comme tel, il est toutefois dénué de fondement. En effet, la recourante, en dénonçant comme insuffisante la motivation que lui a opposée la cour cantonale, admet elle-même que cette dernière s'est prononcée sur les critiques qu'elle formulait. En définitive, c'est donc d'une violation de son droit d'être entendue, à raison d'une motivation insuffisante, dont se plaint la recourante. 
 
1.3 Sur le vu des critiques que la recourante adressait aux premiers juges, la cour cantonale a préalablement observé, au considérant 2.2 de son arrêt, que, dans la mesure où celle-ci se limitait à opposer sa version des faits à celle du Tribunal correctionnel, ses moyens devaient être écartés, comme purement appellatoires. Pour le surplus, elle a examiné les critiques de la recourante, aux considérants 2.3 ss de son arrêt. 
 
Que le refus d'entrer en matière sur des critiques purement appellatoires procéderait d'une application arbitraire du droit cantonal de procédure ou violerait le droit d'être entendu de la recourante n'est en rien démontré par cette dernière conformément aux exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF (cf. ATF 133 IV 286 consid. 1.4 p. 287). Au reste, c'est-à-dire dans la mesure où ses griefs ont été examinés, la recourante n'établit pas qu'ils auraient été écartés par une motivation à ce point indigente qu'elle aurait été privée de la possibilité de la contester à bon escient (cf. ATF 133 III 439 consid. 3.3 p. 445 et les arrêts cités). Sur ces points, le recours est par conséquent irrecevable. 
 
2. 
Sous l'intitulé "de l'état de fait inexact ou violant le droit", la recourante semble se plaindre de ce que le dommage de l'intimée ait été tenu pour établi alors qu'il ne le serait pas. 
 
Les juges cantonaux ont admis qu'il n'était pas possible d'arrêter de manière précise le dommage subi par l'intimée. Ils ont toutefois estimé qu'ils étaient en mesure de l'évaluer et ont justifié les montants qu'ils retenaient, exposant les éléments sur lesquels ils se fondaient et réfutant les arguments avancés par la recourante. A l'appui du présent grief, cette dernière n'y oppose qu'une argumentation purement appellatoire, dans laquelle on ne trouve aucune démonstration, conforme aux exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF, d'une atteinte à l'un de ses droits constitutionnels. En particulier, la recourante n'établit nullement que le montant total de 52'472 fr. finalement retenu l'aurait été sur la base d'une appréciation arbitraire, c'est-à-dire manifestement insoutenable, et non seulement discutable ou même critiquable (cf. ATF 135 V 2 consid. 1.3 p. 4/5; 134 I 140 consid. 5.4 p. 148 et les arrêts cités), des preuves. Partant, le moyen est irrecevable. 
 
3. 
La recourante soutient que sa condamnation pour usure repose sur un état de fait déduit d'une appréciation arbitraire des preuves. Plus précisément, elle reproche à la cour cantonale d'avoir retenu arbitrairement qu'elle avait conscience de la gêne ou de la faiblesse de la capacité de jugement de l'intimée. Elle lui fait en outre grief d'avoir nié arbitrairement qu'elle croyait en son don et était convaincue de ses pouvoirs surnaturels. Sur ces deux points, elle argue en outre d'une violation de son droit d'être entendue, à raison d'une motivation lacunaire. 
 
3.1 Il ne ressort pas de l'arrêt attaqué que la recourante, qui n'établit pas le contraire, aurait soulevé en instance cantonale un moyen de nullité, au motif que les premiers juges auraient retenu arbitrairement qu'elle était consciente de l'état psychologique dans lequel se trouvait l'intimée. Dans la mesure où elle contestait, dans le cadre de son recours en réforme, avoir agi intentionnellement, cette question a été examinée par la cour cantonale au considérant 4 de son arrêt. Il en ressort que le fait litigieux a été tenu pour établi en se fondant sur les appels téléphoniques incessants et les demandes de protection récurrentes de l'intimée ainsi que sur le comportement de cette dernière, attesté par les témoins qui l'ont côtoyée. La cour cantonale a donc motivé sa décision sur ce point. Au reste, la recourante ne démontre nullement, d'une manière qui satisfasse aux exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF, que, de ces éléments de preuve, il était arbitraire, au sens défini par la jurisprudence, de déduire que l'état psychologique de l'intimée ne pouvait lui échapper. Ici comme ailleurs, elle ne fait que contester les faits en les rediscutant. 
 
3.2 S'agissant de la croyance de la recourante en son don de voyance et en ses pouvoirs surnaturels, elle est clairement infirmée par son comportement envers l'intimée, comme l'a admis la cour cantonale, qui, sur ce point également, a donc motivé sa décision. Cela pouvait au demeurant être retenu sans aucun arbitraire, qui n'est d'ailleurs nullement démontré à satisfaction de droit. 
 
3.3 En conclusion, le grief de violation du droit d'être entendu est manifestement infondé et celui d'arbitraire irrecevable. 
 
4. 
Dans un moyen déjà examiné (cf. supra, consid. 2), la recourante n'a pas démontré d'arbitraire dans l'établissement des faits en ce qui concerne le dommage subi par l'intimée. Dans la mesure où elle y revient sous chiffre IV des pages 18 ss de son recours, elle ne le fait pas davantage. 
 
4.1 La recourante ne remet pas en cause le montant de 2000 fr. retenu dans le cas n° 1, soit celui qu'elle a reçu en contrepartie du saucisson enroulé de tissu qu'elle a remis à l'intimée. Du moins, ne démontre-t-elle aucun arbitraire sur ce point. 
 
En ce qui concerne le produit des conversations téléphoniques, il avait été évalué à 15'000 fr. par l'ordonnance de renvoi, sur la base des pièces du dossier qui y sont citées. Avec les premiers juges, la cour cantonale a admis qu'il s'agissait d'une estimation. Elle a en outre indiqué tenir compte de ce que certains appels n'étaient pas en relation avec le comportement délictueux de la recourante. Elle en a conclu que les premiers juges étaient fondés à retenir un montant de 10'000 fr. à ce titre. Cette appréciation n'est pas manifestement insoutenable, au vu des innombrables appels de l'intimée durant la période délictueuse, de leur durée et du fait que chacun des appels rapportait à la recourante 60 % du coût de la communication, tarifée à 2,50 fr. la minute. La recourante n'établit en tout cas pas le contraire, se bornant à arguer une nouvelle fois, de manière générale, d'appels sans relation avec le comportement qui lui est reproché. 
 
S'agissant des sommes que la recourante a reçues en espèces, dont le total était estimé à 80'000 fr. par l'ordonnance de renvoi, les juges cantonaux ont finalement retenu un montant global de 50'472 fr., dont 35'872 fr. remis par l'intimée le 17 mai 2005 et un versement ultérieur de 14'600 fr., issu de trois prêts sur gage mobilier souscrits par l'intimée. Cette somme a été arrêtée en se fondant sur les montants obtenus par l'intimée, de sources diverses, pendant la période considérée et sur ce que des témoins ont dit savoir des demandes d'argent que cette dernière leur a adressées durant cette même période. Que cette appréciation serait arbitraire n'est pas démontré dans le recours, l'argumentation présentée étant manifestement insuffisante à le faire admettre. 
 
4.2 Le grief est ainsi irrecevable, faute de motivation suffisante. 
 
5. 
La recourante n'établit pas que des mesures d'instruction lui auraient été refusées par la cour cantonale en violation arbitraire du droit cantonal de procédure. Comme elle l'admet implicitement, elle n'en n'a d'ailleurs pas réellement requises de la cour cantonale elle-même, relevant au contraire que, parce que longues et fastidieuses, celles qu'appelaient, selon elle, les lacunes du jugement de première instance, "ne sauraient être assumées par le Tribunal cantonal". Il n'y a donc pas lieu d'entrer en matière. 
 
6. 
Le recours doit ainsi être rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
La recourante, qui succombe, supportera les frais (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens à l'intimée, qui n'a pas été amenée à se déterminer sur le recours. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 4000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pénale. 
 
Lausanne, le 6 avril 2010 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Président: La Greffière: 
 
Favre Angéloz