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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1A.169/2001/col 
 
Arrêt du 7 février 2002 
Ire Cour de droit public 
 
Les juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et vice-président du Tribunal fédéral, 
Reeb, Féraud, 
greffier Kurz. 
 
V.________, recourante, représentée par Me X.________, avocat à Genève, 
 
contre 
 
Instance d'indemnisation LAVI du canton de Genève, 
c/o Hospice général, cours de Rive 12, case postale 3360, 
1211 Genève 3, 
Tribunal administratif du canton de Genève, rue des Chaudronniers 3, 1204 Genève. 
 
(art. 3 et 12 LAVI
 
(recours de droit administratif contre l'arrêt rendu le 28 août 2001 par le Tribunal administratif du canton de Genève) 
 
Faits: 
A. 
Par arrêt du 12 novembre 1999, la Cour d'assises du canton de Genève a condamné M.________ à quinze ans de réclusion et quinze ans d'expulsion de Suisse, pour l'assassinat de son épouse S.________, commis dans la nuit du 5 au 6 juin 1998. Statuant sur les conclusions des parties civiles, la Cour d'assises a alloué les sommes suivantes, à la charge du condamné: 5000 fr. d'indemnité pour tort moral et 5000 fr. de dépens à V.________, mère de la victime; les mêmes indemnités à H.________, soeur de la victime; 40'000 fr. d'indemnité de tort moral à chacun des enfants du couple A.________ et B.________, nés en 1993 et 1997, ainsi qu'une indemnité pour perte de soutien de 337'896 fr. et 367'992 fr. Cet arrêt est définitif. 
B. 
Le 2 juin 2000, V.________ a saisi l'Instance cantonale genevoise d'indemnisation LAVI (ci-après: l'instance LAVI) d'une requête tendant à l'octroi de 17'556,80 fr. pour le dommage matériel (2'848,40 fr. de frais de pompes funèbres, 3'600 fr. de loyer pour l'appartement de sa fille, 4'000 fr. correspondant à une formation de Wellness Trainer interrompue, 6'670,40 fr. de frais d'installation des enfants chez elle et 438 fr. de frais de garde de A.________ immédiatement après le décès de sa mère), 50'000 fr. de tort moral et 69'645 fr. d'honoraires de son avocat. Dès le 18 août 1998, ses petits-enfants avaient été placés chez elle, de sorte qu'elle avait cessé son activité professionnelle, renoncé à sa formation et effectué certains travaux d'aménagement de son domicile. Son avocat, était intervenu, dès le 29 juin 1998, à raison de 161 heures d'activité. L'assistance judiciaire avait été refusée par décision du 15 juillet 1998. 
Le 6 juillet 2000, l'instance LAVI lui a accordé une provision de 5'000 fr. Par ordonnance complémentaire du 29 novembre 2000, elle a alloué 15'000 fr. de réparation morale, 3'286,40 fr. de frais de pompes funèbres et de garde, les autres frais n'étant pas considérés comme résultant directement de l'infraction. Les frais d'avocat n'avaient pas à être intégralement pris en charge dès lors que les autres parties civiles (enfants et soeur de la victime) étaient également représentées par des avocats. Les honoraires présentés étaient disproportionnés, la culpabilité de l'accusé ne faisant aucun doute; un montant de 2'000 fr., fixé ex aequo et bono, a été alloué. 
C. 
Par arrêt du 28 août 2001, le Tribunal administratif genevois a partiellement admis le recours formé par V.________ contre cette décision. Les frais d'installation des enfants chez leur grand-mère étaient directement liés à l'infraction. L'intervention de l'avocat était nécessaire, s'agissant d'assister une partie civile en assises. Il paraissait toutefois équitable de calculer les frais d'avocat sur la base du tarif relatif à l'assistance judiciaire (125 fr. de l'heure pour un collaborateur, 150 fr. pour un chef d'étude et 65 fr. pour un stagiaire), soit 21'583 fr. au total. Le montant du dommage indemnisable (frais d'installation, de pompes funèbres, de garde et frais d'avocat) s'élevait au total à 31'540,30 fr. Appliquant la formule prévue à l'art. 3 al. 3 OAVI, compte tenu des revenus de la requérante et de son époux, le Tribunal administratif a fixé l'indemnité à 25'766,96 fr. S'agissant du tort moral, le montant de 15'000 fr. correspondait à ce qui avait été alloué dans des cas analogues. Une indemnité de procédure de 1'500 fr. a encore été allouée pour la procédure de recours, à la charge de l'Etat de Genève. 
D. 
V.________ forme un recours de droit administratif contre cet arrêt. Elle demande au Tribunal fédéral de l'annuler et, statuant à nouveau, de condamner le canton de Genève à lui verser 35'384,70 fr. pour ses honoraires d'avocat, 1713,60 fr. de participation aux honoraires d'avocat pour la procédure devant l'instance LAVI et 50'000 fr. pour son tort moral, avec intérêts. Elle demande la confirmation de l'arrêt pour le surplus, et une indemnité de dépens. 
E. 
La cour cantonale persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. L'instance LAVI et l'Office fédéral de la justice (OFJ) ont présenté des observations, sans prendre de conclusions formelles. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
La démarche de la recourante tend à l'obtention d'une indemnité, pour son dommage matériel et pour tort moral, fondée sur la LAVI, et il n'est pas contesté que cette loi est applicable. En particulier, la recourante est assimilée à la victime conformément à l'art. 2 al. 2 LAVI. Dirigé contre une décision (art. 5 PA) ne relevant pas des exceptions prévues aux art. 99 ss OJ (ATF 122 II 315 consid. 1 p. 317, 121 II 116 consid. 1 p. 117) et émanant de l'autorité cantonale de recours prévue à l'art. 17 LAVI, le recours de droit administratif est recevable (ATF 125 II 169 consid. 1 p. 171 et les arrêts cités). 
2. 
La recourante se plaint d'une constatation inexacte des faits pertinents, en relation avec une violation des art. 3 al. 4 et 12 LAVI. Elle ne conteste pas l'application du tarif de l'assistance judiciaire pour le calcul de ses frais d'avocat indemnisables. Toutefois, la cour cantonale avait appliqué le tarif prévu pour les collaborateurs (125 fr. de l'heure), alors que son mandataire est associé depuis 1994 et devait être indemnisé à raison de 150 fr. de l'heure. Elle soutient également qu'étant seule victime au sens de la LAVI, il n'y avait pas lieu de prendre en compte le revenu de son époux dans le calcul de l'indemnité selon l'art. 3 al. 3 OAVI, et il convenait par conséquent de l'indemniser pleinement, soit à hauteur de 35'384,70 fr. La cour cantonale n'aurait d'ailleurs pas tenu compte du fait que l'époux de la recourante était au chômage dès le 1er août 2001 et ne percevait plus que 1'712,45 fr. par mois. 
2.1 L'art. 3 al. 3 LAVI dispose que les centres de consultation fournissent en tout temps une aide immédiate, au besoin pendant une période assez longue. L'art. 3 al. 4 LAVI prévoit que les prestations sont gratuites, les centres de consultation prenant en outre à leur charge d'autres frais, notamment d'avocat, "dans la mesure où la situation personnelle de la victime le justifie". Selon la jurisprudence, la LAVI assume ainsi une fonction subsidiaire à celle de l'assistance judiciaire. Lorsque cette dernière est octroyée à la victime, l'intervention étatique au sens de l'art. 3 al. 4 LAVI ne se justifie plus. En revanche, lorsque la victime n'obtient pas l'assistance judiciaire totale selon le droit cantonal, il appartient au centre de consultation d'examiner si sa situation personnelle justifie le remboursement des frais d'avocat. Le refus de l'assistance judiciaire cantonale ne dispense donc pas d'examiner si les conditions posées par la LAVI sont réunies (ATF 121 II 209 consid. 3b p. 212). 
2.2 En l'espèce, la recourante n'a pas requis la couverture de ses frais d'avocat à titre de prestation du centre de consultation (art. 3 al. 4 LAVI), mais en tant que poste du dommage résultant de l'infraction (art. 11 ss LAVI). La distinction entre les prestations allouées au titre de l'art. 3 LAVI et l'indemnisation prévue aux art. 11 ss LAVI n'est pas aisée. Cette distinction a pourtant une incidence sur le canton débiteur de la prestation, et sur les facteurs de calcul (art. 13 LAVI), et la victime n'est en principe pas libre de choisir sur quelle base elle compte obtenir l'aide de l'Etat. Les prestations prévues à l'art. 3 LAVI ont pour but de diminuer les conséquences de l'infraction, du point de vue psychique ou financier, alors que l'indemnisation se rapporte aux conséquences qui ne sont plus susceptibles d'améliorations (cf. Gomm, Einzelfragen bei der Ausrichtung von Entschädigung und Genugtuung nach dem Opferhilfegesetz, Solothurner Festgabe zum Schweizerischen Juristentag 1998, p. 673-690, 675/676 et les exemples cités). L'intervention d'un avocat, afin de faire valoir des prétentions contre des tiers, peut être couverte au titre de l'aide immédiate ou à plus long terme, ou faire l'objet d'une avance sur l'indemnisation prévisible, selon la nature de l'intervention (op. cit. p. 676-677). Si, comme le relève la cour cantonale, les frais de défense de la victime, avant, pendant ou après le procès pénal, constituent des éléments du dommage résultant de l'infraction dans la mesure où la victime intervient dans la procédure pénale afin de sauvegarder ses prétentions (arrêt du 7 août 2000 dans la cause D., SJ 2001 I 153, ATF 117 II 101 consid. 4 p. 106), ils sont prioritairement visés à l'art. 3 LAVI au titre de l'aide juridique (al. 2 let. a) et peuvent être pris à la charge des centres de consultation (al. 4). 
2.3 L'indemnisation répond à des conditions différentes de la couverture des frais d'avocats au sens de l'art. 3 al. 4 LAVI. Cette dernière doit être justifiée par la « situation personnelle » de la victime, ce qui implique un besoin particulier, sur le vu notamment de la situation patrimoniale de l'intéressé et des chances de succès de ses démarches. En revanche, l'indemnisation de la victime sur la base de l'art.11 al. 1 couvre en principe l'intégralité du dommage qui résulte de l'infraction, pour autant que les conditions de revenu des art. 12 al. 1 et 13 soient réunies. Dès lors que la LAVI a prévu un mode de prise en charge des frais d'avocat à son art. 3, lui-même déjà subsidiaire à l'assistance judiciaire cantonale, on peut se demander si la victime peut encore prétendre une indemnisation à ce titre. Dans ce cas, il ne serait guère conforme au système de la loi d'accorder à la victime le paiement de ses frais d'avocat sur la base de l'art. 12 LAVI, alors que cela ne serait pas justifié par « sa situation personnelle » au sens de l'art. 3 al. 4 LAVI. Si la victime n'est pas certaine de pouvoir supporter le paiement de ses frais d'avocat, en particulier si l'assistance judiciaire lui est, comme en l'espèce, refusée, elle doit en principe s'adresser immédiatement au centre de consultation, afin que cette question soit résolue d'emblée; cela lui permet d'éviter d'engager des frais dont la couverture n'est pas assurée. Par ailleurs, si les frais encourus dans une procédure pénale constituent un élément du dommage (ATF 101 consid. 3 p. 104), c'est dans la mesure seulement où ils ne sont pas compris dans les dépens, même tarifés, qui peuvent être alloués selon le droit cantonal (arrêt précité du 7 août 2000 dans la cause D., SJ 2001 I 153). On pourrait se demander si cette pratique est aussi applicable en matière d'indemnisation fondée sur la LAVI. 
Ces questions peuvent en définitive demeurer indécises car, qu'elle ait été accordée à un titre ou à un autre, l'indemnité fixée par la cour cantonale ne viole pas le droit fédéral. 
3. 
Le système d'indemnisation instauré par la LAVI ne tend pas à assurer à la victime une réparation intégrale et inconditionnelle du dommage qu'elle a subi du fait de l'infraction. La création d'une limite de revenu (art. 13 al. 1 LAVI et 3 OAVI) ainsi que d'un montant maximum de l'indemnité de 100'000 fr. (art. 13 al. 3 LAVI et 4 al. 1 OAVI) démontrent que l'indemnisation fondée sur cette loi n'a pas été voulue pleine et entière (ATF 125 II 169 consid. 2b/bb p. 173-174). Par ailleurs, même s'il existe des différences tenant à la nature juridique de l'indemnisation et à l'identité de son débiteur, les principes dégagés en droit de la responsabilité civile peuvent trouver application (ATF 125 II 169 consid. 2b p. 173). 
3.1 La cour cantonale a rappelé, dans sa décision, la jurisprudence relative à l'art. 3 al. 4 LAVI, en rapport avec l'assistance judiciaire. Elle a toutefois indemnisé la recourante en application de l'art. 12 LAVI, puisqu'elle a intégré les frais d'avocat dans le dommage indemnisable à ce titre, à côté des frais d'installation, de pompes funèbres et de garde, et leur a appliqué la formule prévue, à cet effet, à l'art. 3 al. 3 OAVI. On ne comprend toutefois pas pourquoi, tout en estimant que l'assistance d'un avocat était « parfaitement justifiée et légitime », compte tenu du traumatisme psychique que la recourante a subi et de la complexité de la procédure pénale, la cour cantonale a considéré qu'il était « équitable » de calculer les frais d'avocat en appliquant le tarif relatif à l'indemnisation du défenseur d'office. Cela peut paraître adéquat lorsqu'il s'agit de la prise en charge des frais d'avocat par le centre de consultation (art. 3 al. 4 LAVI), car comme cela est rappelé ci-dessus, cette mesure peut venir se substituer à l'assistance judiciaire. S'agissant en revanche de l'indemnisation du préjudice économique de la recourante, la note d'honoraires représentait a priori le montant du dommage à prendre intégralement en considération dans le calcul de l'indemnité, selon l'art. 13 al. 1 LAVI
3.2 La recourante ne critique toutefois pas le calcul de ses frais d'avocat sur la base du tarif de l'assistance judiciaire. Elle se borne à relever que son avocat n'est pas collaborateur, mais associé, de sorte que le tarif horaire devait être non pas de 125 fr., mais de 150 fr. Le dommage relatif à ses frais d'avocat serait de 25'427,90 fr. (soit 161,15 heures à 150 fr., 19,35 heures d'avocat stagiaire à 65 fr. et 232 fr. de frais), et non de 21'583,50 fr. En dépit de cette différence de montant, le résultat auquel a abouti la cour cantonale ne viole pas le droit fédéral. En effet, parmi les principes de droit civil qui peuvent être appliqués au calcul de l'indemnité, figure celui de la limitation du dommage (art. 44 al. 1 CO). Ce principe est partiellement repris à l'art. 13 al. 2 LAVI, qui prévoit la réduction de l'indemnité lorsque la victime a contribué, par un comportement fautif, à créer ou à aggraver le dommage. Par ailleurs, comme cela est relevé ci-dessus, l'indemnisation des frais d'avocat ne devrait en tout cas pas permettre d'obtenir plus que ce qui aurait été alloué à la victime en vertu de l'art. 3 al. 4 LAVI, ce qui implique que l'on prenne en compte les besoins de celle-ci. L'instance d'indemnisation ne saurait par conséquent indemniser que l'activité strictement nécessaire à la défense des droits de la victime, à l'exclusion de toutes démarches inutiles ou superflues. S'agissant de l'assistance à une partie civile, le mandataire doit ainsi tenter de maintenir son intervention dans un rapport raisonnable avec les prétentions que son client peut faire valoir. 
3.3 Or il apparaît que, si l'intervention d'un mandataire professionnel est incontestablement légitime, s'agissant d'un procès en assises pour une infraction grave, l'accusé contestant au surplus toute culpabilité, l'activité du mandataire apparaît manifestement exagérée au regard du but poursuivi par l'intervention de la partie civile en procédure. Compte tenu de la présence des autres parties à la procédure, soit en particulier du Procureur général et des enfants de la victime directe, assistés d'un avocat, on ne voit pas en quoi la présence systématique de l'avocat de la recourante à quelque 34 audiences d'instruction, ou devant la Chambre d'accusation, était nécessaire à la défense des droits de sa cliente, dont l'intervention tient en définitive principalement à l'allocation de ses conclusions civiles. S'étant vu refuser l'assistance judiciaire, et ayant renoncé à demander l'aide du centre de consultation, la recourante - et son avocat - ne pouvaient pas ignorer que la prise en charge des frais de défense était loin d'être assurée. On pouvait donc attendre de l'avocat une intervention plus mesurée, limitée aux actes nécessaires à la défense de sa cliente. En appliquant le tarif de l'assistance judiciaire, la cour cantonale a ainsi pratiqué une modération de fait des honoraires, qui n'est guère critiquable dans son résultat. Dès lors que les prétentions de la recourante s'élevaient à 50'000 fr. de tort moral et quelque 17'500 fr. pour son dommage matériel, les honoraires de son avocat, pour près de 70'000 fr., apparaissent manifestement exagérés, et le montant de 21'583,50 fr. finalement alloué semble dans un rapport plus raisonnable avec, notamment, les difficultés de la cause et le résultat obtenu. Pour le surplus, dès lors que l'application du tarif de l'assistance judiciaire n'est pas déterminante, l'argumentation de la recourante, fondée sur la distinction entre la rémunération du chef d'étude et celle du collaborateur, tombe à faux. Le grief doit par conséquent être écarté. 
4. 
La recourante estime qu'étant seule requérante de l'indemnisation, il n'y avait pas lieu de tenir compte du revenu de son époux au sens de l'art. 3 OAVI. Il ne serait pas juste que l'indemnité allouée à une victime puisse varier en fonction de la situation de son mari. Son propre revenu annuel étant d'environ 10'000 fr., c'est l'intégralité de son dommage qui devrait être couverte. Si le revenu du couple devait malgré tout être pris en compte, la cour cantonale aurait méconnu que dès le mois d'août 2001, son époux n'avait plus aucun revenu. 
4.1 Selon l'art. 13 LAVI, l'indemnité est fixée en fonction du montant du dommage et des revenus de la victime. Le législateur a fixé, pour la réparation du dommage matériel, une limite de revenu au-delà de laquelle aucune indemnité n'est versée; il a recouru pour cela à une limite "connue et éprouvée dans la pratique", soit le plafond fixé à l'art. 3b de la loi fédérale sur les prestations complémentaires (LPC, RS 831.30; cf. également l'art. 2 OAVI, RO 1997 p. 2824). L'indemnité ne couvre intégralement le dommage que pour le cas où les revenus de la victime ne dépassent pas la limite supérieure fixée à l'art. 3b al. 1 let. a LPC (cf. art. 3 al. 1 OAVI); dans les autres cas (revenus supérieurs à la limite LPC et inférieurs au plafond LAVI), la réparation n'est que partielle (art. 13 al. 1 LAVI, art. 3 al. 3 OAVI); enfin, aucune indemnité n'est allouée lorsque les revenus déterminants de la victime dépassent le quadruple du montant LPC (plafond LAVI, art. 3 al. 2 OAVI; ATF 125 II 169 consid. 2b/bb p. 173-174). L'art. 2 OAVI prévoit que les revenus déterminants sont calculés selon l'art. 3c LPC. Les art. 3b et 3c LPC sont fondés sur le principe d'une différenciation entre les personnes seules et les couples (art. 3b let. a ch. 1 et 2, 3c al. 1 let. a et c). Ce principe est expressément posé à l'art. 3a al. 4 LPC, selon lequel les dépenses reconnues et les revenus déterminants des conjoints doivent être additionnés (cf. également l'art. 1b OPC). Même si la LAVI et son ordonnance d'exécution ne renvoient pas expressément à cette dernière disposition, il apparaît évident que le législateur s'est inspiré du système dans son ensemble et il serait incohérent de ne pas additionner les revenus de personnes faisant ménage commun, partant du principe que d'ordinaire, ce sont les deux membres du couple qui supportent ensemble le dommage (Gomm, Stein, Zehntner, Kommentar zum OHG, Bern 1995, p. 181 n°7). 
4.2 La recourante reproche au Tribunal administratif de ne pas avoir tenu compte de la situation financière réelle de son ménage au moment où il a statué, soit au mois d'août 2001. Lors de la comparution personnelle du 13 juin 2001, elle avait annoncé un revenu de 10'328,40 fr. pour elle-même et de 54'000 fr. pour son époux. Toutefois, le contrat de travail de ce dernier avait été résilié au 31 juillet 2001, ce que la recourante avait communiqué le 5 juillet 2001. Au moment où le Tribunal administratif a statué, le revenu de l'époux de la recourante était limité à 1'712,45 fr. d'allocation de chômage mensuelle. Il y aurait sur ce point constatation inexacte et incomplète des faits, ainsi qu'un abus du pouvoir d'appréciation. 
4.2.1 Selon l'art. 12 al. 1 in fine LAVI, les revenus déterminants sont ceux qu'aura probablement la victime après l'infraction. La notion de revenu probable comporte nécessairement une part d'incertitude, la loi ne précisant d'ailleurs pas à quel moment l'autorité d'indemnisation doit se placer pour estimer ce revenu. Sauf circonstances spéciales, c'est la situation existant au moment où elle statue qui est déterminante, l'autorité étant tenue, selon l'art. 16 al. 2 LAVI, d'apprécier les faits d'office. Le Tribunal administratif était lui aussi tenu, en vertu du plein pouvoir d'examen prévu à l'art. 17 LAVI, de prendre en considération les explications de la recourante, ainsi que d'éventuels changements intervenus entre-temps. Il ressort toutefois du dossier que la situation patrimoniale des époux n'était guère explicite. Le 13 juin 2001, la recourante a exposé que son mari était au chômage partiel, qu'il avait repris une activité à 70% mais avait été licencié au 30 juin 2001, voire au 31 juillet suivant, et qu'il percevait alors un gain mensuel net de 4'500 fr. par mois, indemnité de chômage comprise. Le 5 juillet 2001, elle a transmis au Tribunal administratif un bordereau complémentaire comprenant notamment un décompte de la caisse de chômage vaudoise du 7 mai 2001. Ce document n'indique pas ce qui pourrait être perçu dès le 1er août 2001 par l'époux de la recourante. Selon les indications figurant dans le recours de droit administratif, celui-ci se serait installé en tant qu'indépendant dans l'import-export et le courtage de produits biologiques; il n'aurait réalisé aucun revenu depuis son installation. 
4.2.2 La notion de revenu probable ne se recoupe ni avec celle de revenu effectif, ni avec celle de « revenu qu'on peut raisonnablement attendre » de la victime (cf. l'art. 28 al. 2 de la loi sur l'assurance-invalidité - LAI, RS 831.20); l'autorité doit essayer de déterminer le revenu le plus vraisemblable après l'infraction, sur la base des éléments dont elle dispose. En l'espèce, l'époux de la recourante était certes au chômage depuis le 1er août 2001, mais rien ne permet de penser - et la recourante n'avance aucun argument en faveur de cette thèse - que cet état soit destiné à durer. Le mari de la recourante a repris une activité lucrative et, même s'il n'en tire actuellement aucun revenu, on peut raisonnablement penser que cette activité pourra permettre de réaliser un gain proche de celui qu'il retirait de son activité précédente. Le montant du salaire perçu jusqu'au mois de juillet 2001 constitue la seule indication utile, et on ne saurait par conséquent reprocher à la cour cantonale de s'y être tenue. Sur ce point également, il n'y a pas violation du droit fédéral. 
5. 
La recourante critique le montant qui lui a été alloué en réparation du tort moral. Elle évoque les exemples cités par Hutte/Ducksch (Die Genugtuung, 3ème éd. Zurich 1996), dans lesquels des sommes supérieures ont été allouées: 25'000 fr. à la mère d'une fille de vingt ans tuée par son père, 30'000 fr. à chacun des parents d'un fils tué par balle au cours d'une dispute, 35'000 fr. à chacun des parents d'un enfant de treize ans tué après avoir été victime d'abus sexuels, 40'000 fr. à chaque parent d'un enfant de dix-sept ans assassiné à coups de couteau, 50'000 fr. à chaque parent d'un fils de vingt-six ans assassiné de plusieurs coups de feux et dépouillé de ses biens. Elle se réfère également à un précédent arrêt du Tribunal administratif confirmant l'allocation de 30'000 fr. à un enfant âgé de trois ans au moment de l'assassinat de son père. Sur le vu de ces exemples, rien ne justifierait, selon la recourante, le montant de 15'000 fr. qui lui a été alloué. 
5.1 Selon l'art. 12 al. 2 LAVI, une somme peut être versée à la victime à titre de réparation morale, indépendamment de son revenu, lorsqu'elle a subi une atteinte grave et que des circonstances particulières le justifient. En prévoyant l'octroi d'une réparation morale à la victime, le législateur est allé sciemment au-delà des exigences de la Constitution (cf. ATF 121 II 369 consid. 2 p. 372). Il a considéré que cet aspect de l'indemnisation participait de l'aide prévue à l'art. 64ter 1ère phrase Cst. (actuellement l'art. 124 Cst.), et pouvait donc être octroyée indépendamment de la situation matérielle de la victime (FF 1990 II p. 916). Si la définition de l'art. 12 al. 2 LAVI correspond dans une large mesure aux critères prévus aux art. 47 et 49 CO (ATF 123 II 210 consid. 3b p. 214), les différences quant au débiteur de la réparation morale et quant à sa nature juridique peuvent, là aussi, conduire à des différences dans le système de la réparation (ATF 121 II 369 consid. 3c/aa p. 373). Certes, pour des raisons pratiques évoquées par le Tribunal fédéral (ATF 123 II 210 consid. 3b/dd p. 216), on ne saurait perdre totalement de vue l'intérêt d'une certaine cohérence, à cet égard, entre le régime de la LAVI et celui du droit civil. C'est toutefois à l'autorité d'indemnisation qu'il appartient, dans le cadre de son large pouvoir d'appréciation, de décider si, et dans quelle mesure les "circonstances particulières" justifient l'application des critères du droit civil. En mettant en place le système d'indemnisation prévu par la LAVI, par l'usage d'une formulation potestative et le recours à une notion juridique indéterminée, le législateur avait comme intention de combler les lacunes du droit positif, afin d'éviter que la victime supporte seule son dommage. En définitive, le versement d'une indemnité LAVI pour tort moral se rapproche d'une allocation ex aequo et bono, et justifie que l'on tienne compte de la situation dans son ensemble. Le large pouvoir d'appréciation reconnu à l'autorité d'indemnisation n'a comme principales limites que le respect de l'égalité de traitement et l'interdiction de l'arbitraire (ATF 125 II 169 consid 2b p. 173 ss; Gomm/Stein/Zehnter, op. cit. p. 184-185 n° 26). 
5.2 Il y a lieu d'admettre que le montant qui a été alloué à la recourante se situe dans les « fourchettes » inférieures de la pratique relative à l'indemnisation morale. L'OFJ indique que, dans le cadre de l'indemnisation des victimes de l'attentat de Louxor, une indemnité située entre 20'000 et 30'000 fr. a été allouée aux parents des victimes. Cela étant, la recourante perd de vue que, selon les principes rappelés ci-dessus, l'indemnisation LAVI découle d'un devoir d'assistance de l'Etat, et non d'une obligation d'indemniser résultant de la responsabilité de celui-ci (ATF 125 II 554 consid. 2a p. 555/556, 123 II 425 consid. 4c p. 431). Cette aide est donc non seulement subsidiaire, mais aussi moins étendue que la réparation fondée sur le droit civil. Dans l'optique d'une compensation partielle, le montant de 15'000 fr. alloué à la recourante ne procède pas d'un excès ou d'un abus du pouvoir d'appréciation. Dans un arrêt non publié du 17 janvier 2000 dans la cause W. X., le Tribunal fédéral a confirmé une indemnité de 25'000 fr. allouée pour tort moral à la mère de la victime, en retenant comme facteur d'augmentation, outre les circonstances du décès, les conséquences psychologiques pour la requérante et le comportement odieux de l'auteur - qui n'avait pas été arrêté - après son acte, le fait que la victime était enceinte. Cette dernière circonstance constitue une différence importante avec le cas d'espèce, comme l'est aussi le fait qu'en l'espèce, le responsable ait été arrêté, puis condamné, ce qui procure déjà à la victime une certaine manière de satisfaction morale dont il y a lieu de tenir compte. L'arrêt attaqué doit être confirmé sur ce point également. 
6. 
La recourante reproche enfin au Tribunal administratif d'avoir annulé l'indemnité de 7'000 fr. allouée par l'instance d'indemnisation, laquelle comprenait 1'713,60 fr. de participation aux honoraires d'avocat pour la procédure LAVI. Il aurait omis d'inclure cette somme dans le montant de 25'766,96 fr. d'indemnité, sans motiver cette suppression. La recourante demande que cette somme soit ajoutée à son indemnité. 
6.1 S'agissant des règles relatives à la procédure d'indemnisation, la LAVI ne fait que poser les principes de rapidité, de simplicité et de gratuité. L'autorité de recours unique instituée à l'art. 17 LAVI doit en outre disposer d'un plein pouvoir d'examen. La loi fédérale ne prévoit en revanche pas d'indemnité pour la procédure d'indemnisation proprement dite, et c'est donc uniquement sur la base du droit cantonal de procédure que peut être allouée une telle indemnité. Le Tribunal administratif a d'ailleurs indemnisé la recourante pour la procédure de recours cantonale, sous la forme d'une allocation de dépens à la charge de l'Etat de Genève. Le grief ressortit donc bien plutôt au recours de droit public et il eût appartenu à la recourante, conformément à l'art. 90 al. 1 let. b OJ, d'indiquer quelle norme de procédure cantonale imposait l'allocation d'une indemnité pour son avocat devant l'instance d'indemnisation. Dans son recours cantonal, la recourante concluait d'ailleurs à l'annulation de la décision précédente et à l'allocation de diverses indemnités, sans demander la confirmation de l'indemnité de procédure. Elle ne saurait par conséquent reprocher au Tribunal administratif de s'en être tenu au cadre des conclusions dont il était saisi. 
7. 
Sur le vu de ce qui précède, le recours de droit administratif doit être rejeté. Conformément à l'art. 16 al. 1 LAVI, il est renoncé à la perception de l'émolument judiciaire. Il n'est pas alloué de dépens. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours de droit administratif est rejeté. 
2. 
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire, ni alloué de dépens. 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la recourante, à l'instance d'indemnisation LAVI et au Tribunal administratif du canton de Genève, ainsi qu'à l'Office fédéral de la justice. 
Lausanne, le 7 février 2002 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président: Le Greffier: