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2A.427/2001 
[AZA 0/2] 
 
IIe COUR DE DROIT PUBLIC 
*********************************************** 
 
8 janvier 2002 
 
Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Hungerbühler, 
Juge présidant, Müller et Yersin. Greffière: Mme Rochat. 
 
___________ 
 
Statuant sur le recours de droit administratif 
formé par 
BY.________ et FY.________, représentés par Me Jean-Pierre Moser, avocat à Lausanne, 
 
contre 
l'arrêt rendu le 27 août 2001 par le Tribunal administratif du canton de Vaud, dans la cause qui oppose les recourants au Service de la population du canton de Vaud; 
 
(art. 17 al. 2 LSEE et 8 § 2 CEDH: regroupement familial) 
 
Vu les pièces du dossier d'où ressortent 
les faits suivants: 
 
A.- BY.________ et son épouse FY.________, ressortissants turcs, ont eu cinq enfants: A.________, né en 1972, B.________, né en 1974, C.________, né en 1976, D.________, né en 1979 et E.________, né le 10 juillet 1983, soit peu après leur divorce prononcé en Turquie le 20 juin 1983. 
 
Arrivé en Suisse en 1987, BY.________ a été rejoint successivement par ses trois fils aînés, alors que les deux cadets sont restés en Turquie, chez différents membres de la famille. Quant à son ex-épouse, elle est entrée en Suisse le 4 janvier 1996 au bénéfice d'un visa touristique de 90 jours, mais elle n'est pas repartie et a vécu dans sa famille. 
BY.________ a obtenu une autorisation d'établissement le 16 juillet 1998; il s'est ensuite remarié avec FY.________ le 31 mars 2000, laquelle s'est alors annoncée au contrôle de l'habitant et a sollicité une autorisation de séjour pour vivre en Suisse avec son mari. Les époux Y.________ partagent actuellement un appartement de quatre pièces, à Renens, avec leur fils C.________, titulaire d'une autorisation annuelle de séjour, et hébergent leur fils cadet E.________, arrivé en Suisse le 26 janvier 2000, auquel l'autorisation d'établissement au titre de regroupement familial a été refusée définitivement à la suite de l'arrêt du Tribunal fédéral du 14 novembre 2000 (2A. 379/2000). Les deux aînés, A.________ et B.________, sont au bénéfice d'une autorisation d'établissement, tandis que D.________ est toujours resté en Turquie. 
 
B.- Par décision du 27 décembre 2000, le Service cantonal de la population a refusé d'accorder une autorisation de séjour à FY.________, en tenant compte de son séjour sans autorisation en Suisse pendant plus de quatre ans, de son absence d'intégration et de la situation financière obérée de son époux. 
 
BY.________ et FY.________ ont recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif qui, par arrêt du 27 août 2001, a rejeté le recours. Il a retenu en bref qu'il existait un risque concret que les époux Y.________ tombent de manière continue et dans une large mesure à la charge de l'assistance publique au sens de l'art. 10 al. 1 lettre d de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement de étrangers (LSEE; RS 142. 20). Il a aussi tenu compte du fait que la recourante avait séjourné en Suisse pendant quatre ans en toute illégalité et que le recourant pourrait suivre son épouse en Turquie sans trop de difficultés. 
 
Dans le même arrêt, le Tribunal administratif a aussi rejeté le recours de AY.________ et EY.________ contre la décision du Service cantonal de la population du 4 avril 2001, déclarant irrecevable leur demande de réexamen. 
 
C.- Agissant par la voie du recours de droit administratif, BY.________ et FY.________ concluent à la réforme de l'arrêt du Tribunal administratif du 27 août 2001, en ce sens qu'une autorisation de séjour est accordée à la recourante avec effet au 31 mars 2000. Subsidiairement, ils concluent au renvoi de la cause au Tribunal administratif ou au Service cantonal de la population pour qu'ils délivrent l'autorisation sollicitée. Les recourants ont présenté une requête d'effet suspensif et ont demandé d'être dispensés de l'avance de frais. 
 
Le Tribunal administratif et le Service cantonal de la population se réfèrent aux considérants de l'arrêt attaqué, de même que l'Office fédéral des étrangers qui propose de rejeter le recours. 
D.- Par ordonnance présidentielle du 11 octobre 2001, l'effet suspensif a été accordé au recours. 
 
Le 6 novembre 2001, les recourants ont produit un nouveau certificat médical du Dr X.________, médecin à Renens, au sujet de FY.________. 
 
Considérant en droit : 
 
1.- Le présent recours porte uniquement sur le refus d'accorder une autorisation de séjour à FY.________, en sa qualité d'épouse d'un étranger titulaire d'une autorisation d'établissement. 
 
a) L'art. 17 al. 2 LSEE dispose que le conjoint étranger d'un étranger bénéficiant d'une autorisation d'établissement a droit à une autorisation de séjour aussi longtemps que les époux vivent ensemble. Toutefois, ce droit s'éteint si l'ayant droit a enfreint l'ordre public. Lorsqu'il existe un motif d'expulsion, les conditions d'extinction du droit pour atteinte à l'ordre public sont moins strictes que celles à remplir dans le cas de la perte du droit à l'autorisation de séjour du conjoint étranger d'un ressortissant suisse selon l'art. 7 al. 1 LSEE. Il y a lieu néanmoins de procéder à la pesée des intérêts en présence (ATF 122 II 385 consid. 3a p. p. 390; 120 Ib 129 consid 4a p.130; Alain Wurzburger, La jurisprudence récente du Tribunal fédéral en matière de police des étrangers, in RDAF 1997p. 320/321). 
 
b) Selon les circonstances, un étranger peut également se prévaloir du droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'art. 8 CEDH pour s'opposer à l'éventuelle séparation de sa famille et obtenir ainsi une autorisation de séjour. Encore faut-il, pour pouvoir invoquer l'art 8 CEDH, que la relation entre l'étranger et une personne de sa famille ayant le droit de s'établir en Suisse (en principe nationalité suisse ou autorisation d'établissement) soit étroite et effective (ATF 122 II 1 consid. 1e p. 5; 120 Ib 1 consid. 1d p. 3, 6 consid. 1 p. 8, 16 consid. 3a p. 21 et 257 consid. 1c p. 259/260). Cette condition est remplie en l'espèce, dans la mesure où les recourants sont mariés et vivent ensemble. 
 
La question de savoir si, dans un cas particulier, les autorités de police des étrangers sont tenues d'accorder une autorisation de séjour fondée sur l'art. 8 CEDH doit aussi être résolue sur la base d'une pesée de tous les intérêts privés et publics en présence. 
 
c) Le présent recours, qui respecte au surplus les conditions formelles prescrites par la loi, est donc recevable comme recours de droit administratif. 
 
2.- a) D'après l'art. 104 OJ, le recours de droit administratif peut être formé pour violation du droit fédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (lettre a), ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents, sous réserve de l'art. 105 al. 2 OJ (lettre b). 
 
Le Tribunal fédéral vérifie d'office l'application du droit fédéral, qui englobe notamment les droits constitutionnels des citoyens (ATF 124 II 517 consid. 1 p. 519; 123 II 385 consid. 3 p. 388), sans être lié par les motifs invoqués par les parties (art. 114 al. 1 in fine OJ). En revanche, lorsque le recours est dirigé, comme en l'espèce, contre la décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés dans cette décision, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de procédure (art. 105 al. 2 OJ). En outre, le Tribunal fédéral ne peut pas revoir l'opportunité de l'arrêt entrepris, le droit fédéral ne prévoyant pas un tel examen en la matière (art. 104 lettre c ch. 3 OJ). 
 
b) Les recourants reprochent tout d'abord au Tribunal administratif d'avoir établi les faits de façon arbitraire, sans tenir compte de la déposition commune des fils A.________, B.________ et C.________ du 10 mai 2001, qui déclaraient avoir continué à subvenir aux besoins de leur mère en Suisse, notamment en se chargeant des frais médicaux. 
 
En réalité, la juridiction cantonale a estimé qu'il était inutile de faire porter l'instruction sur les déclarations de salaire des fils des recourants, dans la mesure où il s'agissait de montants relativement modestes (3'800 fr. 
brut par mois pour A.________, 4'000 fr. brut pour B.________ et 2'800 fr. pour C.________, les deux aînés étant au surplus mariés et pères de deux enfants), qui leur permettaient tout au plus de fournir une aide occasionnelle à leurs parents, mais pas de les entretenir au sens de l'art. 328 CC. Il s'agit donc d'une question d'appréciation des faits pour déterminer l'ensemble des ressources potentielles des recourants, qui doit être examinée avec le fond du litige. 
 
3.- a) Le droit à une autorisation de séjour dans le cadre d'un regroupement familial qui est reconnu par l'art. 17 al. 2 LSEE n'est pas absolu. Il s'éteint si l'ayant droit a enfreint l'ordre public et s'il existe un motif d'expulsion (art. 10 al. 1 LSEE). 
 
 
b) Pour que le regroupement familial puisse être refusé en raison du motif d'expulsion figurant à l'art. 10 al. 1 lettre d LSEE, il faut toutefois qu'il existe un danger concret que les membres de la famille tombent d'une manière continue et dans une large mesure à la charge de l'assistance publique. Le simple risque n'est pas suffisant (cf. ATF 122 II 1 consid. 3c p. 8; 119 Ib 81 consid. 2d p. 87). La notion d'assistance publique doit être interprétée dans un sens technique (arrêt non publié du 2 novembre 1999 en la cause M., consid. 4b). C'est dire qu'elle comprend l'aide sociale traditionnelle et les revenus minima d'aide sociale à l'exclusion des prestations d'assurances sociales, comme les indemnités de chômage. Pour apprécier si une personne se trouve dans une large mesure à la charge de l'assistance publique, il faut tenir compte du montant total des prestations déjà versées à ce titre (arrêt non publié du 5 juin 2001 en la cause V., consid. 3a). 
 
 
Un canton peut certes prendre en considération des circonstances purement financières, tirées de motifs préventifs d'assistance publique pour refuser une autorisation de séjour. Le Tribunal fédéral n'admet toutefois qu'avec réserve un refus d'autorisation fondé sur de tels motifs. Pour que ceux-ci l'emportent sur l'intérêt des recourants à pouvoir vivre leur vie de famille en Suisse, il faut qu'il existe un danger concret que, selon toute probabilité, les intéressés se trouvent durablement et dans une mesure importante à la charge de l'aide sociale (ATF 125 II 633 consid. 3c p. 641; 122 II 1 consid. 3c p. 9; 119 Ib 81 consid. 2e p. 88). A cet égard, il y a lieu de tenir compte de l'aptitude financière de chaque membre de la famille à réaliser un revenu. Cela suppose que le canton procède aux investigations voulues afin d'évaluer si la situation financière des personnes à charge de l'assistance publique est ou non susceptible d'évoluer favorablement à long terme et pas seulement au moment de la demande de regroupement familial (arrêt non publié du 12 avril 2000 en la cause S.). 
 
c) En l'espèce, l'intérêt de la recourante, concrétisé par les art. 17 al. 2 LSEE et 8 CEDH, à pouvoir vivre en Suisse avec son mari, à proximité de trois de ses fils et de ses petits-enfants est important. Il y a lieu toutefois de tenir compte du fait qu'elle a séjourné illégalement en Suisse pendant plus de quatre ans et que son intégration dans ce pays reste très relative, dans la mesure où elle ne parle pas la langue et se dit incapable de travailler. Quant à son traitement médical, il s'agit essentiellement de médicaments pour soigner son hypertension artérielle diagnostiquée en 1998, qu'elle pourrait aisément se procurer en Turquie. Du côté du recourant, même si ce dernier vit en Suisse depuis 1987, il n'aurait sans doute pas trop de difficultés à suivre sa femme dans son pays d'origine, car sa situation en Suisse demeure précaire depuis plusieurs années, tant sur le plan professionnel que financier. Il ressort en effet du dossier qu'il n'a plus travaillé régulièrement depuis 1993 déjà: 
après avoir touché les prestations de l'assurance-chômage en 1993 et 1994, il a bénéficié pendant une année de l'aide dite "Bouton d'Or", actuellement remplacée par le revenu minimum de réinsertion (RMR); en 1997, 1998 et 1999, il a travaillé chez Textura pendant trois périodes de six mois et a reçu, depuis le 1er novembre 1999, un RMR de 1'852 fr. 50 par mois; il a également bénéficié d'un "emploi temporaire subventionné des plus de 50 ans" qui a pris fin le 9 juillet 2001; depuis lors, il touche à nouveau les indemnités journalières de l'assurance-chômage. 
 
Dans ces circonstances, il est incontestable que les recourants ne sont pas financièrement indépendants et sont durablement à la charge de la société, même si les prestations de l'assurance-chômage ne sont pas considérées en tant que telles comme des prestations d'aide sociale au sens strict. Il est en effet établi que les mesures destinées à la réinsertion sociale du recourant n'ont pas atteint leur but (voir art. 27 de la loi vaudoise du 25 septembre 1996 sur l'emploi et l'aide aux chômeurs), mais que le recourant fait en sorte de travailler juste le temps nécessaire pour toucher soit les prestations de l'assurance-chômage, soit le RMR. A cela s'ajoute qu'il existe à l'encontre du recourant des actes de défaut de biens pour un montant d'environ 25'000 fr. 
et que, comme l'a retenu l'autorité intimée, la situation financière de ses fils ne permet effectivement pas de mettre à leur charge une obligation d'entretien au sens de l'art. 328 CC
 
 
d) Il s'ensuit que le Tribunal administratif pouvait retenir que les recourants risquaient de tomber de manière continue et dans une large mesure à la charge de l'assistance publique au sens de l'art. 10 al. 1 lettre b LSEE. Ce faisant, il n'a pas violé les art. 17 al. 2 LSEE et 8 CEDH, ni pris une mesure inéquitable ou disproportionnée en confirmant le refus d'accorder une autorisation de séjour pour regroupement familial à la recourante. 
 
4.- Compte tenu de ce qui qui précède, le recours doit être rejeté. Il y a lieu également de mettre les frais judiciaires à la charge des recourants, en tenant compte de leur situation financière (art. 153, 153a et 156 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, 
le Tribunal fédéral, 
 
1. Rejette le recours. 
 
2. Met à la charge des recourants un émolument judiciaire réduit de 1'000 fr. 
 
3. Communique le présent arrêt en copie au mandataire des recourants, au Service de la population et au Tribunal administratif du canton de Vaud, ainsi qu'à l'Office fédéral des étrangers. 
_______________ 
Lausanne, le 8 janvier 2002 ROC/elo 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE: 
Le Juge présidant, 
 
La Greffière,