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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_970/2022  
 
 
Arrêt du 8 février 2023  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
Bovey et De Rossa. 
Greffière : Mme Bouchat. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
recourante, 
 
contre  
 
Justice de paix de l'arrondissement de la Gruyère, rue de l'Europe 10, 1630 Bulle, 
intimée. 
 
Objet 
protection de l'adulte (autorisation de résilier le contrat de bail et de liquider le ménage), 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de protection de l'enfant et de l'adulte du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg du 31 octobre 2022 (106 2022 123). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________, née en 1954, fait l'objet d'une mesure de curatelle de représentation et de gestion (art. 394 al. 1 et 395 al. 1 CC) instituée par décision du 21 mars 2019. 
 
B.  
Le 24 août 2022, la Justice de paix de l'arrondissement de la Gruyère (ci-après: l'autorité intimée) a donné à B.________, curateur auprès du Service des curatelles, l'autorisation de résilier le contrat de bail et de liquider le ménage de A.________, une fois cette décision entrée en force; partant, le curateur a été chargé d'aider l'intéressée à rechercher un logement correspondant à ses besoins et à sa situation financière; mission lui a en outre été donnée d'examiner la possibilité matérielle et financière de mettre ses meubles dans un garde-meuble. 
 
C.  
Par arrêt du 31 octobre 2022, la Cour de protection de l'enfant et de l'adulte du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg (ci-après: l'autorité cantonale ou précédente) a rejeté le recours formé par A.________, dans la mesure de sa recevabilité, et confirmé la décision précitée. 
 
D.  
Par courrier du 9 décembre 2022, A.________ (ci-après: la recourante) interjette un recours contre l'arrêt précité, en faisant notamment opposition à la résiliation de son contrat de bail, dont le loyer mensuel s'élève à 1'650 fr., charges comprises, et à la liquidation de son ménage. 
Invitée à déposer une éventuelle réponse, l'autorité cantonale a déclaré, par courrier du 9 janvier 2023, ne pas avoir d'observations à formuler. L'autorité intimée ne s'est quant à elle pas déterminée. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. L'arrêt attaqué, qui rejette un recours formé contre une décision de l'autorité de protection de l'adulte autorisant le curateur à résilier le contrat de bail et à liquider le ménage de la personne au bénéfice d'une mesure de protection (art. 416 al. 1 ch. 1 CC), constitue une décision finale (art. 90 LTF; arrêt 5A_34/2019 du 30 avril 2019 consid. 1.1), de nature pécuniaire - la recourante s'opposant à une mesure qui, par sa finalité, tend à défendre ses intérêts patrimoniaux (ATF 142 III 145 consid. 6.1 et les références, dont 116 II 379 consid. 2a; arrêt 5A_311/2015 du 11 septembre 2015 consid. 1) - atteignant la valeur litigieuse minimale de 30'000 fr. (art. 51 al. 4 et 74 al. 1 let. b LTF). Rendue sur recours par un tribunal supérieur statuant en dernière instance cantonale (art. 75 al. 1 et 2 LTF), en application de normes de droit public dans une matière connexe au droit civil (art. 72 al. 2 let. b ch. 6 LTF), la décision est susceptible de recours en matière civile. Déposé par ailleurs par une partie disposant de la qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF), par écrit (art. 42 al. 1 LTF) et en temps utile (art. 100 al. 1 LTF), le recours est recevable au regard de ces dispositions.  
 
 
1.2. Le recours en matière civile se caractérise comme un recours en réforme (art. 107 al. 2 LTF), de sorte que le recourant doit en principe prendre des conclusions sur le fond. A titre exceptionnel, il est admis qu'il puisse se limiter à prendre des conclusions cassatoires lorsque le Tribunal fédéral, s'il accueillait le recours, ne serait pas en mesure de statuer lui-même sur le fond (ATF 134 III 379 consid. 1.3). Par ailleurs, les conclusions doivent être interprétées selon le principe de la confiance, à la lumière de la motivation du recours (ATF 123 IV 125 consid. 1; 105 II 149 consid. 2a). En l'espèce, la recourante se limite à s'opposer à l'arrêt précité. On comprend toutefois au vu de la motivation de son acte que le recours vise en définitive la réforme de celui-ci, en ce sens que la requête du curateur, tendant à la résiliation de son contrat de bail et à la liquidation de son ménage, est rejetée.  
 
Partant, le présent recours est recevable. 
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être lié ni par les motifs de l'autorité précédente, ni par les moyens des parties; il peut donc admettre le recours en se fondant sur d'autres arguments que ceux invoqués par la partie recourante, comme il peut le rejeter en opérant une substitution de motifs (ATF 145 V 215 consid. 1.1; 144 III 462 consid. 3.2.3; 143 V 19 consid. 2.3). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés; il n'est pas tenu de traiter, à l'instar d'une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui pourraient se poser, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références). Le recourant doit par conséquent discuter succinctement les motifs de la décision entreprise et indiquer en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 consid. 2.4 et la référence). Il doit exister un lien entre la motivation du recours et la décision attaquée; le recourant ne peut se contenter de reprendre presque mot pour mot l'argumentation formée devant l'autorité cantonale (ATF 145 V 161 consid. 5.2; 139 I 306 consid. 1.2; 134 II 244 consid. 2.1-2.3). Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été expressément invoqué et motivé de façon claire et détaillée (" principe d'allégation ", art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 144 II 313 consid. 5.1; 142 II 369 consid. 2.1).  
 
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ceux-ci ont été constatés de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Le recourant qui soutient que les faits ont été établis d'une manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 144 II 246 consid. 6.7; 143 I 310 consid. 2.2 et la référence), doit se conformer au principe d'allégation susmentionné (art. 106 al. 2 LTF; cf. supra consid. 2.1). Une critique des faits qui ne satisfait pas à cette exigence est irrecevable (ATF 145 IV 154 consid. 1.1).  
 
3.  
 
3.1. La recourante se plaint en substance d'une violation de l'art. 416 al. 1 ch. 1 CC en tant que l'autorité précédente a confirmé la décision de l'autorité intimée autorisant le curateur à résilier son contrat de bail et à liquider son ménage.  
 
 
3.2. L'autorité précédente a retenu que la situation personnelle et financière des époux était de plus en plus précaire et que les demandes d'intervention formulées à l'égard du curateur, respectivement de l'autorité de protection se multipliaient, entre autres par la gérance en charge de l'appartement occupé actuellement par A.________, sans que celle-ci ne soit en mesure d'admettre ni les limites de son mari, ni les siennes. Elle a exposé que lors de l'audience du mois de mai 2022, le curateur avait ainsi fait état de l'endettement inquiétant du couple, l'épouse devant faire face à des poursuites pour plus de 113'000 fr. et l'époux pour près de 89'000 francs. Elle a relevé qu'il ne faisait dès lors aucun doute que la situation financière des époux commandait que des mesures soient désormais prises. A cet égard, elle a notamment constaté que l'intéressée devait s'acquitter d'un loyer mensuel de 1'650 fr. pour un appartement de quatre pièces, lequel avait été pris en location en vue d'un futur retour à domicile du mari. Or si un tel retour n'était pas totalement exclu en théorie, il se heurtait dans la pratique à de nombreuses contraintes logistiques - ce que A.________ avait d'ailleurs admis - et surtout aux difficultés personnelles de celle-ci, en particulier son impossibilité de collaborer avec les personnes qui soignaient son époux, tel que constaté par les divers intervenants, notamment ceux du Home médicalisé U.________, constat qui avait du reste amené l'autorité intimée à lui retirer avec effet immédiat et pour une durée indéterminée la représentation thérapeutique de son mari. L'autorité cantonale a considéré que dans ce contexte, il ne se justifiait plus qu'elle demeure seule dans un appartement prévu pour deux personnes. Ses revenus ne lui permettaient en effet pas de couvrir son minimum vital et sa situation financière se péjorait de plus en plus, étant précisé qu'elle n'y avait emménagé qu'en juillet 2020, de sorte qu'un (nouveau) déménagement ne représenterait pas une intrusion démesurée dans sa vie ou dans celle de son couple, et ceci quand bien même des dépenses avaient été effectuées dans ou en lien avec l'appartement actuel. Elle a encore relevé que l'autorité intimée avait soigneusement examiné la situation et n'était pas intervenue de manière précipitée; elle avait notamment donné le temps à l'intéressée d'éviter un tel déménagement, et suspendu la procédure afin de demander un rapport d'évaluation audit Home pour connaître précisément la situation de l'époux, en particulier si et à quelles conditions un retour à domicile était envisageable. Enfin, l'autorité précédente a relevé que l'autorité intimée avait expressément chargé le curateur d'examiner la possibilité matérielle et financière de mettre les (très nombreux) meubles de A.________ dans un garde-meuble, tenant ainsi compte de la possibilité et du souhait de celle-ci de ne pas se séparer de ses biens.  
 
 
3.3. L'art. 416 al. 1 ch. 1 CC prévoit que le curateur doit requérir le consentement de l'autorité de protection pour liquider le ménage et résilier le contrat de bail du logement principal de la personne concernée. Cette disposition, introduite par le nouveau droit, tient compte des lourdes conséquences (modification de l'environnement de vie) que ces actes peuvent entraîner pour la personne sous curatelle et son équilibre tant physique que psychique (Message du Conseil fédéral concernant la révision du Code civil suisse du 28 juin 2006, FF 2006 p. 6689; VOGEL, in Basler Kommentar, ZGB I, 7e éd., 2022, nos 14 ss ad art. 416 CC et les références; MEIER, Droit de la protection de l'adulte, 2022, nos 1081 et 1091, pp. 574 et 579; BIDERBOST, in CommFam, Protection de l'adulte, 2013, no 1 ad art. 416 CC, p. 583). L'approbation comporte un devoir d'examen et un devoir d'appréciation. L'autorité de protection doit effectuer une analyse complète de l'acte juridique envisagé, sous l'angle des intérêts de la personne protégée, ce qui implique une vision complète des circonstances du cas d'espèce (BIDERBOST, in CommFam, op. cit., no 44 ad art. 416 CC, p. 605).  
 
 
3.4. La recourante s'oppose à l'autorisation donnée à son curateur de résilier notamment son contrat de bail, en exposant que le montant de son loyer serait tout à fait raisonnable, celui-ci s'élevant à 1'650 fr. par mois, charges comprises. Elle allègue que l'appartement, étant plain-pied et bénéficiant d'un jardin, serait adapté à son état de santé ainsi qu'à celui de son époux et aurait en outre été aménagé conformément à leurs besoins. Elle ajoute que le coût de la location d'un garde-meuble ne serait pas inférieur à 1'000 fr., voire 1'200 fr. par mois, et que par conséquent, ses charges mensuelles totales risqueraient d'être au final plus élevées. Elle déclare enfin refuser catégoriquement de supporter les frais générés par le déménagement.  
 
 
3.5. En l'espèce, si l'on comprend les raisons qui ont conduit l'autorité précédente à confirmer la décision de l'autorité intimée (situation financière obérée, appartement prévu pour deux personnes, impossibilité de la recourante de collaborer avec les personnes qui soignaient son époux mettant ainsi en péril le retour de celui-ci à domicile, etc.), il apparaît que l'analyse de l'acte juridique envisagé n'est pas complète. En effet, plusieurs éléments essentiels manquent pour déterminer si l'autorité cantonale a ou non outrepassé son pouvoir d'appréciation (art. 4 CC). En premier lieu, alors que le but visé par la mesure est de reloger la recourante à meilleur compte, on ignore quel serait le montant du nouveau loyer jugé admissible au vu de sa situation financière, étant rappelé que son loyer s'élève à 1'650 fr. par mois. L'arrêt cantonal ne contient sur ce point aucun élément permettant une comparaison. Il ne renseigne pas non plus sur le coût que représenterait la location d'un garde-meuble qui s'ajouterait au nouveau loyer, ni sur les frais de déménagement, l'autorité intimée ayant simplement chargé le curateur d'examiner la possibilité matérielle et financière de louer un tel dépôt. Or, la cour cantonale ne pouvait pas se dispenser d'établir avec précision les montants précités, avant de confirmer l'autorisation litigieuse. Faute de comporter les constatations suffisantes pour l'application de la loi, l'arrêt déféré viole le droit fédéral (cf. supra consid. 3.3).  
 
4.  
Au vu de ce qui précède, le recours doit être admis, l'arrêt attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision conformément à l'art. 107 al. 2 LTF. La recourante qui obtient gain de cause ne supporte pas de frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il en va de même de l'autorité cantonale (art. 66 al. 4 LTF). 
 
Il n'est pas alloué de dépens, la recourante n'étant pas assistée. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis, l'arrêt attaqué est annulé et l'affaire est renvoyée à la juridiction précédente pour nouvelle décision. 
 
2.  
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué à la recourante, au curateur, à la Justice de paix de l'arrondissement de la Gruyère et à la Cour de protection de l'enfant et de l'adulte du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg. 
 
 
Lausanne, le 8 février 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : Bouchat