Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
 
[AZA 0/2] 
1P.23/2000 
 
Ie COUR DE DROIT PUBLIC 
********************************************** 
 
Séance du 8 novembre 2000 
 
Présidence de M. Aemisegger, Président de la Cour. 
Présents: MM. les Juges Nay, Aeschlimann, Féraud, Catenazzi, 
Favre et Seiler, Juge suppléant. 
Greffier: M. Thélin. 
 
__________ 
 
Statuant sur le recours de droit public 
formé par 
X.________, représenté par Me Michel Ducrot, avocat à Martigny, 
 
contre 
la loi valaisanne du 23 juin 1999 sur la prévoyance professionnelle des magistrats de l'ordre exécutif, judiciaire et du Ministère public; 
 
(régime transitoire; égalité de traitement) 
Vu les pièces du dossier d'où ressortent 
les faits suivants: 
 
A.- Le 23 juin 1999, le Grand Conseil du canton du Valais a adopté une loi sur la prévoyance professionnelle des magistrats de l'ordre exécutif, judiciaire et du Ministère public. 
 
Cette loi prévoit qu'à l'avenir, dès leur élection ou nomination, le Chancelier d'Etat et les magistrats de l'ordre judiciaire, y compris ceux du Ministère public, seront affiliés à la Caisse de prévoyance du personnel de l'Etat du Valais et soumis aux dispositions statutaires de cette caisse (art. 2 al. 1). Une ordonnance du Conseil d'Etat doit déterminer la catégorie d'assurance, parmi celles que comporte la caisse, et le taux de cotisation applicables (art. 2 al. 2). 
 
A titre transitoire, il est prévu que les magistrats judiciaires déjà en fonction lors de l'entrée en vigueur de la loi, âgés de plus de cinquante ans ou ayant atteint une certaine durée de fonction, soit douze ans de fonction pour les juges cantonaux ou seize ans pour les autres magistrats, demeureront soumis au régime de pensions antérieur, institué par un règlement du Grand Conseil du 30 mars 1979 (art. 5 al. 1). Il s'agit de pensions de retraite, d'invalidité ou de survivants payées directement par l'Etat, sans financement spécifique, hormis une cotisation retenue sur le traitement des magistrats. Ce régime doit toutefois être modifié selon les principes suivants (art. 5 al. 2 et 3): 
 
 
"Il est fait application d'un taux de coordination 
correspondant à celui retenu par la [Caisse de prévoyance]. 
Pour le calcul des prestations, les traitements 
assurés (anciens et nouveaux) sont pris en 
considération proportionnellement à leur durée effective 
d'application. 
"Le taux de cotisation est identique à celui des 
magistrats transférés à la [Caisse de prévoyance].. " 
 
Les magistrats judiciaires déjà en fonction, mais ne satisfaisant pas aux conditions précitées d'âge ou de durée de fonction, sont transférés à la Caisse de prévoyance (art. 6 al. 1). L'Etat verse à celle-ci les prestations de libre passage dues selon le régime de pensions antérieur; il verse en outre les montants complémentaires nécessaires au rachat d'années d'assurance, de manière à garantir l'obtention de prestations maximales dans le système de cette caisse (art. 6 al. 2). L'Etat impute toutefois, sur ces montants complémentaires, les avoirs de vieillesse que les intéressés se sont ou auraient pu se constituer avant leur entrée dans la magistrature, selon la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle (art. 6 al. 3). 
 
 
D'autres dispositions règlent la prévoyance des conseillers d'Etat, pour lesquels le régime antérieur est en principe maintenu (art. 3 et 7). 
 
L'entrée en vigueur de la loi a été fixée au 1er janvier 2000 (art. 10 al. 2). Le Conseil d'Etat devait préalablement adopter, par la voie d'une ordonnance soumise à l'approbation du Grand Conseil, les "dispositions complémentaires absolument nécessaires au respect de la législation fédérale sur la prévoyance professionnelle" à l'égard des magistrats non affiliés à la Caisse de prévoyance; il devait aussi régler "les questions expressément déléguées par la loi" et adopter les dispositions nécessaires à son exécution (art. 8). 
 
B.- La loi était sujette au référendum facultatif, qui n'a pas été demandé. Le Conseil d'Etat l'a promulguée par arrêté du 1er décembre 1999, publié le 3 suivant, en même temps que l'ordonnance qu'il avait entre-temps adoptée le 13 octobre 1999 et soumise à l'approbation du Grand Conseil. 
 
L'art. 16 al. 1 de cette ordonnance précise la base de calcul des prestations telle que prévue par l'art. 5 al. 2, 2e phrase, de la loi. Il s'agit d'une moyenne pondérée "prorata temporis" des traitements déterminants avant et après la modification du règlement de 1979: 
 
 
(D1 x T1) + (D2 x T2) 
D1 + D2 
D1: durée de fonction jusqu'au 31 décembre 1999; D2: durée de fonction depuis le 1er janvier 2000; T1: traitement effectif (100 %), déterminant jusqu'au 31 décembre 1999; T2: traitement coordonné (85 %), déterminant depuis le 1er janvier 2000. 
 
Il résulte de ce système que plus la durée de fonction d'un magistrat se prolonge au delà du 1er janvier 2000, plus la base de calcul de ses prestations diminue et se rapproche du traitement coordonné. 
 
C.- Le Tribunal fédéral est saisi d'un recours de droit public dirigé contre la loi du 23 juin 1999, formé par X.________, né le xxx, juge d'instruction pénale depuis le 1er janvier 1988 puis juge de district depuis le 1er janvier 1992. Le recourant demande l'annulation des art. 5 al. 1 et 2 et 6 al. 1 de la loi. Il tient pour arbitraire de ne pas conserver, à titre transitoire, le régime de pensions antérieur pour tous les magistrats judiciaires déjà en fonction; il critique, en particulier, les critères d'âge ou de durée de fonction retenus aux art. 5 al. 1 et 6 al. 1. Il se plaint aussi d'inégalité de traitement en tant que selon l'art. 5 al. 2, 2e phrase, les magistrats maintenus sous le régime de pensions antérieur ne subiront qu'une réduction progressive de la base de calcul de leurs prétentions, inhérente à l'introduction "prorata temporis" d'un traitement assuré inférieur au traitement plein, tandis que cette réduction sera immédiate pour les magistrats transférés à la Caisse de prévoyance. 
 
Invité à répondre, le Grand Conseil du canton du Valais propose le rejet du recours. X.________ a déposé un mémoire complétif et a maintenu ses conclusions. 
 
D.- Les documents joints à la réponse du Grand Conseil révèlent que l'Etat du Valais a versé à la Caisse de prévoyance le montant total de 8'041'009 fr.60 pour le transfert de vingt-trois magistrats, qui devraient en outre apporter globalement 464'055 fr.85 pour s'assurer des prestations maximales. Dans le cas personnel du recourant, les montants versés par l'Etat et à verser par l'affilié s'élèvent respectivement à 435'732 fr.15 et 10'632 fr.50. Le recourant devrait prélever ce dernier montant sur un capital de prévoyance de 123'869 fr.10 qu'il avait constitué avant son accès à la magistrature, placé depuis sur un compte de libre passage auprès de la Banque cantonale du Valais. 
 
Considérant en droit : 
 
1.- a) Au 1er janvier 2000, le recourant était âgé de moins de cinquante ans et n'atteignait pas seize ans de fonction en qualité de juge d'instruction ou de juge de district. 
La loi attaquée a donc pour effet de le contraindre à renoncer au régime de pensions institué par le règlement du 30 mars 1979, dont il bénéficiait auparavant, et de l'affilier à un système de prévoyance moins avantageux. En particulier, pour obtenir des prestations maximales dans ce système, il doit céder à la Caisse de prévoyance une partie du capital constitué avant son accès à la magistrature et, de toute manière, ses perspectives de retraite anticipée sont considérablement réduites. Il a ainsi, en principe, qualité pour recourir selon l'art. 88 OJ
 
Les situations des magistrats qui exercent la même fonction publique mais sont soumis par la loi à des régimes de prévoyance professionnelle différents sont étroitement comparables; le recourant est donc autorisé à faire valoir, le cas échéant, que les magistrats maintenus sous le régime spécifique de 1979 bénéficient d'un avantage injustifié et constitutif d'une inégalité de traitement (cf. ATF 109 Ia 252 consid. 4c p. 255; voir aussi ATF 124 I 159 consid. 1c p. 161, 110 Ia 7 consid. 1a p. 10). En revanche, le recours est irrecevable dans la mesure où il tend à faire constater que les modalités dudit régime, ou les modifications qui lui sont apportées par la loi attaquée, sont en elles-mêmes arbitraires. 
En effet, le recourant n'est pas personnellement touché, même de façon seulement virtuelle, par les dispositions concernées (cf. ATF 125 I 173 consid. 1b; 124 I 145 consid. 1c p. 148; 123 I 41 consid. 5b p. 43). 
 
 
 
b) Le recours de droit public doit être formé dans le délai de trente jours dès la communication, selon le droit cantonal, de l'acte attaqué (art. 89 OJ). Lorsque celui-ci, tel une loi cantonale, est soumis au référendum obligatoire ou facultatif, le délai court dès la publication de l'arrêté de promulgation par lequel le pouvoir exécutif constate que l'acte est définitivement adopté (ATF 121 I 187 consid. 1a p. 188, 119 Ia 123 consid. 1a p. 126, 119 Ia 321 consid. 3a p. 325). En l'occurrence, le délai de recours est respecté. 
 
 
 
2.- Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, les prétentions pécuniaires des magistrats ou fonctionnaires, qu'il s'agisse des prétentions salariales ou de celles relatives aux pensions, n'ont en règle générale pas le caractère de droits acquis. Elles sont en principe régies par la législation en vigueur au moment où elles doivent prendre effet, de sorte que des droits acquis ne naissent en faveur des personnes concernées que si la loi a fixé une fois pour toutes les relations en cause pour les soustraire aux effets des modifications légales, ou lorsque des assurances précises ont été données à l'occasion d'un engagement individuel (ATF 118 Ia 245 consid. 5b p. 255, 117 V 229 consid. 5b p. 234, 107 Ia 193 consid. 3a p. 194, 106 Ia 163 consid. 1a p. 166). Le cas échéant, la loi ne peut supprimer des droits acquis que si un intérêt public suffisant justifie cette mesure, et elle doit assurer une pleine indemnisation (ATF 119 Ia 154 consid. 5c p. 161/162, 117 Ia 35 consid. 3b p. 39, 117 V 229 consid. 5b in fine p. 235). En l'occurrence toutefois, le recourant admet expressément qu'il ne bénéficie pas de prétentions ainsi garanties. 
 
Dans la mesure où elles ne constituent pas des droits acquis, les prétentions patrimoniales des magistrats ou fonctionnaires sont néanmoins protégées contre les interventions du législateur par les art. 8 al. 1 et 9 Cst. A l'instar de l'art. 4 aCst. , ces dispositions constitutionnelles empêchent que les prétentions en cause ne soient arbitrairement supprimées ou réduites, notamment quant à leur montant, et que des atteintes aux droits concernés interviennent unilatéralement et sans justification particulière, au détriment de quelques intéressés ou de certaines catégories d'entre eux (ATF 118 Ia 245 consid. 5b p. 255, 117 V 229 consid. 5c p. 235, 106 Ia 163 consid. 1c p. 169; voir aussi Ueli Kieser, Besitzstand, Anwartschaften und wohlerworbene Rechte in der beruflichen Vorsorge, RSAS 43/1999 p. 290 ss, p. 308; Jacques-André Schneider, La prévoyance professionnelle et l'égalité de traitement, in Aspects de la sécurité sociale 2/1993 p. 22, ch. 3 ss). Selon les circonstances, le législateur est tenu d'adopter des dispositions transitoires, soit pour éviter des conséquences ainsi prohibées, soit pour permettre aux intéressés de s'adapter à la nouvelle situation légale (arrêt du 3 avril 1996 in Pra 1997 p. 1, SJ 1996 p. 661, consid. 4b; voir aussi ATF 122 V 405 consid. 3b/bb p. 409). Ces dispositions transitoires ne doivent pas comporter elles-mêmes des distinctions arbitraires ou contraires à la garantie de l'égalité de traitement (arrêt du 30 septembre 1988 in RSAS 33/1989 p. 313, consid. 4f p. 326). 
 
 
 
3.- Il convient d'étudier les caractéristiques essentielles des deux systèmes de prévoyance professionnelle en présence, ainsi que les effets des dispositions contestées. 
 
a) Dans le régime des pensions institué par le règlement du 30 mars 1979, l'âge de retraite des magistrats judiciaires est en principe "celui fixé par l'AVS"; c'est cet âge-terme qui détermine le calcul des prestations de libre passage en cas de démission sans droit à la pension. Les magistrats judiciaires peuvent cependant prendre leur retraite déjà après douze ans de fonction pour les juges cantonaux, ou après seize ans pour les autres magistrats, étant précisé que la pension complète suppose seize ans de fonction aussi pour les juges cantonaux. Le magistrat qui n'est pas réélu a droit à une pension, le cas échéant réduite, quelle que soit sa durée de fonction. Seules des années de fonction effectives entrent en considération; le régime ne comporte aucune possibilité, ni aucune nécessité de rachat d'années. La pension complète peut être réclamée dès l'âge de soixante ans ou dès un âge plus élevé; réclamée plus tôt, elle est réduite de 2 % par année manquante jusqu'à l'âge de soixante ans. Les pensions complètes ouvertes avant le 1er janvier 2000 correspondaient à 60 % du traitement effectif payé par l'Etat; les pensions complètes ouvertes ou à ouvrir dès cette date correspondent à 60 % d'un montant calculé conformément à l'art. 5 al. 2, 2e phrase, de la loi, compris entre le traitement coordonné (85 % du traitement effectif), nouvellement introduit dans ce régime, et le traitement effectif. 
 
 
Auprès de la Caisse de prévoyance, selon les statuts actuels adoptés le 23 juin 1999 pour entrer en vigueur le 1er janvier 2000, la pension complète suppose soit quarante, soit trente-sept ans et demi de cotisation, selon la catégorie d'assurance, et elle n'est jamais supérieure à 60 % du traitement coordonné. Si un nouvel affilié dispose déjà d'un capital de prévoyance, il doit généralement l'affecter au rachat d'années de cotisation manquantes. Si l'affilié opte pour une retraite anticipée, la pension est réduite selon un taux d'environ 7 à 7,5 % par année d'anticipation, légèrement dégressif. 
 
b) A titre de juge de district, le recourant est attribué à la catégorie d'assurance 1b, où la retraite statutaire est fixée à soixante-deux ans et nécessite, pour une pension complète, quarante années de cotisation effectives ou rachetées. Le recourant atteindra cet âge en 2012. La pension complète correspondra à 60 % du traitement coordonné, soit 51 % du traitement effectif. Si le recourant pouvait conserver le régime de pensions de 1979, tel que modifié par la loi attaquée, il pourrait obtenir au même moment une pension égale à 55,5 % de ce traitement effectif. On constate donc qu'à cette échéance lointaine, le système de la Caisse de prévoyance est moins avantageux que le régime antérieur, mais que la perte d'expectative imposée au recourant n'est pas très importante. Celui-ci conserve d'ailleurs l'essentiel du capital de prévoyance qu'il avait constitué avant son accès à la magistrature; hormis un montant d'environ 10'500 fr., il n'a pas besoin d'investir ce capital dans le rachat des années de cotisation manquantes. 
 
Auprès de la Caisse de prévoyance, dans la catégorie précitée, l'affilié peut prendre une retraite anticipée à cinquante-sept ans au plus tôt. Même avec une carrière d'assurance sans lacune, la pension n'atteint alors que 33,02 % du traitement effectif. Or, dans le régime de 1979 modifié, le recourant pourrait obtenir, à cet âge, en 2007, une pension égale à 53,28 % du traitement effectif. Cette pension serait à peine réduite par rapport à celle accessible cinq ans plus tard. La différence entre les prestations de chaque système, défavorable au recourant, est ici considérable. Enfin, la loi attaquée retire au recourant, sans aucune alternative même moins avantageuse, la possibilité de prendre sa retraite dès sa seizième année de fonction accomplie, à cinquante-quatre ans, avec 50,82 % du traitement effectif. 
 
c) Comparé au système de la Caisse de prévoyance, le régime des pensions de 1979 se distingue ainsi par une durée d'acquisition des prestations très brève et par un taux de pension élevé. Les prestations de retraite à l'âge terme "fixé par l'AVS" ne s'écartent guère de la norme, mais les possibilités de retraites anticipées sont particulièrement avantageuses et même tout à fait inusitées. Cette singularité est confirmée par le fait qu'en règle générale, l'équilibre d'un système de prévoyance nécessite que les retraites anticipées soient réduites d'environ 8 % par année manquante jusqu'à l'âge terme normal (Carl Helbling, Personalvorsorge und BVG, 7e éd., Berne 2000, p. 214); or, le régime de 1979 ne prévoit aucune réduction pour les retraites prises à soixante ans, et une réduction de 2 % seulement est opérée pour chaque année d'anticipation supplémentaire. De plus, les magistrats retraités peuvent cumuler une pension complète avec la prévoyance vieillesse qu'ils ont eu le temps de se constituer, en particulier sous forme d'une prestation de sortie d'une institution de prévoyance, dans leur carrière professionnelle antérieure à leur entrée dans la magistrature. 
 
Le transfert à la Caisse de prévoyance, tel qu'imposé au recourant et à vingt-deux autres magistrats, a pour effet de déplacer l'âge de la retraite complète de soixante à soixante-deux ans pour les quatorze magistrats attribués à la catégorie 1b; les neuf juges d'instruction pénale ou juges des mineurs, que l'ordonnance attribue à la catégorie 2b, conservent la retraite complète à soixante ans. Pour tous, le montant de la retraite complète est inférieur, dans une mesure variable selon la date d'entrée en fonction, à celle qui serait obtenue dans le régime de 1979 modifié. Pour tous également, les perspectives de retraite anticipée sont supprimées ou très fortement réduites. Cependant, en raison des modalités financières adoptées pour le rachat des années d'assurance manquantes, le cumul d'une retraite ordinaire avec la prévoyance antérieure à l'activité de magistrat subsiste partiellement (en tant qu'il n'est pas exclu par le droit fédéral: 
cf. Bernard Viret, La surindemnisation dans la prévoyance professionnelle, in Revue suisse d'assurances 67/1999 p. 15 ss, p. 26), dans une mesure d'autant plus étendue que l'intéressé a entrepris une activité lucrative longtemps avant l'entrée en vigueur de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle, intervenue le 1er janvier 1985; il en est ainsi dans le cas particulier du recourant. Enfin, tant les cotisations que les prestations sont calculées d'emblée sur la base du traitement coordonné, soit 85 % du traitement effectif. 
 
 
Pour les magistrats non transférés à la caisse de prévoyance, la cotisation retenue par l'Etat est calculée de la même façon, et son montant est donc identique, mais les prestations sont établies sur une base plus élevée, dégressive au fil du temps, en vertu de l'art. 5 al. 2, 2e phrase, de la loi. Cette différence favorable auxdits magistrats s'applique notamment aux prestations de vieillesse, y compris les retraites anticipées. Le mode de calcul ainsi fixé a pour conséquence que dans le régime concerné, la pension de retraite la plus élevée s'obtient à l'âge de soixante ans; son montant diminue si elle est réclamée plus tard. 
4.- Il est ensuite nécessaire d'examiner les objectifs de la loi attaquée, et les principes qui ont guidé son élaboration. 
 
Selon le message du Conseil d'Etat au Grand Conseil du 27 mai 1998, le régime des pensions appliqué depuis 1979 devait être adapté, sur plusieurs points, à des dispositions impératives de la législation fédérale sur la prévoyance professionnelle. 
Ce régime apparaissait de toute manière incohérent par rapport aux institutions modernes de prévoyance; en outre, notamment en raison de la possibilité de cumul laissée aux bénéficiaires, ledit régime était indûment généreux pour ces derniers et, par conséquent, excessivement coûteux pour les finances publiques. C'est pourquoi le gouvernement proposait que les nouveaux magistrats judiciaires soient désormais affiliés à la Caisse de prévoyance. Dans l'immédiat, l'Etat supporterait des charges financières supplémentaires en tant qu'il ne pourrait plus retenir une cotisation sur les traitements concernés et devrait, au contraire, verser des cotisations d'employeur; à long terme par contre, il serait libéré du service des pensions de retraite. Compte tenu des difficultés que soulevait un transfert à cette caisse des magistrats déjà en fonction, ou de seulement certaines catégories d'entre eux, le Conseil d'Etat proposait de les maintenir tous sous le régime de 1979. 
 
Les travaux de la commission parlementaire chargée d'examiner le projet sont consignés dans un rapport daté du 31 mars 1999. La commission a jugé que le régime transitoire proposé par le Conseil d'Etat n'était pas satisfaisant, notamment parce qu'il s'étendrait sur une durée trop longue; afin d'élaborer une autre solution, elle a demandé un avis de droit sur la possibilité de transférer certaines catégories de magistrats déjà en fonction, à délimiter d'après l'âge ou la durée de fonction. Selon l'avis ainsi obtenu, fourni par un spécialiste du droit de la prévoyance professionnelle, une modification du régime des pensions de vieillesse peut en principe être imposée aux futurs rentiers; toutefois, une personne proche de l'âge de la retraite doit être protégée contre des réductions de ses expectatives, car elle ne dispose plus du temps nécessaire à la préparation d'autres solutions de prévoyance. Le critère d'un âge déterminé, pour départager les magistrats à maintenir sous le régime de 1979, d'une part, et ceux à transférer à la Caisse de prévoyance, d'autre part, était donc jugé pertinent au regard de la garantie de l'égalité de traitement. Il ne s'imposait par contre pas, du point de vue juridique, d'instituer aussi un critère fondé sur une durée de fonction excédant douze ou seize ans. L'avis de droit portait encore sur les modalités financières du transfert à la Caisse de prévoyance: l'Etat devrait verser au moins les prestations de libre passage dues selon le régime de 1979, car chacune d'elle constituait un droit acquis du magistrat concerné (cf. Kieser, op. cit. p. 310/311; Ulrich Fehlmann, Erworbene Rechte und Besitzstand, Prévoyance professionnelle suisse 3/1990, p. 27); il lui incomberait en outre de garantir, par des versements complémentaires appropriés, la possibilité d'acquérir des retraites complètes à l'âge terme. L'expert n'était pas consulté au sujet des modifications à apporter, le cas échéant, au régime des pensions de 1979. 
 
 
La commission a, dans l'ensemble, suivi ces recommandations. 
Après discussion portant notamment sur la fixation de l'âge limite à cinquante, cinquante-cinq ou cinquante-huit ans, elle a proposé la solution finalement consacrée par la loi du 23 juin 1999, comportant le transfert à la Caisse de prévoyance des magistrats de moins de cinquante ans d'âge et de moins de douze ou seize ans de fonction. En outre, dans un souci "d'égalité de traitement par rapport aux magistrats soumis au régime ordinaire de prévoyance", la commission a proposé d'introduire dans le régime de 1979 un traitement coordonné et un taux de cotisation identiques à ceux de la Caisse de prévoyance (art. 5 al. 2 et 3 de la loi). L'application "prorata temporis" de ce traitement coordonné, pour le calcul des pensions, avait pour but d'éviter que les prestations assurées ne diminuent de 15 % "du jour au lendemain"; la diminution devait plutôt intervenir de manière progressive et tenir compte des "droits acquis dans le passé". 
 
5.- a) Il n'est pas contesté que le législateur cantonal ait en principe le droit de mettre fin au régime de pensions spécifique des magistrats judiciaires, immédiatement ou à terme, et de le remplacer par l'affiliation de ces magistrats à une institution de prévoyance classique. Il n'est pas non plus contesté que cette réforme puisse s'accompagner d'une réduction des prestations de prévoyance. En effet, il est loisible au législateur de réduire certaines dépenses publiques afin de maintenir ou rétablir l'équilibre des finances; il lui appartient aussi, s'il le juge opportun, de réviser et d'adapter le statut des magistrats, y compris leurs prétentions pécuniaires, selon sa conception actuelle de l'importance et de la valeur des fonctions qu'ils exercent, comparées à celles des autres agents publics et à la situation du secteur privé. Il lui appartient enfin d'évaluer l'opportunité de maintenir ou, au contraire, de supprimer des dispositions propres à favoriser l'indépendance des magistrats judiciaires. Le litige porte donc exclusivement sur le régime transitoire adopté en l'occurrence, qui définit deux groupes parmi les magistrats actuellement en fonction, les uns étant transférés à la Caisse de prévoyance, les autres maintenus sous le régime spécifique de 1979, avec les avantages que celui-ci comporte quant aux retraites anticipées. 
 
b) Un régime transitoire a essentiellement pour but d'assurer des délais d'adaptation aux personnes qui ont été soumises à la réglementation ancienne, ou de leur permettre de maintenir les dispositions qu'elles ont prises de bonne foi, en fonction de cette réglementation, et sur lesquelles il ne leur est pas facile de revenir (arrêt du 3 avril 1996 in Pra 1997 p. 1, SJ 1996 p. 661, consid. 4b). Un tel régime introduit inévitablement des différences entre des situations qui ont pris naissance, respectivement, avant ou après certaines dates; dans ce domaine, pour autant que les modalités retenues ne comportent pas de distinctions arbitraires ou contraires à la garantie de l'égalité de traitement (cf. ATF 123 II 433 consid. 9 p. 446/447; arrêt du 30 septembre 1988 in RSAS 33/1989 p. 313, consid. 4f p. 326), le législateur dispose d'un large pouvoir d'appréciation. 
 
La jurisprudence tient pour admissible, en particulier, de maintenir inchangée la situation des magistrats ou agents publics déjà en fonction lors du changement de législation, même si cela aboutit à ce que ces magistrats ou agents bénéficient, pour la même activité, de prestations plus avantageuses que celles accordées aux autres, nouvellement engagés (ATF 118 Ia 245 consid. 5d p. 257/258; arrêt du 21 octobre 1997 in Pra 1998 p. 227, consid. 4c p. 230). Le législateur est toutefois aussi autorisé, en règle générale, à soumettre d'emblée tous les magistrats ou agents concernés, y compris les anciens, à la nouvelle réglementation; il peut également adopter une solution intermédiaire, qui consiste, par exemple, à maintenir la situation antérieure seulement pendant une période déterminée. Dans certaines conditions, une telle solution peut apparaître obligatoire du point de vue de l'art. 9 Cst. ou 4 aCst. (arrêt précité du 3 avril 1996, loc. cit.). Par ailleurs, compte tenu de la grande liberté du législateur dans l'aménagement du statut de la fonction publique, il peut aussi se justifier d'accorder, au contraire, une situation plus favorable aux magistrats ou agents nouvellement engagés (arrêt du 20 janvier 1999 dans la cause S., non publié, consid. 3a). 
 
c) En l'occurrence, le régime transitoire distingue deux groupes parmi les magistrats qui étaient déjà en fonction au 1er janvier 2000, date de l'entrée en vigueur du nouveau régime de prévoyance. Les uns, qui n'atteignaient alors ni cinquante ans d'âge ni douze ou seize ans de fonction, sont soumis audit régime, à l'instar des magistrats qui seront élus ou nommés à l'avenir; les autres, plus âgés ou plus anciens, demeurent au bénéfice de l'ancienne réglementation, amendée sur certains points; ils conservent notamment leurs perspectives de retraites anticipées. On a vu qu'en principe, le législateur peut maintenir la situation des magistrats ou agents déjà en fonction, ou au contraire les soumettre à la nouvelle réglementation; on ne saurait donc lui dénier par principe la faculté d'appliquer simultanément ces deux solutions à deux groupes distincts, pour autant que les critères de délimitation ne soient pas arbitraires. 
 
Dans sa réponse au recours, le Grand Conseil soutient à juste titre que des magistrats proches de l'âge de la retraite doivent être protégés contre des réductions de leurs expectatives en matière de pension, compte tenu qu'ils ne disposent plus du temps nécessaire à la préparation d'autres solutions de prévoyance. Cette considération s'impose en tout cas lorsque la réduction envisagée doit porter sur des pensions de retraite à réclamer dès l'âge AVS ou peu d'années avant cet âge (arrêt du 30 septembre 1988 in RSAS 33/1989 p. 313, consid. 4f p. 326); il appartient cependant au législateur d'apprécier l'âge limite à prendre en considération. 
 
 
Pour le surplus, dans une profession qui ne comporte ni exigences physiques particulières, ni incidences spécifiques sur la santé, la possibilité de prendre sa retraite avant soixante ans, avec une pension complète ou presque complète, est un avantage qui excède le cadre d'une prévoyance vieillesse ordinaire (cf. Roland Müller, Die Vorzeitige Pensionierung [...], RSAS 41/1997 p. 337 ss, p. 344; Erika Schnyder, La retraite anticipée dans le deuxième pilier, Prévoyance professionnelle suisse 9/1996, p. 93). Le maintien de cette possibilité n'est donc pas constitutionnellement garanti aux intéressés. Néanmoins, le législateur cantonal ne tombe pas dans l'arbitraire en la conservant aux magistrats ayant déjà atteint un certain âge, en l'occurrence celui de cinquante ans, et qui étaient donc les plus proches de pouvoir effectivement bénéficier d'une retraite anticipée à des conditions très favorables. Avant l'âge précité, une personne peut éventuellement rechercher une autre situation professionnelle, si elle n'accepte pas de simplement renoncer aux avantages particuliers que son statut comportait initialement; au delà de cet âge, un changement de ce genre devient, en fait, plus difficile. La solution retenue et l'âge limite fixés par le Grand Conseil échappent donc aux critiques du recourant; il est sans importance qu'un régime transitoire différent, plus favorable à ce dernier, eût aussi pu être adopté. 
 
L'accès aux retraites anticipées est maintenu, en outre, pour les magistrats de moins de cinquante ans d'âge mais qui avaient accompli, selon qu'ils appartiennent au Tribunal cantonal ou à une autre juridiction, au moins douze ou seize ans de fonction. Cet élément du régime transitoire a pour objet de maintenir le droit des magistrats concernés d'opter entre le départ en retraite immédiat ou la continuation de leur activité, droit qu'ils auraient pu exercer déjà avant le 31 décembre 1999; si leur situation n'avait pas été spécifiquement prévue, ils auraient dû choisir entre présenter leur démission avant cette date ou se soumettre au nouveau système de prévoyance. La modalité critiquée correspond exactement à la situation juridique préexistante et elle échappe donc, elle aussi, au grief d'arbitraire. 
 
En tant que le recourant conteste la distinction opérée entre les juges cantonaux et les autres magistrats, quant à la durée de fonction déterminante, son argumentation est dirigée plutôt contre le règlement de 1979 que contre le régime transitoire de la loi attaquée. Elle est de toute manière privée de fondement: en effet, il n'est pas arbitraire de différencier les rémunérations des magistrats, ou les autres prestations pécuniaires qui leurs sont offertes, d'après la position hiérarchique des fonctions concernées. De plus, en général, les juges cantonaux accèdent à leur fonction à un âge plus avancé que les autres magistrats. Enfin, ils doivent eux aussi accomplir seize ans de fonction pour obtenir, le cas échéant, une retraite complète. 
 
d) Le recourant critique spécialement l'art. 5 al. 2, 2e phrase, de la loi attaquée. Cette disposition est une modalité de l'introduction du traitement coordonné dans le régime de 1979; elle a pour objet d'éviter une diminution soudaine, de 15 %, des prestations assurées dans ce régime. 
Il est exact que les magistrats transférés à la Caisse de prévoyance ne bénéficient d'aucune modalité comparable, et que les prestations de cet établissement se calculeront d'emblée sur la base du traitement coordonné. On a cependant vu que le législateur cantonal aurait pu maintenir sans changement le régime de 1979 pour les magistrats les plus proches d'obtenir effectivement une pension de retraite; on ne saurait donc lui reprocher d'avoir adopté une solution intermédiaire qui aura pour effet de réduire, progressivement, les pensions nouvelles dudit régime, et de les rapprocher ainsi de celles de la Caisse de prévoyance. 
 
 
6.- Le recours de droit public se révèle en tous points mal fondé, dans la mesure où il est recevable, et doit donc être rejeté. L'émolument judiciaire incombe à son auteur. 
 
Par ces motifs, 
 
le Tribunal fédéral : 
 
1. Rejette le recours dans la mesure où il est recevable. 
 
2. Met un émolument judiciaire de 2'500 fr. à la charge du recourant. 
 
3. Dit qu'il n'est pas alloué de dépens. 
 
4. Communique le présent arrêt en copie au mandataire du recourant et au Département des finances et de l'économie du canton du Valais. 
 
__________ 
Lausanne, le 8 novembre 2000 THE/col 
 
Au nom de la Ie Cour de droit public 
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE: 
Le Président, 
 
Le Greffier,