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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
5P.288/2003 /frs 
 
Arrêt du 9 septembre 2003 
IIe Cour civile 
 
Composition 
M. et Mmes les Juges Raselli, Président, Escher et Hohl. 
Greffier: M. Fellay. 
Parties 
 
A.________ SA, 
recourante, représentée par Me Alain Dubuis, avocat, av. C.-F. Ramuz 60, case postale 234, 1001 Lausanne, 
 
contre 
 
L.________, 
intimé, représenté par Me Pierre-Xavier Luciani, avocat, rue du Petit-Chêne 18, case postale 3151, 1002 Lausanne, 
Président de la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois, route du Signal 8, 1014 Lausanne, 
 
Office des poursuites et faillites de Morges, 1110 Morges. 
 
Objet 
art. 9 Cst. (prononcé de faillite; effet suspensif), 
 
recours de droit public contre la décision du Président de la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois du 23 juillet 2003. 
 
Faits: 
A. 
Le 9 mai 2003, L.________, créancier de la société A.________ SA pour un montant de 27'247 fr. et garant d'un crédit bancaire de cette société de 100'000 fr., a requis la faillite sans poursuite préalable de celle-ci pour suspension de paiements au sens de l'art. 190 al. 1 ch. 2 LP
Par décision des 8/10 juillet 2003, la Présidente du Tribunal d'arrondissement de la Côte, statuant comme autorité de première instance en matière sommaire de poursuites, a admis la requête et prononcé la faillite sans poursuite préalable de la société avec effet au jeudi 10 juillet 2003 à 9h. 
B. 
Contre cette décision, la société a recouru le 17 juillet 2003 auprès de la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois en concluant, préalablement, à l'octroi de l'effet suspensif, au fond et principalement à la réforme de la décision dans le sens d'un rejet de la requête de faillite, subsidiairement à son annulation et au renvoi de la cause en première instance pour nouvelle décision. 
Par décision du 23 juillet 2003, le Président de la cour cantonale a refusé d'accorder l'effet suspensif au recours. 
C. 
Contre cette dernière décision, la société a formé auprès du Tribunal fédéral, le 6 août 2003, un recours de droit public tendant à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. La recourante invoque la violation des art. 9 et 29 Cst., ainsi que de l'art. 59 al. 2 let. b de la loi vaudoise d'application de la LP (LVLP). 
Par ordonnance du 27 août 2003, le Président de la IIe Cour civile du Tribunal fédéral a octroyé l'effet suspensif, dès lors que ni le magistrat ayant rendu la décision attaquée, ni la partie intimée ne s'opposaient à cette mesure et qu'aucun motif particulier n'y faisait obstacle. 
Invité à se déterminer sur le recours, l'intimé y a renoncé. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Le Tribunal fédéral examine d'office et avec une pleine cognition la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 127 I 92 consid. 1; 127 II 198 consid. 2; 127 III 41 consid. 2a). 
1.1 La décision relative à une requête d'effet suspensif est de nature incidente (ATF 120 Ia 260 consid. 2b p. 264 et les arrêts cités). Aux termes de l'art. 87 al. 2 OJ, le recours de droit public est recevable contre une telle décision prise séparément s'il peut en résulter un préjudice irréparable. Par préjudice irréparable au sens de l'art. 87 OJ, dans sa nouvelle teneur comme dans l'ancienne (RO 2000 416, 418; FF 1999 7145), on entend exclusivement le dommage juridique qui ne peut être réparé ultérieurement, notamment par la décision finale, parce que le recours contre la décision incidente qui serait formé en même temps que le recours contre la décision finale ne serait plus possible (ATF 126 I 207 consid. 2 p. 210; 118 II 369 consid. 1; 116 Ia 446 consid. 2). 
1.2 L'effet suspensif que l'autorité judiciaire supérieure peut ordonner en vertu de l'art. 174 al. 3 LP (applicable aussi en cas de faillite sans poursuite préalable par renvoi de l'art. 194 al. 1 LP) empêche non seulement l'exécution immédiate du jugement de faillite, en ce sens que l'office des faillites ne peut procéder à aucun acte d'exécution, mais il suspend également les effets juridiques de l'ouverture de la faillite (Amonn/Gasser, Grundriss des Schuldbetreibungs- und Konkursrechts, Berne 1997, § 36 n 55; Roger Giroud, Kommentar zum Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, Bâle 1998, n. 30 art. 174 LP et n. 4 ad art. 175 LP; Jaeger/Walder/Kull/Kottmann, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, 4e éd., Zurich 1997/99, n. 15 ad art. 174 LP; cf. ATF 118 III 37 consid. 2b). 
 
Puisque le prononcé cantonal au sujet de l'effet suspensif ne pourra, par la force des choses, pas être revu en même temps que la décision finale au fond, la condition du préjudice irréparable de l'art. 87 al. 2 OJ est remplie. 
2. 
Sous réserve d'exceptions qui ne sont pas réalisées en l'espèce, le recours de droit public est une voie de cassation et ne peut tendre qu'à l'annulation de la décision attaquée (ATF 127 III 279 consid. 1b et les arrêts cités). 
3. 
La recourante se plaint d'une violation de son droit d'être entendue, plus précisément de son droit à obtenir une décision motivée (art. 29 al. 2 Cst.). 
3.1 Le droit d'être entendu étant une garantie constitutionnelle de caractère formel, dont la violation entraîne l'annulation de la décision attaquée indépendamment des chances de succès du recours sur le fond, il se justifie d'examiner en premier lieu le moyen pris de la violation de ce droit (ATF 124 I 49 consid. 1, 121 I 230 consid. 2a et la jurisprudence citée). La recourante ne se plaignant pas de la violation de règles du droit cantonal de procédure régissant son droit d'être entendue, c'est à la lumière de l'art. 29 al. 2 Cst. qu'il convient d'examiner son grief (ATF 126 I 15 consid. 2a et les arrêts cités), étant précisé que la jurisprudence rendue en la matière sous l'ancienne Constitution demeure valable (cf. ATF 128 V 272 consid. 5b/bb p. 278). 
La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu le devoir pour l'autorité de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, la contester utilement s'il y a lieu et que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. Pour répondre à ces exigences, le juge doit mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause; il n'est pas obligé d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs présentés par les parties, mais peut, au contraire, se limiter à ceux qui, sans arbitraire, apparaissent pertinents (ATF 126 I 97 consid. 2b p. 102/103 et la jurisprudence citée). 
3.2 Dans son recours à la cour cantonale, la société a requis l'effet suspensif en relevant qu'elle était toujours en situation d'exploiter une entreprise dégageant des bénéfices et qu'elle subirait un dommage considérable du fait de la publication de sa faillite et de l'avis aux débiteurs. 
Le président de la cour cantonale a refusé l'effet suspensif au motif que la société faisait l'objet de 113 poursuites pour un montant total de 1'255'250 fr. 34, qu'elle s'opposait systématiquement aux commandements de payer qui lui étaient notifiés, même pour des montants de très faible importance, de sorte que la suspension des paiements était en l'état vraisemblable et que l'intérêt des créanciers justifiait le rejet de la requête d'effet suspensif. 
C'est donc à tort que la recourante soutient que cette décision ne serait pas motivée. Elle s'en prend d'ailleurs à cette motivation, qu'elle qualifie d'arbitraire. Comme elle n'a pas développé de motifs à l'appui de sa requête d'effet suspensif, se bornant à affirmer de manière toute générale qu'elle était en mesure de poursuivre une exploitation rentable, elle ne saurait se plaindre de ce que l'autorité cantonale ne se soit pas prononcée sur des motifs inexistants. 
4. 
Lorsqu'elle est saisie d'un recours contre le prononcé de la faillite, l'autorité judiciaire supérieure peut accorder l'effet suspensif au recours, en prenant les mesures conservatoires nécessaires pour sauvegarder les intérêts des créanciers (art. 174 al. 3 LP, applicable par renvoi de l'art. 194 LP). L'autorité statue selon sa libre appréciation (ATF 76 I 273 consid. 1; Gilliéron, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, Lausanne 2001, n. 57 ad art. 174 LP; Jaeger/Walder/Kull/Kottmann, op. cit., n. 15 ad art. 174 LP). Elle n'accordera l'effet suspensif que si le prononcé de la faillite est susceptible d'être annulé avec une certaine vraisemblance (Amonn/ Gasser, op. cit., § 36 n. 55; Giroud, op. cit., n. 29 ad art. 174 LP). 
En l'espèce, ainsi qu'on l'a déjà relevé plus haut (consid. 3.2), le président de la cour cantonale a jugé que la suspension des paiements au sens de l'art. 190 al. 1 ch. 2 LP était en l'état vraisemblable, dès lors qu'il résultait de la liste du 8 juillet 2003 de l'office des faillites que la société faisait l'objet de 113 poursuites pour un montant total de 1'255'250 fr. 34 et qu'elle s'opposait systématiquement aux commandements de payer qui lui étaient notifiés, même pour des montants de très faible importance. De ce fait, l'intérêt des créanciers justifiait le rejet de la requête d'effet suspensif. 
5. 
La recourante soutient que cette décision est arbitraire et viole l'art. 9 Cst. 
5.1 Saisi d'un recours de droit public pour arbitraire, le Tribunal fédéral n'annule la décision que lorsqu'elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou encore heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 126 III 438 consid. 3 p. 440; 125 I 166 consid. 2a; 120 Ia 369 consid. 3a; 118 Ia 118, spéc. 123/124, 117 Ia 15/16, 20 let. c, 32 consid. 7a, 122 consid. 1b et 139 let. c). La violation doit être manifeste et reconnaissable d'emblée (ATF 102 Ia 1 consid. 2a p. 4). Pour que la décision soit annulée, il ne suffit pas que sa motivation soit insoutenable; encore faut-il que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 119 Ia 28 consid. 3 pp. 32/33; 118 Ia 118, spéc. 124, 117 Ia 139 let. c). Il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une solution autre que celle de l'autorité cantonale apparaît concevable ou même préférable (ATF 126 III 438 consid. 3 p. 440; 125 II 129 consid. 5b p. 134; 118 Ia 20 consid. 5a p. 26; 118 Ia 118, spéc. 123 consid. c). 
Le recourant doit formuler ses griefs de manière claire et détaillée (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 125 I 71 consid. 1c p. 76, 492 consid. 1b) et, lorsqu'il invoque une violation de l'art. 9 Cst., il ne peut se contenter de prétendre que la décision entreprise est arbitraire, mais doit au contraire démontrer, par une argumentation précise que la décision incriminée est insoutenable (ATF 119 Ia 197 consid. 1d), une critique de nature purement appellatoire étant irrecevable (ATF 107 Ia 186). Le Tribunal fédéral ne procède pas un libre examen de toutes les circonstances de la cause; il n'examine que les griefs expressément soulevés et suffisamment motivés par le recourant (ATF 125 I 71 consid. 1c p. 76). De plus, dans un recours pour arbitraire, l'invocation de faits, preuves ou moyens de droit nouveaux est exclue (ATF 124 I 208 consid. 4b p. 212; 118 III 37 consid. 2a p. 39 et la jurisprudence citée). 
5.2 En matière de faillite, il n'est pas arbitraire, selon la jurisprudence, de refuser de suspendre l'exécution du jugement de faillite lorsque le recours interjeté contre celui-ci ne paraît pas fondé; ainsi, lorsque le président prend une décision au sujet de l'effet suspensif alors que le dossier ne contient aucune pièce qui permettrait d'admettre que la faillite aurait été ouverte à tort, sa décision ne saurait être taxée d'arbitraire (ATF 76 I 273 consid. 1). 
5.3 La recourante soutient tout d'abord que le président de la cour cantonale a méconnu de nombreuses pièces rendant vraisemblable que sa faillite a été ouverte à tort. 
Dans la mesure où elle se réfère à des pièces qui n'ont pas été produites en instance cantonale, la recourante fait valoir des pièces nouvelles, qui sont irrecevables dans la procédure de recours de droit public. 
Pour le surplus, elle ne s'en prend pas à la motivation de la décision attaquée comme l'exige l'art. 90 al. 1 let. b OJ. Elle soutient seulement que l'autorité cantonale n'a pas tenu compte du fait qu'elle payait ses créanciers selon un plan de paiement prévu par l'office des poursuites, qu'elle payait un nombre important de créanciers, en particulier ses fournisseurs au moyen de son compte d'exploitation, que sa situation financière s'améliorait sur le vu de son compte de pertes et profits de l'exercice 2002 et des cinq premiers mois de 2003, et que son activité était importante, ainsi qu'en attestaient les mouvements de son compte bancaire et de son carnet de commande. Ce faisant, elle ne démontre pas que ses dettes de 1'255'250 fr. 34 ont fait l'objet d'un plan de paiement, qu'elle respecterait, ni qu'elle ne ferait pas ou plus systématiquement opposition aux commandements de payer qui lui sont adressés. Il s'ensuit que son grief est irrecevable. 
5.4 La recourante tente ensuite de convaincre que son recours au fond devrait être admis pour les raisons suivantes: d'une part, le créancier ayant requis sa faillite aurait commis un abus de droit en s'écartant d'un accord aux termes duquel il se serait engagé à retirer sa requête de faillite; d'autre part, elle ne serait pas surendettée, vu les conventions de postposition qu'elle a conclues avec certains créanciers et qu'elle produit à l'appui de son recours de droit public. Outre qu'elle invoque des faits et des moyens de preuve nouveaux, donc irrecevables, la recourante ne s'en prend pas aux motifs du président de la cour cantonale, comme elle le relève d'ailleurs elle-même en mentionnant que la décision attaquée ne soutient pas que les conditions d'admission de son recours au fond ne seraient pas remplies. Le grief soulevé sur ce point est par conséquent irrecevable. 
6. 
Aux termes de l'art. 59 al. 2 let. b LVLP, l'exécution du prononcé n'est suspendue que s'il en est ainsi ordonné par le président de l'autorité de recours. Le grief de violation de cette disposition n'est pas motivé, ce qui le rend également irrecevable. Au demeurant, on ne voit pas en quoi la disposition en question pourrait avoir été violée. 
7. 
Le juge de première instance a prononcé la faillite avec effet au 10 juillet 2003 à 9h. L'effet suspensif, refusé par le président de la cour cantonale, a été accordé par le président de la Cour de céans. Il a non seulement empêché tout acte d'exécution de l'office des faillites (suspension de la force exécutoire), mais également suspendu les effets juridiques de l'ouverture de la faillite (suspension de la force de chose jugée; cf. supra consid. 1.2.). 
Le rejet, dans la mesure de sa recevabilité, du présent recours de droit public et l'extinction de la décision d'effet suspensif qui en découle commandent de fixer à nouveau la date de l'ouverture de la faillite conformément à la jurisprudence (ATF 118 III 37 consid. 2b). 
8. 
Vu le sort du recours, les frais de la procédure doivent être mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 156 al. 1 LP). L'intimé ayant renoncé à se déterminer, il ne lui sera pas alloué de dépens. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
2. 
La faillite de A.________ SA prend effet le 9 septembre 2003 à 12 h. 00. 
3. 
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge de la recourante. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, au Président de la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois, ainsi qu'à l'Office des poursuites et faillites de Morges. 
Lausanne, le 9 septembre 2003 
Au nom de la IIe Cour civile 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: