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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6S.459/2004 /rod 
 
Arrêt du 11 janvier 2005 
Cour de cassation pénale 
 
Composition 
MM. les Juges Schneider, Président, 
Wiprächtiger et Kolly. 
Greffière: Mme Kistler. 
 
Parties 
X.________, 
recourant, représenté par Me Olivier Flattet, avocat, 
 
contre 
 
Ministère public du canton de Vaud, 
rue de l'Université 24, case postale, 1014 Lausanne. 
 
Objet 
Prise d'otage qualifiée (art. 185 ch. 2 CP), 
 
pourvoi en nullité contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pénale, du 29 septembre 2004. 
 
Faits: 
A. 
Par jugement du 29 juin 2004, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne a condamné X.________ pour prise d'otage qualifiée (art. 185 ch. 2 CP) à la peine de deux ans d'emprisonnement, sous déduction de la détention préventive, et a ordonné l'expulsion du condamné du territoire suisse pour une durée de cinq ans avec sursis pendant trois ans. 
 
Statuant le 29 septembre 2004 sur recours de X.________, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois a confirmé le jugement de première instance. 
B. 
En résumé, cette condamnation repose sur les faits suivants: 
 
Le 13 novembre 2002, en début d'après-midi, X.________, né en 1968, tunisien, en instance de divorce d'avec Y.________, a fugué de l'Hôpital psychiatrique de Cery pour se rendre chez la maman de jour de son fils Z.________, né le 17 avril 2000; de là, il a pris en charge l'enfant, qu'il a emmené dans l'appartement de son épouse, où il s'est enfermé. 
 
Alertée par la maman de jour, Y.________, qui redoutait le pire car son mari l'avait déjà menacée par le passé, notamment en lui déclarant qu'elle ne verrait plus son fils, a téléphoné à la police, qui s'est aussitôt transportée sur les lieux. 
 
Sur place, les policiers ont vu X.________ sur le balcon, qui criait qu'il voulait parler à sa femme. A deux reprises, il a passé une jambe par-dessus la balustrade, son enfant dans les bras, menaçant de le lâcher dans le vide si satisfaction ne lui était pas donnée. Il s'est ensuite armé d'un couteau de cuisine et a réitéré ses menaces. 
 
Ne parvenant pas à faire entendre raison au forcené, la police a décidé d'investir l'appartement par les toits. Comprenant ce qui allait se passer, X.________ s'est retranché dans le logis, puis a baissé les stores et barricadé la porte d'entrée avec des meubles. Ayant aperçu deux policiers sur le balcon, il a encore menacé verbalement d'égorger son fils, qui se trouvait à ses côtés, avant de se rendre au terme d'une discussion d'une demi-heure avec la police. 
C. 
Contre l'arrêt cantonal, X.________ forme un pourvoi en nullité au Tribunal fédéral. Invoquant une violation de l'art. 185 ch. 2 CP, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué. En outre, il sollicite l'assistance judiciaire. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Saisi d'un pourvoi en nullité, le Tribunal fédéral contrôle l'application du droit fédéral (art. 269 PPF) sur la base exclusive de l'état de fait définitivement arrêté par l'autorité cantonale (cf. art. 277bis et 273 al. 1 let. b PPF). Le raisonnement juridique doit se fonder sur les faits retenus dans la décision attaquée, dont le recourant ne peut s'écarter. Le Tribunal fédéral n'est pas lié par les motifs invoqués, mais il ne peut aller au-delà des conclusions du recourant (art. 277bis PPF). Celles-ci, qui doivent être interprétées à la lumière de leur motivation, circonscrivent les points litigieux (ATF 126 IV 65 consid. 1 p. 66). 
2. 
2.1 L'art. 185 ch. 1 CP punit de la réclusion celui qui aura séquestré, enlevé une personne ou de toute autre manière s'en sera rendu maître, pour contraindre un tiers à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte ou celui qui, aux mêmes fins, aura profité d'une prise d'otage commise par autrui. Le chiffre 2 de cette disposition sanctionne un cas aggravé de prise d'otage, en prévoyant que la peine sera la réclusion pour trois ans au moins, si l'auteur a menacé de tuer la victime, de lui causer des lésions corporelles graves ou de la traiter avec cruauté. 
 
Il n'est pas contesté que le recourant s'est rendu coupable d'une prise d'otage en se rendant maître de son fils pour contraindre sa femme à poursuivre la vie commune. Seule est litigieuse la question de l'application de l'art. 185 ch. 2 CP. En effet, le recourant conteste avoir menacé de tuer son fils et d'avoir eu un comportement cruel à son égard. Il fait valoir que la menace a été adressée exclusivement à son épouse, et non à son fils, qui n'aurait au demeurant pas compris ce qui se passait et n'aurait en conséquence pas été traumatisé. En outre, il soutient qu'il n'a pas voulu mettre sa menace à exécution, vu qu'il était très attaché à son fils. 
2.2 L'application de l'art. 185 ch. 2 CP entraîne une importante aggravation de la peine - dont le minimum passe d'un an à trois ans de réclusion, ce qui justifie une interprétation restrictive du chiffre 2 (ATF 121 IV 178 consid. 2b p. 182). Le texte légal ne précise pas si les menaces doivent être adressées directement à l'otage ou exclusivement au tiers que l'auteur veut contraindre. Dans un premier temps, partant du principe que l'aggravation de la peine se justifiait avant tout par la perturbation psychologique subie par l'otage du fait de la menace de mort, la jurisprudence a retenu l'application du chiffre 2 dans des cas où la menace était directement adressée à l'otage (ATF 121 IV 178 consid. 2c/d p. 182 s.; 269 consid. 1c p. 271 s.). Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a cependant précisé que l'art. 185 ch. 2 CP s'appliquait aussi lorsque l'auteur menaçait directement, voire exclusivement, le tiers qu'il voulait contraindre (ATF 129 IV 22 consid. 2.3 p. 28). Il faut que la pression exercée par l'auteur ait été nettement supérieure à celle qui résulte de l'infraction simple dans l'hypothèse où l'auteur menace exclusivement le tiers qu'il veut contraindre comme dans celle où il menace directement l'otage en présence du tiers (ATF 129 IV 22 consid. 2.4 p. 29). 
2.3 Comme le relève le recourant, les menaces proférées l'étaient au premier chef à l'adresse de la mère, et non de l'enfant. En l'occurrence, la pression que le recourant a exercée ne pouvait qu'induire une forte augmentation du stress et de l'angoisse chez Y.________, qui était la mère de l'enfant (et non un tiers quelconque). Le recourant a en effet passé une jambe par dessus la balustrade et a tenu son enfant à bout de bras, par la ceinture de son pantalon, en position horizontale, face contre le sol, menaçant de lâcher l'enfant dans le vide, s'il ne pouvait pas parler à son épouse. Il suffisait que l'enfant échappe des mains du recourant, qui était fort agité, pour que la menace devienne effective. Le danger était d'autant plus grand que, selon les experts psychiatres, le recourant est incapable de gérer des situations conflictuelles sur le plan psychique. Il ressort du reste de l'arrêt attaqué que la mère de l'enfant était tellement désespérée qu'elle a dû être soutenue par la psychologue de la police. Dans ces circonstances, la pression supplémentaire, exigée par la jurisprudence, revêt une intensité suffisante pour justifier l'application de l'art. 185 ch. 2 CP
 
Dans la mesure où le recourant soutient qu'il ne voulait pas passer à l'action, son grief est irrecevable. Ce faisant, il s'écarte en effet de l'état de fait cantonal qui constate que le recourant était prêt à passer à l'acte (arrêt attaqué, p. 5). Au demeurant, cet argument n'est pas pertinent. En effet, selon la jurisprudence et la doctrine, la menace doit apparaître sérieuse, mais il n'est pas nécessaire que l'auteur ait la possibilité et la volonté d'agir (ATF 121 IV 178 consid. 2d p. 183; Trechsel, Schweizerisches Strafgesetzbuch, Kurzkommentar, 2e éd., Zurich 1997, n. 6 ad art. 185; Stratenwerth/Jenny, Schweizerisches Strafrecht, Besonderer Teil I, 6e éd., Berne 2003, n. 59 ad § 5; plus réservés Rehberg/Schmid/Donatsch, Strafrecht III, Delikte gegen Einzelnen, 8e éd., Zurich 2003, p. 390; cf. aussi Vera Delnon/Bernhard Rüdy, Basler Kommentar, Strafgesetzbuch II, n. 32 ad art. 32). Or, dans le cas concret, il est établi que les menaces en cause ont paru suffisamment réelles pour mettre tout le quartier en émoi et créer une défaillance chez la mère de l'enfant. 
 
Il ne ressort pas clairement de l'état de fait cantonal si l'enfant a ressenti la menace comme telle, puisque le jugement de première instance, auquel renvoie l'arrêt attaqué, constate que l'enfant a rencontré des perturbations psychologiques dans les jours qui ont suivi les agissements délictueux, tout en mentionnant que l'instruction n'a pas permis d'établir que l'enfant avait compris ce qui se passait et qu'il avait été traumatisé (jugement, p. 9). Comme, en l'espèce, la pression était exercée au premier chef sur la mère, il n'y a cependant pas lieu d'examiner si l'enfant était conscient de la menace et, partant, s'il a été perturbé psychologiquement. L'argumentation du recourant, selon laquelle l'enfant n'a pas compris ce qui se passait et n'a pas été traumatisé, n'est dès lors pas pertinente. 
Selon une jurisprudence constante, l'intention de l'auteur doit porter sur tous les éléments constitutifs de l'infraction, y compris sur les éléments qui caractérisent une circonstance aggravante. En l'occurrence, l'auteur doit donc agir avec la conscience et la volonté de soumettre le tiers à une pression nettement supérieure, le dol éventuel étant à cet égard suffisant (ATF 129 IV 22 consid. 2.4 p. 29). Dans le cas particulier, les agissements du recourant trahissent sa volonté de se rendre maître de son enfant et celle de contraindre sa femme à un certain comportement. Il ne pouvait en outre échapper au recourant que son comportement était cruel (jugement, p. 10). 
2.4 Dans ces conditions, la condamnation du recourant pour prise d'otage qualifiée au sens de l'art. 185 ch. 2 CP ne viole pas le droit fédéral. Le pourvoi doit être rejeté. 
3. 
Comme le pourvoi était d'emblée dépourvu de toute chance de succès, l'assistance judiciaire doit être refusée. Le recourant, qui succombe, sera condamné aux frais (art. 278 al. 1 PPF). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le pourvoi est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
2. 
La requête d'assistance judiciaire est rejetée. 
3. 
Un émolument judiciaire de 800 francs est mis à la charge du recourant. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Ministère public du canton de Vaud et au Tribunal cantonal vaudois, Cour de cassation pénale. 
Lausanne, le 11 janvier 2005 
Au nom de la Cour de cassation pénale 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: