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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
2C_187/2021  
 
 
Arrêt du 11 mai 2021  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux, 
Seiler, Président, Donzallaz et Beusch. 
Greffier : M. de Chambrier. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Ivan Zender, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Commission des examens d'avocat 
du canton du Jura, 
Le Château, 2900 Porrentruy. 
 
Objet 
Echec aux examens d'avocat; récusation, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour administrative, du 19 janvier 2021 (ADM 4/2021). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Par décision du 19 novembre 2020, la Commission des examens d'avocat de la République et canton du Jura (ci-après : Commission des examens) a constaté que A.________ avait échoué aux examens de la session d'automne 2020 (art. 105 al. 2 LTF). Le 30 décembre 2020, l'intéressée a recouru contre cette décision auprès de la Cour administrative du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura (ci-après: Tribunal cantonal), en requérant notamment la récusation des membres dudit tribunal. 
Par arrêt du 19 janvier 2021, le Tribunal cantonal a rejeté la requête de récusation précitée. 
 
B.   
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt susmentionné du 19 janvier 2021 et d'ordonner la récusation des membres du Tribunal cantonal. 
Le Tribunal cantonal et la Commission des examens renoncent à prendre position sur le recours. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. En vertu de l'art. 83 let. t LTF, la voie du recours en matière de droit public n'est pas ouverte à l'encontre des décisions qui concernent le résultat d'examens ou d'autres évaluations des capacités, notamment en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d'exercice d'une profession. Sont visées par cette disposition aussi bien les décisions sur le fond que celles de procédure, qu'il s'agisse notamment de décisions partielles, préjudicielles, incidentes ou d'irrecevabilité. Ainsi, le recours est irrecevable contre une décision incidente si le recours n'est pas ouvert contre la décision finale (ATF 135 I 265 consid. 1.2; arrêt 2C_487/2019 du 11 juin 2019 consid. 4).  
 
En l'occurrence, la décision sur le fonds concerne l'échec aux examens d'avocat. L'arrêt attaqué ne révèle pas si le recours contre cette décision porte sur l'évaluation de l'intéressée ou sur un autre point, auquel cas, un recours en matière de droit public serait admissible. 
La question de savoir si la voie d'un tel recours est ouverte peut toutefois rester indécise en l'espèce, car la recourante limite ses griefs à la violation de droits constitutionnels, à savoir celle des art. 29 al. 1 et 30 Cst. Le recours serait dès lors de toute manière recevable en tant que recours constitutionnel subsidiaire (art. 116 LTF) dans l'hypothèse où la voie du recours en matière de droit public serait fermée (cf. art. 92 al. 1 applicable par renvoi de l'art. 117 LTF). La qualification exacte du recours n'a par ailleurs pas d'implication sur le pouvoir d'examen du Tribunal fédéral, dès lors que la problématique litigieuse se limite à l'examen de droits constitutionnels. 
 
1.2. Pour le reste, le présent recours a été déposé en temps utile (art. 45 al. 1 et 100 al. 1 cum 117 LTF) et dans les formes prescrites par la loi (art. 42 LTF), par le destinataire de l'arrêt attaqué qui a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (art. 89 al. 1 et 115 LTF). Il est donc recevable.  
 
2.   
Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF (auquel renvoie l'art. 117 LTF) et en dérogation à l'art. 106 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral ne connaît toutefois de la violation des droits fondamentaux, ainsi que de celle de dispositions de droit cantonal, que si le grief a été invoqué et motivé par la partie recourante, à savoir exposé de manière claire et détaillée (cf. ATF 142 I 99 consid. 1.7.2 p. 106; 141 I 36 consid. 1.3 p 41). 
 
3.   
Invoquant une violation des art. 29 al. 1 et 30 Cst., la recourante considère que les liens entre la Commission des examens et le Tribunal cantonal sont tels que les membres de celui-ci ne peuvent pas statuer de façon indépendante et impartiale sur un recours contre une décision de cette première. Elle fait valoir que tous les membres de la Commission des examens sont membres du Tribunal cantonal, à titre de juge permanent, juge suppléant ou greffier. Ladite commission est intégrée au Tribunal cantonal et se trouve soumise à son autorité. La recourante ajoute que le Tribunal cantonal nomme les membres de ladite commission et adopte le règlement sur les examens d'avocat. 
 
3.1. L'art. 29 al. 1 Cst. prévoit que toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. La jurisprudence a notamment tiré de cette disposition un droit à une autorité impartiale, limité toutefois aux autorités administratives (cf. ATF 142 I 172 consid. 3.2). En effet, l'exigence d'indépendance et d'impartialité des autorités judiciaires est instituée en droit suisse à l'art. 30 al. 1 Cst.  
L'art. 30 al. 1 Cst. permet, indépendamment du droit de procédure cantonal, d'exiger la récusation d'un juge dont la situation ou le comportement est de nature à susciter des doutes quant à son impartialité. Elle vise à éviter que des circonstances extérieures à la cause ne puissent influencer le jugement en faveur ou au détriment d'une partie. Elle n'impose pas la récusation uniquement lorsqu'une prévention effective est établie, car une disposition interne de la part du juge ne peut être prouvée; il suffit que les circonstances donnent l'apparence d'une prévention et fassent redouter une activité partiale du magistrat; cependant, seules les circonstances objectivement constatées doivent être prises en considération, les impressions purement individuelles n'étant pas décisives (cf. ATF 144 I 159 consid. 4.3; 142 III 521 consid. 3.1.1; 140 III 221 consid. 4.1 et les arrêts cités). 
La récusation ne touche en principe que les personnes physiques individuelles composant les autorités, et non l'autorité en tant que telle. Une demande de récusation dirigée contre une autorité dans son ensemble peut cependant être examinée comme si elle était dirigée contre chacun des membres de l'autorité pris individuellement (arrêt 2C_110/2019 du 9 décembre 2019 consid. 5.3, avec références). 
La récusation doit rester l'exception et ne peut être admise à la légère, dès lors qu'à défaut, il y aurait danger que les règles de compétence des tribunaux et ainsi, le droit d'être jugé par un tribunal ordinaire, institué par la loi, soient vidés de leur substance (arrêt 1C_654/2018 du 25 mars 2019 consid. 3.1 et référence). 
 
3.2. Selon une jurisprudence constante, une juridiction dont la récusation est demandée en corps est habilitée à écarter elle-même la requête lorsque celle-ci est abusive ou manifestement mal fondée (ATF 129 III 445 consid. 4.2.2; arrêt 6B_44/2017 du 4 avril 2017 consid. 3). Le caractère abusif ou d'emblée dénué de toute chance de succès d'une demande de récusation ne doit pas être admis trop facilement, car il s'agit d'une exception au principe selon lequel le juge dont la récusation est demandée ne doit pas faire partie de la composition de l'autorité chargée de statuer sur son déport (arrêt 2C_384/2017 du 3 août 2017 consid. 3.2 et références).  
 
3.3. Selon l'art. 27 de la loi cantonale du 3 septembre 2003 concernant la profession d'avocat (LAv; RS/JU 188.11), le Tribunal cantonal est compétent pour la formation des avocats, la délivrance et le retrait du brevet cantonal d'avocat (al. 1 phr. 1). Le Tribunal cantonal constitue une commission des examens d'avocat, soumise à son autorité (al. 2). Selon l'art. 28 LAv, la Commission des examens est composée de neuf à onze membres nommés par le Tribunal cantonal pour la durée de la législature. Leur mandat est renouvelable (al. 1). Trois membres au moins sont choisis au sein des autorités judiciaires jurassiennes et trois autres membres au moins au sein de l'Ordre des avocats. Des personnes provenant d'autres cantons peuvent également être désignées membres de la commission (al. 2). Les décisions rendues par la Commission des avocats sont sujettes à recours à la Chambre administrative du Tribunal cantonal (art. 39 LAv). Enfin, la LAv prévoit que le Tribunal cantonal est compétent pour édicter un règlement concernant le fonctionnement de la Commission des examens, le déroulement du stage d'avocat et les modalités de l'examen et les conditions de la délivrance du brevet (art. 30, 33 al. 5, 35a al. 4 et 36 LAv).  
 
3.4. En l'espèce, la recourante s'en prend au Tribunal cantonal dans son ensemble et vise concrètement au retrait d'une prérogative qui est reconnue à celui-ci de par la loi. Donner suite à sa demande reviendrait à vider de sa substance le système choisi par le législateur en matière de formation des avocats.  
Par ailleurs, la recourante ne présente pas d'éléments qui permettraient de retenir une absence d'impartialité et d'indépendance du Tribunal cantonal sur le plan systémique et son argumentation sur ce point ne convainc pas. A cet égard, il ressort en particulier de l'arrêt attaqué que le Tribunal cantonal n'intervient pas dans les cas particuliers. Il ne s'immisce ni dans le choix des dossiers d'examen soumis aux candidats, ni dans la correction des travaux. Le rôle de surveillance découlant de l'art. 27 al. 2 LAv ne permet pas d'y voir un manque d'impartialité ou d'indépendance, au même titre que la surveillance exercée par une autorité judiciaire de dernière instance sur des instances inférieures n'empêche pas cette première de statuer sur les recours formés contre les décisions de celles-ci. Le fait que la Commission des examens soit intégrée au Tribunal cantonal ne démontre pas non plus une absence d'indépendance des magistrats appelés à statuer sur les recours interjetés contre les décisions de cette commission. Au surplus, on peut fortement douter que la recourante dise vrai lorsqu'elle affirme que tous les membres de la Commission des avocats sont également membres du Tribunal cantonal. En effet, à tous le moins pour l'année 2021, cinq membres de cette commission sont des avocats qui n'exercent pas la fonction de juge suppléant au sein du Tribunal cantonal (cf. le site https://www.jura.ch/JUST/, consulté le 22 avril 2021). En outre, elle ne se plaint pas d'une application arbitraire de l'art. 28 al. 2 LAv, qui impose qu'au moins trois membres de la commission proviennent de l'Ordre des avocats. 
Sur le vu de ce qui précède, le Tribunal cantonal ne prête pas le flanc à la critique lorsqu'il qualifie la requête en question d'abusive. Il était ainsi à même de statuer sur celle-ci (cf. supra consid. 3.3). 
 
3.5. Les compétences réglementaires en cause du Tribunal cantonal découlent de la loi. On ne voit pas pour quels motifs objectifs, le magistrat d'une autorité juridictionnelle qui a édicté un règlement ne serait pas en mesure d'appliquer et d'interpréter celui-ci en toute indépendance et avec impartialité. Sur ce point, l'argumentation de la recourante confine à l'absurde, puisque, en la suivant, les autorités devraient se récuser chaque fois qu'elles ont à appliquer et interpréter une réglementation dont elles sont l'auteur.  
 
3.6. La recourante n'apporte enfin aucun élément factuel permettant de retenir un soupçon de partialité chez les membres du Tribunal cantonal, pris individuellement, et, en particulier, chez les juges appelés à se prononcer sur son recours. En particulier, elle ne conteste pas que ces derniers n'ont pas siégé dans la Commission des examens de la session en cause. La recourante perd également de vue que la simple collégialité entre les juges et le personnel judiciaire, de même que le fait d'être membre à la fois d'un tribunal cantonal et de la commission des examens du barreau ne suffit pas en soi pour établir une apparence de partialité (ATF 141 I 78 consid. 3.3; 139 I 121 consid. 5.3 s.; arrêts 2C_852/2019 du 20 novembre 2020 consid. 3.3 et les autres références citées; 2D_23/2015 du 14 septembre 2015 consid. 4.2.2, in SJ 2016 I 79).  
 
4.   
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours. 
Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, à la Commission des examens d'avocat de la République et canton du Jura et au Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour administrative. 
 
 
Lausanne, le 11 mai 2021 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Seiler 
 
Le Greffier : de Chambrier