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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6B_640/2008/bri 
 
Arrêt du 12 février 2009 
Cour de droit pénal 
 
Composition 
MM. les Juges Schneider, Président, 
Favre et Zünd. 
Greffière : Mme Angéloz 
 
Parties 
X.________, 
recourant, 
 
contre 
 
A.________, 
représenté par Me Christophe Misteli, avocat, 
 
B.________, 
intimés, 
Ministère public du canton de Vaud, 
rue de l'Université 24, 1005 Lausanne, 
intimé. 
 
Objet 
Diffamation (art. 173 ch. 1 CP), injure 
(art. 177 CP), menaces (art. 180 CP), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton 
de Vaud, Cour de cassation pénale, du 6 février 2008. 
 
Faits: 
 
A. 
Par jugement du 11 décembre 2007, le Tribunal de police de l'arrondissement de l'Est vaudois a condamné X.________ à une peine de 15 jours-amende à 50 fr. l'un, avec sursis pendant 2 ans, pour diffamation, injure et menaces. 
 
Statuant sur recours du condamné, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois l'a rejeté par arrêt du 6 février 2008, confirmant le jugement entrepris. 
 
B. 
Cet arrêt repose, pour l'essentiel, sur les constatations de fait suivantes. 
 
A plusieurs reprises, depuis son domicile, X.________ a crié des injures et menaces à l'égard du syndic de sa commune, A.________. Le 19 août 2005 vers 06h15, il l'a traité de "pourriture de syndic de merde, salaud, petit con, trou du cul, saloperie de A.________, je te crèverai". Il s'est aussi adressé dans des termes semblables à des tiers qu'il estime responsables de la dégradation de sa situation économique. Le 15 novembre 2006, dans une lettre à la commission de police de la commune, il a traité A.________ de "scélérat, de parasite et de lâche". Ce dernier a déposé plainte. 
 
Le 17 janvier 2006, X.________ a apostrophé B.________ qui fumait une cigarette, en ces termes: "crève charogne, pollueur, je vais te faire la peau, je vais te massacrer, espèce de trou du cul". B.________ a déposé plainte. 
 
C. 
X.________ recourt au Tribunal fédéral. Il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué, à ce qu'il soit constaté que la plainte de B.________ est sans objet, à l'application de l'art. 177 al. 2 CP en ce qui concerne celle de A.________ et à la reconnaissance d'une lésion de ses droits en tant que l'arrêt attaqué lui oppose l'art. 49 al. 2 CP; en conséquence, il demande que la moitié des frais de la cause soient mis à la charge des plaignants. 
 
Les intimés ont renoncé à se déterminer. Le Ministère public et l'autorité cantonale se réfèrent à l'arrêt attaqué. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
Dans un premier moyen, le recourant reproche à la cour cantonale de n'avoir pas mis un terme à l'action pénale introduite par B.________, alors qu'il avait satisfait aux conditions posées par ce dernier pour retirer sa plainte. La cour cantonale aurait dû admettre que cette plainte avait été maintenue abusivement et qu'il n'y avait donc plus de raison de suivre à la procédure, plutôt que de lui objecter que les efforts qu'il avait fournis en vue d'un retrait de la plainte avaient été pris en compte dans l'appréciation de sa culpabilité et dans la décision de lui octroyer le sursis. 
 
1.1 L'art. 33 al. 1 CP reconnaît au plaignant la possibilité de retirer sa plainte avant le jugement de deuxième instance cantonale. Celui-là peut revenir sur sa décision non seulement en raison d'une éventuelle modification des circonstances depuis le dépôt de sa plainte (par exemple, la conclusion d'un compromis), mais aussi parce qu'une connaissance plus approfondie de l'état de fait le conduit souvent à une nouvelle appréciation de la situation (Christof Riedo, Strafantrag, in Basler Kommentar, Strafrecht I, 2ème éd. Bâle 2007, art. 33 CP, n° 3). 
 
1.2 La loi confère ainsi au plaignant une faculté; elle ne lui fait pas d'obligation. Si celui-ci décide de maintenir sa plainte, le juge ne peut donc qu'en prendre acte et suivre à la procédure. Il peut en revanche, comme l'ont fait les juges cantonaux, tenir compte des efforts déployés par l'accusé pour donner satisfaction au plaignant dans l'appréciation de la culpabilité de celui-ci et dans la décision de lui accorder le sursis. Sous réserve de certains vices du consentement affectant la décision de retrait de plainte, il n'y a pas place pour une application analogique du droit des obligations (Christof Riedo, op. cit., loc. cit., n° 17 à 19). En conséquence, c'est à juste titre que les juges cantonaux ont considéré qu'en l'absence d'un retrait de sa plainte par B.________, il n'était pas possible de mettre un terme à l'action pénale initiée par cette plainte. Le grief est donc infondé. 
 
2. 
Dans un second moyen, le recourant reproche aux juges cantonaux de n'avoir pas fait application de l'art. 177 al. 2 CP en ce qui concerne la plainte de A.________. 
 
2.1 Cette disposition permet au juge d'exempter l'auteur d'une injure de toute peine si l'injurié a directement provoqué l'injure par une conduite répréhensible. Il s'agit, là encore, d'une faculté, non d'une obligation (ATF 109 IV 39 consid. 4b in fine p. 43). Le juge peut ou non exempter l'auteur de toute peine. Il peut aussi se borner à atténuer cette dernière. Il dispose à cet égard d'un large pouvoir d'appréciation, que le Tribunal fédéral ne sanctionne qu'en cas d'abus. 
 
Le juge ne peut faire usage de la faculté que lui réserve l'art. 177 al. 2 CP que si l'injure a consisté en une réaction immédiate à un comportement répréhensible de l'injurié, lequel peut consister en une provocation ou en tout autre comportement blâmable. Ce comportement ne doit pas nécessairement viser l'auteur de l'injure; une conduite grossière en public peut suffire (ATF 117 IV 270 consid. 2c p. 173; 83 IV 151). La notion d'immédiateté doit être comprise comme une notion temporelle, en ce sens que l'auteur doit avoir agi sous le coup de l'émotion provoquée par la conduite répréhensible de l'injurié, sans avoir eu le temps de réfléchir (ATF 83 IV 151; cf. aussi Franz Riklin, Strafbare Handlungen gegen die Ehre und den Geheim- oder Pivatbereich, in Basler Kommentar, Strafrecht II, 2ème éd. Bâle 2007, art. 177 CP, n° 17). 
 
2.2 En l'espèce, le recourant n'impute pas un comportement provocateur spécifique à A.________. L'arrêt attaqué ne constate pas non plus un tel comportement de la part de ce dernier, mais explique les injures proférées par un profond sentiment d'injustice éprouvé par le recourant à la suite de diverses décisions de police du commerce prises par la municipalité dont A.________ est le syndic. Quelle que soit la pertinence des griefs du recourant quant à ces décisions administratives, l'irritation qu'il a pu concevoir envers des membres de la municipalité ne se trouvait pas dans le rapport d'immédiateté exigé par la jurisprudence pour excuser les injures formulées à l'encontre de A.________, notamment en sa qualité de syndic. L'art. 177 al. 2 CP ne pouvait donc trouver application. Le présent grief est dès lors également infondé. 
 
3. 
Dans un troisième moyen, le recourant se plaint d'avoir été jugé à raison des faits ici litigieux, alors que, dans l'intervalle, de nouvelles plaintes avaient été déposées contre lui par A.________. Selon lui, les deux causes devaient être jugées en même temps, à défaut de quoi il était exposé à ce que, dans la seconde procédure, le sursis accordé dans la première soit révoqué. 
 
3.1 La cour cantonale a observé que, dans la mesure où le recourant se plaignait d'un refus de la requête qu'il aurait déposée à l'audience en vue de la jonction des deux causes, il semblait invoquer le moyen de nullité de l'art. 411 let. f CPP/VD, moyen qui, le cas échéant, serait irrecevable. Il apparaissait toutefois, à la lecture du mémoire du recourant, que ce dernier exprimait sa crainte que le sursis qui lui était accordé par le jugement entrepris soit révoqué lors d'un jugement à venir. Cette crainte était cependant infondée, dès lors que le juge qui serait amené à prononcer une nouvelle condamnation devrait, en application de l'art. 49 al. 2 CP, fixer la peine de telle façon que le recourant ne soit pas sanctionné plus sévèrement que si les diverses infractions à juger l'avaient été simultanément. 
 
3.2 Ce raisonnement n'est pas critiquable. L'art. 49 al. 2 CP prévoit en effet que, "si le juge doit prononcer une condamnation pour une infraction que l'auteur a commise avant d'avoir été condamné pour une autre infraction, il fixe la peine complémentaire de sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un seul jugement". Concrètement, cette disposition signifie que le juge appelé à prononcer la nouvelle peine, dite complémentaire, doit procéder en se demandant quelle peine il aurait fixée s'il avait eu à connaître des deux infractions en même temps et déduire de cette peine hypothétique celle qui a déjà été infligée. Il en découle que, si le recourant, suite aux nouvelles plaintes de A.________, devait être condamné pour les infractions dénoncées dans ces plaintes, il ne pourra être sanctionné plus lourdement que si ces infractions et celles qui font l'objet de la présente procédure avaient été jugées simultanément. A ce défaut, il pourrait s'en plaindre dans le cadre d'un recours dirigé contre le second jugement. Le refus de renvoyer l'audience en vue d'une jonction des causes ne lui est donc pas préjudiciable. 
 
Certes, l'art. 49 al. 2 CP est généralement applicable lorsque le juge ne s'est pas prononcé simultanément sur l'ensemble des infractions, mais seulement sur certaines d'entre-elles, parce qu'il n'était pas saisi des autres, du fait qu'elles n'avaient pas encore été découvertes. Cette disposition peut cependant aussi trouver application lorsque toutes les infractions n'ont pas été jugées en même temps pour d'autres motifs, notamment parce que le principe de la célérité commandait que certaines infractions, prêtes à être jugées, le soient sans attendre l'issue de l'instruction menée sur d'autres infractions. Le motif pour lequel toutes les infractions connues n'ont pas été jugées simultanément n'est donc pas déterminant pour l'application de l'art. 49 al. 2 CP. Il suffit, pour que l'accusé puisse bénéficier de cette disposition, que les conditions de cette dernière soient réalisées. 
 
Sur le vu de ce qui précède, le grief est infondé. 
 
4. 
Le recourant se plaint encore de ce que le magistrat ayant présidé l'audience de première instance n'ait pas été celui qui avait signé la convocation à cette audience. A supposer toutefois que l'on veuille y voir une irrégularité, encore faudrait-il, selon l'arrêt attaqué, qui n'est pas contesté sur ce point, que celle-ci ait influencé le jugement dans un sens défavorable au recourant, ce qui n'est pas établi ni d'ailleurs allégué par ce dernier. En particulier, le vice prétendu n'a pas empêché le recourant de comparaître à l'audience et on ne voit au reste pas en quoi il lui aurait été préjudiciable d'une autre manière. Le grief doit dès lors être écarté. 
 
5. 
Le recourant conteste l'infraction de menaces, pour l'essentiel au motif que ses propos, notamment les termes "je te crèverai", n'ont pu alarmer ou effrayer A.________. 
 
Ce grief, bien que soulevé devant elle, n'a pas été examiné par la cour cantonale. Or si, comme l'estime le recourant, les menaces qui lui sont reprochées ne pouvaient être qualifiées de graves et considérées comme susceptibles d'alarmer ou d'effrayer le plaignant, l'infraction litigieuse ne pouvait être retenue. A cet égard, il y a lieu de rappeler que la question de savoir si les menaces étaient graves et propres à avoir l'effet exigé par la loi doit être examinée d'un point de vue objectif. Il ne faut pas se fonder exclusivement sur les termes utilisés par l'auteur, mais tenir compte de l'ensemble des circonstances. La question de l'effet de la menace doit par ailleurs être examinée en fonction de la sensibilité moyenne de toute personne raisonnable placée dans la même situation (cf. ATF 99 IV 212 consid. 1a p. 215; cf. aussi arrêt 6S.103/2003 consid. 9.4). En l'état, il n'est pas possible, dans le cas concret, de déterminer ce qu'il en est. Dans la mesure où le recourant se plaint d'avoir été condamné pour menaces sans que les questions évoquées aient été élucidées, son recours sur ce point est fondé et doit dès lors être admis. 
 
6. 
Le recours doit ainsi être partiellement admis, l'arrêt attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour qu'elle statue à nouveau dans le sens des considérants, au besoin après complètement de l'état de fait. 
 
Vu le sort du recours, des frais réduits seront mis à la charge du recourant, qui n'obtient que partiellement gain de cause. Les intimés ayant renoncé à se déterminer, il n'y a pas lieu de mettre des frais à leur charge, ni de leur allouer de dépens. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est partiellement admis, l'arrêt attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. 
 
2. 
Les frais judiciaires sont mis à la charge du recourant à concurrence d'un montant arrêté à 1000 fr. 
 
3. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pénale. 
 
Lausanne, le 12 février 2009 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Président: La Greffière: 
 
Schneider Angéloz