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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6S.477/2002 /rod 
 
Arrêt du 12 mars 2003 
Cour de cassation pénale 
 
MM. les Juges Schneider, Président, 
Wiprächtiger, Kolly, Karlen et Brahier, Juge suppléante. 
Greffière: Mme Bendani. 
 
X.________, 
recourante, représentée par Me Christian Favre, avocat, rue de la Paix 4, case postale 3632, 1002 Lausanne, 
 
contre 
 
Ministère public du canton de Vaud, rue de l'Université 24, case postale, 1014 Lausanne. 
 
refus du sursis (art. 41 ch. 2 al.1 CP); appropriation illégitime, 
 
pourvoi en nullité contre l'arrêt du Tribunal cantonal vaudois, Cour de cassation pénale, du 21 mai 2002. 
 
Faits: 
A. 
Par jugement du 13 décembre 2001, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne a condamné X.________ pour appropriation illégitime (art. 137 ch. 2 CP) à la peine de huit mois d'emprisonnement et a dit qu'elle devait au Crédit Suisse la somme de 150'000 francs. Il a également donné acte de ses réserves civiles à la Banque Bruxelles Lambert Suisse SA. 
B. 
X.________ a recouru en réforme contre le jugement précité. Invoquant une violation des art. 41 et 63 CP, elle a conclu à la diminution de la peine et à l'octroi du sursis. Elle n'a pas contesté la condamnation pour appropriation illégitime (art. 137 ch. 2 CP), ni le jugement sur les conclusions civiles. 
 
Par arrêt du 21 mai 2002, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours de X.________ et a confirmé le jugement de première instance. 
 
En résumé, il en ressort les éléments suivants: 
B.a X.________, née en 1966, a suivi sa scolarité à Aigle. Elle a entrepris une formation commerciale dans une école privée et a par la suite travaillé dans divers établissements bancaires de Genève. De 1991 à 1996, elle a vécu aux Emirats Arabes Unis où elle a travaillé dans une société financière. Revenue en Suisse, elle a retrouvé le poste qu'elle occupait précédemment à la Banque Bruxelles Lambert (ci-après BBL), à Lausanne. Elle réalisait un salaire mensuel d'environ 2'000 francs pour une activité à mi-temps. En été 1999, elle a été transférée de la succursale lausannoise à celle de Genève. En novembre 2000, elle a été mise en congé non payé. En 1987, X.________ a épousé le directeur adjoint de la Banque Pictet, à Genève. Le couple, sans enfants, est à l'aise financièrement et possède une villa estimée à 800'000 francs. 
B.b En juillet 1998, l'employeur de X.________ lui a demandé d'aller retirer 150'000 francs au Crédit Suisse. Dans cette banque, elle a été reçue par Z.________ qui a pris l'argent commandé par la BBL dans le coffre et l'a présenté à Y.________, employé de la caisse centrale, qui, occupé au téléphone, a acquiescé de la tête. A la demande de X.________, Z.________ a glissé les liasses d'argent dans une enveloppe de format C5, collé le rabat avec du scotch et remis l'enveloppe fermée à sa destinataire qui n'a opéré aucun contrôle sur place. 
 
Au Crédit Suisse, les contrôles effectués ont mis à jour un découvert de 150'000 francs et ont révélé que Z.________ s'était trompée et avait prélevé dans le coffre trois liasses de cent billets de mille francs chacune, soit un total de 300'000 francs. 
Informée le lendemain par la BBL du fait qu'il manquait 150'000 francs au Crédit Suisse, X.________ a affirmé à son supérieur que l'enveloppe qu'on lui avait remise ne contenait que 150'000 francs. Le surlendemain, la direction du Crédit Suisse a déposé plainte contre inconnu et, le même jour, une enquête a été ouverte contre X.________. Lors du contrôle des poubelles de la BBL, la police a découvert une enveloppe blanche de format C5 et une attache de liasse de billets de 1'000 fr. de la BNS. Sur cette base, le juge d'instruction a ordonné une expertise. Il en ressort en bref que les marques générées par trois liasses de cent billets de 1'000 francs sont compatibles avec les marques figurant sur l'enveloppe; les autres traces, à savoir la partie de bande adhésive transparente, les zones présentant une surface de papier endommagée et le pli en creux en dessous du rabat au verso de l'enveloppe, peuvent notamment s'expliquer par le fait que celle-ci a été remplie et fermée par une bande adhésive qui a été arrachée lors de la première ouverture, puis refermée, mais avec un contenu modifié qui a permis de plier l'enveloppe et de coller la deuxième bande adhésive. 
 
Entendue au sujet de cette expertise qui lui était défavorable, X.________ a continué à nier et a prétendu que la déformation constatée dans l'enveloppe provenait du fait qu'elle l'avait réutilisée pour y mettre une somme de 50'000 francs destinée à un client. 
 
Se fondant notamment sur les témoignages de Z.________ et Y.________ et sur l'expertise, les premiers juges ont retenu que l'enveloppe remise à X.________ avait contenu 300'000 francs et que cette dernière avait retiré la moitié de la somme avant de replier l'enveloppe et de la fermer avec du scotch. 
C. 
X.________ se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Invoquant une violation de l'art. 41 CP, elle conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué. Elle sollicite l'effet suspensif. 
 
Le 11 février 2003, le Ministère public vaudois a déposé sa détermination, concluant au rejet du recours. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Invoquant une violation de l'art. 41 CP, la recourante estime que le sursis à l'exécution de la peine d'emprisonnement devait lui être accordé. 
1.1 Le sursis à l'exécution d'une peine privative de liberté peut être octroyé si la durée de la peine n'excède pas dix-huit mois, si les antécédents et le caractère du condamné font prévoir que cette mesure le détournera de commettre d'autres crimes ou délits et s'il a réparé, autant qu'on pouvait l'attendre de lui, le dommage fixé judiciairement (art. 41 ch. 1 al. 1 CP). Le sursis ne peut être accordé lorsque le condamné a subi, en raison d'un crime ou d'un délit intentionnel, plus de trois mois de réclusion ou d'emprisonnement dans les cinq ans qui ont précédé la commission de l'infraction (art. 41 ch. 1 al. 2 CP). 
1.2 Il est évident qu'une peine de huit mois d'emprisonnement, par sa nature et sa durée, peut objectivement être assortie du sursis et que la condition posée par l'art. 41 ch. 1 al. 2 CP est réalisée. 
 
Partant, les questions litigieuses sont de savoir si la recourante a réparé, dans la mesure de ses possibilités, le dommage fixé judiciairement (cf. infra, consid. 1.3) et si la condition dite subjective est réalisée, c'est-à-dire si l'on peut prévoir, en fonction des antécédents et du caractère de la condamnée, que cette mesure sera de nature à la détourner de commettre d'autres crimes ou délits (cf. infra, consid. 1.4; ATF 119 IV 195 consid. 3b p. 197 et les arrêts cités). 
1.3 Le Tribunal fédéral a admis que lorsque le dommage - comme en l'espèce - n'était pas établi judiciairement ou par accord avec le lésé avant la condamnation pénale, l'absence de réparation ne représentait pas un obstacle à l'octroi du sursis (cf. ATF 105 IV 234, consid. 2a p. 235 s.; 79 IV 105; 77 IV 140; 70 IV 104). En pratique, il est rare que le dommage soit fixé judiciairement avant le jugement pénal et cette exigence est d'ailleurs abandonnée dans le nouvel art. 42 al. 3 du code pénal modifié du 13 décembre 2002 dont la teneur est la suivante: "L'octroi du sursis peut également être refusé lorsque l'auteur a omis de réparer le dommage comme on pouvait raisonnablement l'attendre de lui". 
 
Toutefois, selon la jurisprudence, l'attitude du condamné, soit sa mauvaise volonté à réparer un préjudice d'emblée certain, l'indifférence ou l'insouciance dont il fait preuve pour les conséquences de son acte, peuvent dénoter un défaut de caractère et influer sur le pronostic du juge relatif au comportement futur du condamné (cf. infra, consid. 1.4; ATF 79 IV 105; 77 IV 140; 70 IV 104). 
1.4 Concernant la condition subjective de l'art. 41 ch. 1 al. 1 CP, il s'agit de faire un pronostic quant au comportement futur du condamné (ATF 123 IV 107 consid. 4a p. 111 s.). Pour poser ce pronostic, le juge de répression dispose d'un large pouvoir d'appréciation. Il n'y a violation du droit fédéral que si la décision attaquée repose sur des considérations étrangères à la disposition applicable, si elle ne prend pas en compte les critères découlant de celle-ci ou si le juge s'est montré à ce point sévère ou clément que l'on doive parler d'un abus du pouvoir d'appréciation (ATF 119 IV 195 consid. 3b p. 198; 118 IV 97 consid. 2b p. 101; 115 IV 81 consid. 2b p. 82 s.). 
 
Pour décider si le sursis serait de nature à détourner l'accusé de commettre de nouvelles infractions, le juge doit se livrer à une appréciation d'ensemble (ATF 119 IV 195 consid. 3b p. 198 et les arrêts cités). Il doit tenir compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de l'auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment de l'état d'esprit qu'il manifeste. Le pronostic doit être posé sur la base de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère de l'accusé et ses chances d'amendement (ATF 123 IV 107 consid. 4a p. 111 s.; 118 IV 97 consid. 2b p. 100 s.). Pour l'évaluation du risque de récidive, un examen global de la personnalité de l'auteur est indispensable. De vagues espoirs quant à la conduite future du délinquant ne suffisent pas pour émettre un pronostic favorable (ATF 115 IV 81 consid. 2a p. 82). 
 
Il est contraire au droit fédéral d'accorder un poids particulier à certaines circonstances visées par l'art. 41 CP et de négliger ou d'omettre d'autres critères pertinents (ATF 123 IV 107 consid. 4a p. 111 s.; 118 IV 97 consid. 2b p. 100). S'agissant de la motivation, le juge doit exposer les éléments essentiels relatifs à l'acte ou à l'auteur qu'il prend en compte, de manière à ce que l'on puisse constater que tous les aspects pertinents ont été pris en considération et comprendre comment ils ont été appréciés (ATF 117 IV 112 consid. 3b p. 118). 
 
Le sursis est considéré comme une mesure d'encouragement à l'égard de celui qui semble avoir compris la signification de son acte et être prêt, pour échapper à l'exécution de la peine, à ne plus commettre d'infractions à l'avenir. Selon la jurisprudence, les dénégations ou le silence du prévenu ne dénotent pas nécessairement un défaut de caractère tel qu'une peine avec sursis ne suffise pas à l'amender, car un tel comportement peut avoir des motifs divers. Celui qui nie par honte, par peur du châtiment, par crainte de perdre sa place ou par égard pour les siens peut être digne de sursis. En revanche, l'accusé qui s'efforce consciemment d'induire les autorités pénales en erreur ou de rejeter la faute sur autrui pour se soustraire à une condamnation révèle un manque particulier de scrupules, ce qui, dans la règle, ne permet pas d'espérer qu'une peine avec sursis suffise à le détourner durablement de la délinquance. Il en va de même pour celui qui persiste à nier l'évidence, qui ment par besoin ou qui refuse de reconnaître une faute patente et donc l'illicéité de son acte (ATF 101 IV 257 consid. 2 p. 258 s.; 94 IV 51). 
 
S'il est vrai qu'un défaut de caractère, le manque de scrupules ou l'absence de prise de conscience de l'illicéité des actes commis justifient un pronostic défavorable, le juge n'est toutefois pas dispensé de procéder à une appréciation de tous les critères pertinents pour déterminer l'adéquation d'une peine assortie du sursis. Partant, il confrontera toutes les circonstances permettant de tirer des conclusions sur le caractère de l'auteur avec les renseignements recueillis sur ses antécédents, sa réputation, sa situation personnelle et son comportement après l'infraction. C'est seulement après l'examen de tous ces éléments que le juge pourra valablement décider si un pronostic favorable est possible ou non (cf. arrêt non publié du Tribunal fédéral du 19 janvier 2000, 6S.762/1999; ATF 115 IV 85, consid. 3b/c p. 86 s.; 94 IV 51; 82 IV 5). Le juge tiendra compte de toutes les circonstances jusqu'au prononcé du jugement (cf. arrêt non publié du Tribunal fédéral du 15 décembre 1997, 6S.258/1997; Schneider, Basler Kommentar, Strafgesetzbuch I, ad art. 41 n. 73). 
1.5 La cour cantonale a constaté en fait, de manière à lier le Tribunal fédéral (cf. art. 277bis et 273 al. 1 let. b PPF), que les dénégations de la recourante ne pouvaient être compatibles avec un pronostic favorable dans la mesure où celle-ci n'avait pas nié par honte, par peur du châtiment, par crainte de perdre sa situation professionnelle ou par égard pour ses proches et qu'elle savait qu'en s'obstinant dans ses mensonges, elle accusait sa collègue dont elle connaissait l'innocence. Elle a relevé qu'après trois ans et demi de mensonges obstinés, la recourante s'était clairement opposée, lors des débats et alors que la plaignante pouvait envisager un retrait de plainte, à toute conciliation pour conserver les 150'000 francs. Sur la base de ces éléments, elle a conclu à un défaut de caractère de la recourante incompatible avec un pronostic favorable. 
Du comportement de la recourante lors de la procédure judiciaire et du motif de ses mensonges, soit sa volonté de conserver le montant de 150'000 francs, la cour cantonale a conclu à un défaut de caractère de l'accusée. Il s'agit d'un élément négatif dans l'examen du pronostic quant au comportement futur de la recourante. Toutefois, le juge doit procéder à une appréciation globale de tous les critères pertinents pour justifier un pronostic défavorable (cf. supra, consid. 1.4). Or, en l'espèce, la cour cantonale n'a pas effectué un tel examen. Elle n'a pas pris en considération la réputation, ni l'absence d'antécédents judiciaires de la recourante, alors âgée de 32 ans lors de la commission de l'infraction. Elle n'a pas non plus tenu compte du fait que, depuis près de quatre ans, soit depuis le mois de juillet 1998, la recourante n'a pas commis d'autres infractions, alors qu'elle a continué à travailler au service de la BBL jusqu'en novembre 2000, date à laquelle elle a été mise en congé. En outre, la cour cantonale n'a pas procédé à une analyse du risque concret de récidive que la recourante pourrait représenter; on ne trouve dans l'arrêt attaqué aucune constatation relative à sa situation personnelle au moment du jugement; on ne sait pas quelles sont ses activités depuis le mois de novembre 2000, ni si elle travaille à nouveau dans un établissement bancaire. Enfin, la cour cantonale aurait également dû, à la lumière de l'ensemble des éléments précités, examiner l'effet d'un sursis avec un long délai d'épreuve ou d'éventuelles règles de conduite (cf. art. 41 ch. 2 al. 1 CP). 
 
Ainsi, la cour cantonale a négligé des éléments pertinents pour le pronostic. Le pourvoi est donc admis et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. 
2. 
La recourante obtient gain de cause. Il sera dès lors renoncé à la perception de frais et une indemnité sera allouée à son mandataire pour la procédure devant le Tribunal fédéral (art. 278 al. 3 PPF). 
 
La cause étant ainsi tranchée, la requête d'effet suspensif est sans objet. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le pourvoi est admis, l'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. 
2. 
Il n'est pas perçu de frais. 
3. 
La Caisse du Tribunal fédéral versera au mandataire de la recourante une indemnité de 2'000 francs à titre de dépens. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la recourante, au Ministère public du canton de Vaud et au Tribunal cantonal vaudois, Cour de cassation pénale. 
Lausanne, le 12 mars 2003 
Au nom de la Cour de cassation pénale 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le président: La greffière: