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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6P.78/2003 /rod 
 
Arrêt du 12 août 2003 
Cour de cassation pénale 
 
Composition 
MM. les Juges Schneider, Président, 
Wiprächtiger et Kolly. 
Greffière: Mme Angéloz. 
 
Parties 
A.X.________, 
recourante, représentée par Me Daniel Jeanguenin, avocat, place Centrale 51, 2501 Biel/Bienne, 
 
contre 
 
Y.________, 
intimée, représentée par Me Philippe Juvet, avocat, case postale 2253, 2001 Neuchâtel 1, 
Ministère public du canton de Neuchâtel, rue du Pommier 3, case postale 2672, 2001 Neuchâtel 1, 
Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel, rue du Pommier 1, case postale 3174, 2001 Neuchâtel 1. 
 
Objet 
Art. 9 et 29 al. 2 Cst. (procédure pénale; arbitraire, droit d'être entendu), 
 
recours de droit public contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel du 5 mai 2003. 
 
Faits: 
A. 
Le 23 mai 2001, à 19 heures 15, un accident de la circulation s'est produit sur la route cantonale de Valengin. B.X.________, qui circulait au guidon de sa moto Yamaha en direction de Dombresson, a entrepris de dépasser la voiture Toyota conduite par Y.________, qui avait entamé une manoeuvre similaire pour doubler l'Opel Omega qui la précédait. Arrivant à une vitesse estimée par l'expert à 135 km/h plus ou moins 10 %, B.X.________ a tenté de passer entre le flanc gauche de la Toyota et le bord de la chaussée, sans y parvenir. Les deux véhicules se sont frôlés, ce qui a modifié la trajectoire de la moto, qui a été propulsée en l'air par le petit talus bordant la route. B.X.________ est tombé et a été écrasé mortellement par sa moto. 
 
Au terme de l'enquête, qui a notamment comporté une expertise judiciaire et une inspection locale, Y.________ a été renvoyée en jugement, sous la prévention de violation des art. 27 al. 1, 35 et 90 LCR, 4a OCR et 117 CP, étendue par la suite aux art. 34 al. 3 LCR et 10 OCR. 
B. 
Par jugement du 12 novembre 2002, le Tribunal de police du district du Val-de-Ruz a acquitté Y.________. Il a retenu qu'il était possible que cette dernière n'ait pas vu la moto, dès lors que, selon l'hypothèse qui lui était la plus favorable, celle-ci survenait à 148 km/h (135 km/h plus 10 % d'après l'expertise) et se trouvait à une distance d'environ 70 m au moment où elle avait amorcé son dépassement; il n'était donc pas exclu que la moto se soit trouvée dans l'angle mort du rétroviseur extérieur de la prévenue lorsque cette dernière y avait jeté un coup d'oeil. Au demeurant, l'accident s'était produit sur une route étroite et en relativement mauvais état, où la prévenue n'avait pas à s'attendre à l'arrivée d'un véhicule dépassant de 85 % la vitesse prescrite; cette circonstance était si imprévisible qu'elle avait rompu le lien de causalité adéquate entre le fait de ne pas apercevoir la moto et l'accident. 
C. 
Contre ce jugement, A.X.________, épouse du motard tué dans l'accident, a recouru auprès de la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal neuchâtelois, qui, par arrêt du 5 mai 2003, l'a rejeté. En bref, la cour cantonale a considéré qu'il pouvait être admis sans arbitraire que la prévenue n'ait pu voir la moto, qu'on ne pouvait par ailleurs faire grief au premier juge de n'avoir pas ordonné une contre-expertise et qu'il n'était au demeurant pas critiquable de retenir une rupture du lien de causalité adéquate. 
D. 
A.X.________ forme un recours de droit public au Tribunal fédéral. Se plaignant d'arbitraire dans l'appréciation des preuves et d'une violation de son droit d'être entendue, elle conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
La recourante fonde sa qualité pour recourir sur l'art. 8 LAVI ainsi que sur l'art. 88 OJ
1.1 Selon la jurisprudence relative à l'art. 88 OJ, le droit de punir n'appartenant qu'à l'Etat, celui qui se prétend lésé par une infraction n'a pas d'intérêt juridiquement protégé à la poursuite et à la condamnation de l'auteur (ATF 120 Ia 101 consid. 1a p. 102, 157 consid. 2a/aa p. 159/160 et les arrêts cités). Il ne peut donc pas se plaindre sur le fond d'un acquittement, d'un non-lieu ou d'un classement et, en particulier, d'arbitraire dans l'appréciation des preuves, dès lors que l'examen d'un tel grief est lié à celui de l'affaire au fond. Il peut en revanche invoquer une violation, équivalant à un déni de justice formel, des droits procéduraux qui lui sont reconnus en tant que partie par le droit cantonal de procédure ou qui découlent directement de la Constitution fédérale (ATF 121 IV 317 consid. 3b p. 324 et les arrêts cités). Ce droit d'invoquer des garanties de procédure ne permet cependant pas de remettre en cause, même de façon indirecte, la décision sur le fond; le recours ne peut donc pas porter sur des points indissociables de cette décision, tel que, notamment, le refus d'une mesure probatoire fondée sur une appréciation anticipée des preuves (ATF 120 Ia 227 consid. 1 p. 230 et les arrêts cités). 
 
En l'espèce, la recourante se plaint essentiellement d'arbitraire dans l'appréciation des preuves. Elle invoque certes aussi une violation de son droit d'être entendue à raison du refus de l'autorité cantonale d'ordonner une contre-expertise; ce refus repose toutefois sur une appréciation anticipée des preuves, en particulier de l'expertise déjà effectuée; c'est d'ailleurs de l'arbitraire avec lequel l'autorité cantonale aurait apprécié cette expertise que la recourante déduit l'atteinte à son droit d'être entendue qu'elle invoque. La recourante ne peut donc fonder sa qualité pour recourir sur l'art. 88 OJ
1.2 En qualité d'épouse de la victime de l'accident, la recourante est assimilée à celle-ci pour ce qui est notamment des droits procéduraux prévus par l'art. 8 LAVI (art. 2 al. 2 let. b LAVI) et peut donc former les mêmes recours que l'accusé, notamment un recours de droit public, aux conditions posées par l'art. 8 al. 1 let. c LAVI. 
 
Cette dernière disposition exige que la victime ait déjà été partie à la procédure auparavant et que la sentence pénale attaquée puisse avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles. Selon la jurisprudence, cela implique que la victime ait pris des conclusions civiles sur le fond dans le cadre de la procédure pénale, pour autant que cela pouvait raisonnablement être exigé d'elle (ATF 120 IV 44 consid. 4b et c p. 53 ss). Tel est en principe le cas lorsque la cause a été menée jusqu'au stade du jugement. Des conclusions civiles ne sont toutefois pas nécessaires lorsque le dommage n'est pas encore établi ou ne peut pas encore être chiffré (ATF 121 IV 207 consid. 1a p. 210). Il incombe alors à la victime qui n'a pas pris de conclusions civiles d'expliquer quelles prétentions elle entend faire valoir et pourquoi elle n'a pas agi dans le cadre de la procédure pénale (ATF 120 IV 44 consid. 8 p. 57 s.). Cette exigence découle de la conception de la LAVI, qui a en particulier pour but de permettre à la victime de faire valoir ses prétentions civiles dans la procédure pénale elle-même (ATF 120 IV 44 consid. 4a p. 51 s.). Si elle n'est pas respectée, le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur le recours. 
 
La recourante, qui s'est constituée partie civile pour pouvoir accéder à tous les actes de l'instruction, a manifestement participé à la procédure cantonale, puisqu'elle a provoqué la décision attaquée par son recours. Il ne ressort toutefois pas de l'arrêt attaqué, ni d'ailleurs du jugement de première instance, qu'elle aurait pris des conclusions civiles, alors que la procédure a été menée jusqu'au stade du jugement. Il en résulte au contraire qu'elle s'est bornée à conclure à la condamnation de l'intimée pour homicide par négligence. Elle n'établit en tout cas pas ni même ne prétend avoir pris des conclusions civiles, semblant bien plutôt admettre le contraire dans la mesure où elle indique qu'elle "désire faire valoir des prétentions civiles". On doit en déduire que la recourante, alors qu'elle était dès le départ assistée d'un avocat, s'est abstenue de prendre des conclusions civiles dans le cadre de la procédure pénale, le contraire n'étant du moins pas établi ni même allégué. Or, elle ne fournit aucune explication qui permette de comprendre cette abstention; en particulier, elle n'indique pas ce qui l'aurait empêchée d'établir ou de chiffrer son dommage. On ne parvient ainsi pas à discerner ce qui l'aurait empêchée de conclure sur le fond, au moins sur le principe de la responsabilité civile de l'intimée, et, eu égard à l'infraction en cause, de formuler des prétentions pour tort moral. Faute de toute explication à ce sujet, force est donc de constater que rien ne vient expliquer l'abstention de la recourante d'articuler des prétentions civiles dans la procédure pénale. Dans ces conditions, la recourante ne saurait bénéficier de l'art. 8 al. 1 let. c LAVI et remettre en cause le prononcé pénal. 
1.3 Il résulte de ce qui précède que la recourante ne pourrait former un recours de droit public que sur la base de l'art. 8 al. 1 let. c LAVI, dont l'une des conditions n'est toutefois pas réalisée en l'espèce. Le recours est par conséquent irrecevable. 
2. 
Vu l'issue du recours, la recourante supportera les frais (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer une indemnité à l'intimée, qui n'a pas été amenée à se déterminer sur le recours (art. 159 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est déclaré irrecevable. 
2. 
Un émolument judiciaire de 2000 francs est mis à la charge de la recourante. 
3. 
Il n'est pas alloué d'indemnité. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, au Ministère public du canton de Neuchâtel et à la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel. 
Lausanne, le 12 août 2003 
Au nom de la Cour de cassation pénale 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: