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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4C.295/2004 /fzc 
 
Arrêt du 12 novembre 2004 
Ire Cour civile 
 
Composition 
MM. les Juges Corboz, président, Nyffeler et Favre. 
Greffière: Mme Aubry Girardin. 
 
Parties 
X.________ S.A., 
demanderesse et recourante, représentée par Me Jean-Jacques Martin, avocat, 
 
contre 
 
A.________, 
défendeur et intimé, représenté par Me Isabelle Poncet Carnicé, avocate. 
 
Objet 
contrat de vente; garantie 
 
(recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice genevoise du 11 juin 2004). 
 
Faits: 
 
A. 
X.________ S.A., qui exploite un hôtel à Genève, est entrée en contact avec A.________, alors à la tête d'une entreprise individuelle, en vue de lui confier différents travaux d'ameublement et de rénovation concernant l'hôtel et l'appartement de fonction de B.________, son administrateur. 
 
Le 11 novembre 2000, B.________ et A.________ ont signé un devis portant sur la livraison de meubles, rideaux et luminaires destinés à l'hôtel, pour un montant total de 340'403,40 fr., TVA incluse. Ce document comportait entre autres clauses l'indication suivante : "Nos meubles ne bénéficient d'aucune garantie légale ou contractuelle". Celle-ci figurait, en caractères parfaitement lisibles, sur la page portant la signature du représentant de X.________ S.A. 
 
Afin de financer cette acquisition, X.________ S.A. a conclu un contrat de leasing avec Crédit Suisse Leasing (ci-après : CSL). 
 
Le 6 février 2001, X.________ S.A. et A.________ ont signé une facture ayant le même contenu que le devis du 11 novembre 2000, y compris la clause exclusive de responsabilité, mais avec une référence au contrat de leasing. Selon les conditions générale applicables, il appartenait au preneur de leasing d'informer immédiatement le CSL des défauts constatés sur la chose vendue. 
 
Le 5 juin 2001, le mobilier commandé a été livré à l'hôtel. X.________ S.A. a prétendu qu'une série de meubles, pour une valeur totale de 46'230 fr., n'avait pas été livrée, ce qu'a contesté A.________. 
 
Le personnel de l'hôtel qui a réceptionné les meubles a immédiatement constaté des défauts sur ceux-ci. 
 
Le 11 juin 2001, X.________ S.A. a conclu le contrat de leasing établi par le CSL sur la base du devis du 11 novembre 2000 et la somme de 340'403,40 fr. a été versée à A.________. Le CSL n'a pas été informé de problèmes relatifs à la livraison des objets visés par le contrat. 
 
Le 9 juillet 2001, A.________ a établi une facture définitive pour les meubles et autres objets livrés à l'hôtel qui s'élevait à 348'414 fr., TVA incluse. La différence de 8'010,60 fr. entre cette facture et le montant convenu en février 2001 s'expliquait par des modifications de commande à raison de 2'899,60 fr. et par la prise en compte de frais de transport équivalant à 5'111 fr. 
 
Le 16 juillet 2001, le compte de leasing a été soldé, B.________ ayant entièrement payé le montant dû. 
 
Le 8 août 2001, B.________ s'est plaint auprès de A.________ d'importants défauts constatés sur les meubles. Il a fait une liste des rectifications à apporter, en ajoutant que beaucoup de meubles, lustres et autres pièces n'étaient toujours pas en place. Il a mis A.________ en demeure de prendre toutes les mesures nécessaires d'ici au 25 août 2001, à défaut de quoi il facturerait à titre de dommages-intérêts les pertes journalières des chambres d'hôtel. 
 
Le 15 août 2001, A.________ a fait livrer ce qu'il considérait être les derniers objets commandés, soit dix lustres. Le bon de livraison a été signé sous la mention "reçu en bon ordre". X.________ S.A. a affirmé avoir refusé ces lustres. 
 
Le 10 octobre 2001, X.________ S.A. a fait établir une expertise de laquelle il ressort que le matériel électrique ne correspondrait pas aux normes suisses et que les travaux de mise en conformité s'élèveraient à 20'153,40 fr. Il n'a pas pu être établi quand X.________ S.A. se serait plainte de ces problèmes, que A.________ conteste entièrement. 
 
Les défauts concernant les objets livrés ont été décrits en détail dans une expertise privée du 7 novembre 2001, qui a conclu à des taux de dépréciation compris entre 20 % et 90 % selon les objets. 
B. 
Les parties sont également entrées en litige s'agissant des autres contrats qu'elles avaient conclus et qui portaient sur des travaux de rénovation, ainsi que sur une livraison de meubles destinés à l'appartement de fonction de B.________. 
C. 
Le 11 février 2002, X.________ S.A. a introduit une action en justice portant sur le paiement, par A.________, du montant total de 110'320,60 fr. Celui-ci a formé pour sa part une demande reconventionnelle tendant à la condamnation de X.________ S.A. à lui verser 226'821,65 fr. 
 
Par jugement du 17 décembre 2003, le Tribunal de première instance du canton de Genève a débouté X.________ S.A. de toutes ses conclusions. Statuant sur la demande reconventionnelle, le premier juge a condamné X.________ S.A. à verser à A.________ le montant total de 203'172,65 fr. avec intérêt à 5 % dès le 4 juin 2002, déboutant les parties de toutes autres conclusions. 
 
Statuant sur appel de X.________ S.A., la Chambre civile de la Cour de justice, par arrêt du 11 juin 2004, a admis très partiellement celui-ci, dans la mesure où elle a opéré quelques réductions sur les montants alloués à A.________. Ainsi, s'agissant des meubles livrés à l'hôtel, les 2'899,60 fr. supplémentaires réclamés le 9 juillet 2001 par A.________ n'ont pas été admis. En définitive, X.________ S.A. a été condamnée à verser à A.________ la somme de 191'277,70 fr. avec intérêt à 5 % dès le 4 juin 2002. 
D. 
Contre l'arrêt du 11 juin 2004, X.________ S.A. (la demanderesse) interjette un recours en réforme au Tribunal fédéral. Elle conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à la Cour de justice pour nouvelle décision. 
 
A.________ (le défendeur) propose de déclarer le recours irrecevable dans la mesure où il méconnaît l'art. 63 al. 2 OJ et de le rejeter pour le surplus. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
1.1 Interjeté par la demanderesse qui a été déboutée de toutes ses conclusions et condamnée à verser des montants au défendeur à titre reconventionnel, le recours en réforme est dirigé contre un jugement final rendu en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ), sur une contestation civile (cf. ATF 129 III 415 consid. 2.1) dont la valeur litigieuse dépasse le seuil de 8'000 fr. (art. 46 OJ). Il a en outre été déposé en temps utile compte tenu des féries (art. 34 al. 1 let. b et 54 al. 1 OJ), de sorte qu'il paraît recevable. 
1.2 Dans la présente procédure, la demanderesse limite ses critiques au refus des autorités cantonales d'admettre qu'elle était en droit de se prévaloir de défauts entachant le mobilier vendu par le défendeur et destiné à l'hôtel. Non critiqués, les autres points figurant dans l'arrêt attaqué et qui concernent la non-livraison de certaines pièces de mobilier, le caractère défectueux des meubles destinés au logement de fonction de l'administrateur et les défauts se rapportant aux divers travaux de rénovation confiés au défendeur ne seront pas revus (cf. art. 55 al. 1 let. c OJ). 
1.3 Les conclusions de la demanderesse ne tendent qu'au renvoi de la cause à l'autorité cantonale. Force est cependant d'admettre qu'elles sont suffisantes au regard de l'art. 55 al. 1 let. b OJ dans la mesure où, s'il admettait le recours en considérant que la demanderesse peut se prévaloir de la garantie des défauts concernant les meubles destinés à l'hôtel, le Tribunal fédéral ne serait pas à même de statuer au fond, mais devrait renvoyer la cause à l'instance précédente pour complément d'instruction et nouvelle décision (cf. ATF 125 III 412 consid. 1b p. 414; 111 II 384 consid. 1 p. 386). En effet, l'arrêt attaqué ne contient aucune constatation concernant l'ampleur, voire la réalité même de ces défauts et, partant, le dommage subi, étant précisé que les conclusions de l'expert privé mandaté par la demanderesse ne lient pas le juge (cf. ATF 127 I 73 consid. 3f/bb p. 81 s.). 
2. 
Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement juridique sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées, qu'il y ait lieu de rectifier des constatations reposant sur une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter les constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents, régulièrement allégués et clairement établis (art. 64 OJ; ATF 130 III 102 consid. 2.2; 127 III 248 consid. 2c et les arrêts cités). Hormis ces exceptions que le recourant doit invoquer expressément, il ne peut être présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). 
 
Comme le relève pertinemment le défendeur, la demanderesse méconnaît ces principes, dès lors qu'elle se fonde sur des faits qui ne figurent pas dans l'arrêt attaqué, sans se prévaloir de l'une des exceptions qui viennent d'être rappelées. C'est donc exclusivement à la lumière des faits ressortants de l'arrêt entrepris que la conformité de cette décision avec le droit fédéral sera vérifiée. 
3. 
La cour cantonale a estimé que la demanderesse ne pouvait se prévaloir de la garantie des défauts qui auraient entachés le mobilier acheté au défendeur et destiné à l'hôtel, car celle-ci avait été exclue contractuellement, tant dans le devis du 11 novembre 2000 que dans la facture du 6 février 2001. Ces documents contenaient en effet une clause qui précisait clairement que les meubles ne bénéficiaient d'aucune garantie légale ou contractuelle. Celle-ci figurait en caractères parfaitement lisibles sur la page portant la signature du représentant de la demanderesse. Comme cette dernière n'a pas prétendu ne pas avoir compris le sens ou la portée de la clause et qu'il n'a jamais été allégué que le vendeur lui aurait frauduleusement dissimulé les défauts de la chose, toute garantie était exclue. 
4. 
Invoquant une violation de l'art. 18 CO, la demanderesse reproche principalement à la cour cantonale d'avoir admis que le contrat comprenait une clause d'exclusion de responsabilité. 
4.1 Il n'est à juste titre pas contesté que les parties se sont liées par un contrat de vente mobilière au sens des art. 187 ss CO s'agissant des meubles destinés à l'hôtel. En matière de vente, les parties peuvent convenir de clauses exclusives ou limitatives de responsabilité (Venturi, Commentaire romand, no 1 ad art. 199 CO). Comme la clause excluant la responsabilité du vendeur doit exprimer clairement la volonté des parties, elle doit être interprétée de manière restrictive (ATF 126 III 59 consid. 5a in fine; 109 II 24 consid. 4). 
 
Selon la jurisprudence, la détermination de la portée d'une clause excluant ou limitant la responsabilité du vendeur ressortit aux règles régissant l'interprétation du contrat. Ainsi, dans la mesure où la volonté réelle et commune des parties n'a pas pu être constatée, la clause en question doit être interprétée en vertu de la théorie de la confiance (ATF 126 III 59 consid. 5a et la référence citée). Le juge doit donc rechercher comment une déclaration ou une attitude pouvait être comprise de bonne foi en fonction de l'ensemble des circonstances (ATF 130 III 417 consid. 3.2; 129 III 702 consid. 2.4). L'application du principe de la confiance est une question de droit que le Tribunal fédéral, saisi d'un recours en réforme, peut examiner librement (ATF 130 III 417 consid. 3.2 p. 425). Pour la trancher, il faut cependant se fonder sur le contenu de la manifestation de volonté et sur les circonstances, lesquelles relèvent en revanche du fait (ATF 130 III 417 consid. 3.2 p. 425). 
Même si la teneur d'une clause contractuelle paraît claire à première vue, il peut résulter d'autres conditions du contrat, du but poursuivi par les parties ou d'autres circonstances que son texte ne restitue pas exactement le sens de l'accord conclu (ATF 130 III 417 consid. 3.2 p. 425; 129 III 702 consid. 2.4.1); il n'y a cependant pas lieu de s'écarter du sens littéral lorsqu'il n'existe aucune raison sérieuse de penser qu'il ne correspond pas à la volonté des parties (ATF 130 III 417 consid. 3.2 p. 425; 129 III 118 consid. 2.5). 
4.2 En l'espèce, la cour cantonale n'a pas constaté de réelle et commune intention des parties concernant la clause exclusive de responsabilité, mais elle a envisagé celle-ci sous l'angle du principe de la confiance, de sorte que son interprétation peut être revue dans la présente procédure. Les juges sont parvenus à la conclusion que la clause était valable, dès lors qu'elle était mentionnée clairement et sans aucune ambiguïté sur le devis du 11 novembre 2000 et sur la facture du 6 février 2001, qui plus est en caractères parfaitement lisibles. Par ailleurs, l'acheteuse avait signé deux fois un document comportant la clause d'exclusion, sans prétendre qu'elle n'en aurait pas compris le sens ou la portée. Sur la base de ces éléments, qui relèvent du fait, rien ne justifiait de s'écarter du texte clair de cette clause, dont la signification ne pouvait échapper à la demanderesse, ce d'autant qu'en qualité de société exploitant un hôtel, elle n'apparaît pas comme inexpérimentée. Par conséquent, on ne voit pas que l'on puisse reprocher à la cour cantonale d'avoir violé le principe de la confiance en admettant la validité de cette clause. 
 
Au demeurant, il convient de souligner que la demanderesse, pour démontrer que cette exclusion de responsabilité ne pouvait correspondre à sa volonté, s'écarte des faits constatés, notamment lorsqu'elle soutient que la clause en question aurait été camouflée, ce qui n'est pas admissible (cf. supra consid. 2). 
4.3 Enfin, comme il n'a jamais été allégué que le défendeur aurait frauduleusement dissimulé des défauts à l'acheteuse, ladite clause ne saurait être considérée comme nulle en regard de l'art. 199 CO
5. 
A titre subsidiaire, la demanderesse soutient que la clause exclusive de responsabilité serait viciée, car elle contreviendrait de manière flagrante à l'art. 100 al. 1 CO
5.1 Le défendeur relève à juste titre qu'il s'agit d'un argument juridique nouveau. Selon la jurisprudence, une argumentation juridique nouvelle est admissible, à condition qu'elle reste dans le cadre de l'état de fait ressortant de la décision attaquée (ATF 130 III 28 consid. 4.4 et les arrêts cités). 
5.2 Comme le mentionne la demanderesse, il existe une controverse dans la doctrine sur le point de savoir si les clauses exclusives de responsabilité prévues dans le cadre d'un contrat de vente sont soumises exclusivement à l'art. 199 CO ou si elles doivent également respecter la règle générale de l'art. 100 al. 1 CO (à ce sujet, Venturi, op. cit., no 2 ad art. 199 CO). Celle-ci n'a à ce jour pas été tranchée par la jurisprudence (cf. ATF 126 III 59 consid. 4a). Il n'est toutefois pas nécessaire de se prononcer sur ce point dans le cas d'espèce, dès lors que, sur la base des faits constatés, rien ne permet de conclure à l'existence d'un dol ou d'une faute grave de la part du vendeur. Par conséquent, à supposer que l'art. 100 al. 1 CO soit considéré comme applicable aux clauses exclusives de responsabilité prévues dans le cadre d'une vente, ce qui fait l'objet de la controverse précitée, cette disposition ne serait de toute manière pas de nature à entraîner la nullité de la clause litigieuse, eu égard aux éléments retenus dans l'arrêt attaqué. 
 
Dans ces circonstances, le recours ne peut qu'être rejeté. 
6. 
Au vu de l'issue du litige, les frais et dépens seront mis à la charge de la demanderesse (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté. 
2. 
Un émolument judiciaire de 5'500 fr. est mis à la charge de la demanderesse. 
3. 
La demanderesse versera au défendeur une indemnité de 6'500 fr. à titre de dépens. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice genevoise. 
Lausanne, le 12 novembre 2004 
Au nom de la Ire Cour civile 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: