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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_365/2021  
 
 
Arrêt du 13 décembre 2022  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz, Hänni, 
Beusch et Ryter 
Greffier : M. Dubey. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Maîtres Alan Hughes et Sabrina Bouklioua, avocats, 
recourante, 
 
contre 
 
Administration cantonale des impôts du canton de Vaud, 
route de Berne 46, 1014 Lausanne Adm cant VD, 
 
Objet 
Impôts cantonal et communal (sauf soustraction) pour la période fiscale 2016, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, 
du 1er avril 2021 (FI.2020.0109). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________ est domiciliée dans le canton de Vaud. Elle détient 99 % des droits de participation dans la société civile immobilière (SCI) de droit français SCI B.________ qui est propriétaire de deux immeubles en France valant 1'018'400 fr. Selon la " Déclaration des sociétés immobilières non soumises à l'impôt sur les sociétés " (formule 2072) produite par la contribuable le 27 novembre 2018, la SCI a dégagé un revenu brut de 7'748 EUR pour l'année 2016. 
Par décision de taxation du 23 avril 2018 pour la période fiscale 2016, l'Office d'impôt des districts de la Riviera-Pays-d'Enhaut et Lavaux-Oron a ajouté à la fortune imposable dans le canton de Vaud de la contribuable la part de celle-ci aux actifs nets de la SCI pour un montant de 1'018'400 fr. 
Par décision sur réclamation du 26 août 2020, l'Administration cantonale des impôts du canton de Vaud a confirmé que la part aux actifs nets de la SCI pour un montant de 1'018'400 fr. devait être soumise à l'impôt sur la fortune de la contribuable dans le canton de Vaud au titre de fortune immobilière. 
 
B.  
Par arrêt du 1er avril 2021, le Tribunal cantonal du canton de Vaud a rejeté le recours que la contribuable avait déposé contre la décision sur réclamation rendue le 26 août 2020 par l'Administration cantonale des impôts du canton de Vaud. Malgré le fait que la SCI était transparente et que les parts détenues par la contribuable dans la SCI étaient traitées comme des immeubles en droit français, la SCI devait être assimilée en droit suisse à une personne morale, de sorte que le droit d'imposer les parts sociales détenues par la contribuable dans cette dernière revenait à la Suisse au titre de fortune mobilière. 
 
C.  
Le 3 mai 2021, la contribuable a déposé un recours auprès du Tribunal fédéral, à qui elle demande, sous suite de frais et dépens, de constater que les actifs immobiliers détenus via la SCI en France ne doivent pas être pris en considération pour l'assiette de l'impôt sur la fortune mais uniquement pour le taux d'imposition global sur la fortune de la période fiscale 2016. Elle se plaint de la violation du droit fédéral conventionnel et interne. 
Le Tribunal cantonal du canton de Vaud renonce à se déterminer sur le recours. L'Administration cantonale des impôts du canton de Vaud conclut au rejet du recours dans la mesure où il est recevable. Le Secrétariat d'État aux questions financières internationales (SFI) expose les enjeux de la cause et s'en remet à justice. L'Administration cantonale des impôts et la contribuable ont répliqué. Une copie des répliques a été adressée aux parties. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre un arrêt rendu par une autorité judiciaire supérieure de dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF) dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) qui ne tombe pas sous le coup des exceptions prévues à l'art. 83 LTF. Interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites par la loi (art. 42 LTF), par une contribuable qui a un intérêt digne de protection à son annulation ou sa modification (art. 89 al. 1 LTF), le recours est donc en principe recevable comme recours en matière de droit public (cf. aussi art. 73 al. 1 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes [LHID; loi sur l'harmonisation fiscale; RS 642.14]; ATF 134 II 186 consid. 1.3). 
 
2.  
Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF et en dérogation à l'art. 106 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral ne connaît toutefois de la violation des droits fondamentaux ainsi que de celle de dispositions de droit cantonal que si le grief a été invoqué et motivé par le recourant, à savoir exposé de manière claire et détaillée (ATF 142 I 99 consid. 1.7.2; 141 I 36 consid. 1.3). Le grief de violation du droit cantonal ne peut en principe pas être soulevé dans un recours devant le Tribunal fédéral. En revanche, il est toujours possible de faire valoir que la mauvaise application du droit cantonal constitue une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à un droit fondamental (cf. ATF 142 I 172 consid. 4.3; 135 III 513 consid. 4.3; 133 III 462 consid. 2.3). En matière fiscale et s'agissant du droit cantonal harmonisé, le Tribunal fédéral en vérifie librement la conformité aux dispositions de la LHID et son application par les instances cantonales, sauf si cette loi laisse une certaine marge de manoeuvre aux cantons, auquel cas l'examen du Tribunal fédéral est limité à celui de la violation de droits constitutionnels dûment invoqués, en particulier l'arbitraire (cf. ATF 144 II 313 consid. 5.3; 134 II 207 consid. 2). 
 
3.  
Le litige porte sur la prise en compte des parts sociales de la SCI détenues par la recourante à titre de fortune mobilière imposable en Suisse - singulièrement dans le canton de Vaud. 
Les positions des parties peuvent être résumées de la manière suivante. 
Dans l'arrêt attaqué, l'instance précédente a confirmé la position de l'autorité intimée selon laquelle, comme la SCI est une personne morale, les parts sociales de cette dernière détenues par la recourante, domiciliée dans le canton de Vaud depuis le 1er juin 2016, étaient imposables au titre de fortune mobilière dans le canton de Vaud en application du droit interne suisse. Elle a ensuite jugé que le droit d'imposer la fortune mobilière provenant de la SCI appartenait en principe à la France, mais qu'en l'absence de perception effective de l'impôt en France, le droit d'imposer la recourante sur sa fortune revenait au canton de Vaud en application de la Convention entre la Suisse et la France du 9 septembre 1966 en vue d'éliminer les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir la fraude et l'évasion fiscales (CDI CH-F; convention de double imposition CH-F; RS 0.672.934.91). 
La recourante conteste cette imposition. Elle s'oppose à l'interprétation du droit interne suisse par l'instance précédente. Elle soutient ensuite que les parts qu'elle détient dans la SCI sont considérées comme immeuble en France et que la Suisse respectivement le canton de Vaud ne peut pas s'écarter de cette qualification en application de l'art. 6 § 2 CDI CH-F. Se fondant sur le commentaire du modèle OCDE, elle objecte enfin que l'instance précédente a procédé à une interprétation erronée de l'art. 25 B § 1 CDI CH-F. Selon elle, cette disposition ne trouve à s'appliquer que si aucun impôt n'est prévu dans l'État de source ou lorsque l'impôt n'est pas effectivement perçu en raison de circonstances particulières telles que la compensation avec des pertes, une erreur ou l'expiration du délai de prescription, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. 
 
4.  
Les conventions internationales en matière de double imposition ne contiennent que des règles visant à limiter les pouvoirs d'imposition des Etats mais ne fondent pas l'imposition elle-même. Par conséquent, il convient d'abord de s'assurer de l'existence d'un droit (interne) d'imposition, puis, le cas échéant, de vérifier que ce droit d'imposition n'est pas limité par une disposition conventionnelle visant à restreindre ou éliminer une éventuelle double imposition internationale (ATF 143 II 257 consid. 5.1 et les références). 
 
I. Droit interne suisse  
 
5.  
 
5.1. En vertu de l'art. 2 al. 1 let. a d LHID, les cantons prélèvent notamment un impôt sur la fortune des personnes physiques. L'impôt sur la fortune a pour objet l'ensemble de la fortune nette (art. 13 al. 1 LHID). Les personnes physiques sont assujetties à l'impôt à raison du rattachement personnel, lorsque, au regard du droit fiscal, elles sont domiciliées dans le canton (art. 3 al. 1 LHID).  
Les art. 1 al. 1 let. a, 3 al. 1 et 50 al. 1 de la loi vaudoise du 4 juillet 2000 sur les impôts directs cantonaux (LI/VD, RSVD 642.11) ont une teneur identique à celle des art. 2 al. 1 let. a, 3 al. 1 et 13 al. 1 LHID. L'art. 6 al. 1 LI/VD précise que l'assujettissement fondé sur un rattachement personnel est illimité; il ne s'étend toutefois pas aux entreprises, aux établissements stables et aux immeubles situés hors du canton. 
La fortune imposable au sens de l'art. 13 al. 1 LHID se compose de l'ensemble des actifs, pour autant qu'ils ne soient pas exonérés de l'impôt en vertu d'une disposition spéciale. Les actifs imposables comprennent en principe tous les droits - qu'ils portent sur des choses, des créances ou des participations - appréciables en argent, à savoir tous les droits qui peuvent être réalisés, c'est-à-dire cédés en échange d'une contre-prestation (ATF 136 II 256 consid. 3.2). 
 
5.2. En application de ces dispositions légales, l'instance précédente a constaté que la recourante était domiciliée dans le canton de Vaud depuis le 1er juin 2016 et qu'elle y était par conséquent assujettie de manière illimitée à l'impôt sur la fortune mobilière. Constatant que la SCI est considérée en droit suisse et en droit français comme une personne morale, elle a jugé que les participations que la recourante détenait dans la SCI constituaient de la fortune mobilière et qu'elles devaient par conséquent être soumises à l'impôt sur la fortune mobilière dans le canton de Vaud, établissant ainsi que le droit interne suisse disposait d'une base légale à cet effet.  
 
5.3. Invoquant les art. 4, 5 et 129 Cst., la recourante soutient que l'art. 6 al. 1 LI/VD, qui exclut de l'assujettissement fondé sur un rattachement personnel les immeubles situés hors du canton, doit être appliqué en l'espèce, puisqu'il correspond, en conformité avec le postulat constitutionnel d'harmonisation verticale, à l'art. 6 al. 1 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct (LIFD; RS 642.11). Elle en conclut que les immeubles sis en France ne peuvent pas être imposés dans le canton de Vaud en application de l'art. 6 al. 1, 2e phr., LI/VD et qu'ils n'entrent en ligne de compte que pour déterminer le taux applicable à l'imposition de la fortune en Suisse (art. 53 al. 1 LI/VD). A son avis, il est arbitraire d'affirmer que la SCI française correspond en droit suisse comme en droit français à une personne morale et que la Suisse a, dans cette mesure, sur la base de son droit interne, une base légale suffisante pour l'imposer sur les parts sociales qu'elle détient dans la SCI. L'autorité intimée n'aurait en effet jamais remis en cause le traitement fiscal en transparence de la SCI par la France, admettant ainsi la qualification d'immeuble en France.  
 
5.4. Les griefs de la recourante doivent être écartés. Le Tribunal fédéral a déjà jugé que la SCI de droit français est considérée comme une personne morale sous l'angle du droit suisse (arrêt 2C_729/2019 du 7 juillet 2020 consid. 4.4; 4A_454/2016 du 16 décembre 2016 consid. 3.2) et la recourante ne démontre pas en quoi cette jurisprudence devrait être modifiée. Il s'ensuit que les participations de la recourante dans la SCI en cause constituent de la fortune mobilière au sens du droit interne suisse et qu'elles ne sont pas exclues de l'assujettissement illimité à l'impôt sur la fortune de la recourante dans le canton de Vaud, puisque l'art. 6 al. 1, 2e phr., LI/VD ne prévoit pas l'exclusion des valeurs mobilières.  
 
II. Droit interne français  
 
6.  
Il est établi et non contesté par les parties que les parts détenues dans une SCI sont, en France, imposées en transparence et sont par conséquent soumises à l'impôt sur la fortune immobilière dans le chapitre fiscal de leur détenteur. Il n'est toutefois pas non plus contesté par les parties que l'impôt sur la fortune n'est perçu en France que lorsque la valeur de celle-ci est supérieure à 1,3 millions d'euros. En l'occurrence, les deux immeubles détenus par la SCI valent 1'018'400 fr., ce qui constitue un montant inférieur au seuil d'imposition. La recourante n'a par conséquent pas payé d'impôt sur la fortune calculé sur la valeur des immeubles détenus par la SCI en France. Il s'ensuit que la recourante est sur le principe aussi imposable en France, mais n'y paie aucun impôt sur la fortune. 
 
7.  
Il ressort de ce qui précède que tant la Suisse que la France disposent d'une base légale suffisante qui permettrait de soumettre à imposition la fortune de la recourante. Il convient par conséquent d'examiner si ces droits d'imposition sont limités par une disposition conventionnelle visant à restreindre ou éliminer une éventuelle double imposition internationale. 
 
III. Règles de conflit d'imposition  
 
8.  
En vertu de l'art. 6 § 2 al. 2 CDI CH-F, si la propriété ou l'usufruit d'actions, parts ou autres droits dans une société, une fiducie, ou une institution comparable, donne au propriétaire ou à l'usufruitier la jouissance exclusive de biens immobiliers situés dans un Etat contractant et détenus par cette société, fiducie ou institution comparable, ou si ces actions, parts ou autres droits sont traités fiscalement comme des biens immobiliers par la législation interne de cet Etat, les revenus que le propriétaire ou l'usufruitier tire de l'utilisation directe, de la location ou de l'usage sous toute autre forme de son droit de jouissance sont imposables dans cet Etat nonobstant les dispositions des art. 7 et 16 CDI CH-F. 
L'art. 6 § 2 al. 2 CDI CH-F valable en matière d'impôt sur le revenu a son pendant en matière d'impôt sur la fortune. L'art. 24 § 2 al. 2 CDI CH-F prévoit en effet que la fortune constituée par des actions, parts ou autres droits dans une société, une fiducie ou une institution comparable, dont l'actif ou le patrimoine est principalement constitué, directement ou indirectement, de biens immobiliers définis au par. 2 de l'art. 6 et situés dans un Etat contractant ou de droits portant sur de tels biens est imposable dans cet Etat. 
Il résulte de ces dispositions conventionnelles que les parts que la recourante détient dans la SCI sont bien, sur le principe, imposables en France. Toutefois, comme cela a déjà été exposé, le droit français soumet certes ces biens immobiliers à l'ISF, mais ne le perçoit que lorsque leur valeur est supérieure à 1,3 millions d'euros. En l'espèce, il n'est pas contesté par les parties que l'ISF n'a pas été perçu. 
 
9.  
Constatant que l'ISF n'a pas été perçu en France, l'instance précédente, faisant application de l'art. 25 B § 1 CDI CH-F, a jugé que l'absence d'imposition effective en France conférait en retour à la Suisse le droit d'imposer les parts de la SCI comme fortune mobilière. La question se pose par conséquent de savoir si l'absence d'imposition effective en France permet à la Suisse, en vertu de son droit interne (cf. consid. 5 ci-dessus), d'imposer les parts que la recourante détient dans la SCI. La recourante conteste la nécessité d'un prélèvement effectif de l'ISF. Elle soutient que ses parts ont bien été soumises à l'ISF et qu'il suffit que le droit français prévoie le principe de l'imposition et non pas que l'impôt soit effectivement perçu, de sorte que, selon elle, l'art. 25 B § 1 CDI CH-F ne trouve pas application dans son cas. 
 
9.1. Selon l'art. 25 B § 1 CDI CH-F, il est entendu que la double imposition sera évitée de la manière suivante en ce qui concerne la Suisse :  
Lorsqu'un résident de Suisse reçoit des revenus ou possède de la fortune qui, conformément aux dispositions de la convention, sont imposables en France, la Suisse exempte de l'impôt ces revenus (à l'exception des dividendes, intérêts et redevances) ou cette fortune, mais peut, pour calculer le montant de l'impôt sur le reste du revenu ou de la fortune de ce résident, appliquer le même taux que si les revenus ou la fortune en question n'avaient pas été exemptés. Toutefois cette exemption ne s'applique aux revenus, aux gains en capital ou aux éléments de fortune visés au par. 2, deuxième alinéa de l'art. 6, au par. 2 de l'art. 15 ou au par. 1, deuxième phrase de l'art. 24, qu'après justification de l'imposition de ces revenus, gains en capital ou éléments de fortune en France. 
 
9.2. Les parties ayant des positions divergentes sur la portée de la notion " après justification de l'imposition ", il convient d'interpréter le texte de la 2e phr. de la let. b § 1 de l'art. 25 CDI CH-F, selon laquelle cette exemption ne s'applique aux revenus, aux gains en capital ou aux éléments de fortune visés au par. 2, deuxième alinéa de l'art. 6, au par. 2 de l'art. 15 ou au par. 1, deuxième phrase de l'art. 24, qu'après justification de l'imposition de ces revenus, gains en capital ou éléments de fortune en France.  
 
9.3. Selon la jurisprudence (arrêt 2C_481/2021 du 19 mai 2022 consid. 9.2 destiné à la publication), l'interprétation des conventions de double imposition s'effectue conformément aux principes d'interprétation de droit international tels qu'ils découlent de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités (CV; RS 0.111; ATF 146 II 150 consid. 5.3.1; 145 II 339 consid. 4.4.1; 144 II 130 consid. 8.2; 143 II 136 consid. 5.2.1). Selon l'art. 31 par. 1 CV, un traité doit être interprété de bonne foi suivant le sens ordinaire à attribuer aux termes du traité dans leur contexte et à la lumière de son objet et de son but. L'art. 31 par. 1 CV fixe un ordre de prise en compte des éléments de l'interprétation, sans toutefois établir de hiérarchie fixe entre eux. Le sens ordinaire du texte du traité constitue toutefois le point de départ de l'interprétation (ATF 146 II 150 consid. 5.3.2; 144 II 130 consid. 8.2.1; 143 II 202 consid. 6.3.1; 143 II 136 consid. 5.2.2). L'objet et le but du traité correspondent à ce que les parties voulaient atteindre par le traité. L'interprétation téléologique garantit, en lien avec l'interprétation selon la bonne foi, l' " effet utile " du traité (ATF 146 II 150 consid. 5.3.2; 144 II 130 consid. 8.2.1; 143 II 136 consid. 5.2.2; 142 II 161 consid. 2.1.3; 141 III 495 consid. 3.5.1). Selon l'art. 32 let. a et b CV, les travaux préparatoires et les circonstances dans lesquelles le traité a été conclu représentent des moyens complémentaires d'interprétation auxquels il peut être fait appel, soit pour confirmer le sens résultant de l'application de l'art. 31, soit pour déterminer le sens lorsque l'interprétation donnée conformément à l'art. 31 laisse celui-ci ambigu ou obscur ou conduit à un résultat qui est manifestement absurde ou déraisonnable (ATF 146 II 150 consid. 5.3.2; 145 II 339 consid. 4.4.2; 144 II 130 consid. 8.2; 143 II 136 consid. 5.2.3). Par ailleurs, l'environnement juridique international qui se dégage des travaux tels que ceux de l'OCDE, auxquels la Suisse participe activement, est pris en compte lorsqu'il s'agit de déterminer la portée d'une convention de double imposition calquée sur le Modèle de Convention OCDE (ci-après MC Convention OCDE; ATF 144 II 130 consid. 8.2.3 et 8.4.3).  
 
 
9.4. La portée de la précision figurant à l'art. 25 B § 1 CDI CH-F in fine, selon laquelle l'exemption ne s'applique " qu'après justification de l'imposition de ces revenus, gains en capital ou éléments de fortune en France " ne peut être comprise que si elle est replacée dans son contexte international. En effet, cette disposition, introduite dans la CDI CH-F en 1997 (RO 2000 1936, 1944), approuvée par l'Assemblée fédérale le 12 mars 1998 et entrée en vigueur le 1er août 1998 (RO 2000 1936), a été inspirée par l'art. 23A du MC OCDE dans sa version du 11 avril 1977 (Rapport du Comité des Affaires Fiscales de l'OCDE, Paris 1977, p. 38). Cette version était en vigueur en 1997. Elle a été partiellement modifiée en 2017 (cf. Modèle de convention fiscale concernant le revenu et la fortune, Version complète, OCDE 2019, art. 23A, p. 62, historique, consultable sur internet ad https://www.oecd.org/fr/ctp/modele-de-convention-fiscale-concernant-le-revenu-et-la-fortune-version-complete-1c00663f-fr.htm). Or, l'art. 23A MC OCDE dans sa version de 1977 (comme dans sa version actuelle d'ailleurs) ne contient pas la précision apportée à l'art. 25B § 1 CDI CH-F in fine. Le commentaire de l'art. 23 A § 1 MC OCDE se rapportant à la version 1977 de la disposition exposait que " l'Etat de résidence doit accorder l'exemption que le droit d'imposer soit ou non effectivement exercé par l'autre Etat " (Commentaire, Modèle de convention fiscale 1977, OCDE 1977 n° 34 ad art. 23A, p. 157). Il en va de même du reste du Commentaire MC OCDE dans sa version actuelle qui précise que " l'État de résidence du contribuable doit exempter de l'impôt les revenus et la fortune qui " sont imposables " dans l'autre Etat conformément aux dispositions de la convention. En conséquence, l'État de résidence doit exempter les revenus et la fortune [...] que le droit d'imposer soit effectivement ou non exercé par cet autre Etat " (Commentaire MC OCDE, version 2019 précitée, p. C (23) -20). Il apparaît par conséquent que, sans l'ajout de la précision finale " qu'après justification de l'imposition de ces revenus, gains en capital ou éléments de fortune en France " à l'art. 25 B § 1 CDI CH-F, il conviendrait d'admettre, eu égard au standard exprimé par le MC OCDE et son commentaire, que la Suisse ne pourrait pas procéder à une imposition des revenus et de la fortune imposés en France, peu importe que cette dernière impose effectivement ou non ces éléments. La précision apportée par les parties contractantes à la CDI CH-F doit par conséquent se comprendre comme une dérogation au système standard prévu par le MC OCDE.  
 
9.5. Cette interprétation est corroborée par une mise en relation de l'art. 25 B § 1 CDI CH-F avec l'art. 6 § 2 de cette même convention. Comme on l'a vu, le principe est que la définition des biens immobiliers ressortit au droit interne de l'État où sont situés ces biens (cf. consid. 6 ci-dessus). Chaque Etat est libre d'appliquer le principe de la transparence fiscale, notamment s'agissant des parts de la SCI qui peuvent être attribuées aux associés, mais être toutefois imposées dans l'État de situation de l'immeuble. Si les détenteurs de parts sont résidents fiscaux d'un autre Etat qui prélève l'impôt sur le revenu et la fortune sur ces parts, alors il en résulte une double imposition et, dans ce cas, le droit de l'État de situation de l'immeuble prime en principe. Toutefois une réserve a été introduite par avenant du 22 juillet 1997, approuvé par l'Assemblée fédérale le 12 mars 1998 et en vigueur depuis le 1er août 1998 (RO 2000 1935). Il a été précisé que l'exonération n'intervient du côté suisse que si les revenus ou la fortune ont été imposés en France. Ce principe est confirmé au paragraphe 1 de l'art. 25B de la convention (FF 1997 1028). Rien n'indique que le Conseil fédéral, en portant cette précision dans le Message concernant l'adoption de cette disposition n'exprimait pas la volonté des parties en rédigeant l'art. 25B § 1 in fine CDI CH-F.  
En outre, cette clause se rapproche de ce que l'on désigne sous le terme de clause d'imposition effective (« subject to tax clause »), ce que le Tribunal fédéral a du reste reconnu et interprété de la sorte en lien avec l'art. 18 de la CDI CH-Israël et le chiffre 5 de son Protocole (Convention entre la Confédération suisse et l'Etat d'Israël du 2 juillet 2003 en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôt sur le revenu et la fortune; RS 0.672.944.91) qui contient une réserve similaire (ATF 143 II 65 consid. 3.3). Cette position a été approuvée par la doctrine (Robert Danon et Benjamin Malek; RDAF 2019 II 72 s.).  
Enfin, quoi qu'en pense la recourante, les parties contractantes peuvent, nonobstant l'effet négatif des conventions de double imposition, y insérer une clause d'imposition effective, si telle est bien leur volonté concordante (cf. Modèle de convention fiscale, version complète 2017, OCDE 2019, n° 35 ad art. 23A, p. C (23) -21). 
 
9.6. En l'occurrence, il n'est pas contesté par les parties que les parts de la recourante dans la SCI ont été estimées à une valeur inférieure au seuil de perception de l'ISF, de sorte que cet impôt n'a pas été effectivement perçu. En conséquence, le droit de soumettre à l'impôt sur la fortune les parts que la recourante détient dans la SCI revient au canton de Vaud qui dispose d'une base légale à cet effet (cf. consid. 5 ci-dessus).  
 
10.  
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours. 
Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, à l'Administration cantonale des impôts du canton de Vaud, à l'Office d'impôt des districts de La Riviera - Pays-d'Enhaut et Lavaux-Oron, au Département fédéral des finances, Secrétariat d'Etat aux questions financières internationales, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, ainsi qu'à l'Administration fédérale des contributions. 
 
 
Lausanne, le 13 décembre 2022 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
Le Greffier : Dubey