Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
Grössere Schrift
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_759/2022  
 
 
Arrêt du 13 décembre 2022  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mme et M. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Ryter. 
Greffier : M. Wiedler. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
recourante, 
 
contre  
 
Commission de surveillance des professions de la santé et des droits 
des patients de la République et 
canton de Genève, 
rue Adrien-Lachenal 8, 1207 Genève, 
 
B.________, 
intimée. 
 
Objet 
Droit du patient, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de 
la République et canton de Genève, Chambre administrative, du 23 août 2022 (ATA/833/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________ a consulté à trois reprises, soit les 21 et 29 juin ainsi que le 16 août 2021, la Doctoresse B.________ après avoir dû changer de médecin traitant. Cette dernière exerce en qualité de spécialiste en médecine interne générale au sein du Centre C.________ à U.________, en tant qu'indépendante (art. 105 al. 2 LTF). 
Lors de ces rendez-vous, A.________ a en particulier parlé à la Doctoresse B.________ du stress vécu suite à des événements dont elle se disait victime, à savoir l'enlèvement de ses deux filles par leur père en 1973, des cambriolages intrusifs quotidiens à son domicile, parfois plusieurs fois par jour, qui avaient débuté en 1973, ainsi qu'une tentative d'empoisonnement à l'arsenic sur sa personne. Les récits de l'intéressée faisaient état de multiples et répétitifs préjudices, persécutions et injustices dont elle aurait été victime, ayant donné lieu à de nombreuses plaintes pénales sur plusieurs décennies qui n'avaient jamais abouti. A cet égard, A.________ a précisé à la Doctoresse B.________ que ses précédents médecins semblaient penser, sans l'avoir toutefois formulé à haute voix, qu'elle souffrait d'hallucinations. 
Lors de la troisième consultation qui a eu lieu le 16 août 2021, A.________ a notamment indiqué à la Doctoresse B.________ que les intrusions criminelles chez elle perduraient. A la suite de cette séance, au cours de laquelle il a été convenu que l'intéressée nécessitait des examens cardiologiques, la praticienne a rédigé un courrier à l'attention du Docteur D.________, cardiologue, dans lequel elle a notamment mentionné, s'agissant des antécédents de sa patiente, "stress sur histoire criminelle vs trouble hallucinatoire mentionné par patiente". 
 
B.  
Le 17 novembre 2021, A.________ a saisi la Commission de surveillance des professions de la santé et des droits des patients de la République et canton de Genève (ci-après: la Commission cantonale de surveillance) d'une "plainte pour diffamation" à l'encontre de la Doctoresse B.________, en lien avec son courrier du 16 août 2021 à l'attention du Docteur D.________. 
 
Par décision du 15 décembre 2021, la Commission cantonale de surveillance a informé A.________ du classement immédiat de sa plainte, celle-ci étant manifestement mal fondée. 
Par arrêt du 23 août 2022, la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) a rejeté le recours interjeté par A.________ à l'encontre de la décision du 15 décembre 2021 de la Commission cantonale de surveillance. 
 
C.  
A.________ dépose un recours en matière de droit public devant le Tribunal fédéral. Elle demande l'annulation de l'arrêt de la Cour de justice du 23 août 2022 et l'ouverture d'une procédure disciplinaire à l'encontre de la Doctoresse B.________ (ci-après: l'intimée), ainsi qu'une instruction pénale pour diffamation et violation des droits du patient. De plus, elle réclame "au civil" une réparation pour tort moral qu'elle chiffre à 5'000 francs, la diffamation et la violation de ses droits de patiente lui ayant causé un choc important et une atteinte grave à son honneur, sa considération et sa dignité. 
La Cour de justice s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. La Commission cantonale de surveillance renonce à formuler des observations. L'intimée n'a pas été invitée à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 147 IV 453 consid. 1). 
 
1.1. Le présent recours est dirigé contre un arrêt confirmant le mal-fondé de la plainte déposée par la recourante devant la Commission cantonale de surveillance à l'encontre de l'intimée pour violation de ses droits de patiente. Il s'agit d'une cause de droit public (art. 82 let. a LTF). Comme aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'est réalisée, la voie du recours en matière de droit public au sens des art. 82 ss LTF est dès lors ouverte.  
 
1.2. La qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF exige que la partie recourante ait pris part à la procédure devant l'autorité précédente (let. a), qu'elle soit particulièrement atteinte par la décision attaquée (let. b) et qu'elle ait un intérêt digne de protection à l'annulation ou à la modification de celle-ci (let. c). L'intérêt digne de protection suppose que la personne qui l'invoque soit touchée de manière directe, concrète et dans une mesure et avec une intensité plus grandes que la généralité des administrés (cf. ATF 140 II 315 consid. 4.2; arrêts 2C_444/2021 du 19 octobre 2021 consid. 3.3; 2C_709/2020 du 18 juin 2021 consid. 4.3). La partie recourante doit se trouver dans une relation spéciale, étroite et digne d'être prise en considération avec l'objet de la contestation. Elle doit également retirer un avantage pratique de l'annulation ou de la modification de la décision contestée qui permette d'admettre qu'elle est touchée dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l'intérêt général, de manière à exclure l'action populaire (ATF 144 I 43 consid. 2.1; 139 II 499 consid. 2.2; arrêts 2C_444/2021 du 19 octobre 2021 consid. 3.3; 2C_214/2018 du 7 décembre 2018 consid. 4.3). En outre, cet intérêt doit être actuel et exister tant au moment du dépôt du recours qu'à celui où l'arrêt est rendu (cf. ATF 142 I 135 consid. 1.3.1; arrêts 2C_444/2021 du 19 octobre 2021 consid. 3.3; 2C_793/2020 du 8 juillet 2021 consid. 1.4).  
 
1.3. La jurisprudence considère en lien avec l'art. 89 LTF que la seule qualité de plaignant ou de dénonciateur ne donne en principe pas le droit de recourir contre la décision prise à la suite de la dénonciation et ne confère donc pas la qualité de partie dans cette procédure (ATF 135 II 145 consid. 6.1; 133 II 468 consid. 2; arrêts 2C_444/2021 du 19 octobre 2021 consid. 3.4; 2C_214/2018 du 7 décembre 2018 consid. 4.5; 2C_519/2017 du 28 novembre 2017 consid. 4.3). En effet, la procédure disciplinaire a pour but d'assurer l'exercice correct de l'activité soumise à surveillance dans l'intérêt public et non de défendre des intérêts privés des particuliers (cf. ATF 135 II 145 consid. 6.1; 132 II 250 consid. 4.4, à propos de la profession d'avocat; ATF 133 II 468 consid. 2, concernant la profession de notaire; arrêt 2C_79/2021 du 17 juin 2021 consid. 3.4, s'agissant de la surveillance des marchés financiers; arrêt 2C_444/2021 du 19 octobre 2021 consid. 3.6, concernant la surveillance des écoles privées). Pour jouir de la qualité pour recourir, le dénonciateur doit non seulement se trouver dans un rapport étroit et spécial avec la situation litigieuse, mais aussi pouvoir invoquer un intérêt digne de protection à ce que l'autorité de surveillance intervienne (ATF 135 II 145 consid. 6.1; 133 II 468 consid. 2; arrêts 2C_444/2021 du 19 octobre 2021 consid. 3.4; 2C_214/2018 du 7 décembre 2018 consid. 4.5; 2C_519/2017 du 28 novembre 2017 consid. 4.3). Savoir si un dénonciateur remplit les conditions précitées et donc jouit de la qualité de partie doit être résolue différemment selon les matières et les circonstances d'espèce. Afin d'opérer une délimitation raisonnable avec le "recours populaire", la jurisprudence reconnaît restrictivement la qualité de partie au dénonciateur, lorsque celui-ci pourrait sauvegarder ses intérêts d'une autre manière, notamment par le biais d'une procédure pénale ou civile (cf. ATF 139 II 279 consid. 2.3 et références citées; arrêts 2C_444/2021 du 19 octobre 2021 consid. 3.4; 2C_214/2018 du 7 décembre 2018 consid. 4.5).  
 
1.4. En l'occurrence, il ressort de l'arrêt attaqué que la jurisprudence cantonale reconnaît la qualité pour recourir au plaignant qui a saisi la Commission cantonale de surveillance en invoquant une violation de ses droits de patient contre la décision classant sa plainte. En revanche, toujours selon la jurisprudence cantonale, le plaignant ne peut pas recourir contre l'absence de sanctions prononcées par l'autorité de surveillance (cf. consid. 2.a de l'arrêt attaqué; cf. également arrêt 2C_675/2019 du 4 février 2020 consid. 2.2). Ainsi, le droit genevois reconnaît au patient un intérêt digne de protection, et partant un droit, à recourir contre la décision de la Commission cantonale de surveillance lorsque celle-ci nie que ses droits de patient ont été violés en classant sa plainte, comme en l'espèce. Le patient a donc un droit à ce que sa plainte soit suivie d'effets, contrairement à ce qui est ordinairement le cas s'agissant de plaintes déposées auprès d'autorités de surveillance (cf. supra consid. 1.3). Dans ces circonstances, sous l'angle de l'art. 89 al. 1 LTF, la recourante dispose d'un intérêt digne de protection à ce que le Tribunal fédéral entre en matière sur son recours, afin de vérifier que le droit qui lui est reconnu par le droit genevois n'a pas été vidé de sa substance par un arrêt cantonal matériellement ou formellement vicié. Partant, la qualité pour recourir doit être reconnue à la recourante qui est touchée plus que quiconque par l'arrêt attaqué.  
 
1.5. Pour le reste, l'arrêt attaqué est une décision finale (art. 90 LTF), rendue en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF). En outre, le recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes requises (art. 42 LTF). Il convient dès lors d'entrer en matière, sous réserve de ce qui suit.  
 
1.6. En tant que la recourante réclame l'ouverture d'une procédure pénale à l'encontre de l'intimée, ainsi que des dommages-intérêts en réparation du tort moral subi, ses demandes excèdent l'objet du litige. En effet, l'objet du litige porte sur le bien-fondé du refus de la Commission cantonale de surveillance de donner suite à sa plainte, laquelle ne peut, dans tous les cas, aboutir qu'à des mesures disciplinaires fondées sur le droit administratif. En conséquence, ces conclusions sont irrecevables et ne seront pas traitées plus avant, de même que les critiques développées en lien avec celles-ci.  
 
2.  
 
2.1. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral examine librement la violation du droit fédéral et du droit international (cf. art. 95 let. a et b et 106 al. 1 LTF). Toutefois, les griefs de violation des droits fondamentaux sont soumis à des exigences de motivation accrue (cf. art. 106 al. 2 LTF). La partie recourante doit indiquer les principes constitutionnels qui n'auraient pas été respectés et expliquer de manière claire et précise en quoi ces principes auraient été violés (ATF 146 I 62 consid. 3; 142 II 369 consid. 2.1; 141 I 36 consid. 1.3).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF (ATF 142 I 155 consid. 4.4.3). La partie recourante ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 145 V 188 consid. 2; 142 II 355 consid. 6). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, la partie recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. A défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui qui est contenu dans l'acte attaqué (ATF 145 V 188 consid. 2; 137 II 353 consid. 5.1).  
 
2.3. En l'occurrence, dans une partie "En fait" et à l'appui de son raisonnement, la recourante présente sa propre vision des faits qui diverge sur plusieurs points de l'état de fait retenu par la Cour de justice. La recourante n'invoquant pas ni a fortiori ne démontrant pas l'arbitraire dans l'établissement des faits ou dans l'appréciation des preuves, il n'en sera pas tenu compte.  
Partant, le Tribunal fédéral statuera exclusivement sur la base de faits retenus par la Cour de justice. 
 
 
3.  
A titre liminaire, il sied de relever que, dans l'arrêt attaqué, la Cour de justice a, à tort, analysé la cause qui lui était soumise en appliquant la loi genevoise du 7 avril 2006 sur la santé (LS/GE; RS/GE K 1 03). En effet, l'intimée pratique en tant qu'indépendante au sein du Centre C.________, soit sous sa propre responsabilité professionnelle. Les droits et devoirs de l'intimée sont donc régis par la loi fédérale du 23 juin 2006 sur les professions médicales universitaires (loi sur les professions médicales, LPMéd; RS 811.11), conformément à l'art. 1 al. 3 let. e LPMéd, ce qui exclut l'application de la LS/GE (cf. ATF 148 I 1 consid. 5; YVES DONZALLAZ, Traité de droit médical, Volume II, Le médecin et les soignants, 2021, n° 4957). Partant, la présente cause sera examinée uniquement au regard de la LPMéd. 
 
4.  
La recourante fait valoir, d'une manière à la limite de la recevabilité (cf. art. 42 al. 2 LTF), que, dans son courrier du 16 août 2021 à l'attention de son confrère, l'intimée a violé ses droits de patiente en mentionnant, s'agissant de ses antécédents médicaux, "stress sur histoire criminelle vs trouble hallucinatoire mentionné par patiente", ce que la Cour de justice aurait nié à tort. En substance, elle soutient que cette affirmation porterait atteinte à sa dignité et au secret médical. 
 
4.1. L'art. 40 let. a LPMéd énonce la règle suivante: "Les personnes exerçant une profession médicale universitaire sous leur propre responsabilité professionnelle doivent (...) exercer leur activité avec soin et conscience professionnelle et respecter les limites des compétences qu'elles ont acquises dans le cadre de leur formation universitaire, de leur formation postgrade et de leur formation continue". Cette clause générale impose le devoir d'agir selon les principes généralement reconnus des professions médicales; une partie d'entre eux sont énoncés de manière plus spécifique aux lettres b à h de cette disposition (ATF 148 I 1 consid. 6.1).  
 
4.2. L'art. 40 let. c LPMéd, qui fait obligation aux médecins de respecter les droits des patients est, dans notre contexte, d'une importance particulière. Au rang de ces droits figurent ceux au respect de la dignité (cf. infra consid. 4.3) et au respect du secret professionnel (cf. infra consid. 4.4), ce dernier étant au surplus expressément mentionné à l'art. 40 let. f LPMéd.  
 
 
4.3.  
 
4.3.1. A teneur de l'art. 7 Cst., la dignité humaine doit être respectée et protégée. Conformément à l'art. 10 al. 3 Cst. et à l'art. 3 CEDH, les traitements dégradants sont interdits. La dignité humaine est une notion juridique indéterminée qui doit être concrétisée, de cas en cas, par le législateur ou les tribunaux. Elle appréhende l'essence non définissable de l'être humain ou des êtres humains et, s'appuyant sur des points de vue collectifs, se fonde sur la reconnaissance de l'individu dans sa valeur intrinsèque et dans son caractère unique individuel ou dans son éventuelle différence (ATF 143 IV 77 consid. 4.1; 132 I 49 consid. 5.1 et les références).  
 
4.3.2. En droit médical, le droit au respect de la dignité humaine exige, au travers de l'art. 40 let. c LPMéd, que le médecin honore le contrat moral conclu avec le patient, en le considérant, dans toutes ses prérogatives d'être humain, c'est-à-dire en évitant de le traiter en inférieur, en mineur, à plus forte raison en objet, respectivement en objet d'expérimentation (cf. DONZALLAZ, op. cit., n° 5479).  
 
4.4.  
 
4.4.1. Le secret médical découle du droit constitutionnel au respect de la sphère privée des individus (art. 13 Cst.; art. 8 CEDH) et sert à protéger la sphère secrète du patient (cf. ATF 147 I 354 consid. 3.2; 147 IV 27 consid. 4.6; 141 IV 77 consid. 4.4). Il sert également à protéger la relation de confiance particulière entre le médecin et le patient (cf. ATF 147 I 354 consid. 3.2; 147 IV 27 consid. 4.6; 141 IV 77 consid. 4.4). En outre, le secret médical protège la santé publique en permettant au patient de se confier sans réserve au médecin et d'être traité de manière appropriée (cf. ATF 147 I 354 consid. 3.2; arrêt 2C_37/2018 du 15 août 2018 consid. 6.2.3).  
 
4.4.2. L'art. 40 let. c et let. f LPMéd ne définit pas la notion de secret médical, mais renvoie pour ce faire, dans une démarche dynamique, à l'ordre juridique suisse, spécialement à l'art. 321 CP (cf. ATF 147 I 354 consid. 3.2; 2C_215/2015 du 16 juin 2016 consid. 3 non publié in ATF 142 II 256).  
 
4.4.3. Selon l'art. 321 ch. 1 CP, les médecins, ainsi que leurs auxiliaires, qui auront révélé un secret à eux confié en vertu de leur profession ou dont ils avaient eu connaissance dans l'exercice de celle-ci, seront, sur plainte, punis d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire. La révélation ne sera pas punissable si elle a été faite avec le consentement de l'intéressé ou si, sur la proposition du détenteur du secret, l'autorité supérieure ou l'autorité de surveillance l'a autorisée par écrit (art. 321 ch. 2 CP). Demeurent réservées les dispositions de la législation fédérale et cantonale statuant un droit d'aviser une autorité et de collaborer, une obligation de renseigner une autorité ou une obligation de témoigner en justice (art. 321 ch. 3 CP).  
 
4.4.4. Il y a révélation au sens de l'art. 321 CP si, sans l'accord de l'intéressé ou de l'autorité supérieure compétente, l'information confidentielle est portée à la connaissance d'un tiers quel qu'il soit, le secret devant être gardé à l'égard de tout tiers, y compris d'autres professionnels soumis au secret (cf. FRÉDÉRIC ERARD, Le secret médical, thèse 2021, n° 463 et 1346; STEFAN TRECHSEL/HANS VEST, in Praxiskommentar, Schweizerisches Strafgesetzbuch, 4e éd. 2021, n° 25; NIKLAUS OBERHOLZER, in Basler Kommentar Strafrecht, 4e éd. 2019, n° 20 ad art. 321 CP; BENOÎT CHAPPUIS, in Commentaire romand, CP II, 2017, n° 75 ad art. 321). L'art. 11 par. 3 du Code de déontologie de la Fédération des médecins suisses (version du 7 octobre 2021) énonce le même principe en précisant que "le secret médical vaut également pour les confrères". Cette disposition articule cependant une présomption selon laquelle "en cas de collaboration entre plusieurs médecins (consilium, patient confié à un autre médecin, hospitalisation, etc.), le consentement du patient pour la transmission des renseignements médicaux en relation avec le cas peut, en règle générale, être considéré comme acquis". La doctrine considère que cette présomption existe aussi dans le cadre de l'application de l'art. 321 CP (cf. DONZALLAZ, op. cit., n° 6541; TRECHSEL/VEST, op. cit., n° 25; OBERHOLZER, op. cit., n° 20 ad art. 321 CP; DAVID CUENAT, Le secret médical dans le canton du Jura - portée, procédure et questions pratiques, in Revue jurassienne de jurisprudence, 2017, p. 16 s; KARIN KELLER, Das ärtzliche Berufsgeheimnis gemäss Art. 321 StGB unter besonderer Berücksichtigung der Regelung im Kanton Zürich, 1993, p. 114 s; plus nuancé ERARD, op. cit., n° 1360).  
 
4.4.5. Pour sa part, la Cour européenne des droits de l'homme (ci-après: CourEDH) estime également, en lien avec l'art. 8 CEDH, que la nécessité de permettre une prise en charge médicale efficace et le suivi d'un patient peuvent justifier la transmission d'informations entre les différents intervenants médicaux impliqués dans les soins à prodiguer (arrêt CourEDH Y. contre Turquie, Requête n° 648/10, du 17 février 2015, § 77).  
 
 
4.5. En l'espèce, la recourante ne conteste pas que l'intimée a contacté le Docteur D.________, en vue d'examens cardiologiques, avec son accord, et que, dans ce contexte, elle lui a transmis, à juste titre, des informations sur ses antécédents médicaux. Elle ne s'en prend au courrier adressé par l'intimée à son confrère uniquement s'agissant de la mention en fin de celui-ci "stress sur histoire criminelle vs trouble hallucinatoire mentionné par patiente", en particulier à l'usage du terme "trouble hallucinatoire".  
 
4.6. Comme relevé à juste titre par la Cour de justice, cette mention correspond à un diagnostic différentiel émis par la doctoresse, opposant un stress lié à des affaires criminelles à celui lié à des hallucinations, sans retenir que la recourante souffrait bel et bien d'hallucinations. Il ressort de l'arrêt attaqué, d'une manière qui lie le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), que ce diagnostic différentiel - provisoire - a été établi sur la base d'une analyse prima facie des constatations faites par la praticienne et des informations transmises par la recourante elle-même. En effet, selon l'arrêt querellé, l'intéressée a elle-même signalé à l'intimée que ses précédents médecins semblaient penser, sans l'avoir toutefois formulé à haute voix, qu'elle souffrait d'hallucinations.  
 
4.7. Quoi qu'en dise la recourante, le terme "trouble hallucinatoire", qui est un terme médical, n'implique pas de jugement de valeur de la part de la doctoresse et n'est pas en lui-même rabaissant et attentatoire à son honneur et à sa considération. En outre, on ne saurait considérer que l'intimée a utilisé ce terme de manière injustifiée, dans le seul but de dénigrer la recourante. Au contraire, l'intimée a précisé dans son diagnostic différentiel litigieux que la recourante avait elle-même mentionné un éventuel "trouble hallucinatoire" ressortant de consultations auprès de ses précédents médecins. Elle n'a pas fait sien le diagnostic de ses confrères et ne s'est pas prononcée sur l'existence d'un trouble hallucinatoire dont souffrirait la recourante, se contentant de mentionner qu'un tel trouble avait été envisagé d'après les dires de l'intéressée. En conséquence, on ne perçoit pas de violation du droit au respect de la dignité de la recourante quant au choix des termes utilisés par l'intimée. Pour le reste, quand un médecin émet un diagnostic différentiel ou "final", il exerce un acte typique de sa profession, que ses conclusions relèvent des domaines psychique ou somatique. Il n'y a guère de place, dans le processus intellectuel conduisant à ces conclusions, pour une atteinte à la dignité du patient. La critique de la recourante sur ce point est donc mal fondée.  
 
4.8. Par ailleurs, toujours selon l'arrêt attaqué, le discours de la recourante durant ses consultations avec la doctoresse intimée s'est porté principalement sur les agissements dont elle se disait victime (notamment intrusions quotidiennes à son domicile depuis 1973 et tentative d'empoisonnement), ce qui a conduit la praticienne à juger important de transmettre à son confrère ses premières constatations quant à la santé psychique de l'intéressée à titre d'antécédents, celles-ci étant nécessaires à la compréhension des faits décrits par la patiente et à une prise en charge adéquate. La doctoresse intimée ayant contacté son confrère avec l'accord de sa patiente, elle pouvait présumer que la recourante l'avait déliée du secret médical pour tous les éléments nécessaires à une prise en charge efficace, ce qui incluait en l'occurrence son diagnostic différentiel provisoire quant à son état de santé psychique. En conséquence, on ne perçoit pas non plus de violation du droit au respect du secret professionnel, dont se serait rendue coupable l'intimée.  
 
4.9. Partant, la Cour de justice n'a pas violé les art. 40 let. a, c et f LPMéd en considérant que la Commission cantonale de surveillance avait à bon droit classé la plainte de la recourante.  
 
5.  
Sur le vu de ce qui précède, le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
La recourante, qui succombe, doit supporter les frais judiciaires (cf. art. 66 al. 1 et al. 5 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 francs, sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué à la recourante, à l'intimée, à la Commission de surveillance des professions de la santé et des droits des patients, ainsi qu'à la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 13 décembre 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
Le Greffier : A. Wiedler