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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4A_593/2012 
 
Arrêt du 14 janvier 2013 
Ire Cour de droit civil 
 
Composition 
Mmes et MM. les juges Klett, présidente, Corboz, Kolly, Kiss et Niquille. 
Greffier: M. Thélin. 
 
Participants à la procédure 
A.X.________, 
B.X.________ et 
C.X.________, 
représentés par Mes Daniel Tunik et Julien Perrin, 
défendeurs et recourants, 
 
contre 
 
M.________ & Cie, et 
N.________ B.V., 
représentées par Me Nicolas Gillard, et 
Me Jean-Cédric Michel, 
demanderesses et intimées. 
 
Objet 
procédure civile; compétence à raison du lieu 
 
recours contre l'arrêt rendu le 13 juin 2012 par la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
Faits: 
 
A. 
Le 4 juin 2010, les sociétés M.________ & Cie et N.________ B.V. ont conjointement ouvert action contre A.X.________, B.X.________ et C.X.________ devant la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. La Cour est requise de constater: 
Le memorandum of understanding du 23 janvier 2009 entre « M.________ group » et « the X.________ group » est invalidé, respectivement annulé et de nul effet. 
Selon les allégués de la demande, au début de 2009, les actions de la société W.________ Ltd, enregistrée en Inde, appartenaient aux demanderesses à hauteur d'environ 51% du capital-actions et aux défendeurs pour le solde. 
Le memorandum of understanding a été signé le 23 janvier 2009 à Montreux, par O.________ au nom des demanderesses et par A.X.________ au nom des défendeurs. Celles-là s'obligeaient à vendre leurs actions à ceux-ci, au prix qui serait fixé par les réviseurs de la société conformément à l'art. 17 de ses statuts. En outre, les parties convenaient de mettre fin à un procès qui les divisait devant les autorités judiciaires indiennes. 
Les demanderesses affirment que A.X.________ a alors délibérément trompé O.________. Il lui a expliqué que la méthode d'évaluation du prix prévue dans l'accord était la seule admise par le droit indien et qu'elle permettait de faire correspondre le prix de vente à la valeur des titres sur le marché. Il a fait référence aux statuts de la société; il en a présenté une page unique en omettant intentionnellement de préciser que l'hypothèse visée par la disposition indiquée n'était en l'occurrence pas réalisée. O.________ était alors âgé de septante-trois ans et atteint dans sa santé. 
 
B. 
Préalablement à toute autre défense, les parties recherchées ont excipé de l'incompétence du for et conclu à l'irrecevabilité de la demande. 
La juge instructeur s'est prononcé par un jugement incident du 26 septembre 2011; il a rejeté l'exception. 
Les défendeurs ayant appelé à la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal, cette autorité a statué le 13 juin 2012; elle a rejeté l'appel et confirmé le jugement. 
 
C. 
Agissant par la voie du recours en matière civile, les défendeurs requièrent le Tribunal fédéral de réformer l'arrêt de la Cour d'appel en ce sens que la demande soit déclarée irrecevable. 
Les demanderesses concluent au rejet du recours. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
L'arrêt attaqué est une décision incidente sur la compétence de la cour saisie; il est susceptible du recours séparé prévu par l'art. 92 al. 1 LTF
La valeur litigieuse doit être évaluée d'après celle des actions que les parties ont respectivement vendues et achetées selon le memorandum of understanding du 23 janvier 2009 (art. 51 al. 1 let. c, 51 al. 2 LTF); elle excède sans aucun doute le minimum légal de 30'000 fr. dont dépend la recevabilité du recours en matière civile (art. 74 al. 1 let. b LTF). Le recours satisfait également aux autres conditions de recevabilité. 
 
2. 
Dans la présente contestation, en vertu de l'art. 1er al. 1 let. a de la loi fédérale sur le droit international privé (LDIP), la compétence de la cour saisie doit être déterminée d'après cette loi. En effet, notamment parce qu'aucune des parties n'a son siège ou domicile en Suisse (cf. ATF 131 III 76 consid. 2.3 p. 79), la contestation revêt de toute évidence un caractère international. 
Les demanderesses soutiennent que lors de la signature du memorandum of understanding à Montreux, A.X.________ s'est rendu coupable de dol, aux termes de l'art. 28 al. 1 CO, à l'encontre de O.________; que le dol est un acte illicite aux termes de l'art. 129 LDIP; que l'action tendant à l'invalidation du memorandum est donc « fondée sur un acte illicite » selon le même texte, et que la cour saisie est compétente parce que « le lieu de l'acte » se trouve dans son ressort territorial. 
Les défendeurs contestent que l'action tendant à l'invalidation du memorandum soit « fondée sur un acte illicite » selon l'art. 129 LDIP; selon leur argumentation, il s'agit d'une « action découlant d'un contrat » aux termes de l'art. 112 al. 1 LDIP, et la cour saisie n'est pas compétente d'après cette disposition. 
 
3. 
Les actions visées par l'art. 129 LDIP ne sont pas seulement celles tendant à la réparation d'un dommage, y compris au paiement de dommages-intérêts, mais aussi celles tendant à la constatation ou à la prévention d'un dommage (Andrea Bonomi, in Commentaire romand, n° 5 ad art. 129 LDIP). L'art. 112 LDIP, lui, vise notamment les litiges portant sur l'existence d'une relation contractuelle (Bernard Dutoit, Droit international privé suisse, 4e éd., 2005, n° 2bis ad art. 112 LDIP; voir aussi Bonomi, op. cit., n° 9 ad art. 113 LDIP; Dieter Hoffmann et Oliver Kunz, in Commentaire bâlois, nos 107 à 109 ad art. 5 CL). 
Pour l'application de ces règles de compétence, la nature de l'action doit être déterminée par référence aux catégories du droit suisse, sans égard au droit étranger éventuellement pertinent pour la solution du litige (ATF 119 II 66 consid. 2b p. 69), d'après la prétention élevée par la partie demanderesse et les motifs que celle-ci invoque (Andreas Bucher, in Commentaire romand, n° 5 ad art. 2-12 LDIP, p. 44). La Cour d'appel civile s'est référée à ces principes. 
 
4. 
D'après l'art. 28 al. 1 CO, la partie induite à contracter par le dol de l'autre n'est pas obligée, même si son erreur n'est pas essentielle. Le dol est une tromperie intentionnelle qui détermine la dupe, dans l'erreur, à accomplir un acte juridique. La tromperie peut résulter aussi bien d'une affirmation inexacte de la partie malhonnête que de son silence sur un fait qu'elle avait l'obligation juridique de révéler. Il n'est pas nécessaire que la tromperie provoque une erreur essentielle aux termes de l'art. 24 CO; il suffit que sans l'erreur, la dupe n'eût pas conclu le contrat ou ne l'eût pas conclu aux mêmes conditions (ATF 136 III 528 consid. 3.4.2 p. 532; 132 II 161 consid. 4.1 p. 165; 129 III 320 consid. 6.3 p. 326). Le dol est en principe un acte illicite qui autorise la dupe à réclamer, s'il y a lieu, des dommages-intérêts sur la base de l'art. 41 CO (ATF 108 II 419 consid. 5 p. 421), ou à refuser la prestation qu'elle a promise même si elle a omis de déclarer l'invalidation du contrat dans le délai de l'art. 31 al. 1 CO (ATF 127 III 83 consid. 1a p. 85). 
Il est évident que le memorandum of understanding est en principe un contrat selon les art. 1er CO et 112 al. 1 LDIP. Il n'est non plus guère discutable que la tromperie décrite dans la demande, qu'il n'était pas nécessaire de prouver à ce stade du procès (cf. ATF 136 III 486 consid. 4 p. 487), doive être considérée comme un dol selon l'art. 28 al. 1 CO et un acte illicite selon les art. 41 CO et 129 LDIP. 
 
5. 
Pour parvenir à la conclusion que l'action concernée entre dans le champ d'application de l'art. 129 LDIP, la Cour d'appel civile retient surtout que cette action « a un caractère constatatoire ayant notamment pour but de déterminer s'il y a effectivement dol dans la conclusion du memorandum en cause », et que, par conséquent, l'action tend à la constatation d'un acte illicite. 
La Cour n'a pas observé que le libellé des conclusions revêt une importance particulière dans une action tendant, comme en l'espèce, à une constatation juridique. En effet, les conclusions énonçant la constatation voulue ont un contenu juridique propre; elles reçoivent ainsi une signification notablement plus précise que celles habituellement articulées dans une action en condamnation, où la partie demanderesse se borne, le plus fréquemment, à réclamer des sommes d'argent. Plus les conclusions présentées apparaissent intrinsèquement dotées de sens, moins il est nécessaire, pour apprécier la nature de l'action, de se référer à la motivation de la demande. 
Selon les conclusions prises en l'occurrence devant les juges de première instance, ceux-ci doivent constater que le « memorandum of understanding est invalidé, respectivement annulé et de nul effet », autrement dit que cet accord est dépourvu d'effets juridiques. Il n'est pas question, dans ces conclusions, de « dol » ou de « tromperie », ni d'aucun autre terme équivalent. Dans la demande, le dol n'est que la cause ou le motif de l'invalidité du memorandum; il n'est pas l'objet de la constatation voulue. 
Les conclusions peuvent-elles, voire doivent-elles être interprétées en ce sens que la cour saisie soit invitée à constater, dans le dispositif de sa décision, non seulement l'invalidité du memorandum mais aussi le dol imputable au représentant des défendeurs ? Une approche de ce genre est exclue déjà parce qu'à première vue, les demanderesses n'ont aucun intérêt pertinent à obtenir ces deux constatations. On comprend bien qu'elles souhaitent rechercher les défendeurs au for choisi par elles, mais à lui seul, cet intérêt n'est pas digne de considération (cf. ATF 136 III 486 consid. 4 in fine p. 488). 
A l'appui de sa décision, la Cour d'appel mentionne aussi la jurisprudence concernant les actions à double fondement, en particulier celles consécutives à un acte qui est à la fois illicite et contraire à un devoir contractuel: il est admis que le lésé peut éventuellement, selon les circonstances, demander réparation et faire valoir les deux fondements juridiques au for de l'action délictuelle (ATF 137 III 311 consid. 5.2.1 p. 319). Cela concerne par exemple une action en dommages-intérêts fondée cumulativement sur les art. 41 et 97 CO. En l'espèce toutefois, l'action n'a pas de double fondement. En effet, si la cour saisie entrait en matière et statuait d'après le droit suisse, la constatation de l'invalidité du memorandum ne pourrait guère intervenir que sur la base de l'art. 28 al. 1 CO, lequel appartient à la législation sur les contrats, à l'exclusion de tout autre fondement légal. 
Conformément à l'opinion des défendeurs, l'action tendant à faire constater l'invalidité du memorandum s'inscrit dans le champ d'application de l'art. 112 al. 1 LDIP, et l'art. 129 LDIP n'est pas en cause. Ni cette disposition-là ni l'art. 113 LDIP n'offrent de for dans le canton de Vaud, ni ailleurs en Suisse; en particulier, il n'existe de for ni au lieu de la conclusion du contrat, ni à celui des pourparlers qui l'ont précédée. Il s'ensuit que l'exception d'incompétence est fondée. Le recours en matière civile l'est également et il doit être admis selon les conclusions de ses auteurs. 
 
6. 
A titre de partie qui succombent, les demanderesses doivent acquitter l'émolument à percevoir par le Tribunal fédéral et les dépens auxquels leurs adverses parties peuvent prétendre. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est admis et la décision attaquée est réformée en ce sens que la demande introduite devant la Cour civile du Tribunal cantonal est irrecevable. 
 
2. 
Les demanderesses acquitteront un émolument judiciaire de 8'000 francs. 
 
3. 
Les demanderesses verseront solidairement entre elles une indemnité de 9'000 fr. aux défendeurs, créanciers solidaires, à titre de dépens. 
 
4. 
La cause est renvoyée à l'autorité précédente pour statuer à nouveau sur les frais et dépens des instances cantonales. 
 
5. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
Lausanne, le 14 janvier 2013 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La présidente: Klett 
 
Le greffier: Thélin